les chretiens birifor devant l`epreuve de la culture traditionnelle du

Transcription

les chretiens birifor devant l`epreuve de la culture traditionnelle du
LES CHRETIENS BIRIFOR DEVANT L’EPREUVE DE LA
CULTURE TRADITIONNELLE DU SACRIFICE
Dans la société birifor, le sacrifice apparaît comme le pivot du culte
traditionnel 1. C’est l’acte cultuel par excellence auquel les Birifor
accordent beaucoup de crédit à cause des réponses qu’il est supposé
apporter à leurs différentes interrogations existentielles. Il est même
entré dans les habitudes culturelles à tel point qu’il paraît aux yeux des
uns et des autres, impossible voire utopique de s’en passer.
Cependant, avec de telles convictions fondamentales, pour les Birifor
convertis au christianisme, l’impact des sacrifices traditionnels demeure
indéniable. La plupart, en réalité, semblent encore tellement attachés aux
pratiques du culte traditionnel qu’ils adoptent un comportement mitigé par
rapport aux exigences de foi de leur nouvelle religion. Les raisons ne
manquent pas mais nécessitent toujours de la critique.
A. Du comportement mitigé de chrétiens birifor
Devant les enjeux des sacrifices traditionnels, beaucoup de
chrétiens birifor ne paraissent pas encore convaincus de leur foi en Christ,
ainsi que du salut qu’apporte la communion à son sacrifice unique :
l’Eucharistie.
De fait, ils demeurent nombreux ceux qui, après le sacrifice chrétien
de la messe, recourent au rite du sacrifice traditionnel pour trouver
réponse favorable à leurs préoccupations existentielles.
1. Le recours aux sacrifices traditionnels
Du recours de chrétiens birifor aux sacrifices traditionnels, il
apparaît deux principales formes : l’une directe et l’autre indirecte.
1
KPIELE SOMDA P., La peur dagara des puissances occultes et les voies de libération en JésusChrist, Mémoire en théologie, Koumi, 2001, p.22.
1
Cf. NDAW A., « Les religions indigenes », Op. Cit., Tome 1, p. 1171.
En ce qui concerne la forme directe, le chrétien en difficulté va
d’abord chez le bawr-bùrç consulter pour trouver les causes du malheur
dont il souffre. De la consultation découle la prescription des sacrifices à
accomplir pour retrouver l’équilibre dont il a besoin. Ni vu ni connu, il va luimême accomplir lesdits sacrifices. S’il s’agit d’un vœu conditionnel, il
procède de la même façon sans référence aucune à personne.
A côté de cette pratique, il sied de souligner que dans la culture
birifor, il y a aussi la possibilité pour un individu de faire un vœu et de s’en
acquitter, de suivre le rite des consultations et d’offrir des sacrifices par
personnes intermédiaires. A ce moment, l’essentiel consiste seulement à
donner son accord et à pourvoir au nécessaire pour le sacrifice soit en
nature soit en espèce.
C’est une forme très prisée par beaucoup de chrétiens car, estiment
les uns et les autres, elle engage moins la foi chrétienne de l’intéressé qui
demeure comme extérieur au rite sacrificiel proprement dit.
Toutefois, quelle que soit la forme, ce sont toujours les mêmes
motifs qui sous-tendent le recours aux sacrifices traditionnels.
2. Les motifs du recours aux sacrifices traditionnels
Selon les résultats de l’enquête menée sur un échantillon de
cinquante (50) chrétiens birifor , même convertis au christianisme, environ
23/50 (soit 46
℅) à 37/50 (soit74℅) de chrétiens garderaient la
conviction que les tibè, en tant que puissances intermédiaires de Dieu,
président à la vie des hommes et à l’harmonie dans le monde.
C’est pourquoi dans les situations de dévitalisation ou de manque
comme l’infécondité, la maladie, les funérailles, la pauvreté, etc., devant le
mutisme apparent du Dieu chrétien, ils sont d’emblée portés, par euxmêmes ou par d’autres, à recourir aux sacrifices traditionnels. Pour plus
d’un, en effet, la vie est un don devant être transmis et l’enfant, une
richesse. La femme, également, rime avec fertilité et fécondité. De fait
son incapacité naturelle ou accidentelle à transmettre la vie, notamment à
cause de la stérilité, est parfois sinon toujours perçue comme un signe de
malédiction des tibè 2. Alors, pour y remédier, les sacrifices traditionnels
s’imposent comme la voie idoine.
2
Cf. BOKA DI MPASI L., « Les ancêtres médiateurs », Telema, n° 82, 1995, p. 66.
Il en va de même en contexte de maladie, où le malade et son
entourage sont amenés à en trouver nécessairement les causes profondes,
lesquelles se ramènent généralement à deux types à savoir les êtres
humains et les tibè 3. C’est la même fin qui est aussi visée dans les
consultations et les pratiques sacrificielles lors du décès ou des
funérailles d’un tiers.
En plus de ces motifs, il existe une autre gamme qui, elle, s’exprime
en termes de réussite : réussite dans le travail, les études, le commerce,
etc.
A vrai dire, à l’antichambre de ces motifs susmentionnés, une double
raison semble expliquer le phénomène du recours de nombreux chrétiens
birifor aux sacrifices traditionnels : le refus catégorique d’accepter la
souffrance à la manière du Christ Jésus et la quête absolue du bonheur
tant terrestre que céleste.
Tiré du mémoire en théologie (6ème année) de l’abbé Anvièlè Bruno DA
« POUR UNE ADHESION PLUS AUTHENTIQUE AU MYSTERE DE L’EUCHARISTIE :
Réflexions sur le recours de chrétiens birifor aux sacrifices traditionnels »
grand séminaire de Koumi juin 2009
Courriel :[email protected]
Tel. (00 226) 71 51 06 02
3
Cf. BAZIE A. (ss. dir.), Le malade chrétien et les pratiques traditionnelles de guérison, Cahier
des Atéliers de Théologie Africaine (C.A.T.A.), n° 8, Koumi, juin 2001, p. 9.