La vie périurbaine face à la menace des gated communities
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La vie périurbaine face à la menace des gated communities
LA VIE PÉRIURBAINE FACE À LA MENACE DES GATED COMMUNITIES Eric CHARMES Eric CHARMES est maître de conférences en urbanisme et aménagement à l'Institut français d'urbanisme (Université Paris VIII). Il est membre du laboratoire CNRS Théorie des mutations urbaines (UMR Architecture, urbanisme, société). Il mène des recherches sur le rapport à l'espace proche des citadins et s'intéresse plus particulièrement aux liens entre pratiques, représentations et qualifications de l'espace (qu elles soient morphologiques, juridiques ou institutionnelles). Cet ouvrage aborde un sujet abondamment discuté mais peu étudié : les rapports des périurbains à autrui et à leur environnement immédiat. Ceux-ci sont en effet couramment accusés de vouloir se mettre à l'écart de la ville et de tout ce qui fait sa valeur civilisatrice : le frottement à autrui, l'expérience de l'inattendu... Le développement, aux États-Unis, des ensembles pavillonnaires clos et sécurisés, les gated communities, n'a fait que renforcer les critiques. Cet ouvrage fait la part des choses et, s'il dresse un tableau sans concession de la vie périurbaine, il montre que beaucoup de critiques sont infondées ou, plutôt, mal fondées. Face à la menace des gated communities, l'attention se concentre sur la transformation des espaces résidentiels en clubs gérés privativement et protégés par des clôtures placées sous vidéosurveillance. Pourtant, en France, des barrières moins visibles, mais aussi efficaces, sont tracées à partir de la carte scolaire ou des règlements d'urbanisme. Dans les périphéries des grandes villes françaises, beaucoup de clubs résidentiels exclusifs sont produits et gérés par la puissance publique ! On reproche également aux périurbains de se replier sur l'entre-soi et de se fermer politiquement au monde qui les entoure. Les égoïsmes communaux, le refus du logement social sont souvent montrés du doigt. Pourtant, comment parler de repli sur l'espace résidentiel quand tous les indicateurs disponibles montrent que les périurbains passent l'essentiel de leur vie quotidienne loin de leur domicile et que l'espace résidentiel a perdu la plus grande part de sa valeur existentielle ? Le sentiment d'insécurité est enfin considéré comme la principale cause de l'apparition de portails ou de barrières à l'entrée des rues pavillonnaires périurbaines. L'enquête montre que ce phénomène est plutôt dû aux troubles engendrés par le trafic automobile et aux difficultés rencontrées par les adultes dans leurs relations avec les jeunes de leur quartier. Dans le périurbain aussi, la question centrale est plus celle de l'incivilité que celle de l'insécurité. TABLE DES MATIERES Préface (Jean Rémy) Introduction La critique de la périurbanisation Le problème des gated communities Critique de la critique Méthode et objectifs de l'ouvrage Les terrains étudiés : définitions et critères de choix Gressy, Coubron et le Grand Large Les personnes rencontrées 1 Les engagements dans la vie périurbaine Les attraits de la maison individuelle périurbaine Le refus du rural profond La mise à distance de la banlieue Les formes sociales de l'engagement dans le périurbain La formation d'un marché de lieux Vers des clubs résidentiels ? Les engagements vis-à-vis de l'environnement proche face à la culture de la mobilité 2 Les formes de territorialisation locale Entre anonymat et vie villageoise : la cordiale ignorance Le jardin comme espace tampon La rue pavillonnaire comme unité de voisinage A propos de l'ensemble pavillonnaire Le paysage naturel et rural comme référent identitaire La commune, l'école et les associations locales La territorialisation locale entre ouverture, fermeture et minimalisme moral Les pathologies de l'entre-soi : racisme et cooptation 3 Des barrières pour quoi faire ? Les troubles dus à la circulation : vers la généralisation de l'impasse La régulation des espaces collectifs Le sentiment d'insécurité comme stimulant Le rejet des « extérieurs » Une crise du lien social ? Au-delà de la barrière : les échelles de la mixité La barrière face à l'idéal de l'espace ouvert Histoire de frontière entre deux communes : Cuincy et Douai La barrière comme standard imposé par le marché immobilier 4 Gestion communale ou privée ? Le choix des périurbains Des cahiers des charges en désuétude Le règlement comme garde-fou Entre l'individuel et le collectif Une préférence pour un exercice communal du contrôle Entre gestion privée et gestion communale des équipements collectifs Sur le statut juridique des rues pavillonnaires L'idéal du périurbain : une voie publique à usage privé Les conséquences du refus de classement dans le domaine public 5 La « clubbisation » des petites communes périurbaines La menace de l'avancée du front urbain et les ambiguïtés du discours environnemental Le rôle des instances communales : résister contre l'envahisseur Des équipements à préserver contre le débarquement de la banlieue La carte scolaire comme outil d'exclusivité sociale L'histoire du collège Henri IV Taille des communes et exclusivité Lutter contre le fractionnement du tissu communal ? Petites communes périurbaines et ensembles pavillonnaires privés Usage, statut juridique et intérêt : ce qui différencie la commune et l'ensemble résidentiel privé 6 La vie interne des groupes sociaux périurbains Conflits de générations Le traitement des troubles occasionnés par les jeunes Du national au local : vers d'autres politiques A propos du logement social Du local au national : le vote en faveur de l'extrême droite Conclusions Pour une approche pragmatique Entre-soi et culture de la mobilité : l'espace proche comme base Entre-soi et sécession : entre le monde vécu et le système La culture publique des périurbains : l'espace proche comme espace de transition Bibliographie