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Voir le programme
D’un écran à l’autre : les mutations
du spectateur
Colloque international – 21-23 mai 2014
Organisé par l’Université Paris 8
(Centre d’études sur les médias, les technologies et
l’internationalisation, CEMTI)
l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)
l’Institut National de l’Audiovisuel (INA)
Sous la direction de Jean Châteauvert et Gilles Delavaud
1
SOMMAIRE
Sommaire ................................................................................................................................................................2
Programme ..............................................................................................................................................................3
Mercredi 21 Mai 2014................................................................................................................................................3
Jeudi 22 Mai 2014 ....................................................................................................................................................4
Vendredi 21 Mai 2014 ...............................................................................................................................................5
Résumés des Communications.............................................................................................................................7
Organisation...........................................................................................................................................................51
Comité scientifique..................................................................................................................................................50
Comité d’organisation..............................................................................................................................................50
Informations pratiques..........................................................................................................................................51
PROGRAMME
Mercredi 21 mai 2014
2
9h30
Ouverture du colloque par Jean-Michel Rodes (Institut National de l’Audiovisuel, Directeur
délégué), Jean Châteauvert (Université du Québec à Chicoutimi) et Gilles Delavaud
(Université Paris 8)
MATIN
Président de séance : Denis Maréchal (Institut National de l’Audiovisuel)
La relation aux écrans, l’écran comme interface (1)
9h45
10h05
10h25
10h45
11h05
11H20
Thierry Lancien (Université de Bordeaux 3, MICA)
Le spectateur fragmenté
Marie-Dominique Popelard (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3)
D’un spectateur captif à un spectateur attentif
Jan Distelmeyer (Université de Potsdam)
Interface mise-en-scène. Video websites and the aesthetics of disposability
Dominique Chateau (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
L'écran entre déspécification des dispositifs et fascination
Discussion
Pause
La relation aux écrans, l’écran comme interface (2)
11h35 André Gaudreault (Université de Montréal, Directeur du GRAFICS et de la revue Cinémas,
Conférencier invité)
Mutatis mutandis, le spectateur est un mutant !
12h05 Olivier Aïm et Pauline Escande-Gauquié (Université de Paris Sorbonne, CELSA)
Eléments pour une « écranalyse » : pratiques et réflexivité des pratiques d’écrans
12h25 Jean Châteauvert (Université du Québec à Chicoutimi)
Les nouvelles plateformes de diffusion. Is the Medium the message?
12h45 Discussion
13h00 Déjeuner buffet
APRES-MIDI
Président de séance : Thierry Lancien (Université de Bordeaux 3, MICA)
La télévision parmi les écrans (1)
14h00 Gilles Delavaud (Université Paris 8, CEMTI)
Alfred Hitchcock d’un écran à l’autre : comment diriger le téléspectateur
14h20 Jacques Guyot (Université Paris 8, CEMTI)
L’art vidéo et la télévision : retour sur des conceptions antagonistes de l’écran
14h40 Aline Hartemann (Centre Marc Bloch, Berlin et EHESS, Paris)
Délinéarisation et temporalité : la question des carrefours de programmes, dans un
contexte médiatique franco–allemand. Quel impact sur le (télé)spectateur ?
15h00 Luca Barra et Massimo Scaglioni (Université Catholique de Milan)
Climbing a Pyramid. Mapping Convergent Television Practices
15h20 Marida Di Crosta (Université Jean-Moulin Lyon 3)
Du « second écran » à la narration distribuée : vers une articulation des formes et des
activités spectatorielles ?
15h40 Discussion
16h00 Pause
La télévision parmi les écrans (2)
16h15 Guillaume Blanc (Université Grenoble 3)
3
16h35
16h55
17h15
17h35
Les écrans comme dispositifs domestico-médiatiques : reconfigurations des lieux et des
temps des pratiques spectatorielles audiovisuelles dans les foyers
Lingzi Ding (Université Paris 8, CEMTI)
La « haute personnalisation » de la télévision japonaise
Virginie Spies (Université d’Avignon)
Twitter, l’avenir de la programmation télévisuelle ?
Chantal Duchet (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
Le multitasking : le nouvel eldorado des chaînes télévisuelles
Discussion
Jeudi 22 mai 2014
MATIN
Présidente de séance : Laurence Leveneur (Université Toulouse 1 Capitole, CEISME)
Le cinéma sur les écrans
Géraldine Poels (Université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, CHCSC)
Le téléspectateur, un ciné-spectateur comme les autres ? Les apports de l’histoire de la
réception télévisuelle
9h35 Michael Bourgatte (Centre Edouard Branly, Institut Catholique de Paris), Olivier
Fournout (Télécom ParisTech, Institut Interdisciplinaire de l’Innovation), Vincent Puig
(Institut de Recherche et d’Innovation, Centre Georges-Pompidou)
Le cinéma à l’heure du numérique et des cours en ligne
9h55 Bruno Trentini (Université Panthéon-Sorbonne Paris 1, directeur de la revue Proteus)
Devenir spectateur : une expérience dé-singularisée
10h15 Séverine Graff (Université de Lausanne)
Pratiques de consommation du « cinéma-vérité ». Télévision, salle de cinéma ou séance
de télévision collective ?
10h35 Discussion
10h50 Pause
9h15
L’écran mis en contexte
11h05 Jieun Park (Ecole du Louvre, Université d’Avignon, UQAM)
Les « flâneurs » ou les spectateurs des oeuvres nouveaux médias dans l’exposition d’art
contemporain
11h25 Jonida Gashi (London Consortium/Birkbeck College, University of London)
The Mobile Spectator and the (Non-)Time of Work
11h45 Julie Alev Dilmaç (Cyprus International University)
Quand le regard tue : les mutations du spectateur
12h05 Lucie Alexis (Université Panthéon-Assas Paris 2, Institut Français de Presse, CARISM)
Traversée des écrans de la pièce « Théâtre sans animaux » : des planches aux scènes
télévisuelle et numérique
12h25 Juliette Crépet (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, CEISME)
Les écrans d’affichages dans la ville
12h45 Discussion
13h00 Déjeuner buffet
APRES-MIDI
Présidente de séance : Barbara Laborde (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
L’écran du web, le documentaire
4
14h00 Amanda Rueda (Université de Toulouse 2 Le Mirail, GRECOM-LERASS)
Document et fiction : l’expérience spectatorielle des écritures documentaires du web
14h20 Anna Wiehl (Université de Bayreuth)
Documentary @Play For a Semio-Pragmatics of Non-Fictional Interactive, Participatory
Transmedia Formats
14h40 Jean‐Michel Denizart et Marianne Charbonnier (Université d’Aix-Marseille, ASTRAM)
Webdocumentaire et spectateur mutant : le cas de « Peau d’Âne, Demy et le merveilleux »,
produit par la Cinémathèque française
15h00 Samuel Gantier (Monteur, réalisateur, Université de Valenciennes, DeVisu)
Du genre documentaire au web-documentaire : concurrence des figures de l’utilisateur et
mutations spectatorielles
15h20 Discussion
15h40 Pause
Le spectateur participant
15h55 Julien Péquignot (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, CEISME, ICCA)
Jeu(x) d’écran(s) Noob et ses spectateurs internautes participatifs
16h15 Beate Ochsner (Université de Constance, Allemagne)
Le web-documentaire comme objet de participation
16h35 Christine Thoër et Florence Millerand (Université du Québec à Montréal, LabCMO)
Regarder des séries en ligne : d’autres expériences de visionnement
16h55 Laurence Leveneur (Université Toulouse 1 Capitole, CEISME)
Les jeux télévisés face à la convergence numérique : de l’écran à l’interface ludique ?
17h15 Discussion
Vendredi 23 mai 2014
MATIN
Présidente de séance : Yannick Lebtahi (Université Lille 3, GERIICO)
Des plateformes : congruences et divergences (1)
9h15
9h35
10h05
10h25
10h45
11h05
Roger Odin (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
Espaces de communication physique et espaces de communication mentaux
Marlène Loicq (Université de Rouen, GRHIS) Florence Rio (Université Lille 3, GERIICO)
L’expérience transmédiatique des jeunes : circulation et production
Amandine Kervella (Université Lille 3, GERIICO) et Elodie Kredens (Université de Savoie,
LLS)
La posture spectatorielle du jeune téléspectateur à l’heure du transmedia
Laurence Allard (Université Lille 3, Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
Le double screening : voir et écrire la fiction
Barbara Laborde (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
Sports et vertus du virtuel : animations 3D, georacing et diffusions multi-écrans des
retransmissions sportives
André Gunthert (EHESS, Culture Visuelle)
Le visionnage "binge", une contre-culture de la réception
Discussion
5
11h25 Pause
Des plateformes : congruences et divergences (2)
11h40 Marie Auburtin (Université Paris 8, CEMTI)
La diffusion d’opéras, de l’écran de télévision à la salle de cinéma et au « second écran »
12h00 Céline Ferjoux (Université Panthéon-Assas Paris 2, Intitut Français de Presse)
Corps à corps, quand le spectateur fusionne avec le spectacle (Danse avec les stars)
12h20 Lorenzo Vilches (Université Autonome de Barcelonne)
L’espace relatif de l’utilisateur face aux écrans
12h40 Discussion
12h55 Déjeuner buffet
APRES-MIDI
Présidente de séance : Virginie Spies (Université d’Avignon)
Cinéphilie et téléphilie : l’amateur et le geek
14h00 Françoise Paquienseguy (Sciences-Po Lyon, ELICO)
Pratiques d’écrans brouillées : le cas des fansub
14h20 Chloé Delaporte (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV, ICCA)
D’un écran à d’autres : les mutations de la spectature pornophilique
14h40 Dominika Kopeć (Université de Varsovie)
Performance on the Internet. Case Study of Michael Jackson’s Death
15h00 Loig Le Bihan (Université Paul-Valéry Montpellier 3)
D’une relation ludique ? Quand le cinéma se remet en jeu
15h20 Discussion
15h40 Pause
Repenser le spectateur
15h55 Christophe Lenoir (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
La télévision braconnière. La part du spectateur dans la télévision sociale
16h15 Matteo Treleani (Université Paris Est Marne-la-Vallée, CEISME, ICCA)
Le spectre et l’automate : figures du spectateur numérique
16h35 François Jost (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, CEISME)
Conférence de conclusion : Faut-il en finir avec la notion d’identification ?
16h55 Discussion
17h30
Fin
6
RÉSUMÉ DES COMMUNICATIONS
Olivier Aïm et Pauline Escande-Gauquié (Université de Paris Sorbonne, CELSA)
Eléments pour une « écranalyse » : pratiques et réflexivité des pratiques d’écrans
Comme pour beaucoup de phénomènes liés aux pratiques médiatiques, culturelles et écraniques,
l’usage des nouvelles « surfaces » de regard, de consommation et d’activation des contenus
audiovisuels et numériques suscitent une très grande réflexivité discursive. Qu’il s’agisse de
« promesses » technologiques et esthétiques (« immersion », « participation », « interactivité », double
screening », etc.), de représentations sociales ou de discours méta-médiatiques sur les pratiques
(« addiction », « accélération », « déconnexion », etc.), le fait est que nous sommes envahis autant par
les écrans que par leurs réflexivités.
C’est pourquoi nous nous proposons dans le cadre de ce colloque de déplacer un peu le regard des
pratiques sur les discours qui les accompagnent, qu’ils soient le fait des acteurs eux-mêmes ou des
commentateurs professionnels de la vie des écrans, en général, de la vie numérique, en particulier. De
manière plus resserrée, nous nous proposons de suivre une hypothèse de lecture principale. Les
discours se focalisent et se polarisent autour de deux logiques dominantes : l’euphorisation (le vertige,
l’ilinx, l’ubiquité, l’enrichissement), d’une part, et la pathologisation (paranoïa, addiction, déréalisation,
narcissisme), d’autre part. Ces deux logiques se croisent, se dédoublent et se redoublent, en postulant
tout autant une « métamorphose » des écrans que de leurs « regardeurs » et de leurs consommateurs.
Pour mettre au jour cette discursivité des pratiques, nous nous appuierons sur un corpus lui-même
double, constitué par des réflexivités d’usagers (forums, études professionnelles, publications
spécialisées), et par des réflexivités davantage historiques, au sens où cette « écranalyse » s’inscrit
dans une tradition transversale de théories qui l’éclaire (théorie du livre, de la radio, de la télévision, du
cinéma, d’Internet, etc.).
Olivier Aim et Pauline Escande-Gauquié sont tous les deux maîtres de conférence au CELSA-Paris-Sorbonne
[email protected]
[email protected]
Lucie Alexis (Université Panthéon-Assas Paris 2, Institut Français de Presse, CARISM)
Traversée des écrans de la pièce Théâtre sans animaux : des planches aux scènes télévisuelle et
numérique
Créée en 2001 à Paris, la pièce Théâtre sans animaux de Jean-Michel Ribes a été reprise au Théâtre du
Rond-Point en janvier 2013. Un dispositif numérique transmédia 1 coproduit par la direction des Nouvelles
Ecritures et du Transmédia de France Télévisions a accompagné les représentations. Le groupe audiovisuel
public ouvre ici son champ en poussant les portes du théâtre, essayant de répondre à son devoir de culture
numérique. La pièce se décline alors via quatre écrans. D’abord, l’écran virtuel et métaphorique qu’est le
« quatrième mur » séparant les acteurs des spectateurs au théâtre. Puis l’écran numérique (écran
d’ordinateur ou de tablette) duquel on accède au site ludique et expérimental qui invite l’internaute à
« réinventer la pièce » au sein de différents modules (faire passer les auditions aux comédiens, jouer avec
1
Adresse du site : http://nouvelles-ecritures.francetv.fr/theatre-sans-animaux/
7
eux, changer le décor, naviguer à travers cinq « flux » synchronisés sur le déroulé de la pièce), et qui lui
permet d’être l’acteur de nouvelles narrations. Un autre écran numérique – un vidéomaton – était installé
dans le hall du théâtre. Les spectateurs pouvaient utiliser, in situ, cet écran de médiation : une caméra
enregistrait des scènes jouées entre le public et les comédiens de la pièce. Et enfin l’écran de télévision : le
23 décembre 2013, la pièce a été diffusée sur France 2 ; l’occasion d’analyser les passations entre
planches et écran télévisuel.
D’un écran à l’autre et sans ordre préétabli, le spectateur migre entre les différentes plates-formes de
diffusion de la pièce et la nouvelle cartographie des expériences de visionnement et d’utilisation. Les
rapports qu’il entretient avec la représentation de l’œuvre théâtrale évoluent. Il est tour à tour public au
théâtre, utilisateur d’un dispositif numérique et interactif qui le rend acteur de la pièce enrichie, usager d’une
installation au sein du Théâtre du Rond-Point, téléspectateur de théâtre. Nous nous attacherons à
caractériser les postures et la part d’implication du spectateur face à la traversée des quatre écrans de
Théâtre sans animaux.
Lucie Alexis est Doctorante en sciences de l’information et de la communication.Après plusieurs expériences en
journalisme, Lucie Alexis est actuellement doctorante en sciences de l’information et de la communication à l’Institut
Français de Presse (Paris II, Assas), au sein du laboratoire pluridisciplinaire CARISM (Centre d’Analyse et de
Recherche Interdisciplinaires sur les Médias). Spécialisée en sémiologie des médias, elle s’intéresse au répertoire de
l'injonction culturelle à la télévision publique et pose la question du spectacle vivant à travers l’analyse de discours
institutionnels, une sémiotique de l'adaptation et les figures de l'artiste. Au sein de la promotion 2012-13 du
Programme d’Expérimentation en Arts et Politique de Sciences Po Paris, elle a enquêté sur le dispositif d’e-pétition de
la Mairie de Paris et l’exercice de la démocratie participative à travers l’usage de moyens numériques. Issue du
champ de la Danse, elle a également un Master recherche en Danse (Paris VIII) au sein duquel elle a travaillé sur la
transmission en danse par le biais de la partition chorégraphique, des formations en notation du mouvement Benesh
(Conservatoire National de Musique et de Danse de Paris) et pratique en danse (Cie 10h10).
[email protected]
Publications
▪ « Prenez la main » : le dispositif d’e-pétition de la Mairie de Paris.Actes du 16e Colloque International sur le Document Électronique.
▪ L’e-pétition de la Mairie de Paris. Discours institutionnel, expérience utilisateur, processus de mobilisation citoyenne.
Actes des 3e journées doctorales du GIS « participation du public, décision, démocratie participative ». A paraître.
▪ La démocratie participative : du désaccord au consensus ? À partir du dispositif numérique d'e pétition de la Mairie
de Paris. Poster scientifique, colloque Jeunes Chercheurs Praxiling.
Laurence ALLARD (Université Lille 3, Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
Le double screening : voir et écrire la fiction
Cette communication s’attachera aux pratiques de double screening consistant à voir et à commenter
des programmes télévisées sur les sites de réseaux sociaux comme Twitter et Facebook. Ce qui
suppose de diviser sa réception télévisuelle entre deux écrans suivant la configuration singulière que
chacun compose, entre contraintes, désirs et besoins, avec les terminaux, les services et les
fonctionnalités de la vaste panoplie digitale contemporaine avec 64% de multi-équipement entre
ordinateur, téléphone mobile et tablette ( Credoc/Arcep, 2013), 6 écrans par foyer en moyenne
(Médiamétrie, juin 2013) et 76 % des personnes qui regardent désormais la télévision avec
un smartphone ou une tablette dans les mains (NPA Consulting, avril 2013). Un genre vernaculaire a
été inauguré dans les vagues de l’usage de Twitter, le livetweet qui suppose de « faire public » sous un
mot-dièse. On peut parler ici réception télévisuelle re-créative suivant la logique culturelle en
8
« lecture/écriture » d’internet. Cette logique est désormais prise en compte dans les stratégies des
chaînes de TV, qui dans le contexte d’innovation industrielle de la télévision connectée, s’adossent aux
pratiques de la « télévision sociale ». A l’audimat est désormais associé le nombre de tweets par
émission pour quantifier la popularité d’un progrmame. Nous donnerons les résultats d’études de
pratiques de livetweet dans différents genres télévisuels (séries et téléréalité) en les associant à
certains usages du téléphone mobile qui supposent eux aussi un double agir entre émotion et
expression telle la photographie mobile. Cette « médiamorphose mobile » de la télévision nous donne
accès précieux à une réception co-produite en commun à travers l’affiliation à un mot-dièse et qui vient
re-scénariser, mettre sous observation collective, focaliser sur les détails, ou déconstruire la narration.
« Voir et écrire » la fiction constitue désormais l’un des modalités d’existence du régime spectatoriel.
Laurence Allard est maître de conférences, Université Lille 3-IRCAV-Paris 3. Elle a travaillé sur les
problématiques de réception audiovisuelle dès les années 1990 et depuis développe des travaux à la fois
d’analyse pragmatique d’analyse de corpus et d’ethnographie des usages sur les pratiques numériques et
mobiles en mettant l’accent sur la créativité ordinaire à l’œuvre. Parmi de nombreuses études, elle a notamment
travaillé sur le remix qu’elle a défini comme la « prose du web » ainsi que plus récemment sur les usages du
téléphone mobile comme relevant d’un « double agir communicationnel » (photographie mobile, SMS, tweets).
[email protected]
Marie Auburtin (Université Paris 8, CEMTI)
La diffusion d’opéras, de l’écran de télévision à la salle de cinéma et au « second écran »
L’arrivée, en 2005, de Peter Gelb à la tête du Metropolitan Opera a changé le cours des diffusions
d’opéras dans les médias. Les retransmissions données depuis le MET dans des salles de cinémas du
monde entier, ont rencontré un vif succès, et ont incité d’autres salles prestigieuses à leur emboiter le
pas (Royal Opera House, Théâtre du Bolchoï, Opéra de Paris). Ainsi, en dépit des faibles scores
d’audiences des diffusions d’opéras à la télévision, l’art lyrique paraît pouvoir séduire même lorsqu’il est
diffusé via un support média.
L’introduction des technologies numériques, dans le domaine de l’audiovisuel, semblent ainsi donner
une impulsion nouvelle à la diffusion d’opéra au cinéma mais aussi à la télévision, grâce à l’apparition
de plateformes « relais » et à l’utilisation par le téléspectateur d’un « second-écran ». L’heure est
encore à l’expérimentation, mais les premières innovations s’ouvrent sur deux axes de recherches :
l’amélioration des qualités sonore et visuelle de ces diffusions (ultra haute définition, captation 360°,
son spatialisé) et l’enrichissement des contenus de ces programmes télévisuels (compléments
d’information et social tv).
Cette contribution se propose d’étudier les stratégies bi-médias et transmédias misent en place par les
chaînes de télévision pour la diffusion d’opéras. Nous nous interrogerons sur l’avancée des innovations
dans ce domaine, sur les échecs et les réussites à ce jour ; et tenterons de comprendre comment, et
dans quelle mesure cela modifie les diffusions d’opéras à la télévision.
Marie Auburtin est doctorante du Centre d'études sur les médias, les technologies et l'internationalisation
(CEMTI) de l’Université de Paris 8 Vincennes-Saint-Denis. Titre du projet de thèse : « La diffusion d’opéras à la
télévision ». Avril 2013, participation à une Journée d’étude « Opéra et cinéma » ; communication : « Les
premières années de l’opéra à la télévision 1956-1964 » (article à paraitre).
[email protected]
Luca Barra and Massimo Scaglioni (Université Catholique de Milan)
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Climbing a Pyramid. Mapping Convergent Television Practices
In recent years, the emersion of different screens and the diffusion of trans-media narratives have
challenged Television and Media Studies, as well as media industry, in several ways: on one side, it
becomes more and more important to create, build and produce texts and narratives according to new
and different trans-medial criteria, also taking into account new limits and constraints; on the other,
television viewers are progressively starting to make themselves more and more familiar with a
convergent media landscape, and to engage directly with a lot of TV programs (and their textual
extensions, access forms and multilayered brands) alongside a variety of paths.
This speech will present the final results of a several-years long qualitative research on Italian
convergent television, mainly focusing on the different approaches to TV and media convergence, as
well as on broadcasters’ production strategies and viewers’ consumption habits of several products
across different genres (Italian and European fiction, US TV series, reality and talent shows, talk shows,
information, etc.). As a result, in a constant dialogue with the literature on media cultural convergence
and with Henry Jenkins’ definitions of spreadability and drillability, an original “pyramid” model of “weak”
and “strong” engagement will be presented, trying to represent effectively the relationships between TV
narratives and their audience. This longitudinal perspective enables also to demonstrate recent trends
inside television industry and consumption in Italian industry and across the world – i.e. the passage
from a “trial and error” method towards media convergence to a tailor-made focalization for each
operation, the polarization of different viewing temporalities, the current trend of social TV and second
screen and its implications, or the double-edged role of TV promotion.
Luca Barra, Ph.D, is Post-Doctoral Fellow Researcher and teaches Media Economics and TV Scheduling at
Università Cattolica, Milan. His research focuses on the international circulation of media products, on the history
of Italian television and on the evolutions of contemporary media landscape. He published a book - Risate in
scatola (Vita e Pensiero, Milan 2012) - and several essays in edited books and journals, and he is consulting
editor of the television studies Italian journal Link. Idee per la televisione.
Massimo Scaglioni, Ph.D., is Assistant Professor of Media History at Università Cattolica, Milan. He also
teaches Televisual Communication and Transmedia Narratives at USI – Università della Svizzera Italiana,
Lugano. He is the author of several books on media and broadcasting history. He is Research Coordinator at the
Research Centre for Television and Audiovisual Media at Università Cattolica (Ce.R.T.A.), didactic director of the
Master “Fare Tv. Analisi, Gestione, Comunicazione” at ALMED (Post-graduate Schools on Media,
Communication and Performig Arts) and a member of the editorial boards of the scientific journals View - Journal
of European Television History and Culture
- A. Grasso, M. Scaglioni (eds.), Televisione convergente. La tv oltre il piccolo schermo, Link Ricerca, Milan 2010.
- L. Barra, M. Scaglioni, “Risalite e discese. Le trasformazioni dei percorsi degli spettatori nell’ecosistema
mediale”, in C. Bisoni, V. Innocenti (eds.), Media Mutations, Mucchi, Modena 2013.
[email protected]
[email protected]
Loig Le Bihan (Université Paul-Valéry Montpellier 3)
D’une relation ludique ? Quand le cinéma se remet en jeu.
En pleine « querelle des dispositifs » (Bellour), abordons la question des variations dans l’ordre de la
relation spectatorielle au film qu’induiraient tant un contexte intermédiatique et convergent ou migratoire
qu’une hybridation des poétiques. On peut notamment constater une détermination croisée des formes
de certains films et des jeux vidéo dans l’usage d’une imagerie convergente : « film numérique »
(Manovich) ou « animage » (Gaudreault & Marion) d’une part et « cinématique » (Cf. Triclot) d’autre
part. On pourra donc à bon droit s’interroger sur ce que ces évolutions font bouger dans l’arrangement
des modalités relationnelles au film d’action hollywoodien par exemple. Bousculant la « relation
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pathétique » cinématographique, jusqu’ici essentiellement modalisée dans ce cadre générique par la
« relation attractionnelle », et ce en introduisant la modalité d’une « relation ludique » renouvelée (de
l’ordre de l’agôn de Caillois et pas tout-à-fait au sens de Perron), les nouvelles formes filmiques
hollywoodiennes feraient-elles bouger les lignes de l’acte de spectature ? D’autre part, les « alliages »
qui affectent la poétique des films cinématographiques contemporains « conservatoires » (Vancheri) et
notamment les films à « narration modulaire » (Cameron) suscitent également une remise en cause des
convenances réciproques de la « relation esthétique » et de la « relation critique ». On peut là encore
considérer que la « relation ludique » participe également, même si différemment, de ce
réarrangement. En nous focalisant sur ces deux pôles a priori opposés dans l’offre de films
cinématographiques, on cherchera donc à faire quelque lumière sur les variations et réinventions qui,
dans le contexte d’une situation intermédiatique métastable, affectent le complexe relationnel
aujourd’hui expérimenté par le spectateur cinématographique « prototypique » - celui qui, dans quelque
condition qu’il visionne un film, le réfèrera mentalement à « ce qui reste » du cinéma (Aumont).
Loig Le Bihan est Maître de conférences en Etudes cinématographiques à l’université Paul Valéry - Montpellier
3. Son travail de recherche consiste essentiellement en un essai de théorisation des différentes modalités de la
relation spectatorielle aux films, et notamment aux films du cinéma contemporain. Parmi ses dernières
contributions dans ce cadre, trois communications : “A la recherche du film-installation” (Colloque Réfléchir la
projection, dir. V. Campan, Forell B3/université de Poitiers, 26/28 mai 2011, à paraître aux PUR) ; “Une
esthétique débordée ? Quand les nouveaux médias mettent le cinéma à l’ouvrage… A propos de Melancholia de
Lars Von Trier” (colloque Tout ce que l’esthétique permet !, dir. T. Faucon & B. Lemaître, CRECIIRCAV/Université Paris 3, 15/18 février 2012, à paraître) ; “Le temps composé. De Louis Lumière à Mark Lewis,
une révolution cinégénique” (Colloque Images numériques : technique, esthétique et idéologie, dir. J.-L. Lioult &
C. Renard, LESA/université Aix-Marseille & Ecole Supérieure d’Art d’Aix en Provence, 29/30 novembre 2012, à
paraître aux PUP)
[email protected]
Guillaume Blanc (Université Grenoble 3)
Les écrans comme dispositifs domestico-médiatiques : reconfigurations des lieux et des temps
des pratiques spectatorielles audiovisuelles dans les foyers
Notre communication se propose de questionner les écrans et leurs pratiques au travers de leur
inscription dans les foyers (travail doctoral en cours, 3ème année).
Il s’agit de s’intéresser aux pratiques effectives de réception audiovisuelle des spectateurs, dans le
cadre de l’essor des techniques numériques et de la multiplication des écrans amenant une redéfinition
des médias audiovisuels (Missika, 2006 ; Jenkins, 2006). Notre travail entend montrer que le foyer reste
un lieu privilégié de formation et de mise en oeuvre de pratiques audiovisuelles évolutives. Ces
dernières s’inscrivant non pas en rupture mais en continuité (Miège, 2007) avec les pratiques
observées avant la multiplication des écrans.
Dans la lignée de travaux conduits sur l’utilisation de dispositifs « domestico-médiatiques » (Derèze,
1990, 1994 ; Morley, 1992), nous avons mené une étude de terrain fondée sur des entretiens et des
observations au sein de cinquante foyers rigoureusement sélectionnés. Nous avons ainsi analysé les
pratiques de notre échantillon selon une méthode à caractère ethnosociologique, dans deux
orientations principales (en lien avec la nature des contenus audiovisuels visionnés) :
- Temporelle, notamment au regard de la programmation (imposée, négociée ou construite) :
structuration de la journée en fonction des différents instants de réception, (dé)synchronisation avec le
flux télévisuel, conséquences du téléchargement, des plateformes de replay, etc.
- Spatiale : lieux de réception investis en fonction du dispositif utilisé, aménagement du domicile en
fonction des écrans, caractère individuel et/ou collectif de la réception, etc.
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Les résultats de cette enquête, que nous synthétisons ici mais que nous développerons et illustrerons,
montrent que loin d’une situation de « concurrence » ou de « convergence », les écrans par leurs
utilisations complémentaires sont socialement construits comme des systèmes médiatiques
interconnectés au sein même des foyers. Dans ce contexte, l’inscription affective vis-à-vis du contenu
audiovisuel visionné (Calbo, 1998), apparaît déterminante dans le choix de sa méthode d’acquisition et
de l’écran utilisé. Ce qui semble corroborer l’idée que les pratiques télévisuelles héritées, c’est-à-dire
essentiellement domestiques, se trouvent enrichies et précisées par les nouvelles pratiques via les
dispositifs de diffusion numérique.
Boullier, D. (2004). La télévision telle qu’on la parle : trois études ethnométhodologiques. Paris : l’Harmattan.
Calbo, S. (1998). Réception télévisuelle et affectivité. Paris: L’Harmattan.
Derèze G. (1990). « Eléments pour une ethnosociologie des objets domestico-médiatiques ». In Recherches
sociologiques, n° 3, pp. 307-321.
Derèze G. (1994). Une ethnosociologie des objets domestico-médiatiques. Médias, quotidien et troisième âge.
Louvain-la-Neuve : CIACO.
Gripsrud, J. (2010). Relocating television : television in the digital context. London, New York: Routledge.
Jenkins, H. (2006). Convergence culture : where old and new media collide. New York: New York University
Press.
Le Grignou, B. (2003). Du côté des publics : usages et réceptions de la télévision. Paris: Economica.
Miège, B. (2007). La société conquise par la communication : les TIC entre innovation technique et ancrage
social. Grenoble: Presses universitaires de Grenoble.
Morley, D. (1999). Family television : cultural power and domestic leisure. London : Routledge.
Missika, J.L. (2006). La fin de la télévision. Paris : Seuil.
Vidal, G. (2012). La sociologie des usages: continuités et transformations. Cachan : Lavoisier.
Guillaume Blanc est Doctorant en troisième année au Groupe de Recherche sur les Enjeux de la
Communication à Grenoble. Ses travaux portent sur l’ancrage et l’usage domestique des dispositifs sociotechniques permettant la diffusion de contenus audiovisuels, sous la direction de Fabienne Martin-Juchat et de
Benoît Lafon. Ses recherches s’inscrivent dans la ligné de travaux sur l’ancrage social des TIC, l’étude des
médias ou encore la théorie des industries culturelles.
[email protected]
Publications et travaux scientifiques :
Blanc, G. (2011). Différenciation des pratiques de réception des séries télévisées et mutations du secteur de la
diffusion audiovisuelle : analyse critique du scénario de la mort annoncée de la télévision. Mémoire de master 2
en Sciences de l’Information et de la Communication sous la direction de Fabienne Martin-Juchat, Grenoble
Blanc, G. (2014). « Débats et controverses autour des résultats de recherche entre universitaires et
professionnels ». In Lépine, V., Fourrier, C., & Martin-Juchat, F. La communication aux prises avec le marketing.
Presses Universitaires de Grenoble : Grenoble. (A paraître)
Michael Bourgatte (Centre Edouard Branly, Institut Catholique de Paris), Olivier
Fournout (Télécom ParisTech, Institut Interdisciplinaire de l’Innovation), Vincent
Puig (Institut de Recherche et d’Innovation, Centre Georges-Pompidou)
Le cinéma à l’heure du numérique et des cours en ligne
Depuis bientôt 7 ans, nous interrogeons, d’une part, les modes d’exploration du cinéma en
classe à l’aide des technologies du numérique et, d’autre part, les modes d’acquisition de
connaissances grâce au cinéma. Nos réflexions portent sur les usages de technologies
contributives et participatives qui sont caractéristiques de la mutation des écrans ces dernières
années. En effet, pendant longtemps, l’écran a borné strictement les contenus audiovisuels. Avec
12
les technologies du numérique, une nouvelle façon de consommer les films est apparue.
Maintenant, les utilisateurs peuvent voir, sur l’écran, le film et des productions périphériques,
dont les leurs.
En situation d’émergence de l’enseignement à distance et de la mise en circulation accrue de
ressources éducatives autour des Moocs, nous nous intéressons, aujourd’hui, au cinéma et à
l’audiovisuel comme mode de communication en expansion, ainsi qu’aux nouvelles technologies
d’écriture audiovisuelle qui modifient l’épistémologie des savoirs produits et introduisent de
nouvelles formes de diffusion, de communication et de débat interprétatif entre les chercheurs
(Peer-to-Peer Knowledge), entre les chercheurs et la société des amateurs (Open Science,
science participative), entre les pédagogues et les apprenants (à l’aide de ressources propres
ou provenant de sites comme Youtube, INA.fr, archive.org, …).
Dans ce contexte, les ressources cinématographiques et audiovisuelles constituent des socles
nouveaux d’écriture et d’apprentissage qui renforcent l’importance de l’image animée dans la
fabrication, la transmission et la co-élaboration des savoirs. Pour cette intervention, nous
proposons d’observer des processus de création, de mise en circulation et de réception de
certains travaux de recherche pionniers menés à la BnF autour du cinéma dans le cadre du
projet CineCast, ainsi que des formes émergentes et plurielles de Moocs (Spoc, Pooc, …) pour y
déceler les modes d’appropriation de ces nouvelles écritures et les formes d’ajustement qui se
mettent en place autour d’elles, afin de développer les outils pour accompagner ces pratiques
émergentes.
Michaël Bourgatte est docteur en sciences de l’information et de la communication. Sa thèse porte sur
les pratiques spectatorielles et la notion de valeur dans le champ du cinéma. Il a travaillé entre 2010 et
2013 ans comme chercheur à Télécom ParisTech. Il est actuellement chercheur au Centre Edouard
Branly – ICP. Ses travaux interrogent la circulation des formes culturelles et l’usage des nouvelles
technologies dans le champ du cinéma et de l’audiovisuel (production d’annotations, réalisation de
mashups, relations entre les contenus). Il a récemment dirigé une publication collective (Le cinéma à
l’heure du numérique. Pratiques et publics. MkF) et publié plusieurs articles dans le champ des Digital
Humanities (L’écran-outil et le film-objet, MEI ; Annoter des films et des vidéos : une activité de curating
audiovisuel, Actes du Congrès Avanca-Cinéma).
[email protected]
Vincent Puig est directeur exécutif de l’Institut de Recherche et d’Innovation du Centre Pompidou.
Praticien des transferts de technologie et du montage de projets entre culture et recherche depuis 1993
(Directeur de la valorisation scientifique à l’Ircam, fondateur du Forum Ircam, Vice-président Europe de
l’International Computer Music Community). Il fonde l’IRI en 2008 avec Bernard Stiegler, pour développer,
dans le contexte des Digital studies, une nouvelle approche organologique des savoirs, largement
appuyée sur les technologies contributives et la figure de l’amateur. Il est président de la Communauté
Culture, Presse & Média et vice-président de la Commission d’évaluation Services au sein du pôle de
compétitivité Cap Digital. Il est membre du conseil scientifique de l’Institut Méditerranéen de Recherches
Avancées d’Aix-Marseille (IMéRA), fondation pour la transdisciplinarité dans les sciences et les arts. En
lien avec le sujet de cette communication il a notamment publié Nouveaux modes de perception active de
films annotés (avec Yannick Prié), in Cinéma, interactivité et société, Presses Universitaires du Québec,
2013 et Contribuer n’est pas collaborer, un focus sur les dispositifs d’annotation de documents
audiovisuels, in Numérisation du patrimoine, quelles médiations, quels accès, quelles cultures ? Editions
Hermann, 2013
Olivier Fournout est enseignant-chercheur à Télécom Paristech et à l’Institut Interdisciplinaire de
l’Innovation (I3). Ses travaux se situent à la croisée de la sociologie du cinéma et de l’analyse de contenu
(sémiotique, esthétique, philosophique) des œuvres de fiction. Il est l’auteur de Théorie de la
communication et éthique relationnelle, Hermès-Lavoisier, 2012, ainsi que d’un livre sur les liens entre
cinéma et management à paraître en 2014 aux Presses des Mines. Plusieurs de ses articles de
recherche portent sur le cinéma (« L’imagination en négociation », Communication & Langages, 2004 ; «
La fabrique du héros hollywoodien. L’acteur et l’intériorité », Communication & Langages, 2012, et à
paraître en 2014, « Société, cinéma et ingéniérie relationnelle », revue Communication, Canada).
13
Dominique Chateau (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
L'écran entre déspécification des dispositifs et fascination
Mon propos vise à explorer le paradoxe que forme le processus postmoderne de déspécification des
dispositifs, corrélativement à celle des médiums, avec la persistance de l'écran, mieux même la
prolifération des écrans. Les médiums subissent toutes sortes de transformations, en sorte qu'au
"domaine de compétence" unique cher à Clement Greenberg s'est substituée une hybridation illimitée
qui fait peser un doute sur la notion même de médium et, surtout, produit des dispositifs à géométrie
variable, sans cesse recréés et repensés (des médiums d'un jour…). Une conséquence de cette
déspécification est la pratique "multi-screen" — peut-on traduire par "multi-écranique"? —, c'est-à-dire
le fait qu'un même produit audiovisuel, à commencer par le film, peut être vu sur tout une gamme
d'écrans, du grand écran panoramique de la salle au petit écran du téléphone ou de la tablette, en
passant par des écrans domestiques de tailles diverses. Outre que cela induit la possibilité de pratiques
différentes de "lecture" du même message audiovisuel — des modes d'expérience différents comme le
montre Francesco Casetti —, paradoxalement, à l'ère de la dématérialisation des médiums, à l'ère des
médias numérisés, à l'ère de "l'iEsthétique", l'écran demeure et se multiplie, et l'homme postmoderne,
éprouve plus que jamais la fascination de l'écran, objet d'une relation sensorielle, esthésique, et somme
toute matérielle (comme le retour au tactile contribue à le montrer).
Dominique Chateau est professeur à l’Université de Paris I Panthéon-Sorbonne. Il enseigne l’esthétique et les
études cinématographiques. Il a publié notamment : Arts plastiques : archéologie d’une notion, Jacqueline
Chambon, Coll. « Rayon art », 1999. Qu’est-ce que l’art ?, L’Harmattan, Coll. « L’ouverture philosophique »,
2000. Cinéma et Philosophie, Nathan, Coll. « Université », 2003. Qu’est-ce qu’un artiste ?, Presses Universitaires
de Rennes, 2008. L’Art comptant pour un, Les presses du réel, MAMCO, 2009. L’Expérience esthétique :
intuition et expertise, Presses Universitaires de Rennes, 2010. Philosophies du cinéma, Armand Colin, 2010.
Christian Jaccard, Énergies dissipées, Bernard Chauveau éditeur, 2011. Subjectivity (dir.), Amsterdam University
Press, 2011. La Subjectivité au cinéma, Presses Universitaires de Rennes, 2011. Dialectique ou antinomie ?
Comment penser, Paris, L’Harmattan, 2012. L’Invention du concept de montage, Paris, L’Amandier, 2013.
[email protected]
Jean Châteauvert (Université du Québec à Chicoutimi)
Les nouvelles plateformes de diffusion. Is the Medium the message?
La tablette, le cellulaire et le « mini-laptop » sont devenus en quelques années des plateformes de
visionnement qui font partie de nos options pour visionner au gré de nos déplacements un épisode
d’une série web ou télévisuelle, un bulletin d’information ou découvrir un clip sur YouTube (LaGesse,
"Can't Go an Hour without Tv? No Problem."). Si les tests donnent à penser que ces plateformes
mobiles ont peu d’impact sur la rétention de l’information et sur le niveau d’implication du spectateur – il
y a malgré tout ce sentiment vague que l’expérience est compromise par le support (Lam, "Portable
Media Affected Spectatorship."). Je veux explorer dans cette communication les conditions nouvelles
de visionnement qu’apporte le dispositif mobile, cellulaire ou tablette, et son impact sur la relation que le
spectateur développe avec le matériel visualisé.
Quelques considérations pour nourrir cette réflexion.
Visionner un clip, une série web ou télévisuelle, le bulletin d’infos ou un film sur un portable ou une
tablette se traduit par une expérience fragmentée de visionnement. L’image est recadrée par la fenêtre
qu’impose le cellulaire ou la tablette, compressée pour sa diffusion, qui parfois se fige, s’interrompt. Le
14
son réduit ses pistes et sa qualité au gré de la bande passante (Kernan, "Playing to the Strengths of a
Very Small Screen.").
En amont de ce visionnement sur ces plateformes mobiles, le spectateur a porté un regard sélectif : il
sait (il a une idée) ce qu’il va voir sur le cellulaire ou la tablette. L’épisode regardé lui a été
recommandé dans un réseau d’amis ou appartient à une série télévisuelle, une série web, un journal
télévisé. Le court-métrage ou le documentaire est vu parce qu’il est proposé par une émission ou un
festival ou présenté comme participant d’une filmographie. La dimension sérielle permet de créer le
rendez-vous: la série nourrit le désir de voir, rassure et fonde ce geste de visionnement au milieu dans
le quotidien (Sintumuang, "Is a Tablet the Only Tv You Need?).
Cette expérience de visionnement a lieu le temps d’un interstice, où le temps s’arrête, où le spectateur
se place en retrait du présent, le temps d’un trajet, d’une attente, d’une pause au bureau. Le spectateur
s’isole avec des écouteurs, avec la tablette ou le mobile pour ouvrir l’accès à l’interstice du
visionnement instantané : l’épisode de la série, la vue qui fait la manchette ou le bulletin d’info sont
toujours accessibles. Il suffit d’un clic pour voir.
Le spectateur qui visionne dans le présent de l’interstice, partout où la réception le permet, vit la
solitude du visionnement qui l’isole dans le présent et participe du même souffle d’une communauté
virtuelle, celles des spectateurs sur la toile avec lesquels il peut interagir sur le site de diffusion, dans
les réseaux sociaux. Dans l’immédiateté du visionnement, relative et variable selon qu’on regarde un
bulletin d’info, le dernier clip d’un chanteur ou la mise en ligne du dernier épisode de la série télévisuelle
ou web, le spectateur peut interagir au moment où la réaction et le commentaire ont leur pertinence
parmi les internautes. La plateforme mobile ajoute à l’expérience de visionnement la possible
participation ‘live’ à un réseau virtuel qui se crée chez les internautes autour de la série, du sujet.
Ce visionnement de nature sérielle, dans l’interstice accessible au présent, qui s’arrime à une possible
communauté virtuelle, participerait à créer un sentiment d’appartenance et un désir de voir qui fidélise
le spectateur.
Kernan, Michael. "Playing to the Strengths of a Very Small Screen." Television Week 26.32, 2007, pp.
LaGesse, David. "Can't Go an Hour without Tv? No Problem." News & World Report 144.16, 2008
Lam, Celia. "Portable Media Affected Spectatorship." Convergence: The International Journal of Research into
New Media Technologies 17.4, 2011, pp. 431-443.)
Sintumuang, Kevin. "Is a Tablet the Only Tv You Need? With the Explosion of on-Demand Video and Live
Streaming Apps, the Future of Television Might Be Closer (and Smaller and Lighter) Than You Think." Wall
Street Journal (Online), 2012, pp. 28 septembre 2012.
Jean Chateauvert est chercheur et consultant en création audiovisuelle, il enseigne la création vidéo et la production
audiovisuelle pour le web l’Université du Québec à Chicoutimi. Il a développé en parallèle de son enseignement une
production audiovisuelle de fiction et expérimentale et une expertise en scénarisation (cinéma, télévision, web). Ses
travaux portent sur la compréhension et la perception du récit audiovisuel. Il développe une recherche sur la scénarisation
et l’esthétique audiovisuelle des séries web et webdocumentaires. Il analyse la synergie entre les différentes plateformes
(site internet, blog, page Facebook, etc.) qui font l’expérience de visionnement sur le web.
[email protected]
Juliette Crépet (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, CEISME)
Les écrans d’affichages dans la ville
L’écran d’affichage dans la ville, est un média qui présente des textes, des animations vidéo ou des
diaporamas de photographies, à caractères publicitaires, informatifs, ou divertissants. On les trouve
15
dans les lieux de transit, lieux de loisirs, lieux de service, et lieux de vente 2, des grandes villes
internationales.
Il est juste d’affirmer que les écrans d’affichages de vidéos numériques empruntent aux médias de
l’affiche et de la télévision. L’affiche, d’une part, parce que l’écran est disposé pour être un support de
visualisation de l’image dans les points transitoires de la ville ; la télévision, d’autre part, pour son flux
continu d’images. Cependant, bien que l’affichage numérique puise de ces deux moyens de
communication, il détient des propriétés qui lui sont propres, et qui le définissent de façon univoque.
Le paradigme selon lequel l’affichage de vidéos numériques semble opérer, est l’ ambiance. Très
brièvement, on constate que la mise en place des dispositifs, ainsi que les formulations des montages
des contenus, sont analogues aux critères de l’ambiance. Ils constituent une atmosphère 3, ils se
fondent parmi l’ensemble des objets du contexte de vie 4, ils subissent une indifférence de la part du
spectateur 5, et constituent un climat moral et affectif.
En résultante, le facteur apical qui régit la problématique de la mutation des écrans est le suivant : le
message communicationnel ne s’adresse pas à l’attention soutenue du spectateur, mais à son espace
environnant.
Il faudra alors traiter le sujet de l’affichage numérique, selon des points de mutations distincts. La
narration : les images sont produites selon un récit strictement visuel, sous l’apanage d’un langage
formel 6. Les usages : des évolutions des technologies numériques résultent une prolifération de
dispositifs, ainsi qu’une prolifération des fonctions de communication. Les écrans : les appareils
personnels sont déparés de leurs fonctions interactives, pour intégrer celles de l’affichage. La
réception : l’écran d’ambiance communique avec le spectateur par le biais de l’émotion, son
appréhension du lieu dépend du type de programme diffusé. Le paysage urbain : la ville nourrit ses rues
de nouveaux simulacres.
BONNET (Eric) – sous la direction de – Esthétiques de l’écran - Lieux de l'image, Paris : L’Harmattan, 2013.
CHIK (Caroline), L’image paradoxale. Fixité et mouvement, Villeneuve d’Ascq : Presses Universitaires du
Septentrion, 2011.
FONTANILLE (Jacques), ZINNA (Alessandro), Les objets au quotidien, Limoges : Pulim, 2005.
LANCIEN (Thierry) - Sous la direction de – Ecrans et médias, Paris : L’Harmattan, 2012.
LIZOTTE (Aline), L'art de la définition, Les Plans sur Bex (Suisse) ; Paris : Parole et silence : les Presses
universitaires de l'IPC, 2007.
Revue Ecrans : n°1, « L’écran expérimental », Paris : l’Harmattan, 2013.
2
Classement des lieux élaborée par SCHAEFFLER (Jimmy), Digital signage : software, networks, advertising, and displays : a
primer for understanding the business, Amsterdam ; Boston : Focal Press, 2008.
3
L’ambiance, définie dans le Vocabulaire d’esthétique d’Etienne Souriau (2004) et dans le Petit Robert de la Langue française (2012), consiste à être : « le milieu dans lequel un être se trouve placé ». On en déduit que les écrans et leurs programmes sont ambiants dans le sens ou ils sont présents dans le contexte de vie d’une personne. C’est en cela qu’ils se distinguent du cinéma : l’écran n’est pas la cause de la présence d’une personne dans un contexte ; elle est un élément du
contexte de vie de la personne.
4
Dans le Système des objets, et dans La Société de consommation, Jean Baudrillard décrit que l’ambiance est un « tout
presque indissociable » (La Société de consommation, Paris, Éditions Folio, 2009, spéc. p. 90), dans lequel l’individu « ne se
réfère plus à tel objet dans son utilité spécifique, mais à un ensemble d’objets dans sa signification totale ». On en déduit
que les écrans et leurs programmes, ne se distinguent pas des autres éléments présents dans le contexte de vie d’une personne. Ils sont ambiants dans le sens où ils se fondent parmi tous les autres objets.
5
Ce troisième critère découle du deuxième : les objets qui formulent l’ambiance d’un contexte de vie, subissent une indifférence de la part
des individus. Les écrans et leurs programmes sont ambiants, dans le sens ils ne sont pas un élément d’attention privilégié. On convient
que ce point est contradictoire avec les objectifs des programmes, qui ont pour but principal d’effectuer une communication. Mais cette
indifférence corrèle avec le phénomène actuel de la prolifération des images : l’individu ne peut se concentrer sur toutes les images des
écrans qui se présentent à lui dans sa vie quotidienne.
6
Dans le sens de : « qui considère la forme, l'apparence plus que la matière, le contenu » in « formel », Le Grand Robert de
la Langue française, version électronique, 2014.
16
Juliette Crépet rédige sa thèse de doctorat « les écrans dans la ville », sous la direction de Monsieur le
Professeur François Jost, au sein du laboratoire du CEISME (Centre d’Etude sur les Images et les Sons
Médiatiques), de l’Université de Paris III Sorbonne – Nouvelle. Cette recherche consiste à étudier tous les objets
technologiques qui sont exposés dans les lieux publics comme des outils de présentation de l’image. L’objectif
est de définir ces écrans, de comprendre leurs significations symboliques, de sorte à les inscrire dans une théorie
de l’image.
Les recherches effectuées au sujet de l’écran d’ambiance, ont fait l’objet d’une publication dans le premier
numéro de la revue Ecrans, « L’écran expérimental », dirigé par Jean Pierre Esquenazi. Il s’intitule « De l’usage
décoratif de la télévision ». Il traite de l’usage des programmes télévisés comme élément d’ambiance, et comme
outil de décoration d’intérieur.
L’écran d’affichage de vidéos numériques dans la ville a été présenté en septembre 2012, dans le cadre du
Congrès International sur les Ambiances de Montréal. L’intervention sur « L’ambiance des écrans dans les lieux
publics. Le cas de l’affichage numérique », énonce une classification des fonctions des programmes. Il a fait
l’objet d’une publication : THIBAUD (Jean-Paul), SIRET (Daniel) – sous la direction de -, Ambiances in action:
proceedings of the 2nd International congress on ambiances, Canadian centre for architecture, Montreal,
Septembre 2012, Grenoble : Réseau international Ambiances, 2012.
Enfin, les critères de l’ambiance ont été traités lors des journées d’études « Du studio au plateau de télévision :
appropriations, détournements et réinterprétations par les artistes », les 28 et 29 juin 2013, à l’Institut National
d’Histoire de l’Art. La publication de cette intervention est à venir, sous le titre : « l’art de la vidéo d’ambiance ».
Elle montrera comment l’ambiance est une discipline à part entière en matière de création vidéo, aussi bien dans
la ville, que de la part des médias télévisuels, et des arts plastiques.
[email protected]
Marida Di Crosta (Université Jean-Moulin Lyon 3)
Du « second écran » à la narration distribuée : vers une articulation des formes et des activités
spectatorielles ?
Nombreuses sont les expériences de production audiovisuelle récentes qui, à partir d’une série
télévisée, combinent en les faisant interagir différents écrans et dispositifs : de l’expérience suédoise
pionnière La Vérité sur Marika (Company P, SVT, 2007) au transnational The Spiral (Caviar Films, VTR,
SVT, VARA, 2012), en passant par les expérimentations françaises autour de Braquo et Plus Belle la
vie, jusqu’à la série post-adolescente Cut ! (ALP, Terence Films, France Télévisions Nouvelles
Ecritures, 70 ép. x 26 min., 2013), diffusée depuis le 30 septembre sur France Ô et Facebook.
Dans cette logique de narration distribuée transmédia, la fiction sérielle télévisée joue le rôle de pièce
maîtresse. Volet narratif indispensable tant à la création d’univers et personnages évolutifs et captivants
qu’à la viabilité commerciale du projet, elle est aussi incontournable au niveau de la relation particulière
qu’elle est capable d’instaurer avec le (télé)spectateur. Le glissement de la fiction télévisée vers la
sérialité a joué en effet un rôle fondamental vis-à-vis de la préparation des publics à des formes de
fiction plus complexes et plus immersives, voire plus participatives (Gray, 2011, Mittel 2012). Au même
titre que sa structure fragmentée et son déroulement temporel spécifique, l’écriture sérielle télévisée
semble donc partager avec le storytelling transmédia l’ouverture de l’univers diégétique à l’interactivité
et au partage des activités spectatorielles. En proposant des volets de l’histoire et des éléments
paratextuels hors télévision, les productions tranmédia postulent ainsi différentes typologies de
spectateur, tant pour la télévision que pour le « second écran ». Parce qu’elles intègrent, au niveau de
leur écriture scénaristique, certaines pratiques et postures liées aux usages des réseaux socionumériques – blogging et micro-blogging, social networking, partage de photos et de vidéos, etc. – ces
productions parviennent à jeter des passerelles entre les différents dispositifs et volets de l’histoire, et
donc à favoriser certaines formes de participation et de circulation de la part du public.
S’appuyant sur l’étude de ces expériences, notre proposition vise à repérer les articulations
scénaristiques, symboliques et technologiques qu’instaure la fiction sérielle « distribuée » - télévisée en
17
même temps que partagée via les réseaux. Nous espérons ainsi parvenir à mieux cerner certaines
formes et activités spectatorielles spécifiques à ces productions.
Marida Di Crosta est maître de conférences à l’Université Jean-Moulin Lyon 3 où elle a mis en place le master
biennal Scénarisation de contenu audiovisuel multi-support (transmedia storytelling). Membre du laboratoire
PARAGRAPHE (Paris 8) et du Screenwriting Research Network, elle a publié en 2009 Entre cinéma et jeux
vidéo: l'interface-film. Métanarration et interactivité, De Boeck-INA (Médias-Recherches).
[email protected]
Chloé Delaporte (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV, ICCA)
D’un écran à d’autres : les mutations de la spectature pornophilique
L’audiovisuel pornographique se présente comme un terrain privilégié pour l’observation des mutations
contemporaines de la posture spectatorielle. Cette communication se propose de les renseigner sous
un triple jour. Dans un premier temps, c’est la question de la migration des écrans qui nous intéresse.
En effet, plus que de « multiplication » ou de « dispersion », c’est bien d’un déplacement écranique qu’il
s’agit ici : les salles de cinéma spécialisées, aux larges écrans collectivisés, ont laissé la place aux
postes de télévision, connectés à des chaînes spécialisées ou à un magnétoscope, puis aux microordinateurs, tablettes et Smartphones. Ce remplacement progressif d’un type d’écran par d’autres, a
priori plus intimes, invite de nouveaux modes de lecture de la part des spectatrices et spectateurs, qui
peuvent maintenant consommer ces images dans des lieux publics, mais à l’abri des regards de tous,
comme directement dans leur lit. Dans une perspective pragmatique, nous pouvons imaginer que ces
nouveaux usages ont initié la production de nouvelles images, ce que nous voulons, dans le deuxième
temps de cette communication, renseigner. On observe, en effet, la popularisation de formes filmiques
spécifiques à cette migration écranique, au sein desquelles les adresses au spectateur et les inclusions
de celui-ci dans le dispositif filmique se multiplient (récurrence de la caméra subjective, choix de
cadrage incitant une identification, brouillage de la frontière entre hors-champ et hors-cadre, etc.). Dans
un troisième temps, il nous paraît judicieux d’ouvrir la réflexion à l’imagerie pornographique « amateure
», démocratisée par la prolifération de plateformes internet de partage de vidéos, comme YouPorn ou
RedTube. L’audiovisuel pornographique se prête bien à ce champ d’investigation car s’y développe tout
particulièrement la question du « pro-am », de l’imagerie professionnelle présentée comme amateure
dans une visée marketing. Ainsi, être spectateur du porno aujourd’hui c’est, souvent, être au moins
autant acteur, réalisateur, producteur, éditeur et critique (par le biais des commentaires, « likes » et «
dislikes » accolés à chaque vidéo partagée sur une plateforme), ce que cette communication tentera de
mettre en lumière.
Docteure en sociologie, ancienne allocataire-monitrice et ATER, Chloé Delaporte est postdoctorante au Labex
ICCA – Industries Culturelles et Création Artistique et chercheuse à l’Institut de recherche sur le cinéma et
l’audiovisuel (IRCAV). Elle enseigne au Département de Cinéma et audiovisuel de l’Université Sorbonne
Nouvelle – Paris 3. Ses travaux portent sur l’histoire socio-économique du cinéma américain, les processus de
catégorisation des objets filmiques et les hiérarchies cinéphiliques.
[email protected]
DELAPORTE Chloé, VOVOU Ioanna (à paraître fin 2014), « Commenter la télé, une performance de genre ?
Convergence médiatique, usages numériques et réception des émissions de relooking », dans SPIES Virginie
(dir.), « La télévision dans la toile », Télévision n°5, CNRS Éditions
DELAPORTE Chloé (2013), « Analyse filmique et porno 2.0 », Nonfiction.fr, le quotidien des livres et des idées
[en ligne], dossier « Penser le porno » (publication conjointe des pôles Cinéma et Gender)
DELAPORTE Chloé (2013), « Transtextualité et cinéphilie. Étude de Cinéman (Yann Moix, 2009) », dans
AUBERT Jean-Paul, TAILLIBERT Christel (dir.), « Du créateur au spectateur. La cinéphilie des cinéastes (Tome
2) », Les Cahiers des Champs Visuels n°8-9, L’Harmattan, p. 97-124
18
Gilles Delavaud (Université Paris 8, CEMTI)
Alfred Hitchcock d’un écran à l’autre : comment diriger le téléspectateur
Hitchcock a parfaitement résumé son projet de cinéaste lorsqu’il a déclaré, à propos de l’un de ses
films, qu’il « faisai(t) de la direction de spectateurs ». Mais lorsqu’en 1955 il se lance dans la production
d’une série télévisée – la série Alfred Hitchcock Presents –, passant non seulement d’un écran à l’autre,
mais aussi d’un spectateur à l’autre, que devient cette revendication de maîtrise ? L’idée même de
direction de spectateurs a-t-elle encore du sens ?
Pour s’attacher durablement cet autre spectateur qui ne lui est pas acquis d’avance et que,
contrairement à celui de la salle de cinéma, il ne tient pas à sa merci, Hitchcock ne se contente pas de
proposer des histoires pleines de suspense et d’humour ; il prend le titre de la série au pied de la lettre
et substitue (ou superpose) à l’image publique du cinéaste-star l’image dégradée d’un Hitchcockprésentateur dépourvu de la moindre autorité, privé de toute maîtrise. A partir de quoi il développe visà-vis du téléspectateur une relation de complicité sans précédent. Celle-ci se nourrit parallèlement
d’une approche ludique du dispositif télévisuel, et du rêve, ou de l’utopie, d’un nouvel équilibre de part
et d’autre de l’écran.
Gilles Delavaud est professeur en sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris 8,
chercheur au Centre d’études sur les médias, les technologies et l’internationalisation (CEMTI). Il a notamment
publié L’Art de la télévision, Ina/De Boeck, 2005, et dirigé ou co-dirigé Télévision : le moment expérimental. De
l’invention à l’institution, Ina/Apogée, 2011, Permanence de la télévision, Apogée, 2011 ; il a publié plus
récemment "La télévision selon Alfred Hitchcock. Une esthétique de l'émergence", revue Cinémas, vol. 23, n° 23, Montréal, printemps 2013.
[email protected]
Jean-Michel DENIZART et Marianne CHARBONNIER (Université d’Aix-Marseille,
ASTRAM)
Webdocumentaire et spectateur mutant : le cas de Peau d’Âne, Demy et le merveilleux, produit
par la cinémathèque française
On propose ici de considérer les mutations du spectateur de documentaire vers le webdocumentaire à
partir de l’analyse de la réalisation de la Cinémathèque française : Jacques Demy et le merveilleux
(http://www.cinematheque.fr/zooms/demy/fr/index.php) dans le cas d’une consultation sur ordinateur. Le
spectacteur (Weissberg) d’un webdocumentaire peut, contrairement à un spectateur de documentaire
se soustraire au flux, notamment grâce au principe d’interactivité. A l’aune de ces différentes
contraintes, agissant sur les actants de la communication, il convient de s’interroger sur les processus
et les modes convoqués par le spectateur dans le cas étudié ici. Le webdocumentaire Jacques Demy et
le merveilleux – décliné en deux options de parcours libre et guidé - constitue une véritable expérience
scientifique : Dans le parcours guidé, le spectateur est soumis au rythme et à la linéarité du contenu.
Une analyse sémiopragmatique, conduit à remarquer que, le mode de lecture dit « documentarisant »,
notamment de part sa spécificité énonciative (la construction d’un énonciateur réel interrogeable en
terme de vérité), est particulièrement prégnant, malgré la présence d’une nouvelle forme de mise en
scène (dite « scénographie du document »), et la consultation via un écran d’ordinateur. Le spectateur
fait corps avec le cinéma de Jacques Demy, en s’imprégnant du graphisme répondant au code de
l’univers Demy. Du côté du parcours libre, l’utilisateur retrouve « le plaisir spectatoriel lié à la navigation
19
intentionnelle » (Di Crosta), « il oscille entre perception, recherche et collectes d’informations » (Di
Crosta), il s’approprie alors l’univers de Demy, qu’il pénètre et utilise, devenant ainsi spectateur-incube
ou succube. Spectateur d’une oeuvre ouverte (Eco), il se trouve projeté dans l’espace du film via le clic
de sa souris, qui devient cet « autre-champ » (Bergala). De même, l’interactivité fait naitre cette «
image-relation » (JL Boissier) qui s’instaure entre l’utilisateur et l’oeuvre. On peut alors aller jusqu'à
supposer – au delà se son rôle fondamental de co-constructeur de sens – que le spectateur tend à
s'instituer en tant que co-énonciateur, car l'interactivité nouvelle dont il jouit, lui permet de monter, voire
d'alimenter en contenu sa propre expérience (spectateur monteur).
Ainsi il semblerait que le spectateur-mutant d’un webdocumentaire, soumis à l'ensemble de contraintes
de ce système, tende, dans sa position incube ou succube, à déployer une adjonction particulière
d'opérations et de processus que nous nous proposons d’analyser. Il conviendra également de se
demander si cet agrégat constitue une des multiples déclinaisons du mode « documentarisant » ou si la
précédente hypothèse de construction d’un co-énonciateur nous permettrait éventuellement de définir
un « mode de lecture « webdocumentarisant ».
Jean Michel Denizart et Marianne Charbonnier préparent leur thèse en études cinématographiques, à
l’Université d’Aix‐Marseille, sous la direction de Jacques Sapiega. (Laboratoire ASTRAM, école doctorale 354)
[email protected]
[email protected]
ADJIMAN, Rémi, L’émergence du sens du spectateur, au cours de la projection cinématographique: une
approche communicationnelle et cognitive, Université de Montpellier 1, 2002, 457 p.
ALBÉRA, François et TORTAJADA, Maria, Ciné-°©‐dispositifs: spectacles, cinéma, télévision, littérature,
Lausanne, L’Age d’Homme, 2011. B
OISSIER, Jean-°©‐Louis, La relation comme forme : L’intéractivité dans l’art, Musée d’Art Moderne et
Contemporain (Mamco), 2004.
CROSTA, Marida Di, Entre cinema et jeux-°©‐video : l’interface-°©‐film, DE BOECK, .
DAVALLON, Jean, « L’écriture de l’exposition : expographie, muséographie, scénographie », Ecole du Louvre,
Palais du Louvre, , (« Culture et Musées vol16 »), p. 229-238.
GAUDREAULT, André et MARION, Philippe, La fin du cinéma ? : Un média en crise à l’ère du numérique,
Armand Colin, 2013, (« Cinéma / Arts visuels »).
ODIN, Roger, De la fiction, Paris; Bruxelles, De Boeck Université, 2000.
ODIN, Roger, Les espaces de communication: introduction à la sémio-°©‐pragmatique, Grenoble, Presses
universitaires de Grenoble, 2011.
20
SAPIEGA, Jacques, The Durance: Interlaced waters: art-°©‐science collaborations and audiovisual research,
Leonardo, MIT Press Journals, en ligne :
http://www.mitpressjournals.org/toc/leon/0/0 À paraître (janvier 2014) : Revue Leonardo Vol. 47, No. 1, 2014. ,
MIT Press
SAPIEGA Jacques, Dérive(s), in Histoire du Transmédia. Genèse du récit audiovisuel éclaté, Cahiers de Champs
Visuels, L'Harmattan, Avril 2014. (Actes de la journée d'études organisée par ASTRAM le 23 mai 2013).
Julie Alev Dilmaç (Cyprus International University)
Quand le regard tue : les mutations du spectateur
Internet s’impose comme un « lieu » virtuel de sociabilité. Il est une plateforme où s’établissent les
interactions. Plus que cela, il est devenu un monde dans lequel il faut « exister » pour « exister
vraiment » : il faut y être vu pour être reconnu. Ce rapport a autrui s’établit sur une relation réciproque et
dialectique entre « l’être-vu-par-autrui » et le « voir autrui » (Sartre,1943, pp. 314-315).
Avec l'émergence des nouvelles technologies, les manières de regarder semblent ainsi être redéfinies,
notamment par le biais des écrans : l'innovation principale d'Internet a été la banalisation et la
prolifération médiatique du « tout voir, tout dire et tout montrer » (Uhl, 2002). Pour cela, beaucoup
d’internautes n’hésitent pas à se dévoiler et à dévoiler des pans entiers de leur existence, comme si
cette exposition leur permettait d’être plus « ancrés » dans le monde virtuel.
Or « la visibilité est un piège » (Foucault, 1993, p.234), car la « pleine lumière trahit davantage que
l'obscurité » (Uhl, 2002). Sur Internet, les individus acceptent de se soumettre au regard d’autrui, aux
commentaires du spectateur; ils se plient aux diktats de la tyrannie de l’opinion qui fait et défait aussi
bien leur réputation que leur e-réputation. Ainsi, en tentant de s’inscrire dans le monde virtuel par
l'exhibition de soi, l'individu s’expose de même au jugement continu des spectateurs, mais surtout à
toutes formes d’humiliations. Le spectateur, loin d’être passif, devient ici un acteur principal dans la
« mise à mort » de la réputation d’autrui.
Nous tenterons ici de montrer comment Internet a redéfini les manières de « regarder », en exposant
les individus aux risques d’humiliation et de détournement de leur image par les spectateurs.
AUBERT N. et Haroche C., Les tyrannies de la visibilité. Être visible pour exister?, 2011, Érès.
BARUS- MICHEL J., « Une société sur écrans », dans Les tyrannies de la visibilité. Être visible pour exister?, Aubert
N. et Haroche C. (Dir.), 2011, Érès, pp.27-37.
BAUDRILLARD J., Au-delà du vrai et du faux, ou le malin génie de l'image, dans Cahiers internationaux de
sociologie, vol. LXXXII, 1987.
BELHOMME L., Interview de Serge Tisseron. « L'identité et les liens transformés par les nouvelles technologies »,
dans Cahiers de psychologie clinique, 2010/2 (n° 35).
FOUCAULT M., Surveiller et punir. Naissance de la prison, 1993, Paris, Gallimard.
HAROCHE C., « L’invisibilité interdite », Les tyrannies de la visibilité. Être visible pour exister?, 2011, Érès, pp.77102.
HIRIGOYEN M-F., Le Harcèlement moral: la violence perverse au quotidien, 2000, Pocket.
PASQUIER D., « Pratiques d’Internet et pouvoir des apparences », Le Journal des psychologues, 2011/10, no :
293, pp.32-35.
SARTRE, Jean-Paul. L'Être et le Néant, Essai d'ontologie phénoménologique, 1943, Paris, Gallimard.
TISSERON S., « Intimité et extimité », Communications, no: 88, 2011/1, pp.83-91.
UHL M., « Intimité panoptique. Internet ou la communication absente. », Cahiers internationaux de sociologie,
Presses universitaires de France, 2002/1, no : 112, pp.151-168.
21
Julie Alev Dilmaç est Docteur en Sociologie (Université Paris Descartes-CERSES-CNRS). Elle est actuellement
« Assistant Professeur » à la Cyprus International University. Ses intérêts de recherches portent sur les
problèmes d’honneur et d’humiliation dans le monde contemporain. Elle est l’auteur de nombreuses publications
telles que “L'honneur : principe de résistance à la barbarie contemporaine”, in Barbaries Contemporaines, dir. by
Christiana Constantopoulou, L’Harmattan coll. Logiques Sociales, 2012, pp.83-99 ; “Les crimes d'honneurs en
Turquie : une vengeance familiale rationnelle “ in « Faire justice soi-même. Études sur la vengeance. » Presses
Universitaires de Rennes, 2010, pp.205-217.
[email protected]
Lingzi Ding (Université Paris 8, CEMTI)
La « haute personnalisation » de la télévision japonaise
La télévision d'autrefois était une diffusion broadcasting pour le plus de monde possible au même
moment. Telle a été la télévision de rue, qui diffusait dans les années 1950, dans trois ou quatre
quartiers métropolitains du Japon, des programmes sportifs grand public et ceux relatifs à des
événements impériaux. Au début des années 1980, les émissions de télévision ciblaient la famille
d'autant plus que chaque foyer japonais possédait son propre téléviseur. A cette époque, 70% des
Japonais estimaient que la télévision favorisait la vie de famille. A la fin de la décade suivante, suite à
l'intégration des fonctionnalités de la télévision dans les téléphones mobiles, la population a acquis la
possibilité de regarder individuellement les émissions. Entrant dans le 21e siècle, la numérisation a
permis un large éventail de capacités fonctionnelles combinées avec le contenu télévisuel. Les
téléspectateurs ont non seulement accès au visionnement individuel de la télévision, mais ils peuvent
aussi participer à la production de leur expérience télévisuelle grâce à des interactions avec les
émetteurs. Ainsi les programmes dont la fin est multiple (multi-ending), permettent de choisir entre
plusieurs fins d’un téléfilm (par exemple, Seventeen Killer, Fuji TV, 2013)7 ; et les services sous forme
de données transmises avec un contenu (datacasting) permettent d’afficher le profil d’un comédien en
regardant une émission. C'est ce qu'on pourrait appeler « la haute personnalisation de la télévision »,
qu’on continue d’expérimenter aujourd’hui en laboratoire en cherchant comment mobiliser la totalité des
cinq sens pour permettre aux téléspectateurs de vivre des expériences enrichies en lien avec leurs
propres installations (voir les études sur l’ergonomie virtuelle menées au laboratoire du professeur
Yasushi Ikei de l’Université Métropolitaine de Tokyo.)
Ma proposition vise à montrer comment cette haute personnalisation produit pour chaque
téléspectateur la perception de sa propre singularité tout en développant une tolérance élargie envers
les autres par reconnaissance de la différenciation de chacun. La télévision guide la formation des
cultures. Dans la haute personnalisation, les téléspectateurs, tout en étant individualisés, choisissent
d'adhérer à certains mêmes éléments proposés par la télévision et ainsi forment leur culture de groupe
qui les amène aux mêmes modes de vie, aux mêmes vocabulaires et à l'admiration des mêmes
personnalités emblématiques.
Lingzi DING est Doctorante du Centre d'études sur les médias, les technologies et l'internationalisation (CEMTI)
de l’Université de Paris 8 Vincennes-Saint-Denis. Elle étudie la problématique de l’harmonie sociale au Japon à
partir des émissions de variétés à la télévision japonaise.
[email protected]
Jan Distelmeyer (Université de Potsdam)
7
Seventeen Killer est un téléfilm produit par Fuji TV qui bénéficie de l’interactivité proposée par la plateforme Youtube
http://www.youtube.com/watch?v=GAkZNQt8uT4.
22
Interface mise-en-scène. Video websites and the aesthetics of disposability
Watching movies or TV material online by using video websites has changed the relationship of
spectators to the offered representations in many ways. The heterogeneous elements of this computer
based dispostif include technical, legal, aesthetical, and discursive (respectively ideological) aspects.
One of the theoretically underestimated components is the graphical user interface of these
representations: the designed conditions under which we choose filmic material to appear within given
frameworks. These interfaces should not be disregarded as just preparations of representations but are
of course representations themselves imbedded in certain traditions and media practices. As
representations they interact with the appearance of the filmic material that they allow, frame, and
shape. Since interfaces like those are fundamental in today’s usage of all sorts of computer based
media, I would like to introduce the term interface mise-en-scène to highlight the importance of
analyzing these special representations.
The dominant modus of providing filmic material as ready-to-hand content offered and staged by
popular websites like Youtube, Daylimotion, Veoh or Yahoo!Video structures a certain amount of
symbolically represented material. This interface mise-en-scène, that I would like to discuss as an
example of aesthetics of disposability, could be described as a gesture of wealth and richness
conveying a “power of control” related to all sorts of audiovisual material classified by taglines, genres,
categories, and other visual metadata. This complex paradigmatic gesture is very much related to other
computer based media representations and builds a strong contrast to the syntagmatic order of film. In
fact websites like Youtube merge two opposing logics and gestures within the same framework. My
paper will discuss this double-logic as well as hereby reflected promises of “the digital” and its relation to
current demands of competition.
Jan Distelmeyer is professor for History and Theory of Media in the cooperative program „European Media
Studies“ of the University of Applied Sciences Potsdam and the University of Potsdam. Research interests are
most notably the history and theory of film and of digital media, focusing especially on the correlation between
aesthetics and dispositif. Most recent book publications: Raumdeutung. Zur Wiederkehr des 3D-Films
(Interpretation of Space. The Comeback of the 3D-Film, 2012, together with Lisa Andergassen and Nora Johanna
Werdich), Das flexible Kino. Ästhetik und Dispositiv der DVD & Blu-ray (The Flexible Cinema. Aesthetics and
Dispositif of DVD & Blu-ray, 2012), Katastrophe und Kapitalismus. Phantasien des Untergangs (Catastrophe and
Capitalism. Phantasies of Destruction, 2013). Most recent international book-chapters: „Frame for Ambivalence:
Acting out Realism in Italian Neorealism and the Films of Christian Petzold“ (in: Jörg Sternagel et.al. (Ed..): Acting
and Performance in Moving Image Culture, 2012, „Film School in a Box: Information Imperative, Discs and
Knowledged-Based Society“, in: Anna Bertoli et.al (Ed.): Il cinema si impera? Can we learn cinema?, 2013) Since
2008 co-publisher of the CineGraph book series, since 2010 co-organizer of the „Film Heritage“-section at the
MAGIS International Film Studies Spring School, Gorizia.
[email protected]
Chantal Duchet (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
Le multitasking : le nouvel eldorado des chaînes télévisuelles
Avec la multiplication des écrans et la télévision connectée, un nouveau téléspectateur, lié ou non à la
génération digitale, est né en ce sens où la pratique du multitasking est devenue monnaie courante : il a
tendance à utiliser tous ses écrans en même temps : smarphone, tablette et/ou ordinateur, écran de
télévision. Cette aptitude au multitasking a été très rapidement prise en compte par les acteurs du
champ télévisuel, que ce soit au niveau des chaînes ou au niveau des producteurs. En effet, une étude
commanditée par Time Warner à Ipsos média en 2012 a même conclu que « se connecter à un autre
écran ne réduit pas pour autant l’intérêt pour le programme diffusé sur l’écran principal, au contraire
23
l’engagement est souvent renforcé ».
C’est pourquoi passer d’un écran à un autre serait devenu un atout pour les chaînes de télévision et les
producteurs l’ont fort bien compris puisqu’ils proposent des produits « 360° ». Les chaînes, elles, ont
intégré cette pratique dans leurs positionnements stratégiques afin de fidéliser leurs téléspectateurs (cf.
en particulier les chaînes historiques en France). Quant aux producteurs, ils pensent et créent des
produits adaptés au multitasking avec la prise en compte des réseaux sociaux (« twitter », « facebook
») et/ou la faculté des téléspectateurs à jouer à partir de la thématique du produit audiovisuel.
Est-ce un phénomène de mode ou au contraire un tournant déterminant dans la conception des
produits audiovisuels ? Est-ce que ce phénomène est exclusivement réservé à un genre particulier ?
Est-il plus utile aux annonceurs, aux chaînes ou aux producteurs ? Telles sont les questions auxquelles
cette communication devrait apporter quelques éléments de réponse
Chantal Duchet est Professeur au Département Cinéma et Audiovisuel (Paris 3) et a pour spécialité la
Télévision, les Smarphones et Tablettes (approches esthétiques comme économiques), et également concepteur
publicitaire. Ses recherches portent sur les relations et interactions entre la publicité, le film et la télévision, les
smarphones et les tablettes avec des approches sémiotique, esthétique et économique. Elle est l'auteur de
nombreux spots publicitaires, et articles et CDROM sur ces objets.
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Celine Ferjoux (Université Panthéon-Assas Paris 2, Intitut Français de Presse)
Corps à corps, quand le spectateur fusionne avec le spectacle (Danse avec les Stars)
Pour rendre compte d’un phénomène complexe comme l’expérience du spectateur des médias il est
possible d'examiner la situation particulière du dialogue qui se noue entre des corps, ceux qui
regardent et ceux présentés dans les images.
La pratique spectatorielle peut être conçue comme un échange sensoriel mis en scène, médiatisé,
par un appareillage technique, médiatique. L’analyse empirique des formats de programmes de
télévision rend ce phénomène apparent. Notre hypothèse consiste à mettre le focus sur la dimension
perceptive, non rationnelle, de la pratique spectatorielle induite par le format d’une émission de
téléréalité comme
« Danse avec les Stars ». En diffusant « Danse avec les Stars, le samedi soir, en direct, TF1fait
valser le téléspectateur. Le concept de « Danse avec les stars » affirme la volonté de montrer
des corps en mouvement, et d’émouvoir le spectateur de la télévision. Les conditions de réception
du programme, l’oeil du spectateur, sont inclues dans le format. Le programme engage le
téléspectateur dans son corps. Notre propos s’articule selon 3 axes :
(1) la mise en scène des corps dans le programme de téléréalité « Danse avec les Stars »
(2) l’engagement du spectateur
(3) le programme décliné sur le web : l’expression des émotions sur les réseaux sociaux.
Le programme sera analysé comme typique des formats de téléréalité1 : l’engagement du corps des
protagonistes (montrés dans des soins quotidiens) et celle du spectateur (promesse d’indiscrétion)
sont exacerbés. Cette analyse permettra de replacer la situation spectatorielle à un niveau assez
primaire sur une échelle qui irait de la pulsion scopique2 à une consommation intelligente et
pleinement rationnelle des émissions de télévision et plus largement des produits des industries
culturelles.
1 cf. JOST (2002).
2 cf. STIEGLER (2006).
Corpus
24
DANSE AVEC LES STARS, un format de programme : archives d’émissions de télévision (saison 2013, ex.
émission diffusée en direct le samedi 16 novembre 2013 ) et déclinaisons web (site TF1), dont écrans des
réseaux sociaux (Twitter).
BIANCHI Jean, GITLIN Todd, MEADEL Cécile, PAJON Patrick (et al.) (1990) L'invention du téléspectateur,
CNET, Paris, 1990, 120 p.
DAYAN Daniel, KATZ Elihu (1996) La Télévision cérémonielle. Paris, Presses Universitaires de France, (1996)
259 p.
DAYAN Daniel, « Raconter le Public », in MEADEL C. (dir.) (2009) La Réception, Paris, CNRS-Éditions.
DAYAN Daniel, « Le double corps du spectateur », in PROULX S. (dir.) (1998) Accusé de réception, Le
téléspectateur construit par les sciences sociales, Champs Visuels, L'Harmattan 1998, p.175-186.
DAYAN Daniel (1992) Les mystères de la réception, Le Débat, 71, 1992, p. 146‐162.
FISKE John, Hartley John (1989) Reading Television. Routledge, 2nd Revised edition, Septembre 2003, Coll.
New Accents, 200 p.
FISKE John (1987) Television Culture (Studies in Communication Series), Routledge, Dec 1987, 368 p.
GHEUDE Michel (1994) "La réunion invisible", dans VEYRAT MASSON, I., DAYAN, D., (éd.), "Espace public en
images", Hermès, 13‐14, CNRS, 1994, Paris
HALL Stuart (1994) "Codage/Décodage", In : Réseaux, 1994, volume 12 n°68, 18 p.
JOST François (2002) L’Empire du Loft, La Dispute, 153 p.
MACÉ Eric, MAIGRET Eric (2005) (dir.) Penser les médiacultures : Nouvelles pratiques et nouvelles approches
de la représenation du monde. Paris, INA / Armand Colin, nov. 2005, 186p.
MACÉ Eric "La télévision du pauvre : sociologie du public participant", in Dayan, D., éd., "A la recherche du
public", Hermès, 11‐12, CNRS, Paris, 1992
PROULX Serge (2006) " Les communautés virtuelles : ce qui fait le lien". In : Communautés virtuelles ‐ Penser et
agir en réseau. coll. Laboratoire de communautique appliquée, Presses universitaires de Laval, 2006, 361 p.
PROULX Serge (1998) (dir.) Accusé de réception, Le téléspectateur construit par les sciences sociales, Champs
Visuels, L'Harmattan 1998, 200 p.
> STIEGLER Bernard (2006). « La télécratie contre la démocratie » es formes de la médiation technique ». In:
Réseaux, n°60, juillet-aout 1993, p. 87-98.
Documentation – Pratique de la danse :
> « Danser » revue Terrain n°35, septembre 2000.
> DERRIDA Jacques & STIEGLER Bernard (1996) Echographies, Paris, Galilée.
Celine Ferjoux est chercheur associé, Centre d’analyse et de recherche interdisciplinaire sur les médias
(CARISM). Institut Français de Presse. Université Panthéon-Assas, Paris.
Recherche : "Discours d’innovation et médiations de la programmation. La télévision à l’heure
numérique." thèse de doctorat, 11/2011, sous la dir. F. Lambert, IFP, Université Panthéon-Assas
[email protected]
25
Samuel Gantier (Monteur, réalisateur, Université de Valenciennes, DeVisu)
Du genre documentaire au web-documentaire : concurrence des figures de l’utilisateur et
mutations spectatorielles
Depuis 2008, une série d’œuvres interactives regroupées sous l’appellation générique de webdocumentaire sont publiées de manière exponentielle sur le web francophone (Gantier, 2012). Le
spectacteur de documentaire interactif doit ainsi s’acculturer progressivement à la culture visuelle de
ces « écrits d’écrans » (Jeanneret, Souchier, 2005) qui mélangent les codes filmiques du genre
documentaire aux modes d’interactions des documents hypermédias (Balpe, 1990).
1
A partir d’une étude empirique du web-documentaire B4, fenêtres sur tour notre communication
questionne les instances d’énonciation et la posture spectatorielle induites par ce format émergent.
Afin de mieux appréhender les spécificités de cet espace « info- communicationnel », nous
formulons l’hypothèse que trois figures complémentaires et antagonistes du spectateur-interacteur
peuvent être identifiées :
2
Premièrement : un spectateur modèle imaginé par les concepteurs ;
3
Deuxièmement : un spectateur statistique modélisé par les traces d’usage laissées sur le web ;
4
Troisièmement : un spectateur empirique construit par une analyse de la réception.
Dans le sillage de la sociologie de l’innovation, une première partie de cette communication
5
questionnera le web-documentaire comme une « œuvre frontière » (Trompette, Vinck, 2009). Du
point de vue auctorial, il s’agit d’expliciter comment les usages présupposés de l’œuvre en devenir
impactent les décisions éditoriales et techniques qui jalonnent la carrière du web-documentaire.
6
Dans un deuxième temps, une analyse ergonomique et sémio-pragmatique confrontera les
usages prescrits par les concepteurs à la réalité empirique de l’expérience utilisateur. Il s’agit ici
d’expliciter le concept de « construit de sens » à partir des données perçues comme significatives.
Pour conclure, l’analyse comparative des trois niveaux d’utilisateur (modèle, statistique et empirique)
questionnera les métamorphoses d’une « lecture documentarisante » (Odin, 2000, 2011) de ces «
interface- films » (Di Crosta, 2009).
1 Web-‐documentaire réalisé par Jean-‐François Ribot, produit par France Télévisions-‐ Nouvelles écritures et Mosaique
films, 2012. URL http://www.francetv.fr/nouvelles-‐ecritures/banlieue-‐b4/ (consulté le 16/11/2013).
2 Ma double posture de monteur et de chercheur sur ce web-‐documentaire m’a permis de mener une
« observation participante » pendant les 6 mois de conception qui ont précédés la mise en ligne du web-‐
documentaire 2012.
26
3
Données métriques web mesurées par le service des audiences de France Télévisions sur la période juin 2012 -‐
juin 2013.
4
Un test de « l’expérience utilisateur » sera mené sur un panel de 12 spectateur-‐interacteurs en février 2014.
5
La notion « d’œuvre frontière » qualifie le web-‐documentaire comme un objet dont les spécifications sont suffi-
samment souples pour circuler dans des mondes sociaux hétérogènes - champ du cinéma documentaire versus
champ de l’ingénierie web - tout en étant assez qualifié pour incarner différentes valeurs professionnelles.
−Balpe, J-P., 1990, Hyperdocuments, Hypertextes, Hypermédias, Eyrolles.
−Bonaccorsi, J., 2013, « Approches sémiologiques du web », in : Manuel d’analyse du web en sciences
humaines et sociales, Armand Colin.
−Di Crosta M., 2009 , « L’interface film », in Nouveaux médias, nouveaux contenus, Delavaud, G.,
Ballarini, L. (dirs.), Apogée, p. 85-96.
−Eco U., 1989, Lector in Fabula, Grasset.
−Gantier S., 2012, « Le webdocumentaire, un format hypermédia innovant pour scénariser le réel ? », in
Journalisme en ligne, Degand A., Grevisse B. (dirs.), DeBoeck, p. 159-177.
−Gantier S., Bolka. L., 2011, « L’expérience immersive du web documentaire : études de cas et
pistes de réflexion », Les Cahiers du journalisme, n°22-23.
−Jeanneret, Y., Souchier, E., 2005. « L’énonciation éditoriale dans les écrits d’écran ».
Communication et langages 145, p.3-15.
−Kilborne, Y., 2008. « L’expérience documentaire: approche communicationnelle du cinéma de réalité
», Thèse de doctorat, Université de Paris 8.
−Odin, R., 2000. De la fiction, DeBoeck.
−Odin, R., 2011. Les espaces de communication : introduction à la sémio-pragmatique, Presses
universitaires de Grenoble.
−Rouquette, S., 2009. L’analyse des sites internet : une radiographie du cyberespace, INA, DeBoeck.
Samuel Gantier est réalisateur et monteur d'une trentaine de films « documentaires de création » pour la
télévision depuis une dizaine d’année (ARTE, France Télévisions, RTBF etc.). Depuis 2012, il travaille
comme consultant audiovisuel interactif et transmedia pour le fonds « Expériences Interactives » du pôle de
compétitivité Pictanovo (région Nord-‐ Pas de Calais). Il enseigne comme professionnel associé (PAST) à
l'Université de Valenciennes où il réalise une thèse de doctorant en Sciences de l'Information et de la
Communication au laboratoire DeVisu. Sa recherche interroge les processus info-‐ communicationnels dans
la conception et la réception de documentaires interactifs innovants.
[email protected]
27
Jonida Gashi (London Consortium/Birkbeck College, University of London)
The mobile spectator and the (non-)time of the work.
In museums and art galleries, where moving image artworks are indeed exhibited to the gaze of a
mobile spectator, looping has emerged as the device for coping with some of the key difficulties that
such a spectator poses for the display of the moving image. For instance, looping makes it possible for
the artwork to be “present” throughout the opening hours of the museum/gallery and for the visitor to
“see” the work and return to it during the same visit, just as they might in the case of, say, a painting.
However, the uncoupling of the time of the work and the time of the viewer, as well as the grouping of
different works in the same visual/auditory field, also means that the reception of moving image
artworks in contemporary exhibitions is marked by a problematic dialectic of attention and distraction.
While the productive aspects of this dialectic have not gone unnoticed, the concrete ways in which
contemporary moving image art can engage with it critically remain to be articulated. I will discuss Stan
Douglas’ film installation Inconsolable Memories (2005) as an example of how contemporary moving
image art can respond critically to the conditions of its reception in today’s art spaces. I will focus on the
temporal as opposed to the spatial dimension of Douglas’ work and thus of contemporary moving image
art’s relation to its conditions of reception. I will conclude by suggesting that implicit in the reception of
moving image artworks in today’s art spaces is the displacement of the moving image across different
screens/formats, etc.
Jonida Gashi recently completed her PhD at the London Consortium/Birkbeck College (University of London).
The title of her thesis was “Repetition and the Experience of Duration in Contemporary Moving Image Art.” She is
currently in the process of organizing an international conference titled “The Times of Art” that aims to address
some if not all of the key issues of temporality in contemporary moving image art. She also works as a curator,
editor, and translator from time to time.
[email protected]
Malcom Turvey, Hal Foster, Chrissie Iles, George Baker, Matthew Buckingham and Anthony McCall, ‘Round
Table: The Projected Image in Contemporary Art’, October, Vol. 104 (Spring, 2003), pp. 71-96.
Boris Groys, ‘Comrades of Time’, in Julieta Aranda, Brian Kuan Wood, Anton Vidokle (eds.), What is
Contemporary Art?, (Berlin and New York: Sternberg Press, 2010), pp. 22-39.
Peter Osborne, ‘Distracted Reception: Time, Art and Technoloy’, in Jessica Morgan and Gregor Muir (eds.), Time
Zones: Recent Film and Video, (London: Tate Publishing, 2004), pp. 66-75.
Anne Ring Petersen, ‘Attention and Distraction: On the Aesthetic Experience of Video Installation Art’,
http://www.riha-journal.org/articles/2010/ring-petersen-attention-and-distraction
André Gaudreault (Université de Montréal, Directeur du GRAFICS et de la revue
Cinémas, Conférencier invité)
Mutatis mutandis, le spectateur est un mutant !
andré[email protected]
Séverine Graff (Université de Lausanne)
Pratiques de consommation du « cinéma-vérité ». Télévision, salle de cinéma ou séance de
télévision collective ?
28
Primary (Drew Associates, 1960) et Chronique d’un été (Jean Rouch et Edgar Morin, 1960), les
deux œuvres emblématiques du « cinéma-vérité », résultent chacune d’une volonté de
renouveler le dispositif de consommation du film. Robert Drew cherche à bouleverser sur un plan
technique, énonciatif et journalistique les règles du reportage pour la télévision. A la même
période en France, Edgar Morin pose les bases du « cinéma-vérité » – pensé comme une
profonde transformation du rapport entre spectateur et film – et concrétise sa théorie en réalisant
avec Rouch leur fameux Chronique d’un été. Si ces deux documentaires sont des réussites
techniques et artistiques, la diffusion de Primary à la télévision américaine et celle de Chronique
d’un été en salles de cinéma sont des échecs cuisants que les commentateurs d’époque
expliquent par une inéquation entre le film et son medium de diffusion (les reportages de la
Drew Associates seraient trop brouillons pour retenir l’attention du public, il est reproché à Rouch
et Morin de demander au spectateur de payer pour voir à l’écran un individu qui lui ressemble).
L’équipe américaine va alors gagner la France et expérimenter la diffusion en salle de cinéma,
alors que Rouch se tourne vers des dispositifs de consommation alternatifs, comme les séances de
télévision collective.
Lors de son émergence au début des années 1960, le « cinéma-vérité » (que l’on appellera
plus tard « cinéma direct ») n’est pas circonscrit à un medium. En conséquence, la variabilité
des modes de diffusion et de consommation expérimentés durant cette période offre un passionnant
champ d’investigation pour interroger les rapports entre film, écran et spectateur. Ma
communication se propose d’appréhender, dans une perspective historique, la question des
dispositifs de consommation du « film-vérité ».
Séverine Graff e s t Maître-assistante à l’Université de Lausanne, elle a soutenu en 2013 une thèse de
doctorat en histoire du cinéma sous la direction du professeur Olivier Lugon. Elle est l'auteur de Cinémavérité, films et controverses aux Presses Universitaires de Rennes (janvier 2014), a publié plusieurs
articles sur l’avènement des techniques légères et synchrones dans les années 1960, sur les controverses
autour du « cinéma-vérité », et plus généralement sur la réception critique du cinéma documentaire.
Séverine Graff a également dirigé en 2008 un numéro de la revue Décadrages (Cinéma et migration)
et, en 2011, le premier volume scientifique consacré à Mario Ruspoli (Mario Ruspoli et le cinéma direct).
[email protected]
André Gunthert (EHESS, Culture Visuelle)
Le visionnage "binge", de l'oeuvre cinématographique à la bulle fictionnelle
Favorisés par les modèles de diffusion télévisuels, la formation de collections et la disponibilité en ligne
des œuvres audiovisuelles, de nouveaux comportements de consommation se développent,
notamment le visionnage à domicile de plusieurs films ou d'une saison entière à la suite. Cette
consommation intensive, dite "binge", témoigne d'une évolution majeure dans le rapport aux modèles
cinématographiques, restructurés par la réception.
La disponibilité simultanée des films par le biais du catalogue interroge l'économie de la rareté sur
laquelle s'est construite la passion du cinéma au XXe siècle. Imposée par les comportements des
consommateurs, le visionnage "binge" suggère de passer d'une esthétique de l'œuvre à une esthétique
de la réception, et d'une cinégénie décrite en termes stylistiques à une psychologie de la réception qui
fait intervenir de nouveaux paramètres, comme l'intensité de l'expérience, le caractère fédérateur ou le
plaisir ressenti.
Cette pratique n'est-elle qu'une sorte de fuite en avant dans un refuge fictionnel ? Si cette hypothèse
mérite d'être examinée, la comparaison avec les pratiques traditionnelles de consommation du livre
montre que la disponibilité simultanée n'est pas un facteur à considérer isolément d'une écologie
culturelle plus dense, qui met en jeu un système d'apprentissage et l'élaboration de critères de choix.
29
Plus encore que l'évolution des dispositifs techniques, la création d'une architecture complexe de
catégories sur une plate-forme comme Netflix illustre l'émergence d'un nouveau système de goûts,
annonciateur d'une recomposition par l'usager de l'ensemble des consommations culturelles.
André Gunthert est enseignant-chercheur, spécialiste des cultures visuelles et des cultures numériques. Maître
de conférences à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), il a fondé en 1996 et dirige la revue
scientifique Etudes photographiques.
[email protected]
Jacques Guyot (Université Paris 8, CEMTI)
L'art vidéo et la télévision : retour sur des conceptions antagonistes de l'écran"
L'avènement de la télévision comme média de masse à partir des années 50 a immédiatement suscité
chez les artistes des réactions de défiance, mais aussi généré de nombreuses expérimentations sur les
potentialités créatrices de l'objet télévision. Des collectifs comme Fluxus ont interrogé la notion d'écran,
le détournant de son usage prescrit par les chaînes commerciales, l'envisageant comme un espace
multiple mis en scène dans des installations proposant simultanément plusieurs points de vue. Dans ce
cadre, les dispositifs écraniques étaient irréductibles à la télévision, constituant ainsi un domaine d'expression à part entière capable de produire des objets artistiques ou communicationnels inédits dans
une longue lignée allant de Nam June Païk ou Wolf Vostell jusqu'à Agnès Varda en passant par Catherine Ikam.
Jacques Guyot est professeur des universités, membre du Centre d'études sur les médias, les technologies et
l'internationalisation (Cemti).
[email protected]
Aline Hartemann (Centre Marc Bloch, Berlin et EHESS, Paris)
Délinéarisation et temporalité : la question des carrefours de programmes, dans un contexte
médiatique franco–allemand. Quel impact sur le (télé)spectateur ?
La chaîne de télévision franco-allemande ARTE est bien connue, dans le paysage médiatique
européen, pour faire partie des médias particulièrement innovants en termes de production et de
diffusion en ligne, de contenus spécifiquement conçus pour être retransmis sur Internet, comme des
web-séries ou des web-documentaires (citons, par exemple, la « série policière cross média
européenne » The Spiral). Elle est également reconnue pour la richesse de sa télévision dite « de
rattrapage ». Dénommée « ARTE + 7 », cette plate-forme en ligne offre au téléspectateur des
émissions ou des films qui ont été diffusés, dans un premier temps, à l’antenne.
La diffusion de ces différents contenus, sur le web, est au principe du phénomène de délinéarisation : le
téléspectateur peut voir, quels que soient le jour de la semaine ou l’heure du jour, un programme, et la
réception par le téléspectateur ou l’internaute se fait, pour ainsi dire, en dehors du contexte télévisuel
habituel, c’est à dire dans une temporalité différente, en dehors de la grille de programmes, structurée
par des cases correspondant à des plages horaires bien précises. Une question inédite se pose alors :
qu’en est-il du carrefour de programmes, qui structure traditionnellement la grille de programmes des
chaînes de télévision ? Le carrefour des programmes est un point stratégique qui définit notamment la
programmation et l’horaire du prime-time, et qui a des implications en termes d’audience, de vente
d’espace publicitaire aux annonceurs, ou encore de consommation par les téléspectateurs.
30
Le sujet est particulièrement épineux pour ARTE, dans la mesure où la structure de son public est
particulière : les téléspectateurs français et allemands n’ont pas les mêmes habitudes télévisuelles et le
prime-time, dans les deux pays, ne se situe pas au même moment dans la soirée. Il est aux alentours
de 20H15 outre-Rhin, et vers 20H50 en France. Comment la chaîne gère-t-elle la question de la
délinéarisation des programmes, dans ce contexte binational et quel est l’impact de cette gestion sur le
public ?
Aline Hartemann est diplômée de Science-Po Paris, doctorante en sciences sociales à l’EHESS et au
Centre Marc Bloch de Berlin, elle termine une thèse de doctorat sous la direction de Daniel Dayan
(CNRS-CEMS), sur la coopération franco-allemande dans la chaîne de télévision ARTE, et plus
particulièrement sur l’invention d’un journalisme.
[email protected]
François Jost (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, CEISME)
Faut-il en finir avec la notion d’identification ?
La notion d’identification a été récemment contestée par des nombreux théoriciens qui travaillent sur les
séries télévisuelles. Il est vrai qu’elle reste mal définie et n’explique pas toujours grand-chose. Pour au tant faut-il abandonner la réflexion sur le lien qui attache les spectateurs au personnage? On se doute
que poser la question, c’est répondre par la négative. Réfutant les explications qui privilégient la relation
à la fiction plutôt qu’aux personnages, cette conférence se donne pour tâche de mettre au jour les diffé rentes façons dont les films, puis les séries, requièrent la participation spectatorielle et nous attachent à
eux, au travers notamment des concepts d’empathie et de sympathie.
[email protected]
Patricia Jullia (Université de Montpellier 3, ITIC)
Spectateur, convergence & mutations spectatorielles
Convergence, nomadisme, hybridation
Un document audiovisuel peut être consulté sur la télévision, sur l’ordinateur mais aussi sur un
téléphone mobile, sur une tablette arrimée à l’arrière de la voiture et bientôt sur la montre connectée…
La convergence (Jenkins, 2013) des techniques aboutit donc à un premier brouillage du concept de
réception. À partir d’une réflexion historique sur le concept de réception (Jauss 1978, Hoggart 1970) et
d’une analyse phénoménologique des usages émergents (Vial, 2013) nous définirons les spécificités
des situations de réception contemporaines et le brouillage conceptuel que cela engendre (Jullia, 2002).
Genre, forme et participation
Le genre afférent aux productions audiovisuelles (Jost, 1997) sera notre second outil d’investigation
pour réduire la complexité à l’œuvre actuellement. Nous tenterons de typifier les genres audiovisuels
(Charaudeau, 1997) en les mettant en confrontation à la possibilité interactionnelle qu’ils offrent et nous
définirons des types interactionnels.
Le spectateur omniprésent : devant, derrière et sur l’écran
La troisième partie de notre propos sera de montrer l’irruption du spectateur dans la production
télévisuelle tant au niveau de la télévision classique que sur le Web ; les représentations sociales à
l’œuvre dans ce processus seront aussi analysées à ce stade.
Reconnaissance, identité ou comment entrer en monstration
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Le spectateur se montre, se met en « visibilité » sur l’écran dans des stratégies multiples, individuelles
ou collectives. Cette monstration est alors un processus identitaire sous-tendu par des représentations
sociales fortes.
À partir des théories de la reconnaissance, nous poserons l’hypothèse que les représentations sociales
opèrent un double mouvement : elles conduisent à l’appropriation de la production médiatique comme
elles formatent la mise en visibilité d’acteurs en quête de reconnaissance via les dispositifs
médiatiques.
Patricia Jullia est Maitre de Conférences en Sciences de l’information et de la communication depuis 2004 à
l’Université Montpellier3 – ITIC . Ancienne monteuse vidéo. Recherche sur les situations d’usage des Tic dans
les pratiques quotidiennes et la production participative de contenus, la communiacton sociale, les méthodes
qualitatives.
[email protected]
Bibliographie
Casetti, F., & Odin, R. (1990). De la paléo- à la néo-télévision. Communications, 51(1), 9-26.
Charaudeau, (1997) P. Les conditions d’une typologie des genres télévisuels d’information. Réseaux, n°81
Certeau, M. de. (2008). L’invention du quotidien arts de faire. St Amand folio essais.
Hoggart, R., Garcias, J.-C., Garcias, F., & Passeron, J.-C. (1970). La culture du pauvre étude sur le style de vie
des classes populaires en Angleterre. Le sens commun. Paris: Éd. de Minuit.
Honneth, A. (2004). Visibilité et invisibilité. Sur l’épistémologie de la « reconnaissance ». Revue du MAUSS,
23(1), 137.10.3917
Jost, F. La promesse des genres. Réseaux n°81. 1997.
Odin, R. (1995). Le film de famille usage privé, usage public. Paris: Méridiens Klincksieck.
Odin, R. (1999). La question de l’amateur. Communications, (68). Pp 47-89.
Petit, V., & Colin, L. (2009). La Vidéo Participative : essai de cadrage du concept. Sociologies, Expériences de
recherche. Consulté de http://sociologies.revues.org/index2924.html
Amandine Kervella (Université Lille 3, GERIICO) et Elodie Kredens (Université de
Savoie, LLS)
La posture spectatorielle du jeune téléspectateur à l’heure du transmedia
Cette communication s’inscrit dans l’axe 1. Elle vise à répondre, en deux temps, à la question suivante :
pour un jeune, aujourd’hui, qu’est-ce qu’être un téléspectateur ?
Il s’agira tout d’abord de proposer un état des lieux de la pratique télévisuelle des jeunes aujourd’hui.
Alors que la « mort de la télévision » est questionnée voire annoncée depuis des années (Missika,
Moeglin, Beauscart et al. etc.), qu’en est-il réellement, pour ce public spécifique que sont les jeunes ?
Regardent-ils toujours la télévision ? Sur quels écrans et de quelle manière ? Un bilan de leur
équipement permettra par ailleurs de questionner la consommation mobile de la télévision et de voir
comment se reconfigure la « culture de chambre » (Glévarec).
La question des contenus sera également abordée. Aujourd’hui, quels sont leurs programmes de
prédilection ? Face à la pratique généralisée de visionnage de vidéos issues du web, quelle est la part
que représente la télévision dans leur consommation audiovisuelle globale ?
Nous interrogerons ensuite l’univers de représentation que se forgent les jeunes autour de la télévision
puisqu’elle ne se résume plus au traditionnel poste de télévision trônant dans le salon. Démultipliée
dans l’espace avec les multi-écrans, la télévision l’est aussi aujourd’hui dans le temps avec les
plateformes de rattrapage proposées par les chaînes. Comment les jeunes la définissent-elle, et
comment se définissent-ils vis-à-vis d’elle. Se sentent-ils toujours faire partie d’un public ? On
interrogera ainsi leur identité de téléspectateur.
32
L’ensemble des réponses apportées à l’occasion de cette communication proviendra des résultats de
l’étude « JNT : Jeunes, numérique et télévision ». Financée par Bonus Qualité Recherche et
subventions régionales, elle consiste en une enquête quantitative réalisée à la fin 2013 auprès de 3500
jeunes âgés de 13 à 25 ans (en région Nord-Pas-de-Calais et Rhône-Alpes) couplée à une enquête
qualitative par entretiens semi-directifs menés sur une partie de cet échantillon.
Beauscart J.S., Beauvisage T., Maillard S., (2012), « La fin de la télévision ? Recomposition et synchronisation
des audiences de la télévision de rattrapage », Réseaux 175, pp. 43-82p
Glévarec H., (2010), La culture de chambre, Question de culture (DEPS)
Missika J.L., (2006), La Fin de la télévision, Parils, Seuil
Mœglin P., Tremblay G. (sous la dir.), (2005) "L'avenir de la télévision généraliste", Paris, L'Harmattan
Amandine Kervella est Maître de Conférences à l’ Université Lille 3, Laboratoire Geriico
Elodie Kredens est Maître de Conférences à l’ Université de Savoie, Laboratoire LLS
[email protected]
[email protected]
Dominika Kopeć (Université de Varsovie)
Performance on the Internet. Case Study of Michael Jackson’s Death
The aim of the presentation is to define and identify characteristics of a theatrical performance on the
Internet. I’ll attempt to prove that the “everyday” performance on the Internet may be seen as a
theatrical performance. I’ll provide a detailed analysis of a case study on Michael Jackson’s death and
grief, presenting it as an example of a social phenomenon which can be seen this way. I’ll prove that the
mediatized performances not only represent the “real” performances, but whilst remaining in a tight
relationship to the latter, become autonomous. In my case study I’ll provide a detailed examination of
several factors which demonstrate similarities to a stage performance. Some of the most significant
factors are the space and time limits and liveness. However, the most important feature remains as the
role of spectator who becomes rather a participant or even actor, author, or director of the performance.
I will also present a model of the reception process, showing how the spectator or participant
determines the performance. At the same time I’ll give several examples, presenting the similarities of
the spectator’s role in an Internet performance and the more or less traditional performances on stage.
Dominika Kopeć (M.A.) – PhD candidate in Science of Culture, Institute of Polish Culture, Faculty of Polish
Studies, University of Warsaw
[email protected]
Barbara Laborde (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
Sports et vertus du virtuel : animations 3D, georacing et diffusions multi-écrans des
retransmissions sportives
Cette proposition de communication propose de sortir du corpus finalement limité des œuvres
fictionnelles écrites pour la télévision et/ou pour le web, pour interroger les enjeux esthétiques et
pragmatiques des mises en scène télévisuelles de retransmissions sportives utilisant les animations en
3D et plus spécifiquement le « georacing » (suivi et visualisation en 3D et en live des compétitions
33
sportives) utilisés récemment sur CANAL+, SPORT+ et France télévision. La modélisation en 3D des
sportifs et de leur position dans la course (Tour de France 2012, Vendée Globe, rallye de France WRC)
est en effet à l’origine d’actes discursifs et d’expériences spectatorielles inédits. D’un point de vue
esthétique, il s’agira de s’interroger sur la fragmentation de l’image télévisuelle que le georacing
occasionne, la technique étant jusqu’alors, sur ce type d’écran, principalement utilisée en « doublon »
de l’image en prise de vue réelle, dans une perspective informationnelle ou scénaristique aux contenus
sémantiques divers, enrichie par un contexte de réception inédit de l’image sportive. En effet, il s’agira
d’envisager les différentes expériences spectatorielles rendues possibles par le dispositif, puisque ces
images dématérialisées qui échappent aux difficultés de transmission et de captation de la prise de vue
réelle autorisent une migration entre des plates-formes de diffusion variées (web TV, grands écrans,
portails Internet, tablettes et smartphones …), et permettent d’attendre du spectateur qu’il soit aussi
virtuellement producteur de contenus (le succès du jeu en ligne VirtualRegatta qui propose aux
internautes de participer au Vendée Globe en direct avec les vrais compétiteurs sera particulièrement
étudié). Plus généralement, c’est le rapport ontologique de la télévision et des téléspectateurs au réel et
au direct qui se trouve ici réinterrogé, dans une dynamique globale de l’histoire de la télévision qui
confirme que le sport est, depuis les débuts du medium, un des grands pourvoyeurs d’innovations
techniques qui s’accompagnent immanquablement de variations des formes télévisuelles et des usages
spectatoriels.
Barbara Laborde est maître de conférences à l’université Sorbonne-Nouvelle, dans le département Cinéma et
audiovisuel. Qualifiée en Sciences de l’Information et de la Communication, elle travaille sur la télévision et les
nouveaux médias, les émissions de flux et les émissions de stock, dont les séries télévisées. Ses recherches se
placent dans une perspective culturelle et communicationnelle et son approche est sémiologique, esthétique,
technique, historique et pragmatique.
2013 : « France/RFA 82, France/Italie 2006, lectures pragmatiques de fictions votives » in Dispositifs d’écriture,
spectacles sportifs, revue « Questions de Communication », série Acte 18, sous la direction de Jean-François
Diana
« Présidentielle 2012 : quand la campagne présidentielle s’invite au Grand Journal de Canal+ », revue Télévision,
n°4 : Télévision et appel au divertissement, sous la direction de François Jost.
[email protected]
Thierry Lancien (Université de Bordeaux 3, MICA)
Le spectateur fragmenté
Pour tenter de comprendre comment la multiplication des écrans et la diversification des contenus qui y
circulent affectent les postures spectatorielles, nous proposerons de partir d’une classification de ces
contenus.
En distinguant des contenus nomades, des contenus hybrides et des contenus évolutifs, nous
examinerons comment ceux ci sont ou non affectés par les différents dispositifs écraniques et dans
quelle mesure ils induisent des relations spectatorielles spécifiques.
Dans le cas des images nomades comme celles du cinéma qui peuvent passer dans leur intégralité
d’un écran à un autre, nous montrerons qu’elles sont fortement affectées par certains dispositifs comme
celui de l’ordinateur (même si le phénomène n’est pas entièrement nouveau comme le montre
l’exemple du magnétoscope à partir des années 80) . Nous verrons alors comment la relation que le
spectateur entretient avec elles soulève des questions d’énonciation, d’esthétique et de fragmentation
de l’œuvre.
En ce qui concerne les images hybrides, celles issues du cinéma ou de la télévision et qui se
transforment au contact du web et de ses interfaces (sites de Daily Motion, de Utube, de cinéma et de
télévision), nous ferons l’hypothèse qu’elles introduisent le spectateur dans un nouveau contexte
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sémiotique et qu’elles déplacent fortement sa réception du côté de la communication (partages,
commentaires autour des contenus).
Enfin du côté des contenus évolutifs et notamment du transmedia qui présente d’ailleurs la particularité
de mettre en relation plusieurs écrans, nous avancerons les hypothèses suivantes. Le spectateur nous
semble alors amené à passer d’une réception classique à l’interaction (même s’il faut être très prudent
par rapport à cette notion), de la médiation à l’automédiation, de la consultation à la production et du
déchiffrement d’un contenu singulier à une compétence trans ou intermédiatique.
C’est peut être alors un régime de fragmentation qui affecte les contenus autant que l’activité de
réception.
Thierry Lancien est professeur émérite en Sciences de l’information et de la communication à l’Université de
Bordeaux 3 et Membre du laboratoire MICA.
DOMAINES de RECHERCHE
Sémiologie de l’image et sémiotique des médias (notamment Télévision, Médias numériques et mutations de l’information) Intermédialité Transnationalisation de l’information télévisée, réception interculturelle
LANCIEN Th., (dir), Ecrans et médias, Revue MEI, n°34, mars 2012
CATOIR M.J., LANCIEN Th., Multiplication des écrans et relations aux médias : de l’écran d’ordinateur à celui du
smartphone in Ecrans et médias, Revue MEI, n°34, mars 2012
LANCIEN Th ., Multiplication des écrans, images et postures spectatorielles, in Beylot, Le Corff, Marie (dir) Les
images en question, Cinéma, télévision, nouvelles images : les voies de la recherche, Colloque Affecav 2008,
PUB, 2011
BAETANS J, JEANNERET Y, LANCIEN Th, PAYEUR A, Entretien. Littérature et communication in PAYEUR A
(dir) Littérature et communication : la question des intertextes, MEI n°33, mars 2011
LANCIEN Th., Le journal télévisé. De l’événement à sa représentation. Bordeaux. PUB. 2011
GOLIOT LETE A, JOLY M, LANCIEN Th, Le MEE I, VANOYE F., Dictionnaire de l’image, Vuibert, juillet 2006
DELAVAUD G, LANCIEN Th, (dir) D’un média l’autre. Généalogie et identité des médias. Médiamorphoses,
n°16, INA, A.Colin, avril 2006
[email protected]
Christophe Lenoir (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
La télévision braconnière. La part du spectateur dans la télévision sociale
On a pu parler d’un téléspectateur « braconnier », émancipé, capable de naviguer entre les
programmations que les chaînes voudraient lui imposer, pour construire sa propre stratégie de lecture.
Des études de terrain ont pu également montrer l’importance des lectures oppositionnelles de la
télévision. De la même façon, les réseaux sociaux renverseraient le schéma de Lasswell : des leaders
d’opinion scrutent les réseaux, y débusquent des programmes ou des images qui ne leurs sont en rien
destinées, mais qu’ils relaieront auprès de leur propre communauté, pour, au nom de la défense de
croyances ou de tradition, l’amener à manifester physiquement son désaccord.
Si la fonction de la télévision est donc de pouvoir en parler, et ainsi de socialiser, les réseaux sociaux
prolongent et démultiplient ces interactions. Or, les audiences, l’artefact qui permet de qualifier et
quantifier les spectateurs, risqueraient ainsi de se « désagréger » : comment vendre un « temps de
cerveau disponible », maintenant qu’il devient évident que le spectateur fait tout un tas d’autres
choses ?
La réponse passe par la mise en avant d’une « télévision sociale », les chaînes anticipent ou se
réinscrivent dans ces espaces d’interaction, pour tenter de « ré-agréger » l’audience. Dans un rapport
prospectif de février 2013, le CSA pointe que 62% des individus utilisent au moins une fois par semaine
les médias sociaux en regardant la télévision, et que 40% d'entre eux discutent de ce qu'ils regardent
sur les réseaux sociaux. Il souligne « une dilution de l’attention du téléspectateur ». Mais en même
temps, il précise qu’il devient possible « de mesurer plus finement les réactions des téléspectateurs au
35
cours du programme, au-delà de leurs simples arrivées et départs retracés par les audiences
télévisuelles ».
C’est pourquoi TF1 et Canal Plus ont signé en octobre 2013 des accords avec Facebook et Twitter, leur
permettant de disposer de ces données. Dans le même temps, TF1 peut diffuser directement ses
programmes sur le réseau social. Les éditeurs réclament donc une maîtrise des droits de diffusion sur
tous les écrans, ce qui peut aller à l’encontre des règles contractuelles par lesquelles un auteur cédait
sur une oeuvre des droits d’exploitation limités.
La télévision deviendrait ainsi spectatrice de son audience, ré-inversant le panoptique inversé, les
programmes étant des sortes d’appâts, déposées dans des pièges, dont on observera le découpage et
le partage par les réseaunautes. Ainsi devenue braconnière, la télévision se rêve même contrebandière
des données recueillies qui pourraient être monétisées.
Quelles seraient les conséquences de ces stratégies sur la définition réciproque des auteurs, des
oeuvres et des spectateurs ?
Christophe Lenoir, docteur en études cinématographiques et audiovisuelles, chercheur associé à l’Ircav.
S’intéresse à l’articulation entre enjeux économiques et politiques de l’audiovisuel, et types de programmes
produits et diffusés. Pour ce faire, étudie les corpus juridiques et réglementaires pour comprendre les définitions
du spectateur qu’ils sous-entendent.
christophe.lenoir@univ-paris3
Laurence Leveneur (Université Toulouse 1 Capitole, CEISME)
Les jeux télévisés face à la convergence numérique : de l’écran à l’interface ludique ?
L’histoire des jeux télévisés a montré la précocité des formules fondées sur les dons d’observation et
l’attention visuelle des téléspectateurs (Leveneur, 2005). Certains de ces programmes, en proposant au
téléspectateur de jouer avec les images et la télévision, questionnent la spécificité du dispositif
télévisuel et tentent de transformer l’écran même du récepteur en une véritable interface ludique avec
laquelle ce dernier est convié à jouer (Leveneur, 2006)
Avec la convergence des écrans (télévision, téléphonie mobile, web dynamique), les jeux télévisés
peuvent, au même titre que d’autres genres télévisuels, renforcer la participation des téléspectateurs
aux épreuves proposées de diverses façons. Ainsi, grâce à un système de QR Code, ils tentaient
répondre aux questions posées par Julien Courbet lors de la diffusion de l’émission Seriez-vous un bon
expert ? sur France 2 (2011-2013), ou encore, via une application dédiée sur Internet 8, cherchaient les
indices liées à un épisode spécial des Petits Meurtres d’Agatha Christie (France 2, avril 2013), tout en
échangeant leurs impressions avec les autres internautes sur Twitter et Facebook.
La convergence numérique semble donc offrir de nouvelles possibilités techniques qui permettent aux
producteurs compenser le manque d’interactivité inhérent au petit écran. Mais dans quelle mesure ces
expérimentations changent-elles le positionnement du téléspectateur-joueur ? L’attitude ludique de ce
dernier change- t’elle fondamentalement avec le web dynamique et la convergence des écrans ? Enfin
ces innovations techniques permettent-elles réellement de faire du petit écran un « dispositif
interactif » ?
Nous souhaiterions dans cette communication tenter de répondre à ces questions grâce une analyse
diachronique des différents procédés utilisés dans les jeux télévisés français pour faire jouer les
téléspectateurs et ce, jusqu’au développement du web dynamique et de la téléphonie mobile. A l’aune
de cette histoire, et à travers l’analyse sémiologique et pragmatique de plusieurs formules innovantes
du genre, ainsi que quelques observations participantes, nous interrogerons les changements de
8
Un reportage consacré à cette enquête interactive est disponible sur le site web de Viméo : http://vimeo.com/63338998
36
positionnements induits chez les téléspectateurs-joueurs par la mise en place des nouveaux dispositifs
numériques désormais associés au petit écran.
Bonaccorsi, Julia (2013), « Approches sémiologiques du web », (p.125-146), in Barats, Christine (dir.), Manuel
d’analyse du web, Paris : Armand Colin.
Cardon Dominique (2010), La démocratie Internet. Promesses et limites. Paris : Seuil, coll. « La République des
idées ».
Jost, François (2011) « Où va la télévision ? De l’influence de la télévision numérique sur les programmes et la
programmation. » (p.23-37), in Delavaud, Gilles (Dir.), Permanences de la télévision, Paris : Editions Apogée.
Jouet, Josiane, Le Caroff, Coralie (2013) « L’observation ethnographique en ligne », (p.147-165) in Barats,
Christine (dir.), Manuel d’analyse du web, Paris : Armand Colin.
Lescure, Pierre (2013) « Contribution aux politiques culturelles à l’ère numérique », Mission « Acte II de
l’exception culturelle », Mai 2013.
Plancade, Jean-Pierre (2013), Rapport d’information fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et
de la communication par le groupe de travail sur les relations entre les producteurs audiovisuels et les éditeurs
des services de télévision, Sénat, 30 mai 2013.
Rouquette, Sébastien (2009), L’analyse des sites internet. Une radiographie du cyberespace. Paris, INA/De
Boeck.
Laurence Leveneur est maître de conférences en Sciences de l’Information et de la Communication à
l’Université de Toulouse 1 et à l’IUT de Rodez. Membre de l’IDETCOM (Institut du Droit, de l’Espace, des
Territoires et de la Communication) (Université de Toulouse 1 Capitole) et membre associé du CEISME (Centré
d’Etudes sur les Images et les Sons médiatiques (Sorbonne Nouvelle Paris 3), elle a publié plusieurs articles
portant notamment sur les jeux et les divertissements télévisuels et les stratégies des marques télévisuelles sur
les réseaux socio-numériques parmi lesquels :
« Du télé-viseur au téléspectateur. Quand la télévision joue avec ceux qui la regardent », Questions de
Communication n°10, 2006, Rubrique « Notes de recherche », pp. 333-348.
Laurence Leveneur, Les travestissements du jeu télévisé [1950-2008], Paris, Presses de la Sorbonne Nouvelle,
octobre 2009, 197p.
Laurence Leveneur, « Médiation audiovisuelle et jeux télévisés. L’attitude ludique du téléspectateur", Actes des
journées d'études "Médiations médiatiques et espace public: construction de l'opinion et cohésion sociale, revue
ESSACHESS, 18 et 19 novembre 2010, pp. 46-66.
Laurence Leveneur, « Existe-t-il un service public de l’audiovisuel en ligne ? Le cas de France 2 », in Benoît
Lafon (dir.) Les services publics de radio-télévision à l’orée du XXIe siècle. Conceptions, programmations,
nouvelles utilisations, revue Enjeux de l’information et de la communication (proposition acceptée, publication
prévue pour le dernier trimestre 2013)
[email protected]
Marlène Loicq et Florence Rio (Université de Rouen, GRHIS) Florence Rio
(Université Lille 3, GERIICO)
L’expérience transmédiatique des jeunes : circulation et production
Cette communication s’inscrit dans l’axe 2 de ce colloque et se propose de réfléchir à l’émergence des
pratiques liées aux migrations de contenus sur différentes plateformes de diffusion. Dans le cadre d’une
recherche financée (BQR et subventions régionales) intitulée « JNT : Jeunes, Numériques et
Télévision » menée dans deux régions de France, il s’agira de s’intéresser particulièrement au public
« jeune ». A partir des résultats quantitatifs de l’enquête réalisée auprès de 3500 jeunes âgés de 12 à
25 ans, il s’agira de considérer, d’une part, les pratiques multi-écrans, et de mesurer, d’autre part,
l’impact de la circulation et de l’éparpillement des contenus à l’heure de la culture de la convergence.
Quels sont les types de participation et les degrés d’interactivité de ces publics avec les contenus
37
médiatiques actuels ? Circulent-t-ils d’un écran à l’autre ? Quelles nouvelles expériences de
visionnement se dessinent ?
Ces questionnements seront approfondis par les premiers résultats de la phase qualitative de cette
étude qui permettra également de cerner plus précisément les leviers d’engagement de ces publics
actifs. A partir des informations recueillies dans le cadre d’entretiens semi-directifs, nous réfléchirons à
l’aptitude des jeunes publics au transfert médiatique, et notamment à la pratique individuelle de la
production à laquelle invitent/contraignent de nombreux dispositifs. L’expérience médiatique n’est-elle
désormais « complète » et/ou « achevée » que par la pratique du multi-écran ? La production participet-elle de cette expérience ?
De la pratique à l’usage, entre circulation et production, il s’agira, en somme, d’interroger ici les
mutations de ces « jeunes » spectateurs, dans le chaînage transmédiatique qui leur est aujourd’hui
souvent proposé.
Marlène LOICQ est post-doctorante à l’Université de Rouen sur le programme ANR Translit portant sur les
phénomènes de convergence des littératies médiatiques, informationnelles et numériques (projet ANR-12-CULT0004-01 : programme métamorphoses des sociétés, « émergences et évolution des cultures et des phénomènes
culturels »). Elle est docteure en sciences de l’information et de la communication de l’Université Paris 3
Sorbonne Nouvelle et Ph. D en communication publique de l’Université Laval au Québec. Ses travaux portent sur
les pratiques médiatiques des jeunes, l’éducation aux médias et l’interculturalité. Elle a écrit récemment les
articles- « Être public et faire public. La représentation des publics et des conditions de l’être public dans trois
contextes socio-politiques distincts », in Questions de Communication, série actes 19, PUN (à paraître) ;- « Les
médias, l’Autre et Moi. L’éducation aux médias comme terrain d’analyse et de pratiques de la relation à l’altérité
», in Communication, vol. 30, n° 2 (disponible sur http://communication.revues.org/); « Les discours officiels sur
les médias dans l’éducation : de la théorie à la politique. Étude comparative internationale », in Vacher B., Le
Möenne C., Kiyindou A. (dirs), Communication et débats publics : les réseaux numériques au service de la
démocratie ?, Paris : L’Harmattan, collection communication et civilisation.
[email protected]
Florence RIO est maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Lille 3
et membre du laboratoire Geriico (Directrice du thème de recherche « innovation par l’Usage et Dispositifs
numérique »). Elle travaille à l’analyse des discours médiatiques et s’intéresse aux dispositifs numériques
adressés aux jeunes dans une perspective d’analyse des usages.Elle a écrit récemment les articles « De
Gutenberg à la méta-réalité, de la technique à l’usage : exemple du prototypage en co-conception d’un récit
augmenté », in Dispositifs numériques : contenus, interactivité et visualization, Actes du Colloque international
CIDE 16, Europia, 2013 ; « Du programme court télévisuel à la mini-série web : l’essor d’un dispositif
novateur ? », in Périneau S., Les programmes courts audiovisuels, CNRS éditions, à paraître fin 2013 ; « De
l’identification à l’Identité : Analyse des dispositifs d’enrichissement du livre papier pour Adolescent, Cas
particulier de Cathy’s Book », in Tsimbidy, M. et Rezzouk (ss dir.), A., La jeunesse au miroir, les pouvoirs du
personnage, L’harmattan. 2012.
[email protected]
Roger Odin (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, IRCAV)
Espaces de communication physique et espaces de communication mentaux
Pour tenter de comprendre ce qui se passe lorsque des productions circulent d'un écran à un autre (de
l'écran du cinéma à cellui de la télévision ou du téléphone portable par exemple) il ne suffit pas (comme
je l'ai fait jusque là) de construire des espaces de communication, il faut aussi prendre en compte le fait
que nous intériorisons ces espaces (au moins certains d'entre eux) ; dès lors, ce dont il faut rendre
compte, c'est d'une négociation entre espace de communication « physique » et espace de communication « mental ».
[email protected]
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Beate Ochsner (Université de Constance, Allemagne)
Le web-documentaire comme objet de participation
En 2008, le web documentaire VOYAGE AU BOUT DU CHARBON (Samuel Bollendorff et Abel
Ségrétin, F Honkytonk), diffusé par Le Monde et donnant au spectateur l’illusion de mener sa propre
investigation sur les conditions de travail des mineurs chinois, a été reçu avec un grand enthousiasme.
Aujourd’hui, ce format, encore relativement nouveau, ainsi que toutes les applications de crossmédia
qui en découlent, est devenu un centre d’intérêt dont discutent pas seulement des chercheurs et des
critiques mais aussi des journalistes, des représentants des chaines de télévision comme ARTE ainsi
que des membres de différents blogs et forums spécialisé sur le sujet.
Loin d’être un documentaire télévisuel ou cinématographique qui trouverait sur Internet un espace
possible de diffusion, le web documentaire est conçu, réalisé et diffusé sur le Web, se servant de ses
nouvelles technologies et de ses différentes ressources multimédias. Comme, contrairement à d’autres
sites Web, ce format documentaire possède d’un récit d’auteur, et la plupart des chercheurs se
concentrent justement sur ce dernier point, c’est-à-dire sur la narration non-linéaire, interactive et
crossmédiale. Notre champ d'étude et de recherche, par contre, concerne l’impact des dispositifs
sociaux-techniques des web documentaires dans la production du spectateur (et de la communauté) et
nous proposons d’analyser les figurations qui y sont inscrits respectivement qui s’inscrivent proposant
ainsi une participation active et même opératoire du spectateur, c’est-à-dire une pratique ou un
comportement médiatiques induits par le web documentaire. À partir d’une analyse détaillée d’un choix
de web documentaires actuels comme p.ex. PRISON VALLEY (http://prisonvalley.arte.tv/?lang=de),
COLLAPSUS (http://www.collapsus.com/), L’OBÉSITÉ EST-ELLE UNE FATALITÉ?
(http://education.francetv.fr/webdocumentaire/l-obesite-est-elle-une-fatalite-o22876), THANATORAMA
(http://www.thanatorama.com/docu/#/accueil/) ou CAPTURING REALITY – THE ART OF
DOCUMENTARY (http://films.nfb.ca/capturing-reality/) et autres, nous proposons, par contre, de mettre
l’accent sur leurs conditions médiatiques et sur la forme de participation qu’ils sollicitent.
Comparé au spectateur télévisuel ou cinématographique ainsi que du «lec(ta)teur», le «spect-acteur»
ou «interacteur» (Gueneau 2006) des web documentaires ne diffère pas seulement par sa
connaissance des médias hétéroclites (des textes, des blogs, des forums, du son d’ambiance, du
bruitage, des commentaires, des interviews et du musique, des photos, des graphismes, des images
animées, des vidéos, cliquable ou non, de la cartographie, un menu, etc.) ou la capacité de se servir
des différents supports dématérialisés et hébergés sur des serveurs différents (serveurs de streaming
pour la vidéo, serveurs frontaux pour les interfaces…), la différence fondamentale repose sur le fait que
si les premiers restent (plus ou moins) invisibles, la participation du spectateur amplifié des web
documentaires le rend inéluctablement visible sur différents niveaux: tout d’abord, il est appelé à
s’inscrire en donnant son adresse mél. C’est l’acte interpellatif qui, d’une part, rend le spectateur un
sujet ‹adressable› et auquel, de l’autre, il se soumet volontairement. Ce faisant, sa visibilité le rend
identifiable aux autres membres du groupe qui y sont intéressé pour des raisons divers. Le fait d’être
identifiable et de pouvoir identifier les autres crée l’impression d’une certaine communauté qui, à nos
yeux, n’est que le produit du même arrangement socio-technique qu’est le web documentaire. Les
processus de participation, salués de façon euphorique, ont, pour ainsi dire, des revers que nous allons
décrire.
Ochsner, Beate est Professeur pour les Études Médias à l’Université de Constance (Allemagne). Chargé de
cours aux Universités d’Innsbruck (Autriche), Bâle et Saint Galle (Suisse).
Recherche: Culture et médias de la participation; Production audiovisuelle de dis/ability; monstres et
monstruosités, jeune cinéma allemand.
Publications récentes
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DeMONSTRAtion, Munich 2010; D’autres images: Production culturelle du handicap, Beate Ochsner/Anna
Grebe (éds.), Bielefeld 2013; Christian Petzold ou: Le temps hantologique du film, Augenblick: Bilder in Echtzeit,
I. Otto/T. Haupts (éds.), Marburg 2012, 63-80; „J’aimerais bien, vous pourriez voir cela“ (Fini Straubinger). Quant
à la rébellion des images dans Le pays du silence et de l’obscurité, Anna Grebe/Beate Ochsner (éds.): D’autres
images, Bielefeld 2013, 261-281; „Translations of Blind Perception in the Films Monika (2011) and Antoine
(2011)“, in: Invisible Culture. Special Issue: Blind Spots (Peer Reviewed Journal) 19 (2013),
http://ivc.lib.rochester.edu/portfolio/translations-of-blind-perception-in-the-films-monika-2011-and-antoine-2011/.
Zusammenfassung :
Kontroversen zwischen der Welt der Gehörlosen und der Hörenden bzw. bereits die Grenzziehung und
Etablierung verschiedener ‚Welten‘mobilisieren gleichermaßen Hörende wie Gehörlose, Mediziner und ‹profane› 9
Experten, Patienten- und Elternkollektive, Firmen wie Advanced Bionics oder Cochlear Ltd., etc. Gruppierungen
wie die Sourds en Colère entstehen in diesem Zusammenhang nicht als ursprünglich singuläre, aufgrund einer
gemeinsamen Überzeugung zu einem Kollektiv geeinte Individuen, sondern sind vielmehr als Effekte oder
Verkettungen des soziotechnischen Arrangements aufzufassen, in dem die Interaktionen zwischen hybriden
Akteuren vermittelt werden. Als Objekt der Partizipation gerät das CI – dies wird zu zeigen sein – dabei zum
Ausgangspunkt derartiger Handlungsinitiativen, es dringt in das soziotechnische bzw. mediale Arrangement ein,
vernetzt sich und wirkt aktivierend oder modifizierend auf Teilhabebeziehungen zwischen menschlichen und
nichtmenschlichen Akteuren respektive auf deren Koalitionsbildung ein.
[email protected]
Françoise Paquienseguy (Sciences-Po Lyon, ELICO)
Pratiques d’écrans brouillées : le cas des fansub
▪ Des fans d’ « anime », ces dessins animés japonais de style Manga, regrettant à la fois que certains
d’entre eux ne soit pas traduits ou le retard de la diffusion européenne par rapport à la diffusion origi nale (japonaise ou sudcoréenne) traduisent eux-mêmes les dialogues et sous-titre en anglais, puis en
français…
▪ Ces épisodes sont disponibles en « fansub » à partir de plateformes spécialisées tant qu’ils ne sont
pas diffusés, traduits et donc sans sous-titre, sur certaines chaînes de télévision qui en ont acquis les
droits.
▪ Les groupes qui traduisent et sous-titrent se nomment des « team » et fonctionnent sur la base d’une
chaîne éditoriale qui va du au rawer à l’éditeur.
▪ Deux exemples seront traités pendant la présentation.
Questionnements du sujet :
1. Des pratiques Pro/Am très avancées qui brouillent plus d’un élément
▪ Véritables petites entreprises, les teams les plus célèbres proposent un modèle économique pro/am
particulier (Leadbeater, 2010) car si certaines se contentent de « pirater » les versions originales et
vivent de bannières publicitaires ; d’autres ont passé des accords avec les propriétaires des licences de
diffusion et cessent, par exemple, de proposer un épisode dès lors qu’il est disponible à la diffusion ou à
l’achat en streaming chez le licencié (variante du Freemium).
▪ Les processus d’appropriation (des outils, des codes, des séries, des tribus) liés au fansub se déve loppe selon une logique de dispositif (Paquienséguy, 2012) qui requiert d’associer technique, social et
culture – asiatique ; ce qui produit assurément une compétence, une habileté (Giddens, 1987) chez les
« fansubber » (Cintas, 2005, 2010). Considérer ces pratiques comme une folksonomie permet d’en lire
les éléments structurants.
9
Vgl. Lindsay Prior: Belief, Knowledge and Expertise. The Emergence of the Lay Expert in Medical Sociology. In: Sociol
Health Illness 25, 2003, S. 41–57; Sophie Dalle-Nazébi: Objet et acteurs de recherche. La montée en expertise de locuteurs
de langues des signes. In: S.A.C. Revue d'anthropologie des connaissances, 2(1), 2008, S. 63–96.
40
▪ Les séries se trouvent finalement augmentées par les contenus produits par les team, par les commu nautés de fans qui assurent finalement la fonction de prescripteurs culturels (Croissant et Touboul,
2010) sur les plateformes, dans leurs blogs et sur les réseaux sociaux via l’accès à une expression élargie (Flichy, 2010).
2. Au-delà des pratiques d’écran, l’expertise élargie des fansubbers
▪ Le contenu vaut par lui-même, indépendamment du support (Chantepie et LeDiberder, 2010) et
l’écran d’accès à l’épisode reste secondaire : c’est la rapidité de mise à disposition de l’épisode soustitre qui compte. Les consommateurs de fansub ne sont pas fidèles à un écran mais à des séries, une
plateforme et à une team.
▪ Ces téléspectateurs sont avant tout des fans (Jenkins 1992, Cova 2005) dont les objectifs sont : promouvoir leur passion (ils intègrent alors les team) ; échanger à ce sujet et en savoir le plus possible (ce
qu’ils font sur les forums des plateformes des team) ; ils sont une communauté spécifique (Maffesolli
1988, 2008) et compétente ; et le fansubbing pose question au regard d’ une culture populaire (Glevarec, 2012)
▪ Une forme de « Lecture savante des séries » (Kaplan, 2011) se met en place : les épisodes sont visionnés en fansub, puis lorsque c’est possible en version traduite officielle, par des fans qui ont une vé ritable compétence et connaissance de la série sur laquelle ils capitalisent généralement (avec la ver sion papier : le manga) ; ils sont visionnés plusieurs fois ; ils sont partagés, commentés, critiqués (Vandendorpe, 2000) à deux niveaux : la narration/le récit/les personnages et la traduction.
Françoise Paquienséguy est professeur des Universités en Sciences de l’information et de la Communication à
SciencesPo-Lyon. Elle analyse les usages des TICN afin d’en saisir les spécificités numériques d’une part et
l’empreinte dans les pratiques communicationnelles d’autre part. Elle s’interroge depuis plusieurs années sur
l’évolution de l’appareil théorique à convoquer pour les saisir au travers de la notion de dispositif et de figures de
l’usager principalement et dans le même temps sur les ferments d’innovation présents dans les pratiques
numériques d’écran.
Paquienséguy F., « Lecteurs numériques : qui êtes-vous ? » in 16ème CIDE, Lille, nov 2013
Paquienséguy F., « La notion de dispositif appliquée aux TIC et médias numériques » in Amsidder A., Daghmi F.,
Toumi F. (dir.), Les médias font-il les révolutions ? L'Harmattan, Collection Communication et Civilisation, 2013,
pp.19-36
Paquienséguy F, « Le consommateur à l’ère numérique » in Vidal G. (dir), La sociologie des usages :
transformations et continuités Éditions Hermès Lavoisier, collection Traités, 2012, pp. 179-212
[email protected]
Jieun Park (Ecole du Louvre, Université d’Avignon, UQAM)
Les « flâneurs » ou les spectateurs des oeuvres nouveaux médias dans l’exposition d’art
contemporain
L’arrivée de la vidéo a bouleversé le rapport des spectateurs aux médias existants. Depuis, l’art issu
des médias s’est fait une vraie place dans les institutions artistiques. Malgré cette évolution statutaire, il
semble que la condition de réception de ces oeuvres par les visiteurs reste problématique : combien de
visiteurs les regardent intégralement dans un contexte d’exposition qui génère un visionnement en
zapping ? Contrairement aux spectateurs d’une salle de cinéma, les visiteurs-spectateurs d’une
exposition sont mobiles et rencontrent une grande variété de formes d’oeuvres. Quand il s’agit des
oeuvres nouveaux médias, les nouveaux modes du récit peuvent troubler des spectateurs familiers du
récit filmique traditionnel. Mais si un visiteur regarde une vidéo qui dure 30 minutes pendant seulement
5 minutes, est-ce qu’on peut dire qu’elle a été vraiment regardée ? Cette pratique de l’abandon du
visionnement intégral nous fait poser une question sur la place du spectateur ; bien que le statut du
41
spectateur ait été souligné dès l’apparition de cet art, il y a peu de recherches empiriques à ce sujet.
Nous avons mené des observations et des entretiens avec des visiteurs des musées pour analyser
leurs comportements de visionnement. Il apparait qu’ils ne consacrent en moyenne guère plus de 10
secondes à chaque oeuvre nouveau média dans une exposition. Comme dans le passage parisien du
19ème siècle, analysé par Benjamin, certains micro-espaces médiatiques de la vie quotidienne se
reforment dans une exposition : salle de cinéma, bibliothèque, hall de centre commercial, etc. Nous
retrouvons ainsi des spectateurs dans la figure du « flâneur » du passage parisien avec un
comportement d’hésitation. Certains « n’osent » pas dépasser le seuil psychologique ou physique de
chaque micro-espace dédié à chacune des oeuvres. Ceci pourrait être interprété comme un refus
d’engagement temporel à l’égard d’oeuvres auxquelles ils ne sont pas préparés.
Jieun PARK est doctorante en science de l’information et de la communication et en muséologie, dans le
programme du doctorat international en muséologie, médiation, patrimoine à l’Ecole du Louvre – l’Université
d’Avignon et des Pays de Vaucluse – l’Université du Québec à Montréal (sous la direction d’Yves Jeanneret, de
Marie-Clarté O’Neill et de Marie Fraser). Elle a travaillé en tant que chief curator à la galerie d’art moderne et
contemporain à Séoul et travaillé comme une consultante à la division de l’industrie culturelle (secteur Culture) à
l’UNESCO. Elle a publié « The Dissemination and Reception of Media Art : A Case Study – The New Media Art
Collection of the Centre Pompidou/National Museum of Modern Art », in Limone, Pierpaolo Nardi Emma. 2009.
Museums, new technologies, language Trad. de: French. Roma: Edizioni Nuova Cultura, 113 p.
[email protected]
Julien Péquignot (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, CEISME, ICCA)
Jeu(x) d’écran(s) : Noob et ses spectateurs internautes participatifs
Ma communication se propose d’examiner l’activité spectatorielle suscitée par une web-série, Noob
(Olydri Studio, 2008-), créée par Fabien Fournier, au travers de l’analyse des discours publiés sur
Internet par les spectateurs.
Série de fiction se situant dans l’univers des MMORPG (« Massively Multiplayer Online Role Playing
Game »), Noob est une des web-séries françaises les plus regardées à l’heure actuelle (la première
même selon le site serieweb.fr), et aussi des plus commentées, que cela soit sur le site officiel de la
série, les pages dédiées sur Google+ ou Facebook ou encore à l’occasion de chaque vidéo partagée
sur Dailymotion ou Youtube, pour ne citer que les plateformes les plus importantes. Le sujet de la série,
qui traite des jeux vidéo à univers persistant et plus largement de ce que l’on pourrait appeler, avec
David Peyron10, une « culture geek », donne lieu à un grand nombre de jeux sur les dispositifs
audiovisuels. Par les différentes façons de rendre la vue d’un jeu vidéo de l’intérieur ou de l’extérieur
(effets spéciaux, avatars, icônes, cinématiques, etc.) – y compris l’interface –, par le jeu sur les
alternances et les parallèles entre espace virtuel et espace « réel » au sein de la même diégèse, ou
encore par les nombreuses citations et références (diégétiques ou non) au cinéma, à la télévision, à la
littérature, à la musique (à commencer par celle d’origine cinématographique, télévisuelle, ou
vidéoludique), ainsi qu’à d’autres jeux, séries, web-séries, etc., Noob met en scène les variations et
mutations contemporaines de l’écran. Ces multiples emboîtements d’écrans, de dispositifs, de points de
vue, d’énonciations, voire de structures énonciatives, qui s’ajoutent à la multiplicité des supports
(Internet via différents sites, télévision sur la chaîne Nolife, DVD) et à la dimension transmédiatique
(romans, bande-dessinées, bandes originales, application mobile, jeu et films en développement grâce
à un crowdfunding hors du commun), pourraient donner à penser que leur profusion même ne
10
Peyron David, La construction sociale d’une sous-culture : l’exemple de la culture geek, thèse de Doctorat en Sciences de
l’Information et de la Communication sous la direction de Jean-Pierre Esquenazi, soutenue le 11/12/2012 à l’Université Jean
Moulin Lyon 3.
42
manquerait pas d’être structurante dans les lectures (au sens de Roger Odin 11) produites par les
spectateurs, dont les commentaires en ligne sont les traces. De même, la promesse 12 apparemment
claire de la web-série devrait aboutir à la constitution d’une communauté d’interprétation 13 également
« claire », d’autant plus claire que visible par la partie a priori la plus active puisque participante, au
moins par la production de discours. Cependant, l’analyse des commentaires montre, en plus de
stratégies d’appropriation par le public (en pour ou en contre), d’une part plus de simplicité et de
classicisme dans la production de sens que ce à quoi l’on aurait pu s’attendre, d’autre part une activité
de structuration de l’objet et de ses spectateurs par ses derniers eux-mêmes bien plus grande que le
simple diptyque visionnage/appréciation d’une fiction en ligne.
Julien Péquignot est chargé de Recherche Post-doctorale Labex ICCA – CEISME et docteur en
Sciences de l’Information et de la Communication
2013 – Jullier Laurent, Péquignot Julien, Le clip. Histoire et esthétique, Paris, 2013, Armand Colin,
collection Cinéma, 220 pages.
2013 - Péquignot Julien, « Le clip musical comme processus d’incarnation de la médiation audiovisuelle
», in Médiation et Information, 2013. A paraître.
2013 – Péquignot Julien, « Dispersion des écrans et normalisation des spectateurs. Le cas du clip
musical », Écrans, n°2, « Spectateurs et écrans ». A paraître.
2013 - Péquignot Julien, « Le clip musical comme processus d’incarnation de la médiation audiovisuelle
», in Médiation et Information, 2013. A paraître.
[email protected]
Géraldine Poels (Université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, CHCSC)
« Le téléspectateur, un ciné-spectateur comme les autres ? Les apports de l’histoire de la
réception télévisuelle »
Cette communication se propose de montrer ce que l’expérience du téléspectateur doit au spectateur
de cinéma (qu’il reste), mais aussi en quoi ces deux modalités de la réception diffèrent. Pour cela, elle
revient sur l’histoire du téléspectateur et sur les moments fondateurs de la découverte puis de la
banalisation de la télévision (des années 1950 aux années 1980). Elle s’appuie non pas sur les
analyses des grands cinéastes et intellectuels le plus souvent cités, comme Jean Thévenot, mais sur
les témoignages de téléspectateurs anonymes qui sont conservés dans les archives de l’ORTF. Ces
sources (courrier, enquêtes menées par la télévision) sont d’une grande richesse et permettent de saisir
l’élaboration des postures spectatorielles. L’exposé insistera notamment sur trois moments cruciaux :
- la conversion du ciné-spectateur en téléspectateur dans les années 1950 ;
- l’importance d’un véritable rituel télévisuel caractéristique des années 1970-80, le « film du dimanche
soir ». Les mesures d’audience permettent, en effet, de cerner l’ampleur du phénomène, tandis que les
enquêtes renseignent sur la réception de cet objet hybride du cinéma et de la télévision ;
- l’émergence, sinon d’une téléphilie, du moins d’une expertise du téléspectateur (manifeste dans le
courrier), qui construit ses propres critères de jugement. Nous montrerons comment la « qualité »
télévisuelle est définie par les téléspectateurs (en interaction avec diverses instances – critiques,
festivals, etc.), selon des modalités qui éclairent le mépris avec lequel de nombreux cinéphiles
considèrent la réception télévisuelle.
11
Odin Roger, De la fiction, Bruxelles, De Boeck, 2000 ; Odin Roger, Les espaces de communication, Grenoble, PUG, 2011.
Jost François, « La promesse des genres », Réseaux, vol. 15 n°81, p. 11-31.
13
Fish Stanley, Is There a Text in This Class? The Authority of Interpretive Communities, Harvard, Harvard University Press,
1980 ; Esquenazi Jean-Pierre, Sociologie des œuvres, de la production à l’interprétation, Paris, Armand Colin, 2007.
12
43
Géraldine Poels est agrégée d’histoire, ancienne élève de l’École Normale Supérieure et docteure en histoire
contemporaine. Elle a soutenu récemment sa thèse intitulée « La Naissance du téléspectateur. Une histoire de la
réception télévisuelle des années 1950 aux années 1980 » à l’Université de Versailles-Saint-Quentin.
Actuellement, elle poursuit ses recherches comme post-doctorante à l’UVSQ, au Centre d’histoire culturelle des
sociétés contemporaines. Elle est également chercheure associé au laboratoire Communication et Politique
(CNRS) et membre du comité de rédaction de la revue d’histoire Le Temps des médias.
[email protected]
Marie-Dominique Popelard (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3)
D’un spectateur captif à un spectateur attentif
Pour se proposer comme une « fenêtre ouverte sur le monde » (Alberti), la peinture invente au début du
XVe siècle des procédés divers capables d’insérer le monde dans un cadre planaire. Des modes
perspectifs deviennent susceptibles d’assigner au spectateur une place. Le travail de Michael Fried,
critique d’art spécialiste de la peinture française de la seconde moitié du XVIIIe siècle et d’art
contemporain, proposa en 1980 une théorie de l’absorbement du spectateur dans le tableau, refusant
ainsi la théâtralité de la représentation dénoncée par Diderot. 14
Le propos de la présente proposition consisterait à tester si l’absorbement du spectateur repéré par
Fried ne s’appliquerait pas plutôt, et peut-être de façon plus radicale, à une conception des écrans dont
les tailles – de plus en plus grandes dans de petites salles de projection comme des home cinémas, ou
de plus en plus petites dans le cas des écrans d’ordinateurs, tablettes et autres téléphones – sont à
même de ne plus assigner au spectateur d’autre rôle que celui d’être captif. Il n’y aurait plus qu’à
chercher la bonne position pour regarder : celle du canapé devant l’écran TV ou la bonne orientation de
la tablette ?
À ce spectateur consumériste s’oppose un spectateur capable, dans un regard renouvelé, de porter
attention aux détails. 15 Les nouveaux écrans et leurs techniques favorisent en effet de stationner plus
confortablement sur des détails en temps réel… On pourrait prendre l’exemple de la présentation
numérique par Peter Greenaway du tableau de Véronèse Les Noces de Cana (1563, huile sur toile, 6,
77 × 9,94 m, Louvre, Paris) à la Fondation Cini (San Giorgio, Venise, juin 2009) pour la 53 e Biennale de
Venise (2009).16
Marie-Dominique Popelard est professeur de philosophie du langage et de la communication à l'Université
Sorbonne Nouvelle-Paris 3.Elle s'intéresse à une pragmatique dialogique qu'elle développe aujourd'hui pour
comprendre des œuvres d'art. Elle a notamment publié Ce que fait l’art. Approche communicationnelle (Paris,
PUF, 2002) et Peindre les idées ? Sur la calligraphie chinoise, en collaboration avec Emanuele Banfi (Paris, PUF,
2007). Elle a aussi édité avec Anthony Wall, Citer l’autre (Paris, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2005) et L’art
de très près. Détail et proximité (Rennes, PUR, 2012). Directeur du centre de recherche CIM-APPLA & CO, elle a
édité Moments d’incompréhension (Paris, PSN, 2007) et Les voix risquées de la confidence (PSN, 2010).
[email protected]
Amanda Rueda (Université de Toulouse 2 Le Mirail, GRECOM-LERASS)
Document et fiction : l’expérience spectatorielle des écritures documentaires du web
L'expression webdoc, avec son assimilation du mot doc -raccourci du mot documentaire-, apparaît dans
14
Michael Fried, La place du spectateur. Esthétique et origines de la peinture moderne, 1980, tr. fr. Claire Brunet, Paris, Gallimard, 1990.
15
Daniel Arasse, Le Détail. Pour une histoire rapprochée de la peinture, Paris, Flammarion, 2008 [1992].
16
http://www.destination-venise.net/2009/08/les-noces-de-cana-vues-par-peter.html
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l'environnement médiatique avec une certaine ténacité à la fin de la décennie précédente, engendrant
des questionnements profonds sur les relations qu'est susceptible d'entretenir l'objet documentaire avec
le média web. Ces questionnements touchent autant aux écritures documentaires qu'aux différents
modes de l'expérience spectatorielle.
Traditionnellement attaché au cinéma et à la télévision et à son mode cognitif de réception, l'objet
médiatique documentaire se trouve renouvelé avec l'entrée du média Internet dans l'ère du web 2.0 au
sein duquel opère davantage le mode pragmatique. Dans ce passage d'un écran à l'autre se produit la
rencontre de deux modes de production de sens auparavant séparés.
A travers l’analyse de quelques webdocumentaires, nous interrogerons dans quelle mesure les
spécificités technique, narrative, énonciative, informative et esthétique de cette forme renouvelée du
documentaire participent, d’une part, à la mise en œuvre des processus de fictionnalisation et
d’esthétisation des démarches documentaires et, d’autre part, à la construction d’une nouvelle catégorie
de spectateur du documentaire : le « spectateur explorateur ». Nous montrerons que chacune de ces
spécificités implique un régime singulier d'action et d'engagement du spectateur (exploration et
personnification à travers le transfert de l'expérience, mouvement par lequel le spectateur devient un
« je » énonciateur) et que l'agencement de ces régimes produit en conséquence la rencontre de trois
modes de production de sens (Odin, 2011) jusque-là disjoints : le mode documentarisant (cognitif), le
mode fictionnalisant et le mode ludificiant (performatif), qui mettrait en avant l'expérience ludique de la
réception. La linéarité brisée et l'engagement du spectateur dans un régime exploratoire fait glisser le
documentaire vers la ludifiçation : un mode spectatoriel traditionnellement attaché à l'univers du jeu.
D’après un jeune internaute sensible au caractère ludique des œuvres, cette valeur-promesse s'avère
comblée : « on apprend, on s’informe et on s’amuse ».
Cette approche permettra également de montrer les limites inhérentes à l'interprétation de l'expérience
spectatorielle en tant que telle.
Amanda Rueda est Maître de conférences à l’Université Toulouse 2 Le Mirail, membre du GRECOM et du
LERASS.
[email protected]
Virginie Spies (Université d’Avignon)
Twitter, l’avenir de la programmation télévisuelle ?
Si la télévision et ses programmes font rarement l’objet de changements radicaux, l’arrivée des réseaux
sociaux a pourtant bouleversé une chose, il s’agit de la possibilité, pour le public, de commenter sur
Twitter les émissions qu’il regarde. En deux ans, chaque programme s’est doté d’un dispositif web 2.0,
mettant en place par exemple un hastag dédié à chaque émission, et qui permet, dans chaque tweet
envoyé, de faire référence à ce que l’on regarde.
Peut-on dire pour autant que ces nouveaux dispositifs ont vraiment changé la donne, et si oui, dans
quel sens ? A ce titre, au moins deux pistes méritent d’être explorées.
Au-delà du dispositif mis en place par les émissions, les sociétés de production et les chaînes
(notamment à travers l’invitation à commenter les programmes sur Twitter), on constate par exemple
qu’à l’intérieur des émissions elles-mêmes, lorsque les commentaires émis sur Twitter sont repris dans
l’émission, c’est pour faire l’éloge de ce qui est vu et entendu, ou d’intervenir dans un débat mais sans
que cela n’interfère dans le programme lui-même.
Du côté du téléspectateur, s’il a l’occasion de commenter les émissions, une analyse des messages
postés ne permet pas de dire que nous sommes entrés dans l’ère d’une télévision de l’interaction. Si
dialogue il y a, il se réalise entre les internautes et éventuellement avec un community manager qui va
répondre aux usagers pendant l’émission.
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Dès lors, si la possibilité de commenter les programmes sur Twitter ne bouleverse pas la télévision et
ses programmes, il n’en demeure pas moins que les enjeux sont importants. Pour commenter une
émission, il faut la regarder au moment de sa diffusion. Plus un programme sera live-tweeté, plus il
entrainera l’adhésion du public qui se retrouvera autour d’une communauté. Conscientes de ce
phénomène, les chaînes communiquent sur le nombre de tweets émis à l’occasion de leurs émissions,
et en ce sens, Twitter est devenu un nouvel outil de mesure de popularité.
Pour répondre à ces questions, cette communication prendra plusieurs exemples de dispositifs de livetweet (un talk-show, un débat politique et une émission de télé-réalité), afin de mettre au jour les
différents types de discours qui circulent sur les réseaux sociaux. Il s’agira de comprendre comment, en
réunissant une communauté autour des programmes, Twitter contraint à les regarder au même moment
et donc à redonner du sens à la programmation. Et si, plutôt que de tuer la télévision, les réseaux
sociaux contribuaient à construire l’avenir de sa programmation ?
Cardon, D, La démocratie Internet : Promesses et limites, Paris, Seuil, Coll. La république des idées, 2010.
Casilli, A, Les liaisons numériques, Vers une nouvelle sociabilité ?, Paris, Seuil, collection La couleur des idées,
2010.
Cotte, Dominique, 2011. Emergences et transformations des formes médiatiques. Paris : Hermès.
Doueihi, M, Pour un humanisme numérique, Paris, Seuil, coll. La librairie du XXIe siècle, 2011.
Jost, F, L’empire du loft (la suite), Paris, La dispute, 2007, Coll. Des mots sur les images.
Jost, F, Un monde à notre image, Enonciation, Cinéma, Télévision, Meridiens Klincksieck, 1992.
Le Grignou, B, Du côté du public, Usages et réceptions de la télévision, Paris, Economica, Coll. Etudes
politiques, 2003.
Mercklé, P., Sociologie des réseaux sociaux, Paris, coll. Repères, 2004.
Spies, V, La télévision dans le miroir – Théorie, histoire et analyse des émissions réflexives, L’Harmattan, 2004,
coll. Audiovisuel et communication.
Virginie Spies est Maître de Conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université
d'Avignon, elle est membre de l’Equipe Culture et Communication / Centre Norbert Elias (UMR 8562-EHESSUAPV-CNRS). Elle est l’auteur de « Télévision, presse people, les marchands de bonheur », De Boeck Ina,
2008.
[email protected]
Giles Taylor (University of St Andrews, UK)
Sawyer’s View-Master: An Immersive Media in the Hands of the Spectator
To understand the ways in which the current proliferation of miniaturized and handheld media is
reshaping the practices of spectatorship in a visual culture once dominated by the big screen, it is
necessary to explore past small-gauge, tactile image technologies in relation to the large. One such
device is Sawyer’s View-Master, an American stereoscope held up to the eyes by the spectator.
Invented in 1938, the plastic toy adopts the aesthetic and technical principles of its nineteenth-century
predecessor and advances them by incorporating a finger-operated lever mechanism that enables the
consumer to click and progress through seven pairs of miniature colour film transparencies contained
on circular cardboard disks. The View-Master was first marketed as an alternative to the scenic
postcard. At the height of its popularity in the postwar period, the catalogue expanded to include
licensed film and television subjects, truncating big and small screen narratives into seven essential
images that the spectator could animate by hand.
This paper will present the media archaeology of Sawyer’s View-Master, placing special emphasis on
the immersive viewing space created by the diminutive device. The View-Master will be positioned in
relation to contemporaneous apparatuses, focusing first on a direct comparison with the enveloping
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widescreen Cinerama system and its spectatorship. Insofar as immersion is understood as an
embodied response to gigantic images, I ask how a handheld medium triggers a commensurate
experience. I will proceed to explore the ways in which television helped shape new spectatorial
practices through View-Master infomercials. Finally, I will examine peripheral Sawyer’s objects
(cameras, projectors, screens), in order to identify how audience participation was further triggered in
spaces of domesticity. Emphasising the ways in which the View-Master structured its tactics of display
technically and formally, I investigate how the toy brought forth a virtual world for the spectator to
engage.
Giles Taylor is a PhD candidate at the University of St Andrews, UK. His research explores the interplay
between screen size and spectatorship in postwar American moving image culture through the close analyses of
widescreen cinemas, television sets, virtual reality simulators, theme parks, handheld viewing boxes, and
children’s toys. He has had work published in the Film Festival Yearbook and the Velvet Light Trap.
[email protected]
Christine Thoër et Florence Millerand Millerand (Université du Québec à Montréal,
LabCMO)
Regarder des séries en ligne : d’autres expériences de visionnement
On observe une croissance de la popularité du visionnement connecté (films, séries TV, web séries,
vidéos et podcasts). Cette recherche, qui s’inscrit dans la sociologie des usages, vise à documenter les
usages que font les adolescents (12-17 ans) et les jeunes adultes (18-25 ans) québécois des séries et
webséries auxquelles ils accèdent sur Internet et via les périphériques mobiles, et de cerner le sens
qu'ils construisent autour de ces pratiques. Nous documenterons la façon dont ces utilisateurs accèdent
aux contenus, les manipulent, les visionnent, les conservent, les partagent, et en parlent, et même, les
détournent, puisque l’on reconnaît aux individus la capacité d’être créatifs. Nous nous intéresserons
également à cerner les contextes de consommation, la place qu’occupent le visionnement connecté de
séries dans le quotidien des adolescents et des jeunes adultes et les formes d’articulation à d’autres
pratiques en ligne et hors ligne. Enfin, il sera important de mieux saisir les processus par lesquels se
développe l’attachement aux séries visionnées en ligne. Cette recherche exploratoire s’appuiera sur 4
groupes focus d’environ 90 minutes réalisés avec des jeunes francophones qui consomment des séries
en ligne (au moins 2 par semaine). Nous constituerons 2 groupes (filles et garçons) avec des
adolescents et 2 autres avec des jeunes adultes pour un total d’environ 30 participants. Les participants
seront recrutés sur une base volontaire par voie d’annonces diffusées sur Facebook. Les échanges
enregistrés et entièrement retranscrits feront l’objet d’une analyse qualitative réalisée avec l’aide du
logiciel Nvivo. Les thèmes abordés concernent la fréquence et la durée des pratiques de visionnement,
les séries et webséries privilégiées, les dispositifs techniques utilisés, les contextes de visionnement,
les modalités de découverte et de partage des contenus, l’articulation avec d’autres activités
Christine Thoër est professeure, département de communication sociale et publique
Centre de recherche sur la communication et la santé : www.comsante.uqam.ca
Laboratoire
de
communication
médiatisée
par
ordinateur
LabCMO
Université du Québec à Montréal
[email protected]
Florence Millerand est professeure, département de communication sociale et publique, UQAM
Co-directrice du Laboratoire de communication médiatisée par ordinateur LabCMO
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Matteo Treleani (Université Paris Est Marne-la-Vallée)
Le spectre et l’automate : figures du spectateur numérique
Deux figures de spectateurs s’opposent dans l’audiovisuel contemporain. Deux places lui sont données
dans le récit. Non pas par le film, mais plutôt par le dispositif à travers lequel l’on accède au film. Le
spectre et l’automate. La place du spectre est celle du spectateur-témoin, qui voit sans être vu, selon la
définition que Derrida donne du spectre. Une pure absence, impuissante, placée sur le seuil entre le
monde de la fiction et celui de la salle de cinéma, comme un fantôme bloqué entre l’au-delà et l’icimaintenant. A l’opposé, l’automate est le spectateur-interactif, devenu usager par les biais du
numérique. Il agit, il est enfin présent dans un monde qui, cette fois, il peut manipuler, qui réagit à ses
actions. Mais cette manipulation est programmée, elle suit des chemins préconstitués : l’automate n’est
que l’opérateur d’une volonté d’autrui, destiné à exécuter des ordres conçus a priori. Ces deux figures
étrangement vides et fantomatiques, nous aideront à nous repérer dans le monde des écrans multiples.
Matteo Treleani est ATER à l’Université Paris Est Marne la Vallée et chercheur associé au laboratoire CEISME
(Labex ICCA) de Paris 3, a soutenu une thèse sur la rediffusion des archives audiovisuelles en ligne. Il a été
chercheur à l’Ina de 2009 à 2012. Il a coordonné l’ouvrage collectif Vers un nouvel archiviste numérique
(L’Harmattan/Ina Editions, 2013) avec Valentine Frey et le e-Dossier de l’audiovisuel Sciences humaines et
patrimoine numérique en Juin 2012. L’ouvrage Mémoires audiovisuelles : les archives en ligne ont-elles en
sens ? est en cours de publication pour les Presses de l’Université de Montréal.
[email protected]
Bruno Trentini (Université Panthéon-Sorbonne Paris 1, directeur de la revue Proteus)
Devenir spectateur : une expérience dé-singularisée
L'évolution des supports d'image a démultiplié les types d'expérience que l'on peut avoir des films.
Regarder un film entre amis en discutant et en mangeant une pizza, au lit avec l'ordinateur portable sur
les genoux, ou encore dans le train avec des écouteurs, sont différentes façons d'expérimenter un
même film. Certaines oeuvres essayent de s'adapter aux situations répandues comme le visionnage sur
un écran d'ordinateur par exemple. Toutefois, indépendamment des types de dispositifs et d'écran, la
réception d'un film est soumise à de trop nombreuses variables pour être prise en compte par la
production. Notamment, la réception dépend dans une certaine mesure non négligeable de ce que l'on
faisait juste avant de regarder le film. De nombreux travaux de psychologie montrent justement qu'il est
possible d'influencer et de modifier la réception d'une expérience en intervenant avant celle-ci. L'effet de
cette intervention est appelé « effet d'amorçage », ou « priming » en anglais. Or, une importante
conjecture de l'existence de cet effet est que, même sans intervention de la part d'un psychologue, les
événements précédant une expérience participent à la manière dont cette expérience sera vécue. Pour
éviter tout effet d'amorçage, il faudrait idéalement que l'individu passe, avant de voir un film, par un sas
de remise à zéro effaçant toute trace pouvant donner lieu à une réception biaisée du film. Deux
possibilités semblent s'offrir : soit un tel sas ou un intense priming se trouve au sein même du film, soit
très peu de situations offrent les conditions permettant d'être spectateur.
Au cinéma, ce sas peut se retrouver dans le moment séparant l'horaire de la séance de l'horaire du film.
Quinze ou vingt minutes de publicités et de bandes-annonces, certes davantage présentes pour des
raisons économiques, permettent aussi aux individus de se mettre en posture de spectateur en effaçant
au moins superficiellement leur score au bowling ou l'addition du restaurant. On peut retrouver
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l'existence de sas similaires dans les musées français notamment lorsque l'on fait la queue, ouvre son
sac et passe au vestiaire.
D'un côté, ces sas de remise à zéro fonctionnent comme des effaceurs de singularités et de
personnalités : les individus deviennent des spectateurs-types, un peu comme des pions. Mais d'un
autre côté, cette manière de « désintéresser » l'individu semble justement être ce qui lui permet de
devenir spectateur en se projetant dans une expérience possible sans qu'elle soit nécessairement
réelle.
En comprenant le mot kantien « désintéressé » non pas comme un état mais comme le résultat d'un
acte, cette intervention a pour but de montrer que être spectateur, c'est imaginer une expérience
esthétique communicable. Ainsi, si les machines de l'art ne peuvent pas désintéresser l'individu, si le
film ne parvient pas lui-même à amorcer ce dernier, c'est à l'individu de s'abstraire de sa singularité
pour devenir spectateur. Et ses facultés cognitives lui permettent de le faire. Autrement dit, ce n'est pas
parce que l'on fait l'expérience d'un film, même que l'on y prend plaisir, qu'on en est spectateur. On peut
très bien apprécier un film pour des raisons contingentes et singulières, liée au contexte de visionnage
ou aux préoccupations antérieures et intérieures, mais il ne va pas de soi, dans ces cas, d'affirmer que
cet individu a été spectateur du film. L'individu devient spectateur justement en faisant abstraction de
ces singularités toujours présentes.
Bruno Trentini est actuellement directeur de publication de la revue Proteus – cahiers des théories de l'art,
Bruno Trentini est docteur en esthétique et sciences de l'art et enseigne la philosophie de l'art à l'université Paris
I. Ses recherches menées à l'institut ACTE portent notamment sur les mécanismes immersifs mis en jeu lors de
réception d'oeuvres visuelles complexes en faisant se rencontrer esthétique et psychologie de la perception. Son
enjeu est de comprendre la complexité d'une expérience esthétique et la nature de l'attitude spectatorielle.
Publications récentes ou à venir liées au thème du colloque :
Revue Proteus – Cahiers des théories de l'art, n° 6 décembre 2013, Le spectateur face à l'art interactif ,
coordinateur du numéro avec Benjamin Riado. Numéro en ligne sur le site de la revue.
« Le cadrage de l'attention du spectateur : une contrainte esthétique », Les Poétiques de la contrainte dans l'art
contemporain, Nouvelle Revue d'esthétique, 2012.
« Le refus spectatoriel – à propos de la différence entre émotion naturelle et expérience esthétique », La «
Direction de spectateur » : création et réception au cinéma , dirigé par Dominique Chateau (à paraîte au PUR).
[email protected]
Lorenzo Vilches (Université Autonome de Barcelonne)
L’espace relatif de l’utilisateur face aux écrans
À l’ère du transmédia, la pratique du spectateur, smart consumer, revendique le droit du spectateur face
au droit d’auteur, le droit à l’infidélité de la réception sur un seul écran et le droit à la multitâche entre
fiction et conversation on line. La présomption d’existence d’un film ou d’une série télé est violentée par
le spectateur. Aucune œuvre cinématographie ou télévisuelle n’est assez fermée pour ne pas permettre
une re-manipulation (fanfiction) ni une réception parallèle avec d’autres produits sur d’autres écrans
(vision multi-écrans). Pour ce type d’utilisateur, les œuvres ne possèdent pas de légitimation comme
d’autres produits exclusifs ou spécifiques obligeant à une réception exclusive. Plus encore : dans un
étalage d’opportunisme, les fictions servent de prétexte de conversation sur les réseaux et comme
affirmation d’identité. Le spectateur multi-écran n’est plus un observateur externe mais il se situe dans
un point imaginaire de subjectivités à l’intérieur de l’espace transmédia. Ce spectateur se trouve dans
un système de coordonnées d’espaces relatifs entre lesquelles aucune œuvre ne peut se circonscrire à
un écran d’origine (celui du film dans la salle de cinéma, l’image télévisuelle dans le téléviseur) mais
dans lequel ces dernières se rétro-alimentent, dans l’espace de sa perception, avec des histoires, des
personnages et des scènes situés dans un point entre les écrans, hors de l’espace de chaque Média.
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Dans cette proposition : 1. nous analysons les pratiques des spectateurs à travers les résultats de
certaines études quantitatives et qualitatives récentes sur l’utilisation des réseaux sociaux pendant la
réception de fiction ; 2. nous analysons les pratiques de Social Media qui se réfèrent à la fiction ; 3.
nous proposons en outre 8 catégories théoriques pour l’étude de la narration transmédia.
Lorenzo Vilches est professeur à l’Universidad Autónoma de Barcelona, Directeur Master Internacional
Escritura para Cine, Televisión, Transmedia et Editeur http://guionactualidad.uab.cat/
Vilches, L
Título: ” ¿Es posible una estética de las tecnologías digitales?”, en D.Moraes (comp..), B. Miege : Mutaciones de
lo visible
2010. Editorial :Paidós, Buenos Aires
Vilches, L
Título:, “Da Virada Lingüística a Virada Digital”, en M. Barbosa, M. Fernandes, O.J. de Morais, Comunicaçao,
educaçao e cultura na era digital,
2010. Editorial :Intercom. S. Paulo
Vilches, L.
Título: “La difficile cohabitatioin du catalan et du castillan”,
2010.HERMES Nº 56 . Paris
Vilches, L . (ed)
Título:, La investigación en comunicación
2011. Editorial : Gedisa. Barcelona
Vilches, L.
Título: “El capitalismo narrativo digital”
TELOS, 2012. Madrid.
Vilches, L. (ed)
Título: Convergencia y transmedialidad
2013. Editorial : Gedisa. Barcelona
Vilches, L.
“Siempre nos quedará la televisión y el periodismo” en O. Rincón (ed.) Zapping TV (el paisaje de la tele latina)
2013. Friedrich Ebert Stiftung. Bogotá
[email protected]
Anna Wiehl (Université de Bayreuth)
Pragmatics of Non-Fictional Interactive, Participatory Transmedia Formats
Documentary audio-visual formats have been changing their media-cultural identity ever since their first
days. Currently, in the course of Convergence & Participatory Culture and the interplay of analog and
digital media, a great variety of experimental documentary transmedia artifacts are emerging – new
formats and genres, bringing along a multiplicity of new media practices. In this context, hybrid
transmedia television-/web experiments such as the interactive, playful and often "playable" hypermedia
format of interactive documentary respectively database documentary are among the most fascinating
phenomena.
Such interactive, participatory and sometimes even collaborative projects e.g. blur the boundaries
between filmmaker/producer, the subjects (re-)presented and the viewer/lecteur-actant (Roger
Odin),thereby questioning familiar notions of spectatorship as well as authorship; transmedia
experiences such as televised documentaries accompanied by synchronized tablet-applications play
with common patterns of reception; and the most audacious productions even try to enlarge the spaces
of knowledge to spaces of bodily experience, involving locative media devices.
But what does it exactly mean to interact and play with – and to experience! – new non-fictional
formats?
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In how far do "new screens" and screening practices alter our affective positioning towards
"documentaries @ play"?
And what are the decisive changes as to documentary modes of representation and "the language" of
non-fictional audiovisual productions if audiences become co-creators?
With regard to this "documentary ensemble 3.0", one of the great challenges for analysis is to establish
a convincing tool to tackle these emerging formats. In this respect Roger Odin's semio-pragmatic
approach to audiovisual formats represents a promising point of departure.
The aim of this presentation is to revisit Odin's modes de lecture and to expand the spectrum of
possible emotional and intellectual ways to relate towards non-fictional transmedia productions.
Anna Wiehl is Dr in Media Studies at the University of Bayreuth.
[email protected]
ORGANISATION
Comité scientifique
Jean Châteauvert (Université du Québec à Chicoutimi), Gilles Delavaud (Université Paris 8), JeanPierre Esquenazi (Université Jean Moulin Lyon 3), André Gaudreault (Université de Montréal), MarieFrançoise Grange (Université Jean Monnet Saint-Etienne), Jacques Guyot (Université Paris 8),
François Jost (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3), Denis Maréchal (Institut National de
l’Audiovisuel), Roger Odin (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3), Jean-Michel Rodes (Institut
National de l’Audiovisuel), Maria Tortajada (Université de Lausanne).
Comité d’organisation
Gilles Delavaud (Université Paris 8, CEMTI), Maryam Karimi (Université Paris 3), Clotilde Lebrun
(Université Paris 8), Denis Maréchal (Institut National de l’Audiovisuel), Daniel Rojas (Université Paris
8).
Lieu du colloque : Institut National de l’Audiovisuel, Centre Pierre-Sabbagh, 83-85, rue de Patay,
75013 Paris.
Contact : Clotilde Lebrun [email protected]
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INFORMATIONS PRATIQUES
Lieu du colloque
Institut National de l’Audiovisuel (INA), Centre Pierre-Sabbagh, 83-85 rue de Patay, 75013 Paris.
Accès
Métro ligne 14 ; arrêt : station Bibliothèque François-Mitterrand (puis moins de 10 minutes à pied).
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Frais d’inscription, de déplacement, d’hébergement
Il n’y a pas de frais d’inscription pour participer ou assister au colloque.
Les frais de déplacement et de séjour ne sont pas pris en charge par l’organisation du colloque.
Durée des communications
Les communications sont impérativement limitées à 20 minutes (temps de projection de documents
compris).
Projection de documents
Pour projeter des documents, les intervenants utilisent leurs propres ordinateurs portables. Wifi
disponible dans la salle du colloque.
Langue
Les langues utilisées sont le français et l’anglais ; dans la mesure du possible, préférer le français. La
traduction simultanée des communications n’est pas assurée.
Publication
La publication d’un ouvrage issu du colloque est envisagée. Le texte définitif des communications devra
être adressé à Jean Châteauvert et Gilles Delavaud avant le 1 er septembre 2014.
Les consignes de présentation des textes en vue de la publication seront communiquées après le
colloque.
Contact
Pour toute information pratique, contacter Clotilde Lebrun [email protected] .
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