le travail en sequences - e

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le travail en sequences - e
LE TRAVAIL EN SEQUENCES
BRUNO DOUCEY
QU'EST-CE QU 'UNE SEQUENCE ?
1. Les définitions
Le programme favorise le travail par séquences didactiques. On désigne par là un mode
d'organisation des activité s qui rassemble des contenus d'ordre différent autour d'un même
objectif, sur un ensemble de plusieurs séances.
Une séquence est donc une unité d'enseignement dans laquelle les heures de cours (les séances)
ne sont plus considérées de manière autonome. Les diverses activités inhérentes à l'enseignement
du français y sont corrélées autour d'un objectif fédérateur.
2. La démarche
Le travail en séquences suppose que l’enseignant « rationalise et organise son enseignement en le
découpant en unités distinctes. » (J. Biard et F. Denis, Didactique du texte littéraire, p. 35). Sa démarche consiste donc
à structurer des ensembles progressifs et cohérents, à élaborer des parcours pédagogiques autour
d'objectifs clairement définis.
Cette pratique n'a de sens que si ell e s'inscrit dans le cadre plus vaste d'un projet et d'une
progression pédagogique annuels.
3. Le principe essentiel
Dans la perspective d'un travail séquentiel, les diverses activités qui participent de l'enseignement
du français ne sont plus envisagé es de manière autonome; elles sont nécessairement articulées,
corrélées, comme sont corrélées les multiples séquences qui constituent le projet pédagogique
annuel.
Le principe de base consiste à fédérer, de manière cohérente, diverses activités et divers c ontenus,
afin que les élèves perçoivent les liens fondamentaux qui unissent l'analyse des outils de la
langue à la lecture, l'écriture et l'expression orale .
MODALITES D 'APPLICATION D 'UNE SEQUENCE
1. Définir des objectifs
On ne peut construire une sé quence sans prendre préalablement en compte les savoirs antérieurs,
les lacunes, les besoins ou les attentes d'une classe.
On distinguera, à cet égard, les « pré-acquis », connaissances déjà assimilées, et les « prérequis », savoirs ou savoir -faire que le professeur estime indispensables au bon déroulement des
cours.
La mise en place d'une séquence débute donc par une claire formulation des objectifs que l'on se
fixe.
2. Gérer une durée
Les séquences conçues pour une classe peuvent être de longueur varia ble. Leur durée dépend de
l'âge et du niveau des élèves, des objectifs que l'on se fixe, de la nature même des supports que
l’on utilise. […] Les séquences peuvent être courtes (étymologiquement, une séquence est la
succession d'au minimum deux séances) et ne sauraient excéder quatre à cinq semaines.
L'organisation interne de la séquence peut être d'une grande souplesse, à condition, que l’on
parvienne à équilibrer ces trois activités essentielles et complémentaires que sont la lecture,
l'expression et la découverte des outils de la langue.
NRP N° 1 et 2 SEPTEMBRE et OCTOBRE 1997 (texte légèrement raccourci)
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3. Fédérer des activités
Un type de texte, une œuvre complète , un thème, un film, certaines modalités d'écriture, une
sortie pédagogique peuvent servir de principe fédérateur à la construction d'une séquence. La
dominante peut être ainsi littéraire, méthodologique ou plus nettement linguistique.
On veillera cependant à ne pas faire du texte littéraire, qui transcende toujours par sa
richesse les données linguistiques et les finalités méthodologiques, un simple prétexte
vide de sens.
Certaines séquences ne permettront qu'une initiation ; d'autres favoriseront un apprentissage ou
un approfondissement ; d'autres encore feront appel à la créativité de l'élève. Tout est possible en
ce domaine, à condition que l’on sache maint enir en activité ce principe fondateur : faire converger
des activités diversifiées vers un même objectif.
LE DECLOISONNEMENT EN QUESTION
BRUNO DOUCEY
Le travail en séquence n'est possible dans la pratique que si l'on articule, en les
décloisonnant, les divers apprentissages que recouvre l'enseignement du français.
DU CLOISONNEMENT ET D E SES DANGERS
1. Un enseignement compartimenté
Pratiquer le cloisonnement, c'est aborder isolément les diverses activités qui participent de
l'enseignement du franç ais au collège. Dans cette perspective, l'orthographe, la grammaire, la
lecture littéraire, le vocabulaire, la récitation ou l'expression écrite ne sont pas abordés de manière
globale, mais indépendamment les uns des autres. Ce mode d'organisation, qui a l ongtemps
prévalu, est aujourd'hui contesté et contestable. Inadapté au public hétérogène que nous
accueillons, il rend impossible toute mise en pratique des nouveaux programmes.
2. Un risque de dispersion
On entend souvent dire que ce mode d'organisation « rassure » l'élève et évite certains
phénomènes de dispersion. Que l’on veuille bien y réfléchir, et l’on se rendra compte que c'est
précisément l'inverse qui se produit.
Dans la perspective du cloisonnement, l'élève suit des cours de grammaire, d'orthogra phe, de
lecture suivie ou dirigée, chaque semaine, le même jour, à la même heure, sans nécessairement
percevoir les liens qui unissent, de manière fondamentale, ces diverses activités. «Pire encore,
après avoir fait de la grammaire au collège, l’élève l'ab andonne au lycée pour découvrir la
littérature, comme si quatre années d'enseignement n'avaient servi qu'a préparer le Brevet des
collèges. Demander à un adolescent de «fabriquer lui-même la cohérence d'un système qui en est
singulièrement démuni " curieuse façon de le rassurer !
3. Des progressions standardisées
Reconnaissons -le : le cloisonnement est moins destiné à guider le travail de l'élève qu'à faciliter la
tâche de l'enseignant. En menant, pour chaque activité, des progressions indépendantes, paral lèles
et standardisées, le professeur se donne les moyens de reconduire, d'année en année, et de classe
en classe, les mêmes pratiques et le même cheminement.
Savoir, d'expérience et a priori, que tel point de grammaire doit être abordé à tel moment de
l'année, suivre la sacro -sainte progression d'un manuel, voilà précisément ce qui « rassure »
l'enseignant. Il reste que l'élève doit s'adapter à un rythme qui n'est pas nécessairement le sien.
NRP N° 1 et 2 SEPTEMBRE et OCTOBRE 1997 (texte légèrement raccourci)
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DU DECLOISONNEMENT ET
DE SES MERITES
1. Une autre démarche
Dans la perspective d'un travail en séquence, les diverses activités inhérentes à l'enseignement
français ne sont plus envisagées de manière autonome. L’accent est mis, au contraire, sur leur
indispensable articulation.
- La lecture sera mise en relation (comme support ou comme aboutissement) avec les exercices
d'expression écrite ou orale et la découverte méthodique des outils de la langue.
- L’étude de la langue (la grammaire ) ne sera plus une fin en soi. […] Elle sera constamment
associée à la lecture, l'écrit ure ou l'expression orale.
D'une manière plus générale, le décloisonnement consiste à fédérer l'ensemble de ces activités
autour d'un projet adapté au niveau et aux besoins d'une classe. Dès lors, il serait absurde de
continuer à opposer lecture littéraire et analyse grammaticale. Dans la réalité, celle des textes et de
tout art de langage, forme et sens sont inextricablement liés. Pourquoi devrait -on à toute force,
tenter de les dissocier ?
2. Un autre mode d'organisation
La pratique du décloisonnement ne signifie pas, loin s'en faut, qu'il faille mêler, au cours de chaque
séance, diverses activités (un peu de lecture, un peu d'écriture, une leçon de grammaire, un
soupçon d'orthographe !). Chaque cours doit avoir sa dominante et des temps spécifiques
peuvent être réservés aux diverses activités qui constituent l'enseignement du français. Il ne s'agit
donc pas de confondre, au cours d'une même séance, un vaste ensemble d'apprentissages, mais
de lier, d'articuler ces apprentissages dans le cadre d'une séquence didactique. Montrer que tout
se tient ne signifie nullement que tout est dans tout.
Des limites matérielles
Sur le terrain, la pratique du décloisonnement se heurte toutefois à différents obstacles :
- Les manuels mis à la disposition des élè ves dissocient, dans la majeure partie des cas, l'étude des
textes et les activités grammaticales.
- […] les relevés de notes ou les bulletins trimestriels […] ne font nullement apparaître la logique du
décloisonnement.
- Enfin, dans l'esprit des parents, les divers enseignements pris en charge par le professeur de
français restent, à la fois, fortement cloisonnés et hiérarchisés.
En matière de pédagogie, les changements ne s'inscrivent dans la durée que si l'on explique ce que
l'on fait et pourquoi on le fait.
Katherine Weinland et Janine Puygrenier -Renault, « Cloisonnement et décloisonnement »
L'enseignement du français au Collège, Bertrand Lacoste, " Parcours Didactiques ", 1997.
NRP N° 1 et 2 SEPTEMBRE et OCTOBRE 1997 (texte légèrement raccourci)
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