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Clinique psychomotrice
des obésités
Pitié-Salpétrière
Lundi 11 décembre 2006
Pierre DALARUN, Psychomotricien (Paris)
[email protected]
« Tu ne m’apprends rien si tu m’apprends à
faire quelque chose »
Paul Valéry
Sommaire
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Précisions
Deux notions importantes
Le set-point (1) et (2)
La restriction cognitive (1) et (2)
La logique thermodynamique est-elle la bonne ?
Quel est le véritable intérêt de l’activité physique ?
Le mouvement sensoriel
Redéfinition de l’activité physique
Perturbations psychomotrices des obèses
Le goût du mouvement
Les causes de « l’agueusie corporelle »
Le corps vécu
Les déterminants du bien-être corporel
Les axes de travail
Indications de la TPM dans le traitement des obésités
Les outils
Conclusion
Bibliographie
Références Pierre Dalarun
Précisions
• L’obésité est une maladie chronique, quasi irréversible
• Elle n’est pas obligatoirement associée à un trouble du
comportement alimentaire
• Les origines génétiques ou physiopathologiques sont peu
nombreuses
• Les perturbations psychologiques sont le plus souvent
secondaires à la prise de poids
• Les approches strictement diététiques aggravent le
problème
• L’équilibre du poids ne se résume pas à une équation
thermodynamique « recettes – dépenses »
• L’obésité est un phénomène bio-psycho-social
Deux notions importantes
• Le SET-POINT
• La RESTRICTION COGNITIVE
LE SET-POINT (1)
• La stabilité du milieu intérieur implique l’existence de système
régulés ou d’homéostats. Dans le domaine nutritionnel, les
systèmes concernés permettront d’assurer l’homéostasie
énergétique (adipostat, pondérostat), l’homéostasie des
micronutriments et l’homéostasie émotionnelle.
• L’adipostat varie d’un individu à l’autre et varie pour un même
individu au cours de la vie.
• En situation de surconsommation chronique, l’individu peut
dépasser son set-point (hypertrophie des adipocytes); cette
évolution est réversible. En cas de persistance de la
surconsommation, la saturation des capacités d’adaptation de
l’adipostat peut conduire à fixer un niveau plus élevé du setpoint (hyperplasie des adipocytes); cette évolution est
irréversible.
LE SET-POINT (2)
• Il n’existe actuellement aucun moyen de mesurer le set-point.
La seule approche possible reste donc une approche clinique
faisant intervenir les effecteurs de l’homéostasie énergétique :
les sensations alimentaires. Le set-point d’un sujet peut être
défini comme le poids qu’il maintient quand il mange selon ses
sensations alimentaires.
• Il n’existe à l’heure actuelle aucun moyen de modifier le setpoint. Il n’est pas possible de se maintenir durablement audessous de son set-point, à moins d’accepter de s’affamer de
manière chronique. Le set-point est donc le seul poids qu’il
physiologiquement possible de maintenir.
Source : Zermati J.-P., « Set-point et régulation énergétique chez les personnes en surpoids : approche clinique »,
2èmes Rencontres du G.R.O.S., Paris, novembre 2004, www.gros.org.
LA RESTRICTION COGNITIVE (1)
• La restriction cognitive est une notion introduite par Herman et
Polivy (1975) et qui se définit par l’intention de contrôler ses
apports caloriques en s’imposant un ensemble d’obligations,
d’interdictions et de croyances alimentaires, dans le but de
maigrir ou de ne pas grossir.
• La restriction cognitive est un phénomène induit par les régimes
qui correspondent à une alimentation contrôlée par des facteurs
externes (cognitifs) et non plus par les facteurs internes
(homéostasie énergétique et des micronutriments).
• Elle induit un effacement des signaux physiologiques derrière
les processus de mentalisation et les émotions.
LA RESTRICTION COGNITIVE (2)
• Elle induit une alternance de phases de contrôle avec des phases
de pertes de contrôle.
• Elle induit une dégradation de la relation de l’individu avec les
aliments; l’aliment n’est plus « bon à manger » car il n’est plus
« bon à penser ».
• La relation est dominée par l’idée suivante : « Mes aliments
doivent me servir à rester mince et en bonne santé ».
• Le contenu émotionnel de l’aliment devient négatif.
• L’image du corps se détériore au rythme des pertes et des prise
de poids successives (effet « yoyo »).
Source : Apfeldorfer G., Zermati J.-P., « La restriction cognitive face à l’obésité, histoire des idées, description
clinique » in La Presse Médicale, 30,32, 1575-1580.
La logique thermodynamique
est-elle la bonne ?
« Je dépense ce que je mange » ou « Je mange ce que je dépense » ?
Le prix du kilo de graisse
L'élimination d'un kilo de
graisse nécessite une dépense
de 8000 calories soit :
•63 heures de marche à pied à 5km/h,
•15 heures de footing à 10 km/h
•30 heures de cyclo-tourisme de détente
•17 heures de natation de détente
Source : J.P. de Mondenard cité dans
"Précis de nutrition & diététique" n° 30.
L’activité physique est vécue par
les obèses comme une expiation
des pêchés alimentaires : ils
dépensent ce qu’ils mangent. Dans
cette logique l’activité physique
éloigne le pratiquant de son
propre corps, surtout s’il opte
pour des activités d’endurance
choisies en général pour leur effet
« brûle-graisse ». Autrement dit :
« j’endure pour me dé-penser, je
souffre pour ne plus penser à
manger, je mange pour ne pas
parler, je m’active pour ne pas
penser.»
Quel est le véritable intérêt de
l’activité physique ?
Augmenter les dépenses énergétiques
ou
Améliorer la régulation des apports caloriques ?
« J’ai l’impression que ce qui amène à transformer une apparence, ce n’est
pas tant des dépenses croissantes d’énergie, mais une attention
croissante à son corps et à ses fonctions. Les programmes de
gymnastique individuelle accentueront l’attention portée à la tension
musculaire, et certaines autres sensations corporelles peuvent produire
un meilleur résultat qu’une activité violente. »
Source : BRUCH Hilde, « Les yeux et le ventre », Payot, Paris, 1975.
Le mouvement sensoriel
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« Parallèlement au mouvement moteur, qui sert à faire et à se déplacer, nous appelons
mouvement sensoriel le mouvement qui, devenu conscient, permet de ressentir son
corps, de se situer et de se connaître à travers lui. »
Muscles moteurs = agonistes
(contraction)
Muscles sensoriels = antagonistes
(étirement)
« Dans la vie quotidienne, quelqu’un qui bouge sait qu’il bouge. Mais quelle différence
entre savoir que l’on bouge et sentir que l’on bouge, entre produire un mouvement et le
vivre ! »
« Si le mouvement sensoriel n’est pas suffisamment développé chez l’adulte, c’est soit
parce que dès la vie fœtale et l’enfance, il n’a pas été assez sollicité, soit parce qu’au
décours de la vie adulte, une trop grande stimulations des fonctions cognitives s’est faite
au détriment des fonctions sensorielles. »
Rendre le mouvement sensoriel conscient, c’est offrir au corps d’autres attitudes que
celles de son champ comportemental habituel, c’est donner l’opportunité au sujet de
relancer son potentiel évolutif.
Source : Eve Berger, Le mouvement dans tous ses états - Les recherches de Danis Bois, Editions point d’appui, Paris
1999.
Redéfinition de l’activité physique
L’activité physique a une triple fonction :
1- thermodynamique
Par la contraction des muscles squelettiques qui entraîne une
augmentation substantielle de la dépense d’énergie au-dessus de la
dépense énergétique de repos.
2- sensorielle
Par l’étirement des muscles squelettiques antagonistes qui entraîne une
stimulation sensorielle permettant au sujet d’éprouver son
fonctionnement corporel.
3- relationnelle
Par la mise en jeu des coordinations motrices qui permet au sujet
d’assumer son autonomie vis-à-vis de son environnement.
Perturbations psychomotrices
des obèses
• Perturbations du corps en action :
- appauvrissement du schéma corporel
- déséquilibres du tonus musculaire
- perte d’autonomie (mobilité péricorporelle,
déplacements)
• Perturbations du corps en relation :
- fragilisation de l’image du corps
- désorganisation de l’espace et du temps
- restriction de la vie relationnelle
Le goût du mouvement
« Dans la vie quotidienne, le mouvement n’est plus que le parcours monotone des mêmes
allées et venues, sans surprise. »
« Le goût d’un mouvement, c’est plus que la sensation musculaire qui s’en dégage, c’est une
sensation qui a un sens, et qui donne un sens à ses actions. »
Source : Eve Berger, Le mouvement dans tous ses états - Les recherches de Danis Bois, Editions point d’appui, Paris 1999.
Le panel gustatif :
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FLUX
continu
discontinu
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RYTHME
régulier
irrégulier
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AMPLITUDE
grande
petite
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INTENSITE
forte
faible
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VITESSE
rapide
lente
•
COORDINATION
globale
segmentaire
Les causes de
" l’agueusie corporelle "
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Certains troubles neurologiques
Certains états psychopathologiques
La douleur
La tension neuromusculaire
L’immobilité
L’hyperactivité
L’isolement relationnel
Le contrôle cognitif
Le rejet du corps
Le corps vécu
• La notion de corps vécu se réfère à l’expérience corporelle
du sujet.
• L’expérience corporelle est le substrat perceptif de nos
activités conscientes auquel nous ne prêtons normalement
pas attention parce qu’il est trop proche et trop commun.
• En laissant agir le corps ainsi conçu nous assurons notre
autonomie.
• Ainsi la démarche proposé au patient en Thérapie
Psychomotrice place-t-elle l’expérience corporelle vécue
au cœur du travail.
• Il sera précisé au patient « qu’il s’agit plus pour lui
d’apprendre quelque chose de son corps, plutôt que de lui
apprendre quelque chose à faire ». (Danis Bois)
Les déterminants du bien-être
corporel (en l’absence de douleur)
« Ne sentant pas notre corps, nous disons que nous ne nous sentons pas bien »
Thérèse Bertherat
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Se sentir détendu : lâcher-prise, présence
Se sentir solide : enracinement, densité
Se sentir équilibré : verticalité, symétrie
Se sentir entier : coordination, cohésion
Se sentir vivant : rythme, espace, émotion
Les axes de travail
• Le mouvement
• La relaxation
• Le toucher
• La respiration
• Le rythme
• L’espace
• Le dialogue corporel
• La voix
Indications de
la Thérapie Psychomotrice dans le
traitement des obésités
Restructurer le schéma corporel et consolider
l’image du corps afin de :
• Améliorer la relation à son propre corps et
secondairement prendre goût au mouvement
• Améliorer la relation à la nourriture
• Améliorer la relation à autrui
• Préparer à une éventuelle psychothérapie verbale
Les outils
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la méthode Feldenkraïs
les relaxations dynamiques
et activo-passives
la méthode de Lily
Erhenfried (Gym
Holistique)
l’Eutonie de Gerda
Alexander
la méthode de Jacques
Dropsy (Psychotonie)
La Gymnastique
Sensorielle de Danis Bois
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les Yogas
le Stretching
le Taï chi chuan
le Chi-kung
le Kinomichi de Maître Noro
la Danse
le Mime
le Théâtre
l’Eau (Aquagym)
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Conclusion
• Vivre dans la réalité ou dans l’imaginaire d’un gros corps
représente souvent un ensemble de difficultés quotidiennes
d’ordre physique, psychologique ou relationnel.
• L’approche psychomotrice propose un cadre de travail où
le patient pourra développer tant sa capacité à se mouvoir
qu’à s’émouvoir.
• Cette approche s’intègre le plus souvent à une démarche
co-thérapeutique où le médecin tient sa place de
« prescripteur » et de référent.
Bibliographie
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Basdevant A. & Guy-Grand B., « Médecine de
l’obésité », Flammarion, Paris, 2004
Waysfeld B., « Le poids et le moi », Armand Colin,
Paris, 2003.
Zermati J.-P., « Maigrir sans régime », Odile Jacob,
Paris, 2002.
Le Barzic M., Pouillon M., « La meilleure façon de
manger », Odile Jacob, Paris, 1998.
Bourque D., « À 10 kilos du bonheur », Les Editions de
l’Homme, Québec, 1991.
Références Pierre Dalarun
Conférences récentes :
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« Les étapes d’une restructuration de l’image du corps », in Revue de nutrition pratique n°15,
Dietecom, Paris, 2002.
« Apports de la thérapie psychomotrice au traitement de obésités », 3ème Rencontre des
professionnels de rééducation APHP, Paris, 2003.
« Du corps à l’être », Journée d’Automne du G.R.O.S., Paris, novembre 2003, www.gros.org .
« Poids et conscience du corps », 2èmes Rencontres du G.R.O.S., Paris, novembre 2004,
www.gros.org.
Ecrits récents :
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« Psychomotricité et comportement alimentaire » in Information Diététique n°1, 2000.
« Bouger avec un gros corps » in Diabète Education, vol 12, n°4, 2002.
« Obésités, psychomotricité et activité physique » in Information Diététique n°1, 2002.
« Mieux considérer son corps » in 60 millions de consommateurs, HS n°116, avril-mai 2004.
« Activité physique et traitement de l’obésité » en collaboration avec J-M Oppert, in Médecine de
l’obésité, Basdevant A. & Guy-Grand B., Flammarion, Paris, 2004.
« Se réconcilier avec son corps » in 60 millions de consommateurs, HS n°127, juin-juillet-août 2006.