Les forts de café : Ils veillent au grain
Transcription
Les forts de café : Ils veillent au grain
Janvier 1999 Télérama Verlet cafés et thés Paris texte PIERRE PINELLI photo FRÉDÉRIC FROUMENT / POSE B Las du caoua fadasse du troquet d'en face ? Pour savourer un vrai petit noir, mieux vaut s'abreuver à la source, chez un bon torréfacteur. En voici neuf, qui servent la crème du café parisien. Ils veillent au grain J anvier. Un kiosque à journaux du faubourg Saint-Antoine. Température : brrr. Une passante lance au kiosquier transi : « Je vous apporte un café tout à l'heure ! - Ah là là, merci ! » C'est tout le pouvoir du caoua : réconforter le corps et l'esprit. Cette drogue douce que Proust consommait dur (une quinzaine de tasses par jour) aurait été introduite à Paris, en 1669, par Soliman Aga Mustapha Raca, ambassadeur de Turquie. Depuis ce jour, à l'interrogation rituelle « Ce sera quoi ? », l'écho répond invariablement « Un café. » Mais attention, pas n'importe quel jus. A l'image de Jean Lenoir, le « nez » plus ultra de la profession*, beaucoup de Parisiens, lassés des lavasses servies par de trop nombreux bistrots, préfèrent siroter leur petit noir chez Verlet, Lapeyronie, Guiraud ou à la brûlerie Maubert... C'est-à-dire en direct live chez des artisans torréfacteurs qui ont ouvert leur bar à café. Une aubaine. Le bar-boutique permet de déguster les meilleurs crus en assistant au travail du torréfacteur qui opère souvent dans le magasin même, bravant ainsi un arrêté préfectoral interdisant théoriquement la torréfaction à Paris au motif que cette activité pollue l'atmosphère (interdit de rire). On peut ensuite emmener son grain préféré, entier ou moulu sur mesure, avec le parfait manuel du Père Colateur. Et si les produits à emporter sont en moyenne 20 % plus chers qu'au supermarché, la tasse d'un grand arabica vaut le même prix qu'une bistouille de brasserie ! Hélas, ils ne sont plus qu'une petite vingtaine de torréfacteurs et de brûleries à diffuser leur délicieux parfum sur Paris. L'antique brûlerie de l'Odéon, fondée en 1853, et la pittoresque maison Daval ont fermé l'automne dernier. * L ' oenol og ue à qu i l'on doit le N ez du vin ( j eu- enc yclo pédie ) n o u s o u v re a ujou rd'hu i le diction na ire o lf a c t if du c a f é : pa s mo ins d e 8 5 0 co mpo sé s odorants ! Edit é s o us la f o r me d'un co ff re t l u d op éda gogique disponible en t ro is ver s io ns ( 6 , 1 8 o u 3 6 flaco n s d ' arô mes), il est en vente da ns les Fna c à pa r t ir de 2 4 9 F. Cafés Verlet Chaque jour, Eric Duchossoy, fils et petit-fils de torréfacteur, parcourt les deux cents mètres qui séparent la boutique de la rue Saint-Honoré de l'atelier de torréfaction, rue Montpensier. Il s'isole une heure, le temps de cuire quelques dizaines de kilos de café. « Vous entendez ces petits craquements ? Il chante, il m'appelle », explique le docte artisan en extrayant une poignée de grains de la fournaise. En une vingtaine de minutes, sous l'effet d'une forte chaleur (entre 150 et 250° C), la pigmentation des fèves a viré du vert céladon au ton « robe de bure », un brun chaud aux nuances mordorées qui laisse présager une boisson parfumée. Il est temps de refroidir la précieuse fournée à l'aide d'une espèce de sèche-cheveux. Une fois son travail accompli, Eric Duchossoy regagne le magasin Verlet qui arbore en vitrine sa riche parure de fruits confits et d'arabicas rares. Il décharge les sacs, range le diable, met son tablier, repasse derrière le comptoir. 119 ans que ça dure... 2 5 6 , r u e S ai n t- H o n o ré , 1 e r, 0 1 - 4 2 - 6 0 - 6 7 - 3 9 . O u ve r t tl j sauf di m. e t l u n ., 9 h - 1 9 h . A b o i re s u r p l ace ( ar ab i c as u n i q u e m ent, ori gi ne s e t m é l an g e s ) : M ar ago g y p e d u M e x i q u e , M ys o re d' I nde , Bugi su d ' O u g an d a... A e m p o r te r ( ar ab i c as u n i q u e m e n t, 2 50 g) : Tarazzu To u r n o n d u Co s ta R i c a, Car aco l i d u Cam e ro u n , A n t i gua Vi dor y du G u ate m al a... ©2013 - Design & numérisation : Greg NUÑEZ - Tous les logos, textes et photos appartiennent à leurs propriétaires respectifs. Le présent article n'est qu'un extrait de l'article original appartennant à la publication représentée. Les forts de café