«Un temple bouddhiste intégré à l`architecture suisse»
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«Un temple bouddhiste intégré à l`architecture suisse»
Les Acteurs de l’Immobilier Les Acteurs de l’Immobilier Daniel Rinaldi (à dr.) et Pascal Anderegg «Un temple bouddhiste intégré à l’architecture suisse» Il est politiquement Vert et spirituellement «plutôt athée, mais avec une forte sympathie pour le bouddhisme». Quand on lui a demandé de dessiner un temple à Genève, Daniel Rinaldi, avec son associé Pascal Anderegg, a imaginé une construction fondée avant tout, au-delà des différences de styles, oriental ou occidental, sur la recherche de l’harmonie avec la nature et l’environnement. 66 N u m é r o 8 j u i n – a o û t 0 7 67 Les Acteurs de l’Immobilier L e temple est situé à Genève, tout près de l’aéroport de Cointrin. Un petit chemin, le chemin Terroux, qui respire le calme et la tranquillité, à deux pas de la grand-route et du bruit des avions qui décollent et atterrissent sans cesse. Inauguré l’année dernière, c’est un temple bouddhiste qui a déjà une longue histoire et qui a même failli ne pas naître. C’est aussi, à sa manière, un témoignage, non pas de ce sempiternel choc des civilisations dont on nous rebat les oreilles, mais d’un dialogue éclairé et respectueux des civilisations et des cultures. L’aventure commence il y a près de 10 ans, à la fin 1999. L’architecte genevois Daniel Rinaldi et son associé, Pascal Anderegg, sont approchés par une sympathisante bouddhiste qui, avec diverses associations, souhaite faire construire un temple dans la cité de Calvin. Un projet à risque, puisque le financement manquait totalement à l’appel! «Je me suis tout de suite documenté sur l’architecture bouddhique, confie Daniel Rinaldi, toujours curieux et enthousiaste. Et j’ai décou- «Certains puristes considèrent que le temple idéal serait... une grotte!» 68 N u m é r o 8 Les Acteurs de l’Immobilier vert qu’il n’existe pas, contrairement à ce qui existe dans le christianisme pour les églises ou les cathédrales, de règles codifiées ou de principes élaborés sur la forme que doit avoir un temple. Certains puristes disent que le bâtiment idéal, c’est la grotte: c’est-à-dire rien! C’est pourquoi l’architecture des temples varie énormément dans les pays où le bouddhisme s’est développé. On trouve aussi bien des formes dépouillées, un peu minimalistes, comme au Japon, que des formes très complexes, très chargées, pleines de détails et de rajouts, comme en Chine ou en Thaïlande». Faute de règles précises et contraignantes, l’architecte a toutefois constaté qu’il existe un principe commun aux différents courants du bouddhisme: le chiffre 8 fonctionne, symboliquement, comme la référence qui assure une sorte d’équilibre supérieur. D’où son choix de concevoir une construction à la géométrie stricte et rigoureuse: deux carrés identiques disposés de part et d’autre d’un rond central. Pour marquer le caractère particulier du bâtiment - lieu public, mais fonction sacrée - il aménage un cheminement qui permet de passer progressivement du collectif (l’extérieur) au personnel et même à l’intime (le cœur réservé à la méditation et à la prière). Mais le temple qu’il imagine alors, Daniel Rinaldi ne le conçoit pas hors sol et au milieu de nulle part. Il le voit dans un lieu donné, dans une architecture donnée. «J’ai voulu un bâtiment sur un seul niveau, précise-t-il, car il est situé en zone villa; j’ai voulu qu’il ne dérange pas le voisinage et qu’il s’intègre parfaitement dans son environnement». Premières esquisses, présentation et discussions avec les voisins… Résultat, aucune opposition - quel exploit à Genève! - et entrée en force des autorisations nécessaires en janvier 2001. Mais il manque encore et toujours les fonds nécessaires… Ce n’est que trois ans plus tard, alors que le projet paraît voué à demeurer mort-né, qu’un nouvel acteur entre en scène: une association de Taiwan, l’International Bouddhist Progressive Society. Daniel Rinaldi fait la tournée des temples de l’île chinoise. «Je leur ai dit d’emblée que je ne voulais pas faire la même chose que chez eux et que les proportions des bâtiments étaient aussi liées à la taille des pays. A Taiwan, il y a des temples qui font 50 000 m2, alors que le nôtre fait 1000 m2! Ils ont tout de suite compris». Dès lors, tout va aller très vite: ouverture du chantier en janvier 2005, fin des travaux en juin de l’année suivante. Une construction, on l’a dit, très géométrique; des matériaux très bruts et très naturels qui dialoguent subtilement et se répondent dans une sorte de jeu des apparences: un béton qui donne l’illusion parfaite des planches de bois, et du bois naturel qui, travaillé de manière très dure, très lisse, donne l’illusion inverse d’une espèce de surface métallisée. «Je suis d’origine catholique mais plutôt athée, remarque Daniel Rinaldi, qui a cependant tenté – en vain, hélas! Le prêtre a refusé... – de faire baptiser ses enfants. Mais j’ai un immense intérêt pour l’aspect culturel de la religion. La plupart des villes sont littéralement structurées par les bâtiments religieux. Les cathédrales sont souvent au sommet d’une colline ou au centre d’un espace qui s’est organisé autour d’elles. Quand je vais en Italie avec mes enfants, je leur fais découvrir ces constructions magnifiques. Je suis membre fondateur des Verts, je crois à une approche de la vie qui englobe et qui respecte tout l’environnement. Je ne suis pas bouddhiste, mais ma sensibilité correspond à cette philosophie de la sérénité et de l’équilibre». n Jean Varela j u i n – a o û t 0 7 69