Messe chrismale, le mercredi 16 avril 2014 Homélie de Mgr Eric

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Messe chrismale, le mercredi 16 avril 2014 Homélie de Mgr Eric
Messe chrismale, le mercredi 16 avril 2014
Homélie de Mgr Eric Aumonier
Le mystère de chaque personne, et encore plus la grâce de la sainteté, de la
ressemblance au Christ échappent aux sondages et aux repérages sociologiques
ou à la toile d’internet. Je ne parle pas de l’idée de sainteté, ni du catalogue des
saints répertoriés, ni ce qu’on peut raconter d’eux, ni même du nombre des
saints, de ces « myriades de myriades » évoquées par l’Apocalypse, mais je
parle de ce qui fait vivre les saints en chair et en os, de ceux et celles que nous
croisons tous les jours.
Je parle de ces hommes et de ces femmes qui avancent dans la file des pauvres
pour se faire baptiser par Jean Baptiste, et au milieu desquels se trouve Jésus. De
cet homme et de cette femme qui vivent la vie de tout le monde au bureau ou au
travail, à la maison ou dans la rue. De cet homme et de cette femme qui
cherchent Dieu, et que Dieu le premier les cherche. De ces catéchumènes, de ces
convertis à l’occasion de leur prochain mariage ou de leur confirmation !
Je parle de l’action et de la présence efficace de l’Esprit Saint et sanctifiant se
manifestant tout au long de nos vies à travers les sacrements.
Je parle de la grâce du Christ, de l’onction de l’Esprit qui nous donne de goûter
le commandement de l’amour et de chercher à le traduire dans notre
comportement quotidien, non pas d’abord par des grandes déclarations mais par
l’humble pratique des conseils évangéliques.
Notre manière d’accomplir le commandement de l’amour est profondément
humaine, mais si on y réfléchit bien et si nous regardons Jésus lui-même, elle est
en même temps la manière divine d’humaniser nos relations. Nous avons tous
ici un examen de conscience à faire, pour demander la grâce de mieux vivre
vraiment de l’onction de l’Esprit de Jésus.
En regardant l’action de l’Esprit dans le Christ et chez ceux qui appartiennent au
Christ, nous voyons la délicatesse et la force chaste de l’amour. Dans son
éducation des Douze, dans sa conduite avec tous les disciples et avec ceux et
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celles qu’il rencontre, Jésus montre l’intensité de son amour. Il ne force et ne
retient personne, il ouvre l’espace et ne le referme pas.
C’est auprès de lui que nous apprenons la chasteté et la délicatesse de l’amour.
Le principal lieu de l’apprentissage et de l’exercice de ces relations est ou
devrait être la famille. Avec ses joies mais aussi ses blessures, avec le deuil ou
la séparation, mais aussi les retrouvailles et le pardon. Chacun est au service des
autres, on s’y ouvre à d’autres relations. Ce n’est pas le lieu d’un pouvoir mais
celui de l’amour désintéressé et chaste.
Il en est de même dans le célibat consacré. Quand il est chaste, c’est-à-dire
généreux, serviteur de la liberté des uns et des autres, oublieux de soi-même,
joyeux, il est un signe éloquent de l’amour désintéressé de Dieu
Ressourçons nous à la source de cette grâce, sans hésiter à nous demander : où
en sommes-nous de nos relations conjugales, filiales, paternelles et maternelles,
avec les risques de possession, ou l’abus d’autorité. Où en sommes-nous de nos
relations de prêtres entre nous et avec tous les fidèles, jeunes et âgés, bien
portants et malades ? Avec le peuple confié pour un temps et les relations
gratifiantes et les autres ? Où en sommes-nous des jalousies entre frères et
soeurs et entre confrères ?
Nous regardons aussi Jésus rempli de l’Esprit Saint, choisissant la pauvreté et
nous l’écoutons donner ses consignes à ses disciples : « quand vous entrerez
dans une ville ou un village, n’emportez ni chaussures ni sandales… ». Je pense
à la générosité évangélique de tous ceux d’entre vous qui sont engagés dans la
catéchèse ou dans l’ensemble des tâches qui servent l’annonce de l’Evangile et
qui ont vraiment pris au mot les paroles du Christ.
Pour évangéliser c’est-à-dire pour annoncer de façon crédible l’Evangile, pour
sortir des sentiers battus, nous ne voulons pas singer les méthodes ni prendre
forcément tous les moyens du monde pour une efficacité qui est celle du monde.
Là aussi, il n’est pas mauvais de nous examiner. Nous laissons nous guider par
l’Esprit Saint dans nos choix matériels ? Sommes- nous vraiment convaincus par
la parole du Christ, quand par exemple nous nous plaignons de « manquer de
moyens » ? Nous ferions plutôt mieux de nous demander si tous ont le
nécessaire pour vivre et si nous partageons suffisamment, même entre nous,
nous qui parlons tant de solidarité et de justice dans le monde.
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Notre Pape nous invite à entendre ce que nous disent et comment vivent les
pauvres cette ressemblance avec le Christ. Par pauvreté il s’agit de la béatitude
des pauvres. Une église diaconale n’est pas une église qui se penche de haut sur
la misère du monde mais l’Eglise du Christ qui vit pauvrement et sait recevoir
des pauvres et des humbles. Ces derniers ont beaucoup à nous apprendre. Par
exemple, ils ne se servent pas de leurs connaissances livresques pour se
fabriquer un Evangile qui varie à chaque saison ou à chaque mode. Ils nous
aident à voir la force, le sens littéral de l’Evangile…et à découvrir où sont les
vraies misères à soulager.
A la lumière de l’Esprit Saint, Jésus, à travers les évènements et les rencontres,
Jésus voit son Heure se dessiner lors de l’arrestation de Jean Baptiste, à travers
l’opposition et le refus, la révolte contre Dieu qui se focalise sur lui, et bien sûr
pendant les derniers jours avant Pâques et à Gethsémani. En recevant du Père les
douze tels qu’ils sont, à travers la faim et la soif à rassasier, les disciples à
instruire et à envoyer, en supportant et en éduquant leurs incompréhensions.
C’est l’obéissance filiale au Père, comme le Fils nous la montre et nous la
donne.
En regardant Jésus, nous comprenons ce que veut dire l’écoute et la confiance
filiale. Il l’apprend à ses disciples et d’abord à Pierre lui-même, notamment
quand il lui annonce que viendra un jour où « un autre le conduira » ?
Vivre les changements professionnels et les mutations ni comme une fatalité ni
comme des catastrophes même si ce sont des remises en cause et un saut dans
l’inconnu d’un pays ou d’une situation, vivre les épreuves de la maladie ou du
deuil comme des appels et non comme des absurdités, l’accueil de nominations
comme l’accueil d’une mission et donc d’une confiance faite et d’une parole où
le Seigneur est présent, rien de cela n’est facile.
Frères baptisés laïcs et consacrés dans la vie religieuse ou une autre forme de vie
donnée, frères diacres, priez pour nous prêtres qui allons bientôt renouveler les
promesses de notre ordination.
Nous vous avons reçus comme frères et sœurs. C’est notre joie. Vivre la foi et
l’espérance avec vous est notre joie. Etre à votre disposition de jour comme de
nuit pour que vous receviez les signes du pardon, de la guérison, de la joie est
notre joie. Ouvrir devant vous et avec vous l’Evangile est notre joie. Renouveler
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devant vous ce soir les promesses de notre ordination est un acte de confiance et
de foi renouvelée en la puissance du Seigneur, qui se déploie dans nos
faiblesses.
Priez pour que nous ne nous découragions pas, que nous sachions exercer le
ministère confié par le Bon Pasteur. Nous voulons qu’il soit notre seul modèle.
Merci pour votre patience devant nos limites, nos faiblesses, nos erreurs ou nos
péchés.
Et vous frères prêtres, dans votre prière pour les fidèles à chaque messe,
demandez avec moi pour nous tous la sainteté et le courage de la foi, en
remerciant le Seigneur pour ces trésors de grâce que les fidèles nous montrent
chaque jour.
Que la Vierge Marie et saint Louis intercèdent pour nous !
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