Motivation(s) managériale(s), financement et croissance de l

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Motivation(s) managériale(s), financement et croissance de l
Motivation(s) managériale(s), financement et croissance de l'entreprise
La croissance d'une entreprise est un processus complexe à analyser. Depuis quelques
décennies, la recherche se focalise sur la détection des facteurs influençant la croissance et la
performance de l'entreprise. L'objectif poursuivi est d'une part d'affiner la prédiction de réussite ou
d'échec des entreprises et, d'autre part, dans une approche plus proactive, de contrôler et d'agir sur ces
facteurs pour améliorer la performance de l'entreprise et pour limiter le risque de faillite. Les critères
objectifs comme les ratios de structure financière, les ratios de rentabilité ou encore l'expérience
entrepreneuriale, sont souvent utilisés et considérés comme les seuls facteurs déterminants du devenir
des entreprises [Cooper et al., 1994]. Il existe cependant une variance dans les trajectoires de
croissance à l'intérieur d'un groupe d'entreprises ayant des caractéristiques « objectives » similaires
[Delmar et Davidsson, 2000]. L' explication de la diversité des trajectoires de croissance doit donc
tenir compte d'autres facteurs, plus subjectifs, ayant trait à la psychologie des dirigeants. Dans ce sens,
de nombreux travaux issus de la psychologie montrent que le comportement de l'individu est loin
d'être homogène et est régi par différentes variables telles que les émotions, la motivation,... . Il s'en
suit que la composante cognitive du dirigeant est une variable potentiellement importante dans
l'explication de la trajectoire de croissance des entreprises.
Cette thèse s'inscrit dans une démarche visant à mieux expliquer la croissance des entreprises.
A ce titre, elle s'inscrit dans la lignée des travaux traditionnels qui cherchent à déterminer les facteurs
stimulants et inhibants (les « freins ») à la croissance des entreprises. Elle se démarque cependant des
travaux antérieurs en mettant en évidence l'impact d'un facteur clé de la personnalité des dirigeants, à
savoir la motivation. L'objectif de cette thèse est donc de montrer que la motivation des dirigeants est
un vecteur incontournable de la croissance des entreprises.
Pour répondre à cette problématique, nous nous sommes intéressés à trois stades
fondamentaux de la vie d'une entreprise, c'est-à-dire sa création, son développement et enfin sa
possible défaillance.
Le premier chapitre est consacré à l'étude de l'impact du type motivationnel de l'entrepreneur
naissant sur la probabilité de création de l'entreprise. Tout d'abord, ce chapitre corrobore l'idée que le
gain financier n'est pas l'unique leitmotiv pour se lancer dans une activité entrepreneuriale [Carter et
al. (2003); Shane, Kolvereid et Westhead (1991)]. En effet, quatre types de motivations chez les
entrepreneurs
naissants
sont
détectés
:
le
succès
financier,
l'indépendance,
la
reconnaissance/développement de soi et autrui1. Une approche explicative est mise en place pour tester
1
Ce type motivationnel correspond au cas où l'entrepreneur décide de se lancer dans une activité
entrepreneuriale afin de continuer l'activité familiale ou dans le but de constituer un héritage à léguer à ses
l'effet direct ainsi que l'effet indirect du type de motivation des entrepreneurs naissants (médiation par
l'effort) sur la probabilité de création de l'entreprise. D'un point de vue général, les résultats montrent
que le type de motivation affecte de manière différenciée l'issue du processus de création. La
motivation par le succès financier est le seul type de motivation influençant positivement la création
d'entreprise tant directement qu'indirectement (via l'effort). La motivation par autrui et la motivation
fondée sur la recherche de reconnaissance/développement de soi ont uniquement un effet direct sur la
probabilité de création, effet qui est respectivement positif et négatif. La motivation par l'indépendance
a, quant à elle, un effet positif mais seulement indirectement sur le lancement de l'entreprise. Au final,
nous concluons que les motivations par le succès financier, par autrui et par l'indépendance
contribuent
favorablement
à
la
création
d'entreprise
alors
que
la
motivation
par
la
reconnaissance/développement de soi affecte négativement cette probabilité.
Le deuxième chapitre se concentre sur deux types de motivations qui permettent d'augmenter
la probabilité de création (cf. chapitre 1) : la motivation par le succès financier et la motivation par
l'indépendance. Dans cette partie théorique, un modèle est proposé sur le choix de financement avec
lequel l'entreprise se développera. Contrairement aux modèles proposés dans la littérature, celui-ci
intègre et traite la composante motivationnelle de l'entrepreneur comme une variable à part entière.
L'entrepreneur a la possibilité, pour développer son entreprise, de choisir un financement par dette
bancaire ou un financement par capital-risque. Ce choix est conditionné, entre autres, par son type de
motivation. L'entrepreneur doit faire un arbitrage entre la conservation des droits de contrôle et les
cash-flows, autrement dit entre le fait de préserver son indépendance et le fait de privilégier ses gains
monétaires. Les résultats de ce modèle montrent que la sélection du mode de financement est
différente selon le type de motivation entrepreneuriale. Ainsi, un entrepreneur motivé par
l'indépendance privilégie la dette bancaire. Le choix de financement d'un entrepreneur motivé par le
succès financier est plus complexe et dépend des compétences managériales de l'entrepreneur. Ce type
d'entrepreneur opte pour la dette bancaire s'il dispose de fortes compétences managériales. Il privilégie
en revanche le financement par capital-risque si ses compétences managériales sont faibles. Il s'agit de
l'aide (soutien managérial) apportée par le financier pour augmenter la performance de l'entreprise et,
ce faisant, les gains monétaires de l'entrepreneur qui oriente cet entrepreneur vers ce mode de
financement.
Une forte croissance non contrôlée peut amener à des conséquences néfastes pour l'entreprise,
à savoir provoquer sa faillite. L'étude de la défaillance de l'entreprise est l'objet de notre troisième
chapitre. Dans un premier temps, une typologie a été créée pour caractériser et classifier les entreprises
selon leur trajectoire de croissance et six groupes ont été détectés. Dans un deuxième temps, une
démarche comparative a été appliquée à la typologie pour constater les différences entre les cinq
profils des entreprises. Le premier constat établit que, malgré l'avantage d'une forte croissance, les
enfants. Il peut également entreprendre pour suivre le même parcours qu'une personne qu'il admire. Autrement
dit, il entreprend non pas pour lui mais pour les autres
entreprises se situant dans un contexte d'hyper-croissance ont une probabilité de défaillance plus
élevée comparée aux entreprises ayant une croissance plus modérée. En partant de ce constat, une
approche explicative est appliquée aux entreprises en hyper-croissance afin de comprendre pourquoi
certaines d'entre elles survivent alors que les autres deviennent défaillantes. L'analyse, basée
exclusivement sur des indicateurs financiers (profitabilité, rentabilité, productivité), montre que la
faiblesse du taux de marge ainsi que le taux de rentabilité économique sont des facteurs explicatifs de
la défaillance de ce type d'entreprises. Enfin, cette étude montre que l'explication de la défaillance des
entreprises dépend du mode de croissance de ces dernières. Autrement dit, les facteurs qui expliquent
la défaillance des entreprises en hyper-croissance ne sont pas les mêmes pour comprendre la faillite
des entreprises ayant une croissance plus modérée. Si l'hyper-croissance peut sembler au départ être
une aubaine, elle peut vite se transformer et devenir un calvaire pour une entreprise si elle n'est pas
maîtrisée.