Résumé: Les jeunes face au défi du développement durable
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Résumé: Les jeunes face au défi du développement durable
Résumé: Les jeunes face au défi du développement durable –Résultats d’une enquête dans les classes terminales des lycées luxembourgeois 1. Concept et méthodologie Un projet de recherche de l’Université du Luxembourg L’étude „Les jeunes face au défi du développement durable“ a été réalisée en 2008 dans le cadre du projet de recherche „L’éducation au développement soutenable à l’école luxembourgeoise“ de l’Université du Luxembourg. Elle constitue un apport à la décennie que les Nations Unies ont proclamée pour la période de 2005 à 2014 pour intégrer le développement durable dans les systèmes éducatifs. Dans ce contexte tous les pays membres, donc également le Grand Duché de Luxembourg, sont appelés à mettre en œuvre au niveau national une stratégie d’éducation au développement durable. Auteurs de l’étude: Théid Faber, ass.professeur (responsable de projet) de l’unité de recherche EMACS et Dr. Thomas Boll (collaborateur scientifique) de l’unité de recherche INSIDE: L’éducation au développement durable Le but de l’étude était de faire une analyse des attitudes, des connaissances, des compétences et des comportements des jeunes en classe terminale des lycées, afin de disposer d’éléments objectifs en vue d’une intégration plus poussée de ce volet d’éducation dans le système éducatif. L’éducation au développement durable entend motiver les citoyen/nes (et en particulier les jeunes) en vue d’une participation active au développement durable de la société et à leur procurer les compétences d’action nécessaires à cet effet dans le contexte - d’un comportement durable au niveau individuel (p.ex. utilisation rationnelle de l’énergie, achat de produits fair trade, utilisation de formes de mobilité douce) et - d’un engagement y relatif au niveau citoyen / politique (p.ex. engagement public pour la sauvegarde du climat ou l’équité Nord-Sud ; engagement dans un groupe environnemental ou du tiers-monde). C’est la conception d’un avenir durable qui est au centre des préoccupations : comment voyons-nous notre société dans 30 ou 50 années ? Est-ce que nos visions sont compatibles avec un développement durable ? Que faut-il entreprendre pour les rendre soutenables ? Les questions abordées par l’enquête L’étude devait permettre en particulier d’analyser (1) l’intérêt des jeunes par rapport au défi du développement durable ; (2) l’importance qu’ils attribuent aux différentes dimensions du développement durable (aspects écologiques, économiques et sociaux ainsi que la participation politique) ; (3) le niveau de leurs préoccupations par rapport à l’avenir dans ce contexte ; (4) à quel degré ils estiment pouvoir contribuer – et au niveau individuel et au niveau collectif – à l’implémentation des buts d’un développement durable ; D’autres questions avaient trait à (5) leurs connaissances (notamment en matière d’interrelations p.ex.de relations cause à effet) et leurs compétences de jugement et d’action ainsi que (6) leur appréciation de l’enseignement scolaire suivi jusqu’à présent dans ce contexte ainsi que leurs attentes par rapport à l’école de demain. Université du Luxembourg www.uni.lu 1 La démarche L’échantillon comprenait 827 jeunes des deux sexes provenant de 52 classes terminales représentatives de l’enseignement secondaire classique (ES) et de l’enseignement secondaire technique » (EST) à l’exception du régime professionnel. L’enquête a été réalisée dans les établissements scolaires à l’aide de la plateforme TAO (Testing Assisté par Ordinateur), un tool innovatif pour des enquêtes online avec de grands échantillons. 2. Les résultats 2.1. Motivation élevée des jeunes en vue d’une participation à un développement durable (1) Intérêt élevé pour des questions écologiques, mais peu élevé pour des questions politiques L’hiérarchie en matière des intérêts des jeunes est très claire : 84.0 % des élèves s’intéressent moyennement à très fortement pour des sujets écologiques (p.ex. protection de l’environnement ou des animaux). Pour des questions sociales (p.ex. conditions de vie dans des pays en voie de développement ou personnes défavorisées au Luxembourg) ce pourcentage est de 73.0 % et pour des questions de politique nationale et internationale de 61.0 %. (2) Les finalités du développement durable : créditées d’une grande importance Une majorité très claire d‘élèves attribuent une grande voire une très grande importance aux finalités centrales du développement durable : les finalités écologiques figurent en tête (83,7%), suivies de celles du domaine social (75,1%) et économiques (71,8%). La participation politique est jugée nettement moins importante (58,3 %). 39,2 % des élèves estiment ainsi, qu’il n’est pas important du tout ou pas tellement important, de donner aux hommes et femmes politiques leur avis en matière de politique pour les jeunes. (3) Le changement climatique et les conditions de vie des générations futures: au premier rang des préoccupations pour l’avenir Les problèmes environnementaux figurent également au 1er rang en ce qui concerne l’avenir. 84,3 % indiquent avoir des préoccupations relativement grandes voire très grandes y relatives. Suivent les préoccupations en relation avec les conditions de vie dans les pays en voie de développement (83,5 %) et des préoccupations face aux pays en voie de développement respectivement émergents (71,8 %). (4) Les sciences et la technologie respectivement la faculté d’adaptation comme espoirs en matière de changement climatique Pour 37,2 % des élèves, un grand voire très grand espoir réside dans les sciences et la technologie pour surmonter le réchauffement climatique ; pour 33.3 % c’est la faculté d’adaptation des hommes et de la nature au changement climatique, et pour 32.6 % le grand / très grand espoir que le climat retrouvera de lui-même dans un équilibre. Fait remarquable : seulement 28,5 % des élèves mettent de grands / très espoirs dans un changement de style de vie des hommes et des femmes dans les pays riches en vue de contribuer à la lutte contre les changements climatiques. (5) Le comportement individuel jugé plus efficace que l’engagement public / politique Alors qu’environ 90 % des élèves attribuent une efficacité élevée au comportement au niveau individuel (91,4 % en relation avec la lutte contre le changement climatique ; 87,7 % en relation avec l’équité Nord-Sud), ce pourcentage tombe à 60 % des élèves en ce qui concerne l’engagement au niveau public / politique (p.ex. pétition, démonstration). Un engagement au sein d’un groupement environnemental ou Nord-Sud est toutefois crédité d’une efficacité relativement importante. (6 Différences en relation avec le sexe et la section suivie par les élèves Les intérêts et l’importance ainsi que les préoccupations concernant les aspects écologiques et sociaux revêtent un impact plus élevé chez les élèves de sexe féminin que chez ceux de sexe masculin ; les questions politiques intéressent toutefois davantage ces derniers. Université du Luxembourg www.uni.lu 2 Au sein de l’enseignement secondaire classique l’importance attribuée aux aspects écologiques est plus grande dans les sections B respectivement C (Mathématiques et informatiques respectivement sciences naturelles et mathématiques) que dans la section D (sciences économiques et mathématiques). Au sein de l’enseignement secondaire technique l’intérêt pour les questions politiques est très peu développé chez les éducateurs. 2.2. La pensée systémique (établissement d’interrelations): peu développée en relation avec le développement durable A l’exemple du phénomène de changement climatique: (1) Connaissances partielles et compréhension limitée d‘interrelations En moyenne les élèves n’ont indiqué que six sur dix phénomènes intervenant dans le changement climatique (causes et effets) ; par ailleurs seulement trois sur dix relations „causes à effets“ ont en moyenne été explicitement indiquées. (2) Interrelations peu établies avec des aspects économiques et sociaux Alors qu’un pourcentage élevé des élèves (88.5 – 90,3 %) identifie correctement les causes et effets scientifiques du changement climatique (notamment les émissions CO2, le réchauffement, la fonte des glaces polaires, l‘augmentation du niveau de la mer), les causes économiques et sociales (notamment la production industrielle, la circulation routière, le chauffage domestique, le phénomène des réfugiés climatiques) sont perçus à un bien moindre degré (39,2 – 64,9 %). (3) Un mélange de représentations exactes et erronées A côté des représentations correctes, on retrouve auprès d’une proportion relativement élevée d’élèves également des représentations erronées sur le changement climatique. On constate un mélange avec d’autres problèmes causés par l’homme respectivement avec des phénomènes naturels. Une relation est ainsi faite p.ex. avec le trou d’ozone (83,4 %), les pluies acides (45.2 %) et le phénomène des tsunamis (49,2 %) et de tremblements de terre (32,5 %). (4) Prise en considération inégale des différentes dimensions du développement durable – négligence des aspects sociaux Il ressort de situations-problèmes impliquant à la fois des aspects écologiques, économiques et sociaux que ce sont en premier lieu les dimensions écologiques (41,5%) ou économiques (19 %) qui dominent. Les motifs sociaux sont rarement pris en considération (1 %). Une démarche prenant en considération deux dimensions est retenue par 29,8 % des élèves. La combinaison « écologie – économie » est la mieux représentée (19,1 % de tous les élèves) Une prise en considération simultanée des trois dimensions est très rare (2,.5 % des tous les élèves). 2.3. Les comportements effectifs au niveau individuel respectivement au niveau collectif /politique: deux paires de manche (1) L’engagement en tant que consommateur individuel varie selon le champ d‘action 79,2 % des élèves indiquent utiliser (parfois, souvent, toujours) de façon rationnelle l’énergie au domicile ; le pourcentage correspondant à l’utilisation de formes douces de la mobilité est de 48.4 % et de 34.0 % seulement en ce qui concerne le comportement de consommation (p.ex. préférence pour des produits bio ou fair trade). Université du Luxembourg www.uni.lu 3 2) Engagement au niveau collectif / politique: peu développé 30.7 % des élèves rapportent avoir participé pendant l’année précédant l‘enquête à une pétition, une démonstration ou un stand d’information en relation avec une cause telle que la protection de l’environnement naturel, la protection des animaux, les pays en voie de développement ou la paix). Le pourcentage d’élèves engagés de façon continue dans un groupe en relation avec le développement durable est très peu élevé. Les jeunes citent d’ailleurs comme prémisses à un tel engagement un savoir / une compréhension plus poussée du travail de ces groupes et l’attribution d’une certaine efficacité à un tel engagement de leur part. 2.4 Une appréciation critique de l’enseignement scolaire actuel; de hautes attentes par rapport à l’école de demain (1) Une ouverture limitée de l’école envers la société – des déficits dans l’acquisition de compétences d’action et d‘appréciation La majorité des élèves ont profité de sorties dans la nature; la visite d’institutions sociales a été toutefois vécue seulement par une minorité. 48.3 % des élèves (ES : 53.5 % vs. EST 43,4 %) rapportent, n’avoir jamais visité des sites extrascolaires et 46,2 % n’avoir jamais assisté dans le cadre scolaire à des discussions avec des acteurs de la société (hommes et femmes politiques, organisations non gouvernementales…). 42.4 % des élèves rapportent, qu’ils n’ont pas du tout appris à l’école comment influencer des décisions dans la société. Au delà de ce déficit apparent dans l’acquisition de compétences d’action, ils constatent un déficit du point de vue de la capacité de changer de perspective : pour 37,1 % , l’école ne leur pas permis de se mettre dans la perspective d’acteurs économiques et pour 36,3 % pas dans la position de personnes défavorisées. 44.1 % des élèves de l’enseignement secondaire classique indiquent par ailleurs, ne pas avoir appris comment planifier et réaliser un projet à long terme. Des formes d’enseignement interdisciplinaire sont davantage utilisées dans l’enseignement secondaire technique que dans l’enseignement secondaire technique (« jamais » : ES : 41,4 % vs. EST 27,6 %) (2) Le souhait des élèves: davantage de connaissances et de compétences en vue d’une participation active à un développement durable et une plus grande ouverture de l’école à la réalité de la société Une majorité des élèves plaide pour davantage de connaissances sur les problèmes écologiques (59,9 %) et les problèmes Nord-Sud (56.6 %) ainsi que l’acquisition de plus de compétences en matière de possibilités d’action au niveau individuel et collectif (58,9%) mais également de compétences en vue d’une meilleure appréciation de situations écologiques et sociales complexes (50.9 %). En ce qui concerne les méthodes d’enseignement, une majorité claire se prononce pour la mise en œuvre de méthodes innovatrices notamment des visites dans des entreprises et des institutions sociales (57.1 %), des discussions en présence d’acteurs économiques ou de responsables d’institutions sociales et politiques (54,9 %) ainsi que un enseignement respectivement des projets interdisciplinaires (53.7 %). Ce sont notamment les élèves de l’enseignement secondaire classique qui souhaitent davantage des visites extrascolaires (ES : 60,7 % vs. EST 53,7 %) et d’enseignement interdisciplinaire respectivement de projets (ES :57,7 % vs. EST 49,8 %). Université du Luxembourg www.uni.lu 4 Conclusions: Davantage d’éducation au développement durable au sein du système éducatif Sur la base des résultats les auteurs de la publication tirent quatre conclusions essentielles : (1) Intégration de l’éducation au développement durable dans les curricula scolaires Les compétences-clés de l’éducation au développement durable sont à intégrer moyennant un cadre de référence adéquat dans les curricula scolaires à tous les niveaux. La recherche d’une synergie entre les aspects écologiques, économiques et sociaux est à promouvoir notamment par le biais d’une collaboration interdisciplinaire dans le cadre de projets répondant aux intérêts des jeunes. (2) Education à la citoyenneté et ouverture de l’école à la réalité de la société L’élaboration d‘un concept global en vue la valorisation de l’éducation à la citoyenneté aux différents niveaux scolaires est vivement recommandée, ceci en collaboration avec tous les acteurs concernés, notamment la société civile. Une ouverture plus poussée de l’école à la société est vivement souhaitable ainsi qu’une participation accrue des jeunes au sein des écoles et de la société (voir le rapport sur la situation des jeunes dans ce contexte). (3) Promouvoir la pensée systémique: un défi majeur pour l‘école e Les intérêts des jeunes et les défis de la société du 21 siècle constituent une base idéale pour un enseignement plus poussé des sciences et de la technologie, en prenant en compte par ailleurs des normes sociales et des valeurs éthiques. Au-delà de connaissances factuelles, il importe de promouvoir la mise en évidence d’interrelations entre des faits et phénomènes en intégrant une approche dite systémique dans les curricula scolaires notamment par le biais d’une interdisciplinarité renforcée. (4) La réforme des classes supérieures des lycées: une chance pour l’éducation au développement durable La réforme des classes supérieures des lycées offre une grande chance pour la mise en oeuvre des mesures citées, notamment dans le cadre de la formulation des compétences transversales (dont notamment le changement de perspective, le jugement critique, la pensée systémique, l’application des connaissances dans la pratique individuelle et collective) Une des conditions sine qua non est sans doute une réduction de l’envergure des programmes scolaires et l’aménagement d’un espace horaire et d’un dispositif organisationnel pour la mise en œuvre de méthodes actives et de projets notamment dans le contexte d’une plus grande autonomie des établissements scolaires et de nouvelles formes d’évaluation formative. Des exemplaires de la publication „Les jeunes face au défi du développement durable“ – en langue allemande – peuvent être obtenus auprès des auteurs (courriel : [email protected] ou [email protected]). Le site http://www.emacs.uni.lu/projects/sustainability offre une possibilité de « download » du texte allemand de la publication. Université du Luxembourg www.uni.lu 5