Mémoire du Sierra Club

Transcription

Mémoire du Sierra Club
Mémoire du
Sierra Club Québec
Soumis au
Ministère québécois des Ressources
naturelles
Dans le cadre de la
Consultation publique sur les enjeux
énergétiques du Québec
22 septembre 2013
Sierra Club Québec
http://quebec.sierraclub.ca
[email protected]
514 686 3709
Montréal, 22 septembre 2013
Dans le cadre de la consultation publique sur les enjeux énergétiques du Québec, le
Ministère Québécois des Ressources naturelles invite la population à participer. Le Sierra
Club Québec souhaite présenter son mémoire.
Le Sierra Club Québec est la division québécoise du plus vieil organisme environnemental
de l’Amérique du Nord. Comme nous sommes un organisme grassroots, nos actions et nos
campagnes sont le fruit des initiatives des citoyens qui s’engagent pour restaurer et
protéger la planète et, se réjouir de la santé et sécurité de celle-ci.
En tant que société, nous dépendons de notre environnement, des services offerts par des
écosystèmes et de la prospérité. Nous ne nous opposons pas aux développements
économiques et industriels. Au contraire, nous croyons qu’il est possible de vivre en
harmonie avec l’environnement et la nature, sans compromettre notre qualité de vie, et en
nous assurant une justice sociale à l’intérieur du pays, à travers le monde et entre les
différentes générations présentes et futures.
Selon le rapport publié en 2012 par l’Agence internationale de l’énergie1, il ne fait aucun
doute que le réchauffement climatique est bien réel et induit par l’activité humaine, et ce,
principalement en raison de l’utilisation de combustibles fossiles.
La quantité de combustibles fossiles théoriquement exploitable est estimée à l'équivalent
de 1096 km3 de pétrole, ce qui représente une quantité de GES équivalant à 2,5 *109 tonnes
CO2. Selon le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat 2 , le fait
d’émettre cette quantité de GES entraînera un réchauffement de 6.4 degrés. De tels
changements climatiques auront des effets catastrophiques sur les écosystèmes terrestres
ainsi qu’aquatiques, sur la production agricole à travers le monde et sur la sécurité et la
santé des êtres humains. Ils produiront également des effets imprévisibles sur les
phénomènes climatiques, tels que des orages. Pour éviter ce scénario, les ressources en
combustibles fossiles ne doivent forcement pas être toutes exploitées. En effet, une
certaine quantité de ceux-ci doit rester enfouie dans le sol.
Les débats sur l’exploitation des ressources énergétiques se concentrent souvent sur une
ressource en particulier, confrontant ainsi les gens qui sont en faveur à ceux qui s’y
opposent. Comme nous l’avons mentionné précédemment, nous ne nous opposons pas aux
développements industriels ou à l’exploitation des combustibles fossiles a priori, mais, pour
éviter le scenario décrit ci-dessus, une certaine quantité de ceux-ci doit rester enfouie dans
le sol. À ce sujet, nous sommes très satisfaits de la décision du Ministère québécois de
Ressources naturelles de consulter les citoyens dans ses réflexions concernant la politique
provinciale sur l’énergie. Au lieu de nous demander si une ressource X ou Y (sables
1
<Les perspectives énergétiques mondiales>, (2012,
http://www.iea.org/publications/freepublications/publication/French.pdf)
2
http://www.ipcc.ch/publications_and_data/publications_ipcc_fourth_assessment_rep
ort_synthesis_report.htm bitumineux, gaz de schistes, etc.) doit être exploitée ou non, en tant que société
québécoise, nous espérons pouvoir nous questionner sur la quantité d’énergie dont nous
aurons besoin et sur les façons de pourvoir à cette demande.
Selon nous, pour répondre à nos besoins en énergie, les ressources renouvelables sont
toujours préférables à celles non renouvelables. Celles-ci utilisent des flux inépuisables
d'énergies d'origine naturelle. En plus de leur non épuisement, ces ressources renouvelables
présentent des émissions très limitées des GES
Nous sommes convaincus qu’il est possible de diminuer et même d’éliminer notre
dépendance aux combustibles fossiles, tout en maintenant, voire en accroissant notre
performance économique. Nous sommes aussi convaincus qu’il est possible de les éliminer
de notre économie, non parce que la ressource est épuisée, mais puisque nous aurons
trouvé de meilleures solutions de rechange. Comme formulé par Sheik Yamani, ancien
ministre du pétrole de l'Arabie Saudi et co-fondateur de l'OPEC: <L’âge de pierre n’avait
pas pris fin fautes de pierres. Alors pourquoi s’attarder à l’âge du pétrole ?3>
L’idée de se diriger vers un approvisionnement d’énergie propre et renouvelable va de pair
avec une démocratisation de ce secteur économique de base. Pour exploiter des
combustibles fossiles, la ressource doit être prise en charge par un seul acteur qui devra
faire des investissements importants dans les techniques et méthodes d’extraction. Dans ce
processus, certains emplois sont créés, mais les possibilités pour d’autres d’y participer et
le pouvoir d’agir se limitent à peu d’individus. En revanche, des formes d’énergies
renouvelables, comme l’éolienne, la biomasse, le solaire et la géothermie, sont accessibles
à l’exploitation pour tout acteur qui a la volonté de le faire, à des coûts relativement
faibles. Donc, la transformation d’une économie dépendante aux combustibles fossiles en
celle qui dépend des ressources renouvelables permettra une décentralisation de
l’approvisionnement en énergie. Cette décentralisation entraînera un marché beaucoup
plus ouvert et dynamique, créant davantage de possibilités d’affaires et d’emplois à
plusieurs niveaux différents.
Nous sommes convaincus qu’une telle transformation sera avantageuse autant du point de
vue environnemental et social qu’économique. Néanmoins, ce changement requiert des
investissements publics qui ne généreront des bénéfices qu’à moyen ou à long terme. Bien
sûr, cette transformation n’aura pas lieu automatiquement. Ainsi, si l’on veut se diriger
vers ce modèle économique, nous devrons nous prononcer, en tant que société québécoise,
en faveur de cette transition. Prendre cette voie est un choix de société et c’est
aujourd’hui que le Québec a la possibilité d’effectuer ce choix.
Pour nous diriger vers une économie plus durable, dynamique et participative, nous
sommes d’avis que les mesures suivantes devront être prises :
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La recherche, l’éducation et le développement des technologies d’énergie propre
doivent être stimulés et appuyés financièrement.
La génération et la vente d’énergie propre doivent être encouragées auprès des
citoyens et de petites et moyennes entreprises.
3
http://www.oilcrash.com/articles/kerr.htm
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Pour stimuler la compétitivité et l’efficacité des initiatives québécoises au niveau
mondial, l’économie québécoise doit être ouverte aux technologies et innovations
vertes provenant d’ailleurs.
Le réseau d’électricité doit être adapté pour permettre aux usagers d’utiliser de
l’énergie au besoin et d’en vendre lorsqu’il y a un surplus engendré par la production
domestique. La tarification devra également être ajustée en conséquence pour leur
permettre d’en acheter ou d’en vendre, selon la situation.
Dans le contexte actuel, la façon la plus efficace et la moins coûteuse de libérer de
l’énergie est d’instaurer des programmes d’efficacité énergétique comme l’isolation
des bâtiments, une meilleure gestion du réglage de température et le remplacement
des vieux appareils électriques. Ces programmes devront avant tout viser les
ménages à faibles revenus et, en particulier, les locataires. Comme ce sont
généralement les locataires qui payent les factures d’électricité, les propriétaires
ne sont pas motivés à investir dans ce type de programmes. Donc, cette situation
doit être corrigée.
Le transport doit être électrifié. À court terme, des gains considérables peuvent être
réalisés avec l’électrification du transport en commun en ville. Cependant,
l’électrification du transport privé requiert un investissement en infrastructures
appropriées qui ne doit pas tarder non plus. L’achat de véhicules électriques doit
être encouragé et des bornes de recharge doivent être installées graduellement. De
plus, l’usage du pétrole comme combustible devra être découragé par une taxe sur
le carbone.
De nouveaux projets d'exploitation et transport des ressources en énergie non
renouvelables doivent être évalués en fonction de la demande québécoise, prenant
en compte toutes les alternatives disponibles.
Comme tout changement social, la transformation du marché de l’énergie, telle que
proposée par le Sierra Club Québec, engendrera de nouvelles possibilités pour certains
tandis qu’elle créera de nouvelles menaces pour d’autres. Nous sommes convaincus que,
pour que le Québec puisse continuer à être une société viable, compétitive et durable, il
est en tout temps impératif d’accueillir des changements et de se questionner sur les
structures existantes.
Nous demeurons à votre disposition pour toutes informations additionnelles.
Veuillez recevoir nos meilleures salutations.
Floris Ensink
Président du comité exécutif du Sierra Club Québec