Mission intégrale - Multi-C

Transcription

Mission intégrale - Multi-C
PAROLACTIONS
-----Une amorce pour la mission intégrale
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Avant-propos
Amorce 1. Petite masse de matière détonante servant à provoquer
l’explosion. 2. Début, à la une d’un journal, d’un article dont la suite figure à
l’intérieur.
Le mot « AMORCE » évoque dans notre esprit deux contextes principaux. Le premier
est lors d’une explosion – par exemple pour des excavations. Avant le « vrai » travail
de dynamitage, l’amorce fait une petite explosion pour provoquer l’explosion
principale. Il est également utilisé dans les média pour désigner le bref aperçu à la
une, d’un article dont la suite figure plus loin. Il ne dit pas tout. Il présente un survol
et donne le goût d’en savoir plus.
Ce livre servira d’amorce pour la mission intégrale. Il débute le processus ;
amorce la compréhension. Ce n’est pas le tout ni le dernier mot. Mais nous
croyons, aux Ministères baptistes canadiens, qu’il constitue la meilleure
description de la vision de Dieu et de sa façon de transformer le monde. Nous
prions que les églises et tous les disciples de Jésus pourront s’en inspirer pour
proclamer et démontrer l’amour de Dieu et sa vérité avec plus d’optimisme,
d’imagination et par des partenariats efficaces.
Nous sommes reconnaissants pour les efforts de tant de personnes qui ont
contribué à l’élaboration du la présente amorce. Voir à la page xxxx pour en
savoir plus sur les principaux auteurs et supporteurs.
En route !…..
[side page]
Indications pour la lecture de cette amorce
Cette amorce n’est pas conçue pour être lue d’une façon linéaire (du début à
la fin). Lisez-la selon ce qui vous convient. Sautez des sections si vous le
voulez, ou débutez avec la section qui vous intéresse le plus. N’hésitez pas à
suivre des voies différentes pour parcourir le contenu. Prenez une pause et
notez vos réflexions, vos questions et vos idées. Méditez sur les exemples
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mentionnés. Suivez votre flair : lorsque vous voyez un nom ou un lieu
inconnu, faites-en la recherche sur Google ; découvrez ce qui se trouve en
dehors et au-delà de ces pages. Si vous trouvez qu’une idée vous interpelle
ou vous irrite, partagez vos idées avec d’autres, tels que votre conjoint ou vos
amis à l’église. Vous trouvez que vous n’arrivez pas à mettre en pratique les
idées comme vous le voudriez ? Prenez une pose dans votre lecture et aidez
quelqu’un autour de vous. Ou, considérez ce que dit Wendell Berry :
« Il se peut que nous arrivions devant notre réel travail lorsque nous ne
savons plus quoi faire, et que notre voyage réel débute quand nous ne savons
plus par quel chemin aller. L’esprit qui n’est pas perplexe n’est pas à l’œuvre.
Le ruisseau entravé est celui qui chante. » i
« Faisons comme le renard
Qui trace de multiples pistes,
Certaines dans la mauvaise direction.
Pratiquez la résurrection. » ii
Introduction
Tenant un même discours
Lors d’une soirée douce de printemps, deux groupes de chrétiens se sont réunis – à
des milliers de kilomètres l’un de l’autre. Ils ne se ressemblaient pas par leur histoire,
leur culture, leur langue, leur origine ethnique, leur niveau économique, leur vision
du monde et leur géographie. Un des groupes s’est réuni dans un parc sur la place
centrale de leur village. L’autre groupe a discuté sur le patio d’un café très mode
dans leur quartier embourgeoisé. Mais ils étaient unis par leur foi en Dieu, dans
leurs combats intérieurs et dans leurs incertitudes devant la question de comment
leur église devait agir. Leurs conversations ont suivi des pistes semblables :
(Designer note: THE FOLLOWING DIALOGUE WILL BE LAID OUT IN PARALLEL TRACKS
NEXT TO EACH OTHER, DEMONSTRATING THAT BOTH THE CHURCH IN NORTH
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AMERICA AND THE CHURCH IN AFRICA EXPERIENCE SIMILAR ISSUES AROUND
INTEGRAL MISSION. THE FIRST AND LAST QUOTES ARE PART OF BOTH DIALOGUES)
Personne #1 - je ne sais pas ce que nous devrions faire. Tout autour de nous,
les gens souffrent. Tant de gens désespérés. Il y a franchement trop de douleurs, de
sentiments de vide et d’aspirations non réalisées. (first column and second column)
First Column:
Personne #2 – Pas plus tard qu’hier, Tom et Beth ont reçu un avis de
forclusion sur leur maison. Ils sont sans emploi depuis plusieurs mois maintenant et
ont dépensé toutes leurs économies. Ni l’un ni l’autre ne trouve un emploi. C’est la
deuxième famille de notre voisinage a perdre sa maison ce mois-ci.
Personne #3 – Mais il faut se rappeler que ce ne sont pas que les pauvres qui
souffrent. Il y a beaucoup de gens riches autour de nous qui souffrent une douleur
profonde et sont à la recherche d’espoir. Ils ont beaucoup de moyens mais leur vie
n’a pas de sens. Je ne suis pas convaincu que nous savons comment leur venir en
aide.
Personne #2 – On m’a toujours appris que les gens ont besoin de trouver
Dieu. Mais sérieusement, à bien y penser, je ne peux pas me résoudre à l’idée que les
inviter dans l’église ou dans notre groupe maison – un sermon ou une présentation
de plus de l’Évangile -- apporterait un espoir et un réconfort convenable ?
Personne #1 – On dirait que ce sont des actes de miséricorde qui
communiquent l’espoir de l’Évangile plus que la prédication de la bonne nouvelle.
Peut-être nous faut-il simplement prendre au sérieux notre évangélisation.
Personne #3 – Vous avez tout à fait raison. La réponse est toujours dans le
partage de l’amour de Christ. Où en sera notre crédibilité si nos paroles ne
correspondent pas à nos actions ? La foi sans les œuvres est morte.
(second column)
Personne #2 – J’entends ce que tu dis, ma sœur. Hier, le paludisme a emporté
le fils de Thomas et Elizabeth. C’est la deuxième mortalité dans le village cette
semaine. Ils ont peu d’argent et ne peuvent pas se permettre une sépulture digne.
Que devons-nous faire ?
Personne #3 – Mais n’oublions pas que les pauvres ne sont pas seuls à
souffrir. Beaucoup de gens riches de ce quartier ont aussi de graves problèmes.
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Leurs enfants leur provoquent des blessures profondes. Leur mariage est dévasté.
Leur argent est devenu leur idole.
Personne #2 – Dès l’enfance, on nous a appris à croire que Dieu nous donnera
de l’espoir et du réconfort, quoi qu’il nous arrive. Mais je ne suis pas convaincu que
nos activités d’église, ou même un bon sermon, apporteront à nos voisins qui
souffrent, le réconfort dont ils ont besoin.
Personne #1 – Es-tu certain ? Les gens doivent faire face à leur nature
pécheresse et leur échec. Nous devons mettre en priorité la prédication de l’Évangile
afin d’apporter un réconfort à ceux qui souffrent.
Personne #3 – C’est tellement vrai. Notre foi en Dieu nous apporte la vie
éternelle, et nous devons la partager avec nos voisins. Mais que vaut l’Évangile si
nous ne pouvons pas offrir une tasse d’eau froide aux assoiffés ?
Both columns:
Personne #4 – J’ajouterai ceci : nous avons tendance à faire une séparation
entre croire en l’Évangile et la vivre. Et ensuite, nous rendons l’un plus important
que l’autre. Et si les deux ne se faisaient pas concurrence et n’entraient pas en conflit
l’un avec l’autre ? S’ils se renforçaient, se transformaient et se soutenaient
mutuellement. Nous essayons peut-être de concilier deux choses qui n’auraient
jamais dues être séparées.
De Hyderabad à Halifax, les chrétiens du monde entier tentent de donner un sens à
la tâche très difficile que Dieu nous a confiée, celle d’être une bénédiction pour les
nations. Pour certains, le travail ne consiste qu’à partager la bonne nouvelle du
salut ; la tâche ultime de l’Église est de sauver de la perdition les âmes perdues.
D’autres sont convaincus que nous sommes des rayons de lumière, appelés à vivre
notre foi par de bonnes œuvres. Pas question de paroles vides !
Dans cette amorce nous aimerions aider à forger une nouvelle vision pour la mission
du peuple de Dieu.
Partager la Voie de Jésus
Au commencement était la Parole. Mais quand la Parole a été faite chair...
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L’effet était minime au début – quelques personnes semblaient être un peu
différents. Curieusement, leurs actions étaient conformes à leurs paroles.
Bientôt, plus de gens ont commencé à s’en rendre compte. Il se passait
quelque chose d’incroyable. De petits actes, au début, presque
imperceptibles : « de petits gestes de gentillesse » selon un témoin. Il se
dégageait de ce groupe uni une sensation de chaleur et de générosité. Ils
s’appelaient eux-mêmes les gens de la Voie.
Au fur et à mesure de la croissance du mouvement, les gens s’étonnaient de
voir ce qu’était devenue la communauté. Au lieu de se sentir isolés et
déchirés, les gens avaient trouvé un renouveau d’espoir. On vivait des
guérisons, tant physiques qu’émotionnelles. De petits groupuscules religieux
divergents avaient laissé derrière eux leurs positions de rivalités et de
querelles théologiques pour aller vers la passion de travailler ensemble afin
de répondre aux besoins de leurs voisins. Des dirigeants municipaux, des
éducateurs, des hommes d’affaires et des agents de santé communautaires
ont été très surpris de voir un petit groupe d’hommes et de femmes
partageant les mêmes idées, être prêts à s’engager dans des actions simples
de bienveillance sans calculer ni le coût ni les bénéfices. Certains ont résisté à
la mention explicite de la foi et du salut, mais peu doutaient de l’intégrité et
la passion de ces gens. Il y avait une cohérence agréable entre ce que disaient
les adeptes de la Voie et ce qu’ils faisaient. À une époque où les compromis
moraux étaient endémiques, l’intégrité devenait une alternative attrayante.
Les premiers signes étaient faciles à repérer : de la nourriture pour ceux qui
avaient faim, des maisons pour les nécessiteux, le taux de bonne nutrition à
la hausse, celui de la criminalité à la baisse, les taux d’intérêt à la baisse –
certains prêtant même sans intérêt, les personnes en marge de la société
valorisées, les chômeurs formés en vue de nouvelles compétences et des
emplois, réconciliation dans des familles où il y avait eu aliénation, pardon
offert aux malfaiteurs, espérance allumée et ravivée.
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Quelqu’un a dit qu’il y avait transformation. Mais c’était une situation de
« l’œuf ou la poule ». Personne ne pouvait décider lequel était venu le
premier : les paroles ont-elles précédé les actions de générosité, ou était-ce
l’inverse ? Peut-être que les actions ont été les précurseurs, permettant aux
paroles de mieux passer. En fait, les deux sont venus la main dans la main.
En raison de leur engagement dans la communauté, ce petit groupe de
femmes et d’hommes a apporté des changements positifs et durables. Tout
le monde l’a remarqué. Le mouvement a pris de l’ampleur. De plus en plus de
gens se sont joints à la cause. Bien que les problèmes d’itinérance, de
maladie, de pauvreté et de désolation soient demeurés, il y avait le sens
profond que ce mouvement changeait des choses autour de lui. Et
curieusement, les membres, les adeptes de la Voie, disaient qu’on n’avait
encore rien vu. Le meilleur restait à venir...
Assemblages étranges
Regardez bien la liste de mots qui suit…
Prêcher
Montrer
Parole
Action
Proclamation
Présence
Justice
Miséricorde
Bouche
Mains
Évangélisation
Action sociale
Convertir
Guérir
Foi
Faire des œuvres
Salut
Développement
Croire
Vivre
Dire
Faire
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Soins de l’âme
Soins sociaux
Laquelle des deux listes vous attire le plus ? Vous préférez peut-être choisir
dans les deux colonnes.
Peut-être, en tant qu’étudiant du secondaire ou à l’université, un groupe
vous a influencé et vous a formé pour le service chrétien. Ou peut-être avezvous assisté à une conférence sur l’évangélisation et avez appris que c’était le
but principal de l’Église. Vous avez découvert la grande joie de voir quelqu’un
faire une profession de foi en invitant Christ à venir dans sa vie. Vous l’avez
aidé à grandir dans sa nouvelle foi, l’avez impliqué dans votre église locale et
vous vous êtes tenu à ses côtés lors de son baptême. Quelle belle
expérience ! La parole de ralliement de tous ceux qui ont vécu de telles
expériences vient du verset du Grand mandat.
18
Jésus, s’étant approché, leur parla ainsi : Tout pouvoir m’a été donné dans
le ciel et sur la terre. 19 Allez, faites de toutes les nations des disciples, les
baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, 20 et enseignez-leur à
observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici, je suis avec vous tous les
jours, jusqu’à la fin du monde. (Mt 28.18-20, LS)
D’autres sont plus attirés par l’idée que les chrétiens ne peuvent pas et ne
devraient pas rester silencieux face aux souffrances du monde. Ce sont
généralement ceux qui ont éprouvé la douleur de la pauvreté, de la
malnutrition, de l’injustice et de la violence, soit près de chez eux ou dans
l’hémisphère sud et ont saisi les enjeux du désespoir et de la souffrance d’un
monde gravement déchiré. Ils ont décidé que nous devons et pouvons faire
quelque chose. Ils croient que la foi sans les œuvres est morte, et qu’en tant
que chrétiens, nous avons une responsabilité donnée par Dieu d’améliorer
les conditions des pauvres et des nécessiteux. Pour ces gens-là, peu de
versets parlent plus fort que le Grand commandement.
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- Un 35docteur de la loi, lui fit cette question, pour l’éprouver : 36 Maître, quel
est le plus grand commandement de la loi ? 37 Jésus lui répondit : Tu aimeras
le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, et de toute ta
pensée. 38 C’est le premier et le plus grand commandement. 39 Et voici le
second, qui lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même.
40
De ces deux commandements dépendent toute la loi et les prophètes. (Mt
22.34 – 40 LS)
Le Grand Mandat ou le Grand Commandement ? Face à un tel choix, vous
avez peut-être donné la priorité à l’un ou à l’autre. Vous refusez que
l’indifférence, l’apathie ou l’oisiveté vous empêche de vous impliquer – vous
savez que la Grande omission n’est pas une option. Comme l’enfant qui jette
à la mer les poissons échoués sur la plage, vous savez que vous ne pouvez les
sauver tous, mais, vous croyez profondément que vous serez en mesure de
changer quelque chose pour certains. Alors ce sera quoi ? La bonne nouvelle
de Jésus ou offrir une tasse d’eau froide ? Aider quelqu’un à devenir un
disciple de Christ ou l’aider à acquérir une meilleure qualité de vie ?
Prenez quelques minutes pour écrire ce qui vous passionne profondément
dans votre service chrétien.
En relisant votre réponse, demandez-vous si une colonne ou l’autre, en soi,
peut vraiment représenter la bonne voie.
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Dans nos bureaux des MBC il y avait autrefois deux couleurs de tapis. D’un
côté du bâtiment étaient les bureaux des personnes impliquées dans les
ministères de secours et de développement. Ils avaient un tapis vert. Ils
accomplissaient un travail extraordinaire en offrant des programmes d’aide
alimentaire, de soins de santé maternelle, d’amélioration du sol, de
microcrédit et de formation professionnelle. De l’autre côté du bâtiment se
trouvaient les bureaux de ceux qui était passionnés par l’évangélisation,
l’implantation des églises, les programmes de formation de disciples, la
formation théologique et la littérature chrétienne. Ils avaient un tapis rouge.
Dans les couloirs de chaque côté du bâtiment on trouvait des cartes
géographiques et des photos, montrant les lieux et les gens dont les vies ont
été touchées par une mission chrétienne noble et pertinente.
Les couleurs des tapis servent de métaphore pour l’état de l’Église dans la
seconde moitié du XXe siècle. Pour certains, la mission consistait à implanter
des églises locales saines et de former des leaders pour les ministères de
l’Évangile. Pour d’autres, la mission consistait à alléger les souffrances des
pauvres du monde. Mais pourquoi cette division ? Y a-t-il tant de différence
entre les deux ? Est-ce bien d’avoir séparé les deux dimensions du
témoignage chrétien ?
Fragmentés ou intégrés ?
Difficile de croire, n’est-ce pas, que le message puissamment unificateur de
l’Évangile pourrait devenir une source de débats, de divisions et de conflits ?
Il y a bien des types de fragmentation. Une division peut surgir concernant
les acteurs : est-ce au clergé professionnel ou aux laïcs que revient la
responsabilité de la mission ? Une division plus répandue se trouve entre
« là-bas », c’est-à-dire la mission interculturelle en terre étrangère, et le
travail de la mission dans notre propre pays ou quartier. Pour d’autres, la
division se situe entre les églises locales et des organismes para
ecclésiastiques.
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La présente amorce traite de la fragmentation artificielle, malheureuse et
non biblique qui apparaît fréquemment dans nos églises entre l’action sociale
et l’évangélisation.
Dans sa forme la plus élémentaire, le défi qui nous attend dans le
témoignage chrétien est de choisir entre la fragmentation et l’intégration.
Très peu de disciples du Christ plaident contre les actes de compassion. Aussi,
peu de gens disent que l’Évangile n’a pas besoin de paroles. Mais nous
agonisons sur la question d’essayer de les vivre tous deux. Par manque de
temps, manque de fixer des priorités et manque de valeurs, nous nous
retrouvons d’un côté ou l’autre de la séparation. Face à un monde déchiré et
fragmenté, nous devenons un peuple fragmenté dans des églises
fragmentées. Nous nous plaçons d’un côté de l’Évangile ou de l’autre.
Le grand revirement
L’historien Timothy L. Smithiii a inventé le terme « Le grand revirement » pour
décrire la volte-face qu’ont fait nombreux évangéliques qui ont abandonné le
souci social profond pour les gens, pour prendre une orientation
individualiste d’un salut personnel et privé. Ils craignaient qu’avec l’élan du
mouvement de l’Évangile social, l’Église serait envahie par la théologie
libérale. Les évangéliques, soucieux de se distancier de ce groupe, se sont
séparés également de l’engagement social afin de « revenir aux
fondements ». Ils faisaient partie du mouvement revivaliste du XIXe siècle qui
mettait l’accent sur le salut personnel et la spiritualité individuelle. La
conversion des âmes perdues est devenue primordiale pour beaucoup. Les
membres de ce groupe craignaient l’emprise du modernisme sur la théologie.
Ils proclamaient que le changement réel consistait à sauver des âmes, en
mettant l’accent sur la foi individuelle et la repentance.
Plus ils insistaient sur la proclamation de l’Évangile, plus ils éloignaient le
mouvement évangélique de l’engagement social. Pendant ce temps, les
chrétiens qui étaient préoccupés par l’action sociale ont commencé à se
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distancier des évangélistes qui prêchaient le feu et le soufre et ils ont négligé
la nécessité clairement énoncée de la repentance et du salut personnel.
Un Évangile fragmenté – vignette tirée de l’histoire
À la fin du XIXe siècle et dans les premières années du XXe siècle, il s’est
soulevé un débat intense sur les priorités dans la mission chrétienne. On peut
en trouver un exemple aux États-Unis dans le débat entre deux dirigeants
passionnés de l’Église.
D’un côté, il y avait Walter Rauschenbusch, pasteur baptiste qui œuvrait dans
le quartier très pauvre de Hell’s Kitchen (cuisine de l’enfer) dans la ville de
New York. Ses sermons, ses écrits et ses actes publics, appelaient l’Église à
s’engager activement dans le mouvement de l’Évangile social. Sa vision du
christianisme n’était pas de prêcher la damnation éternelle, mais de mener
une vie qui ressemble à celle de Christ. Il a dit que le Royaume de Dieu ne
consiste pas à s’assurer que des individus se rendent au ciel, mais de
transformer la vie des femmes et des hommes ici sur terre pour qu’ils soient
en conformité avec le ciel. Son ministère a grandi et il contestait la complicité
des églises traditionnelles avec les grands de la politique et de l’économie de
son temps. Rauschenbusch sentait que Dieu l’avait appelé à améliorer la
condition sociale des pauvres de son temps. Il était un vaillant champion de
la lutte contre la cupidité économique et pour le mouvement de l’Évangile
social.
La voix opposée était celle de l’évangéliste « feu et soufre », Dwight L.
Moody. Peu d’hommes ont su capter le cœur et l’attention de sa génération
comme l’a fait Moody. Il était l’une des voix ardentes du mouvement
revivaliste de son temps, et ses prédications et ses réunions d’évangélisation
ont attiré des milliers d’adeptes aux États-Unis, au Canada et en Europe. Le
message de Moody était simple et clair.
Oh, combien terrible la perte d’une âme ! Si vous êtes toujours perdu, je vous
supplie de ne pas vous reposer avant de trouver la paix en Christ. Pères et
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mères, si vous avez des enfants qui sont en dehors de l’arche, ne vous reposez
pas avant qu’ils y soient entrés. N’empêchez pas vos enfants de venir à Dieu.
Le fils de l’homme est venu pour sauver les enfants autant que les vieillards
aux cheveux gris. Il est venu pour tous, riches et pauvres, jeunes et moins
jeunes. O homme, si vous êtes perdu, que Dieu vous montre à entrer dans le
Royaume. Le fils de l’homme est venu vous chercher et vous sauver. iv
Moody, et d’autres évangélistes comme Ira Sankey et Billy Sunday, croyaient
à une forme d’évangélisation qui mettait tout l’accent sur le salut des âmes
de la perdition. Moody pensait que si on misait sur l’action sociale, les gens
seraient distraits et n’accepteraient pas la puissance salvatrice de l’Évangile.
Il n’était pas rare à l’époque d’entendre les évangélistes décrire ainsi les
efforts déployés par le mouvement de l’évangile social : « C’est comme
redresser les tableaux sur un navire qui coule. » Puisque la fin du monde était
proche et le retour de Christ imminent, il y avait peu ou pas de temps pour
poser des gestes de miséricorde autre que celui de prêcher l’Évangile.
D’autres, comme Rauschenbusch, ont insisté sur les actions robustes
d’engagement social contre les structures qui favorisaient l’inégalité et
l’oppression et ils ont prêché sur la nécessité d’une réforme sociale. Leur
mouvement visait à rétablir la dignité de l’homme, en libérant les gens de
toutes les formes d’oppression, de souffrance, d’injustice et de mal. C’est à
cette époque que les organismes de compassion ont vu le jour, comme
l’Armée du Salut, des centres pour les mères seules, des missions dans le
villes et des agences pour venir en aide aux immigrés, aux pauvres, aux
malades, aux prisonniers, et d’autres. Avec passion et conviction, les militants
chrétiens ont combattu pour obtenir des lois visant à instaurer la justice
sociale et les droits humains.
Combler le grand fossé – les débuts
C’est au cours de la dernière partie du XIXe siècle et pendant la plus grande
partie du XXe siècle qu’on a vu augmenter le nombre d’évangélistes et
d’enseignants de la Bible, ainsi que de missionnaires chrétiens. Certains
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missionnaires avaient un zèle inébranlable pour la prédication de l’Évangile,
tandis que d’autres étaient passionnés par la dimension humanitaire de leur
foi. Dans le monde entier, des infirmières et des médecins ont fondé des
hôpitaux missionnaires et des enseignants ont ouvert des écoles. Des
agronomes chrétiens ont développé de nouvelles techniques et amélioré
l’agriculture. On a enseigné des pratiques de gestion des cultures. L’Église
s’est engagée dans des programmes d’alphabétisation et des millions de gens
ont appris à lire et à écrire grâce au travail des « missionnaires à l’étranger ».
Les soins médicaux se sont répandus. On offrait un traitement pour la lèpre.
On a aboli le Sati, le sacrifice des veuves qui se jetaient dans le bûcher
crématoire de leur époux. Des chrétiens se sont battus pour les droits de la
personne et la liberté religieuse, non seulement pour eux-mêmes mais aussi
pour d’autres groupes religieux. Des filles allaient à l’école. Des programmes
de formation professionnelle ont été mis en place. Des mesures de réformes
agraires ont été appliquées, comme en Bolivie, où les missionnaires baptistes
canadiens ont défendu le droit à la propriété des ouvriers agricoles. Mais ce
genre de travail a été accompli non seulement sur le champ de la mission
« outre-mer » : l’Armée du Salut et le YMCA se sont occupés des besoins
sociaux des pauvres dans des pays comme le Canada, les États-Unis et
l’Angleterre. La bonne nouvelle d’un Dieu qui se soucie profondément de
tous les aspects de notre vie a changé le paysage moral, spirituel et social de
nombreux pays.
Paroles et actions se voyaient tous les deux dans le témoignage chrétien à la
maison et à l’étranger. Des églises ont grandi numériquement. À certains
endroits, comme en Corée et aux Philippines et en de nombreux pays
africains, des communautés ont vu une croissance étonnante de l’Église. Des
peuplades entières se sont converties à l’Évangile. Mais comme c’est souvent
le cas, les voix dissidentes se sont fait entendre contre un côté ou l’autre du
grand fossé. Pour certains, le zèle pour le service humanitaire commence à
l’emporter sur la passion et l’enthousiasme d’atteindre le monde pour Christ.
Certaines voix refusaient à de l’Église le droit au prosélytisme – des critiques
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ont fait rage contre le style d’évangélisation des masses par des croisades,
pratiqué par des hommes tels que Billy Graham. Ils estimaient que le monde
évangélique avait négligé un engagement réfléchi avec la culture.
La voix impérieuse du mouvement de l’Évangile social a lancé un défi à
l’Église à plusieurs égards. Le zèle chrétien de personnes telles que Tommy
Douglas et Martin Luther King Jr. ont donné l’élan à de grandes réformes
sociales au Canada, aux États-Unis et en Europe occidentale. Des militants
chrétiens du XXe siècle ont mené de grandes réformes dans les domaines des
soins de santé universels, du droit de vote pour la femme, des droits civils,
des relations interraciales, des logements sociaux et bien d’autres.
À partir de la période de l’après-guerre et jusqu’au début des années 1970,
une aile compatissante de l’Église a commencé à prendre au sérieux sa
responsabilité envers le monde dans lequel elle vivait. Pendant cette période
on a vu la naissance de nombreux organismes para ecclésiastiques et non
gouvernementales (ONG) qui sont profondément humanitaires. World
Vision, Samaritan’s Purse, TearFund, Compassion et d’innombrables autres
groupes de chrétiens engagés ont décidé de répondre aux besoins sociaux
des gens et de mener des ministères humanitaires dans la lutte pour la
justice. Dans notre contexte baptiste canadien, des programmes ont été
établis afin d’aider à la reconstruction de l’Europe d’après-guerre – nous
l’avons appelé The Sharing Way (la voie du partage).
Il y avait, à cette époque, et aujourd’hui encore bien souvent, comme les
deux couleurs de tapis dans nos bureaux, une séparation bien concrète et le
sentiment qu’il faut séparer l’évangélisation de toute forme d’aide pratique.
Alors que le niveau de professionnalisme a augmenté sensiblement et
progressivement au fil des décennies, la plupart n’étaient toujours pas en
mesure de lier la démonstration de l’amour et la compassion de Dieu avec
une proclamation claire de la bonne nouvelle de ce Dieu d’amour.
Ces organisations ont répondu au besoin humain à cause de la compassion
de Christ qui découlait de la foi et des valeurs des individus et des
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congrégations impliquées. Mais voici le défi : s’il n’y a aucun lien avec l’église
locale, et si le travail n’est pas lié avec la proclamation verbale de l’Évangile
par une communauté qui honore Dieu, alors qu’est-ce qui différencie ces
organisations de, disons, Save the Children, Oxfam, CARE ou Médecins sans
frontières ? En effet, qu’est-ce qui fait qu’une organisation soit chrétienne ?
Les organisations de développement et de secours chrétiennes étaient-elles
différentes des ONG non-chrétiens ?
Il s’est fait entendre, dans divers mouvements de la théologie de la
libération, au sein de l’Église catholique en Amérique latine, une voix
passionnée en faveur des opprimés, appelant les chrétiens à un autre type
d’engagement envers les pauvres. Des hommes tels que Gustavo Gutierrez,
Juan Segundo, Jon Sobrino, et beaucoup d’autres grands penseurs
catholiques en ont ouvert la voie. Leur message a conquis aussi le cœur des
penseurs protestants d’Amérique latine. José Miguez-Bonino, un érudit
méthodiste, a aidé à façonner un nouveau type d’engagement envers la
société. Cherchant à unir la théologie et des préoccupations sociopolitiques,
ces auteurs ont décrié hardiment la nature oppressive du colonialisme et le
pouvoir économique injuste. Le salut a été assimilé au processus de
libération de toutes les formes d’oppression humaine. Pour beaucoup de ses
partisans, se joindre en solidarité avec les opprimés contre les oppresseurs
était un acte puissant de conversion. L’évangélisation était l’annonce de la
participation divine dans la lutte de l’homme contre toutes les formes
d’injustice.
Alors que chacun de ces mouvements successifs a apporté un correctif
nécessaire et a rencontré une certaine opposition, ils ont poussé l’Église à
examiner à nouveau le Christ et à essayer de voir s’il avait quelque chose à
dire sur la société, la pauvreté et la justice.
Mais pendant près d’un siècle, la question est demeuré, « Quelle est la voie
de Jésus dans le monde ? »
Façonner un nouvel engagement
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Depuis le début du XXe siècle, les leaders chrétiens se sont réunis dans des
rassemblements mondiaux, commençant à Édimbourg (1910) et allant
jusqu’à la toute récente rencontre à Cape Town (2010) du Comité Lausanne
d’Évangélisation Mondiale. L’objectif de chacune de ces rencontres a été
d’essayer de définir et d’articuler les priorités de l’Église pour la mission de
Dieu dans le monde.
Une étape importante a été la déclaration de Lausanne, rédigée par John
Stott en 1974 lors d’un rassemblement de leaders chrétiens que Billy Graham
et John Stott ont convoqué. Ils ont voulu établir une nouvelle orientation
pour l’évangélisation du monde. Cette déclaration a servi de « bannière
évangélique » et a forgé une nouvelle articulation de l’interdépendance de
l’évangélisation et de l’action sociale.
Nous affirmons que Dieu est à la fois le Créateur et le Juge de tous les
hommes ; nous devrions par conséquent désirer comme lui que la justice
règne dans la société, que les hommes se réconcilient et qu’ils soient libérés
de toutes les sortes d’oppressions ... nous reconnaissons avec humilité que
nous avons été négligents et que nous avons parfois considéré
l’évangélisation et l’action sociale comme s’excluant l’une l’autre. La
réconciliation de l’homme avec l’homme n’est pas la réconciliation de
l’homme avec Dieu, l’action sociale n’est pas l’évangélisation, et le salut n’est
pas une libération politique. Néanmoins nous affirmons que l’évangélisation
et l’engagement sociopolitique font tous deux partie de notre devoir chrétien.
Tous les deux sont l’expression nécessaire de notre doctrine de Dieu et de
l’homme, de l’amour du prochain et de l’obéissance à Jésus-Christ. Le
message du salut implique aussi un message de jugement sur toute forme
d’aliénation, d’oppression et de discrimination. Nous ne devons pas craindre
de dénoncer le mal et l’injustice où qu’ils soient. Lorsque les hommes
acceptent le Christ, ils entrent par la nouvelle naissance dans son Royaume et
ils doivent rechercher, non seulement à refléter sa justice, mais encore à la
répandre dans un monde injuste. Le salut dont nous nous réclamons devrait
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nous transformer totalement dans notre façon d’assumer nos responsabilités
personnelles et sociales. La foi sans les œuvres est morte. v
Plusieurs années plus tard, quand le Mouvement de Lausanne a été
convoqué à nouveau à Manille, aux Philippines, on a entendu un langage
similaire où l’on parlait de deux voies. Cette fois-ci, les auteurs du manifeste
de Manille ont déclaré, dans des Affirmations 8 et 9 :
Nous affirmons que nous devons manifester l’amour de Dieu de façon visible,
en nous occupant de ceux et de celles qui sont privés de justice, de dignité, de
nourriture et d’abri.
Nous affirmons que la proclamation du Royaume de Dieu, royaume de justice
et de paix, exige de notre part la dénonciation de toute injustice et de toute
oppression, personnelle ou institutionnelle ; nous ne reculerons pas devant ce
témoignage prophétique. vi
L’aile évangélique de l’Église chrétienne passait de la fragmentation à
l’intégration. Mais c’était une chose de reconnaître la réalité des deux
dimensions, souvent aliénées l’une de l’autre dans le témoignage chrétien, et
une toute autre chose de savoir si les deux pouvaient être véritablement
intégrées.
Dans ce contexte et avec la voix inattendue de l’Église de l’hémisphère sud, le
mouvement vers la mission intégrale a commencé à prendre racine.
La naissance de la mission intégrale
(insert photo of Padilla)
J’ai eu l’occasion de rencontrer personnellement René Padilla, lorsque les
Ministères baptistes canadiens sondaient les possibilités d’une collaboration
avec son organisation, la Fondation Kairos, de Buenos Aires, en Argentine. Un
jour, au cours du lunch, il a raconté la croissance étonnante du mouvement
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protestant en Argentine au cours de la seconde moitié du XXe siècle, et je lui
ai demandé comment il se sentait d’être le « père de la mission intégrale » ?
Il a souri timidement et a dit : « Mais, je ne suis pas le père de la mission
intégrale, je n’en suis qu’un de ses oncles. »
Il m’a raconté comment l’expression est devenue courante au sein de la
Fraternité théologique de l’Amérique latine dans les années 1980. Le
contexte social de l’Amérique latine offrait une terre spirituelle fertile pour la
croissance de la « mission intégrale ». Elle s’est remise en question devant
l’enseignement des théologiens catholiques d’Amérique latine, qui
soulignaient le fait que le salut de Jésus comprend la libération des pauvres
et opprimés. Elle savait qu’on posait les bonnes questions, mais elle sentait
que les réponses données, souvent fortement marxistes et dialectiques,
étaient insuffisantes. Elle envisageait que l’église locale pouvait devenir un
agent de transformation positive du monde entier, en réponse à la bonne
nouvelle.
C’est dans ce contexte que le terme espagnol « misión integrale » a été
inventé dans les années 1970 par des membres de leur groupe. Cette
expression décrit une compréhension de la mission chrétienne qui embrasse
autant la proclamation que la démonstration de la bonne nouvelle de JésusChrist. Parmi ses porte-paroles principaux étaient Padilla et Samuel Escobar,
qui voulaient mettre l’accent sur le vaste étendu de la bonne nouvelle et de
la mission chrétienne. Ils ont choisi d’utiliser le mot « intégrale » pour
signaler leur malaise devant les conceptions de la mission chrétienne qui
avaient séparé l’évangélisation de l’implication sociale ou de la responsabilité
sociale. Padilla a souligné que la notion de mission intégrale n’est pas
nouvelle – au contraire, elle est enracinée dans les Écritures et est illustrée
dans le ministère de Jésus lui-même.
Au cours des années, le terme espagnol a été utilisé si largement que la
traduction littérale en français, « mission intégrale », s’est intégrée peu à peu
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au vocabulaire de ceux qui font pression pour une approche plus holistique
de la mission chrétienne.
Padilla a raconté que les missionnaires évangéliques qui sont arrivés en grand
nombre en Amérique latine au siècle dernier étaient préoccupés
principalement par l’évangélisation et d’implantation d’églises. L’Église avait
comme mission de « gagner des âmes » et l’implantation d’églises était la
preuve claire et tangible que l’Église s’était engagée dans une mission
réussie. Pour eux, le salut impliquait une expérience personnelle et
subjective, avec peu d’attention accordée au contexte historique dans lequel
les nouveaux convertis vivaient leur foi et sans traiter le mal systémique et
l’injustice, l’oppression et la pauvreté, sous ses formes multiples. Les
membres de l’église qui proposaient une mission qui pourrait inclure d’autres
éléments essentiels étaient envisagés avec méfiance et finalement
marginalisés.
À cette époque, le mot « mission » avait des connotations géographiques. Il
s’agissait de traverser la frontière entre « l’occident chrétien » et « le champ
missionnaire païen, » généralement dans le but d’augmenter le nombre
d’églises locales. Mais on créait alors une dichotomie entre ceux qui ont
répondu à l’appel « d’aller » en mission interculturelle et la multitude des
chrétiens qui restent à la maison pour soutenir par la prière et les dons, ceux
qui partent. Comment pouvaient-ils regagner l’idée biblique que nous faisons
tous partie d’une Église à la fois « envoyée » et qui « envoi » ?
La Latin American Theological Fellowship (Consultation théologique latinoaméricaine) se préoccupait également de la dichotomie entre la vie de
l’Église et sa mission. Si la mission ne consiste qu’à envoyer des gens vers un
ministère outre-mer par des églises locales chez eux dans l’occident qui se
limitent à « donner, prier et c’est tout, » la mission cesse inévitablement
d’être au centre de la volonté de Christ – elle perd sa place dans le dessein de
Dieu qui consiste à racheter et à transformer la création toute entière. Les
églises de l’Ouest avaient dilué leurs obligations missionnaires sur un autel de
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spiritualité privatisée. Par conséquent, trop peu d’efforts ont été consacrés à
établir et entretenir un modèle intégré, qui entremêle le cœur, les mains et la
voix. Padilla a déclaré « Dans la mission on peut franchir ou non des
frontières géographiques, mais on franchira toujours les frontières entre les
croyants et les incroyants, le privé et le public, la parole et les actions. »
« Quand l’Église est engagée dans la mission intégrale et dans la
communication de l’Évangile dans tout ce qu’elle est, fait et dit, elle
comprend que son but n’est pas de devenir numériquement grande, ni
matériellement riche, ni politiquement puissante. Son but est d’incarner les
valeurs du Royaume de Dieu et de témoigner de l’amour et de la justice
révélés en Jésus-Christ, par la puissance de l’Esprit Saint, en vue de la
transformation de la vie humaine dans toutes ses dimensions, tant au niveau
de l’individu que de la communauté. » vii
Le but de la mission est la transformation, pour que Dieu soit glorifié dans
toutes les dimensions de la vie, y compris la relation avec Dieu, avec d’autres
et avec la création elle-même. Le but de l’évangélisation n’est pas
simplement la conversion, mais la création d’une nouvelle communauté qui
confesse Jésus-Christ comme Seigneur de tous les aspects de la vie et qui vit
cette confession en paroles et en actions. Ou, comme Abraham Kuyper,
homme politique et militant néerlandais au tournant du siècle dernier, a dit à
juste titre : « ... il n’y a pas un [centimètre] carré dans l’ensemble du domaine
de notre existence humaine sur lequel Christ, qui est souverain sur tout, ne
crie pas : " C’est à moi ! " » viii Dieu recrée constamment le monde par le
moyen de la mission de son Église.
Padilla a souligné que le cœur de la mission intégrale est une préoccupation
pour tous les besoins fondamentaux des gens : la grâce de Dieu, l’amour dans
les relations, l’abri, les vêtements, la santé physique et mentale et le
sentiment de dignité humaine. La vie humaine dans son essence même
(selon les Écritures) est corps, âme et esprit. En conséquence, la mission de
Dieu ne peut se limiter ni aux besoins dits « spirituels » tels que le pardon ni
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aux besoins physiques tels que la nutrition adéquate. La mission doit toucher
tous les aspects de la vie humaine.
Comprendre le principe de la mission intégrale
Intégral, ale, aux (ԑtegRəl, o) adj. et n. f. – 1640; parties intégrales XIVe –
latin integralis, de integer « entier » Qui n’est l’objet d’aucune diminution,
d’aucune restriction,… complet, entier,… sans omission ni coupure. ix
Les mots INTEGRAL, INTÉGRER et INTÉGRITÉ ont une racine commune qui
signifie entier. Rien ne manque, rien n’est laissé de côté. Une chose intègre
ne peut pas être divisée ou brisée. Toutes les composantes vitales
fonctionnent en harmonie.
Nous pouvons probablement tous penser à des contextes courants pour ces
trois mots. Faites l’essai.
Quand je pense aux mots « intégral », « intégrer » ou « intégrité », quelles
choses ou personnes me viennent à l’esprit ? Pourquoi ?
Une de mes réponses à la question vient de mes jours d’école secondaire.
Nous vivions aux États-Unis pendant les années 1970. Mon école était l’un
des premiers établissements dans notre état qui avait tenté l’intégration. Les
afro-américains ont été amenés en autobus à notre école, afin de contrer la
vielle ségrégation. La commission scolaire pensait être en mesure de
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promouvoir l’égalité des chances pour tous – blancs, noirs, hispaniques et
asiatiques – en « nous intégrant ». Elle rêvait de voir une communauté unie.
Peut-être, avez-vous pensé à la grande contribution de quelqu’un envers
l’accomplissement d’une tâche, par exemple « Diane était une partie
intégrante de la réussite de notre projet. » Sa contribution était
indispensable ou vitale à la réalisation d’un projet spécifique.
Pour d’autres, l’utilisation pourrait être façonnée par les arts ou la littérature
: lorsqu’il est utilisé comme adjectif, intégral signifie qu’il s’agit de l’œuvre au
complet. Il ne manque rien.
Nos amis latino-américains auraient pu penser à leur petit déjeuner. Pain
intégral (pan integral) est le pain fait de blé entier. Toutes les bonnes parties
de la graine sont là. Il est entier et complet.
La plupart des gens aspirent à être reconnus comme étant intègre ou
honorable. Ils tiennent aux principes moraux et agissent en conséquence. Le
livre des Proverbes parle de gens intègres en disant qu’ils prennent un
chemin droit. (Pr 10.9).
Donc, en parlant de la mission intégrale, nous parlons d’une plénitude ou
d’une approche unifiée pour la mission. Aucune partie n’est supérieure à une
autre. La mission intégrale représente le sentiment très profond que la
mission de Dieu dans le monde exige de l’Église d’être complète et
indivisible. Ses praticiens n’ont pas le luxe de séparer par la distillation les
paroles des actions. La mission intégrale va au-delà de nos actions ou de nos
paroles et intègre notre être tout entier. La mission intégrale représente
l’Église qui vit sa foi en Jésus à travers tous les aspects de la vie et du
témoignage.
Inspiré par la vision du prophète Michée, qui, il y a près de 3 000 ans, a
contesté l’exercice abusif du pouvoir, aussi bien religieux que profane, et a
appelé le peuple de Dieu à l’engagement et au témoignage éthique, le
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Réseau Michée (un réseau mondial d’organisations et d’individus chrétiens)
définit la mission intégrale comme suit :
La mission intégrale ou la transformation holistique est la proclamation unie
à la démonstration de l’Évangile. Elle n’est pas simplement la juxtaposition de
l’évangélisation et de l’engagement social. Au contraire, dans la mission
intégrale notre proclamation a des retombées sociales alors que nous
appelons les gens à l’amour et à la repentance dans tous les domaines de la
vie. Et notre engagement social a des retombés dans l’évangélisation alors
que nous témoignons de la grâce transformatrice de Jésus-Christ. Si nous
négligeons le monde, nous trahissons la Parole de Dieu qui nous envoie pour
servir le monde. Si nous négligeons la Parole de Dieu, nous n’avons rien à
apporter au monde. La justice et la justification par la foi, l’adoration et
l’action politique, le spirituel et le matériel, les changements personnels et les
changements structuraux vont de pair. Comme dans la vie de Jésus, être, faire
et dire sont au cœur de notre tâche intégrée. x
[sidebar]
Michée 6.8
On t’a fait connaître, ô homme, ce qui est bien ;
Et ce que l’Éternel demande de toi,
C’est que tu pratiques la justice, Que tu aimes la miséricorde,
Et que tu marches humblement avec ton Dieu.
Regardez une fois de plus la citation. Notez les trois facettes de cette
définition qui sont importantes pour vous :
Page | 24
1.
2.
3.
Chris Wright, directeur du partenariat Langham (Langham Partnership), a
beaucoup écrit sur la mission de Dieu. Il considère que la Croix de Christ est
une partie intégrante de la mission. Dans son livre « The Mission of God’s
People » (la mission du peuple de Dieu), il déclare que le peuple racheté de
Dieu, l’Église, est appelé à vivre une vie rédemptrice dans le monde. « Tandis
que nous comprenons de mieux en mieux l’œuvre de Dieu dans la
rédemption, nous commençons à mieux saisir l’œuvre rédemptrice qui se fait
pour et dans l’Église. Cela nous conduit vers une meilleure compréhension,
plus complète et plus riche, des conséquences de la Croix pour notre
engagement au sein d’un monde déchiré. Nous découvrons que notre
mission a des implications sociales, politiques, économiques, morales,
écologiques, éducatives et matérielles. Nous passons de la fragmentation à
l’intégration, de déchirés à restaurés, de séparés à unis. »xi
Quand la tapisserie commence à s’effilocher
Pensez à une tapisserie dans laquelle on a réuni différentes sortes de fil pour
créer une image. Imaginez l’Église qui réunit deux actions distinctes et
pourtant indissociables : la proclamation et la démonstration de l’Évangile de
Jésus-Christ. Les deux sortes de fil sont indispensables pour la tapisserie.
Mais quand certains brins commencent à s’effilocher, la tapisserie en souffre.
Lorsque l’Église perd de vue sa mission intégrée, les trous apparaissent dans
le tissu de la tapisserie, et nous avons besoin d’une bonne réparation.
Une réparation importante pour la mission effilochée a été de se concentrer
sur la mission « holistique ». Ce terme était en vogue dans les années 60 et
70 lorsque les chrétiens sentaient qu’ils avaient besoin de mieux articuler les
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deux côtés du témoignage chrétien, la proclamation et l’action sociale. Dans
la mission holistique, les deux côtés, paroles et actions, devaient être
présents pour que la mission réussisse. C’était une mesure corrective
justifiable. Cependant, de nombreux praticiens engagés dans la mission
holistique se sont malheureusement limités au développement
communautaire, laissant aux pasteurs et évangélistes la prédication de
l’Évangile.
Nous les chrétiens, nous sommes grandement redevables aux femmes et aux
hommes qui ont pris la décision délibérée et souvent sacrificielle de chercher
à atténuer la pauvreté. Il y a beaucoup d’organisations chrétiennes qui
témoignent d’un degré élevé de professionnalisme et de soins dans la
démonstration de l’Évangile. Mais s’ils négligent le mandat de partager la
voie complète de Jésus, y compris de communiquer l’amour et le pardon de
Dieu dans un monde déchiré, il existe, comme un auteur l’a décritxii, un trou
dans l’Évangile.
Un autre trou est visible dans le zèle de pasteurs et évangélistes qui ont mis
l’accent uniquement sur le besoin de la repentance. Ils laissent généralement
à d’autres le travail de répondre à la souffrance physique afin qu’ils puissent
se concentrer sur la propagation de la bonne nouvelle, dans la presse écrite,
par des campagnes d’évangélisation et des croisades, auprès des individus et
souvent en faisant du porte à porte et la prédication en plein air. À travers le
monde, le nombre d’agences et d’organismes qui desservent la cause de la
proclamation de l’Évangile est passé de 1 500 à plus de 34 000 en cent ans, et
le nombre de personnes évangélisées augmente chaque année de plus de 60
millions de personnes. xiii Cependant, lorsque notre attention se porte
uniquement sur la proclamation verbale de l’Évangile au lieu de la
transformation qu’apporte l’Évangile, nous ne partageons pas avec les gens
la voie complète de Jésus. Et lorsque cela se produit par mépris – ou pire
encore, par méfiance – de la lutte contre l’injustice dans un monde de
souffrance humaine, la tapisserie perd de son intégrité.
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Certes, l’accent mis sur la mission véritablement holistique a été un correctif
très utile pour tout témoignage unilatéral. Mais il ne suffit pas que la main
droite et la main gauche travaillent toutes les deux. Ils doivent travailler
ensemble pour créer la beauté de la tapisserie de la mission que Dieu bénit.
Une nouvelle approche qui est très ancienne – la mission intégrale
Le mot a peut-être paru depuis peu dans nos milieux, mais l’idée n’est pas
nouvelle du tout. Il existe de nombreux exemples – à la fois modernes et
anciens – qui illustrent la mission intégrale. En fin de compte, dans toutes les
situations, anciennes et nouvelles, l’église locale est le principal moyen par
lequel Dieu travaille pour atteindre les desseins de sa mission. Votre église –
en partenariat avec toutes les autres églises locales – a été créée pour faire
avancer le ministère de Christ. Comme Jésus et ses premiers disciples dans
l’Église primitive et tout au long de 2 000 dernières années, nous sommes
appelés à être le cœur, les mains et les voix de Dieu dans le monde.
Prenons quelques exemples d’hommes et de femmes qui ont incarné un
engagement envers la mission intégrale. Bien avant que le terme devienne
populaire, des chrétiens se sont profondément engagés à partager la voie de
Jésus. Voici quelques-uns parmi « la si grande nuée de témoins ». (Hé 12)
Saint François d’Assise (1181/1182–1226) est né dans une famille aisée à
Assise en Italie et a mené une vie de richesse et de privilège. En 1204, apr. J.C., François a eu une profonde expérience du Christ lors d’un sermon sur
Matthieu 10.9, dans lequel Christ envoie les 12 apôtres proclamer le
Royaume des cieux sans se soucier des possessions matérielles. François a
pris la décision de faire un vœu de pauvreté. Il s’est associé à des mendiants
et a commencé à prêcher la repentance dans les rues, et bientôt des disciples
l’ont suivi. Au fil du temps, son ministère a conduit à la fondation de l’Ordre
des Clarisses. Ce groupe s’est engagé à vivre et exercer son ministère dans le
monde. Déterminé à porter l’Évangile à toutes les créatures de Dieu, François
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a tenté à plusieurs reprises de prendre son message hors d’Italie, voyageant
même jusqu’en Égypte pour tenter de convertir le Sultan. Son intérêt pour
les animaux et l’environnement est devenu légendaire. On rapport que ses
dernières paroles ont été : « j’ai fait ma part, que Christ vous enseigne à faire
la vôtre. » Il fut l’un des premiers activistes environnementaux chrétiens.
William Carey (1761–1834), un missionnaire baptiste anglais, est connu
comme le « père des missions modernes. » Il fut l’un des fondateurs de la
Société missionnaire baptiste. Missionnaire à Serampore en Inde, il a traduit
la Bible en bengali, en sanskrit et en de nombreuses autres langues et
dialectes.
Quand il est arrivé en Inde, Carey a géré une usine d’encre indigo pour
gagner sa vie. Il a choisi un mode de vie communautaire et auto suffisant. En
1800, sa mission s’installe dans la colonie danoise à Serampore, où elle a
fondé une école. À la fin de cette année, la mission s’est réjouie de la
conversion d’un premier Hindou, Krishna Pal. Elle avait également gagné la
bonne volonté du gouvernement danois local et de Richard Wellesley, alors
gouverneur général des Indes.
Au cours des années qui ont suivi, Carey a écrit des grammaires pour le
bengali et le sanscrit et a débuté la traduction de la Bible en sanskrit. En
1818, la mission a fondé Serampore College pour former les pasteurs
autochtones au service de l’Église croissante et pour dispenser un
enseignement dans les arts et les sciences à toute personne, sans distinction
de caste ou de nationalité. En 1820, Carey a également fondé l’AgriHorticultural Society of India à Alipore, Kolkata.
Pendant sa vie, William Carey a exercé le métier de pasteur, linguiste,
traducteur, missiologue, écrivain, enseignant, travailleur en développement
des communautés locales, militant politique, agronome et évangéliste. Il a
vraiment incarné la vie de Christ en son temps. Il nous donne un exemple
éminent de la mission intégrale.
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Jane Buchan (1837–1904) a mobilisé d’innombrables femmes au Canada pour
remplir un rôle stratégique dans la mission de l’Église, en particulier dans
l’éducation et les droits humains. En 1876, Jane et ses sœurs ont donné main
forte à la fondation de la Société des femmes baptistes de l’Ontario ouest
pour la mission à l’étranger. Deux ans plus tard Jane et Margaret ont lancé
personnellement la revue, Canadian Missionary Link (Le lien missionnaire
canadien)
Militante passionnée dans l’activité missionnaire, Jane a misé sur l’Inde où
l’œuvre missionnaire se caractérisait par un fort engagement social. Elle a
lutté contre la pratique du Sati, où les veuves se faisaient brûlées vives sur le
bûcher funéraire de leur mari défunt. Elle a écrit des textes contre le système
des castes qui, croyait-elle, minait la condition de la femme. Elle a encouragé
l’évangélisation et le développement parmi les Dalits, la plus basse caste,
appelés intouchables à l’époque. Au cours des années, elle a aidé à lever des
milliers de dollars pour des projets de développement tels que des
dispensaires, des écoles et des abris pour femmes.
Au moment de la mort de Jane Buchan, les femmes baptistes de l’Ontario
soutenaient 14 femmes missionnaires en Inde et elles débutaient un nouveau
ministère en Bolivie. Jane a été un atout précieux pour la mission de l’Église,
aidant à lever des fonds, à promouvoir l’égalité des sexes, à lutter en faveur
des pauvres et à montrer l’hospitalité envers celles qui sont rentrées au
Canada tout en recrutant de nouvelles ouvrières.
L’évêque Nathan K. Ngala (1890[env.]–2007) est né au Kenya au cours de la
période de la domination coloniale britannique. Converti au christianisme
dans sa jeunesse, il a servi Dieu et son peuple, les Kamba (une des principales
tribus bantoues au Kenya), avec passion, sagesse et une énergie inépuisable.
À l’époque où les colonisateurs et les missionnaires étrangers imposaient la
nature et la structure d’autorité dans les églises locales, Ngala a aidé à établir
un mouvement social puissant, dénommé Association des hommes Kamba
chrétiens. Ce groupe offrait aux dirigeants africains la possibilité d’apprendre
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par le biais de leur engagement dans la mise en œuvre des activités de la
mission et l’évangélisation à travers diverses méthodes qui attireraient et
habilitaient leurs compatriotes africains. Ngala a enseigné aux gens de son
village natal à labourer avec des bœufs et il a enseigné et fait la
démonstration de nouvelles techniques agricoles - et il a prêché l’Évangile.
En 1945, Ngala et d’autres chrétiens kamba ont fondé the Africa Brotherhood
Church (ABC) (l’Église de la fraternité africaine). Grâce à son approche
intégrale de l’évangélisation, ils ont réussi à créer 486 écoles primaires, 64
écoles secondaires, 60 écoles polytechniques, cinq écoles bibliques, des
dispensaires et des centres médicaux. Les membres de l’ABC devaient
également contribuer mensuellement à l’offrande humanitaire, pour donner
aux orphelins et aux veuves, accès à l’éducation qui visait le changement
social.
Quand la pandémie du sida est devenue critique dans leurs villages, l’ABC a
réagi. Avec les MBC et en partenariat avec d’autres églises africaines,
Guardians of Hope (les gardiens de l’espoir) a été lancé pour soutenir les
veuves et les orphelins du sida. C’est un ministère qui ne cesse d’augmenter
son efficacité dans la réduction de la stigmatisation et l’habilitation des plus
vulnérables par le biais de campagnes de sensibilisation et de prévention, des
microentreprises, et l’offre de nourriture spirituelle et des conseils.
Dans sa charte, l’Église Africa Brotherhood a établi des principes directeurs
qui reflètent un engagement aux principes de la mission intégrale, même si le
terme ne s’est trouvé dans le vocabulaire de l’ABC que plus de 50 ans plus
tard.
L’histoire du mouvement de la mission chrétienne est remplie d’exemples de
femmes et d’hommes qui se sont engagés à pratiquer la mission intégrale, en
œuvrant dans la mesure du possible avec et à travers les églises locales, en
intégrant les paroles et les actions, des soins de l’âme et les soins sociaux.
Leur engagement était ancré dans une solide compréhension de la voie de
Jésus et un engagement à la partager avec le monde entier.
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Le plan de Dieu pour la mission intégrale
Nous allons prendre du recul et regarder le plan de Dieu pour transformer la
vie humaine entière, tel que nous le voyons dans les Écritures.
L’amour transformateur de Dieu pour notre monde a débuté à la création. Il
a créé un monde merveilleux où toutes les dimensions de la vie et de la
réalité étaient censées s’imbriquer et se compléter mutuellement. Tel un
orchestre où chaque membre joue les bonnes notes et coopère avec le chef
d’orchestre, le désir de Dieu a été la plénitude, l’unité et la beauté.
Mais le péché humain a fait entrer la corruption et la rupture dans la
création. La réaction de Dieu a été et est encore, de récupérer, réconcilier et
réintégrer toute la création. Le mot « shalom » est le mot biblique qui
exprime la plénitude et la paix. Il représente ce qui est complet. Rien de
cassé, rien ne manque. Cette paix n’est pas uniquement une expérience de
tranquillité intérieure, mais une condition de vie – privée et publique – où
toute la création s’épanouit comme Dieu l’avait voulu. C’est la substance
d’une vision biblique d’une communauté unique qui englobe toute la
création de Dieu. C’est le rêve de Dieu qui résiste à toutes nos tendances à la
division, à l’hostilité, à la peur, à l’inégalité, à la misère et à la souffrance. (Éz
24.25-29)
Tout au long de la Bible, on voit Dieu qui désire, par la transformation de
toute la vie, accorder à son monde le salut et la plénitude. Il s’agit de
l’histoire qui donne « la vue d’ensemble » dans les Écritures, et si nous ne
parvenons pas la voir ainsi, nous pourrions être tentés de penser que la
mission intégrale n’est que le dernier engouement ou technique
ministérielle.
Jésus : l’accomplissement de la mission intégrale
La mission intégrale est clairement la voie de Jésus. Même dans l’incarnation
– Dieu devient homme en Jésus-Christ – Dieu s’est inséré dans la lutte
Page | 31
humaine à un moment précis et en un lieu déterminé, pour parler et agir de
manière à montrer comment faire la volonté de Dieu « sur la terre comme au
ciel. »
Et en ce moment-là et à cet endroit, en Palestine, Jésus de Nazareth a incarné
le Royaume de Dieu, pour traduire et communiquer la mission de Dieu d’une
façon qui était adaptée aux besoins de la vie privée et de la vie publique au
premier siècle.
Son auto-présentation est décrite ainsi dans l’Évangile de Luc 4.16-20 (TOB).
18 «
L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a oint pour annoncer une
bonne nouvelle aux pauvres ; Il m’a envoyé
19
Pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le recouvrement
de la vue, pour renvoyer libres les opprimés,
Pour publier une année de grâce du Seigneur.
20
Ensuite, il roula le livre, le remit au serviteur, et s’assit. »
C’était l’année de grâce du Seigneur. Il enseignait que « Dieu a tant aimé le
monde qu’il a envoyé son fils. » Ces enseignements déclarent la dimension
spirituelle et physique complète de la mission de Dieu et parlent d’un rachat
et d’une réparation pour tout ce qui vit dans le monde. Cela s’accorde avec la
vision de la création du psalmiste : « À l’Éternel la terre et ce qu’elle
renferme. » Il n’y a pas de moyen plus clair de résumer l’approche de Jésus à
la mission que lorsque ses disciples lui demandent comment prier. En leur
offrant ce que nous appelons le « notre père », nous voyons que la vision de
Jésus est intégrale, à commencer par ces mots qui unissent tous les
chrétiens: « Notre père qui es aux cieux, que ton règne vienne, que ta volonté
soit faite sur la terre comme au ciel. »
Dans son combat contre les principautés et les puissances, dans sa quête de
la transformation de toute la création et dans son accompagnement des
Page | 32
disciples, des pauvres et des parias, nous pouvons regrouper la mission de
Jésus autour de plusieurs activités clés qui se chevauchent.
Annoncer la bonne nouvelle : Jésus est entré en Galilée en annonçant la
bonne nouvelle que le Royaume de Dieu s’approchait (Mt 4.17 ; Mc 1.14,15).
Dans son discours inaugural dans sa ville natale de Nazareth, il a proclamé
qu’il était l’accomplissement de la promesse prophétique donnée plusieurs
siècles au paravent.
Ses paroles et ses actions ce jour-là ont montré qu’il était venu proclamer la
bonne nouvelle qui n’était rien de moins que « L’année de l’intervention
divine ! » – apportant généreusement et abondamment une transformation
aux pauvres, le relâchement aux opprimés et la vue aux aveugles –
spirituellement, matériellement et physiquement.
Enseigner : Ceux qui suivaient Jésus étaient appelés disciples, l’expression du
premier siècle pour « étudiant » ou « stagiaire ». Jésus leur a appris à vivre en
tant que croyants, sous le règne et la direction de Dieu. Il a enseigné les
mystères et les voies du Royaume de Dieu, principalement par des paraboles
qui intégraient la vérité spirituelle avec la vie quotidienne de l’agriculteur, de
la femme au foyer, du propriétaire et du roi. Sa façon de faire était unique et
exigeante. Elle demeure le modèle pour la formation de leaders chrétiens
aujourd’hui.
Guérir et soigner des malades et des blessés : les actions de Jésus sont aussi
importantes que ses paroles pour témoigner du Royaume. On le voit bien
lorsque Jésus a répondu à la question de Jean Baptiste : « Es-tu celui qui doit
venir? » Il répondit : « les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux
sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, et la bonne
nouvelle est annoncée aux pauvres ». Le ministère de Jésus dans les villes et
villages de Galilée a témoigné de la préoccupation de Dieu pour toutes les
dimensions du bien-être humain.
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Manger et boire avec les pécheurs, c’était de pratiquer l’hospitalité
inclusive – une action controversée et contre-culture dans un monde
méditerranéen où l’hospitalité était strictement déterminée par la classe
sociale et l’appartenance religieuse. Il a transcendé les préjugés religieux,
ethniques et sexuels lors de sa conversation mémorable avec la femme
samaritaine dans Jean 4. Il a contesté la « culture de la pureté » déformée et
cruelle de son temps en guérissant l’aveugle-né dans Jean 9.
Confronter ceux qui abusaient de leur pouvoir et autorité : Le ministère de
Jésus a également touché les structures visibles et invisibles des instances du
pouvoir de son époque. Une façon d’être injuste est d’« abuser du pouvoir. »
De tels abus étaient monnaie courante dans la Palestine du premier siècle,
comme c’est le cas encore à notre époque. Jésus, en agissant selon les
intentions de Dieu – en tendant la main aux groupes marginalisés, exploités
et sans moyens – est entré inévitablement en conflit avec ceux qui étaient les
détenteurs du pouvoir et les portiers des institutions qui bénéficiaient le plus
de l’injustice. Maintes et maintes fois, les actions d’amour et de compassion
de Jésus l’obligeaient à protéger et défendre les gens des préjugés et du
danger. Sa défense de la femme prise en adultère (Jean 8) et son accusation
cinglante des chefs religieux (Matthieu 23) en sont deux exemples. Ce faisant,
ses actions et ses paroles ont démasqué les pouvoirs et les principautés de
son temps.
Jésus a envoyé ses disciples, en leur disant de mener cette mission, apportant
et proclamant dans les foyers, le Royaume de Dieu de paix (shalom), et en
acceptant toute hospitalité qui serait offerte. Dans le cadre de la visite, ils
devaient appeler les gens à la repentance, offrir la guérison et l’onction
d’huile et pratiquer des exorcismes.
Pour ce faire, ils devaient apporter le minimum et n’imposer aux gens ni leur
présence ni leur message, mais de l’offrir et s’accommoder avec la réponse.
Jésus, en leur disant ces choses, demandait et autorisait ses disciples à
incarner et à accomplir la mission qu’il leur avait lui-même montrée. On
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pouvait y voir des objectifs intégrés, faisant preuve de l’arrivée spectaculaire
du Royaume de Dieu. Ceux qui le recevaient vivaient une restauration
personnelle profonde.
La crucifixion de Jésus était le résultat de la réaction des forces structurelles
du mal au temps de Jésus. La crucifixion était la peine romaine pour la
trahison. Les récits évangéliques racontent clairement la sombre coopération
entre le souverain sacrificateur (qui avait été nommé par l’empereur
romain !) et les instances politiques locales, de faire exécuter Jésus. Cela ne
diminue en rien ni la signification théologique ni le dessein divin que la mort
de Jésus soit le sacrifice final pour le pardon des péchés et le moyen décisif
grâce auquel le monde est racheté.
L’éclat de la résurrection de Jésus est renforcé par le sens multidimensionnel
de sa mort. En ressuscitant Jésus d’entre les morts, Dieu a accompli une fois
pour toutes plusieurs objectifs. Par Christ la peine du péché a été payée, le
monde a été racheté et le Royaume de Dieu a été établi de façon irréversible,
ce qui inaugure l’ultime chapitre de l’histoire. C’est aussi une confirmation
des objectifs intégrés de Dieu, qui relient la parole aux actions, la miséricorde
à la justice, l’esprit à la terre. Dieu a mis son sceau d’approbation sur la voie
de Jésus ; ses disciples sont assurés d’une victoire déjà acquise.
Toutes ces sphères du ministère de Jésus (et beaucoup d’autres encore) se
chevauchent et se renforcent mutuellement. Ensemble, elles montrent
comment la mission intégrale touche pratiquement toutes les dimensions de
la vie de l’homme et de la communauté. Jésus nous a montré, sur le terrain, à
quoi ressemblent les priorités de Dieu pour son Royaume et il a fourni un
modèle qui nous fait comprendre largement et complètement ce que cela
signifie d’être « sauvé ».
Après la résurrection et l’ascension de Jésus, le mouvement de la mission
intégrale, par l’établissement de l’Église primitive, était sur le point d’entrer
dans un dernier chapitre crucial, qui continue aujourd’hui, en vous et moi,
dans votre église et la mienne.
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La Voie – la naissance de la première église
Les premiers chapitres du livre des Actes fournissent un aperçu dynamique et
instructif de la naissance et de l’activité de la première communauté de
Jésus. Le terme « église » n’est apparu que plus tard ; la première description
de cette nouvelle communauté souligne les relations et les activités de cette
communauté : ils suivaient « la Voie » (Ac 9.2 Semeur). Leurs activités et
priorités nous donnent un aperçu passionnant de la mission intégrale vécue
contextuellement – c’est-à-dire à un moment et en un lieu précis.
Le génie et l’impact de la première communauté seraient incompréhensibles
en dehors de la puissance du Saint-Esprit agissant en eu. Avant son
ascension, Jésus a promis le Saint-Esprit. Son arrivée le jour de la Pentecôte a
donné vie à la première église à Jérusalem (Ac 2.1-13). La naissance de
l’Église a donné lieu à la naissance d’une nouvelle humanité.
Un des premiers signes de l’Esprit était que des personnes de langues
différentes pouvaient communiquer simultanément et de manière
compréhensible, pour proclamer les œuvres de Dieu. En termes modernes,
cela aurait ressemblé à une symphonie de voix internationales unies pour
louer Dieu ! Dans ce premier élan d’activité de l’Église, nous voyons en même
temps la diversité d’expression et l’unité d’orientation. La fragmentation, la
confusion et la rupture, même des langues et de la parole (Genèse 11), était
le résultat du péché dans le monde. Mais quand l’Esprit de Dieu est venu sur
ses disciples pour les rendre aptes, les langues ont été rachetées pour
propager la bonne nouvelle de Dieu dans le monde entier.
Cette réintégration des cultures et des ethnies a été cruciale : Dieu restaurait
la beauté et le don de la culture humaine et de la langue en vue de la mission
future qui serait à la fois contextuelle et globale.
L’apôtre Pierre a prêché ensuite le premier sermon, expliquant ce qui venait
de se passer par la puissance de Jésus-Christ (Ac 2.14-36). Dans ce discours
public, il a brossé un tableau panoramique de ce que Dieu avait fait parmi le
Page | 36
peuple hébreu et les prophètes dans l’histoire, et comment cet événement
(la Pentecôte) accomplissait les desseins de Dieu. Par la vie, la mort et la
résurrection de Jésus, le monde entrait dans un nouveau chapitre : les
anciennes promesses de Dieu pour Israël sont fusionnées avec le bien de
toute la création. À la fin de son sermon, Peter a appelé les gens à se repentir
et à aligner leur vie avec les objectifs de Christ. Trois mille personnes ont pris
cet engagement, (Ac 2.37-41) et l’influence de l’Église primitive, la
communauté de Jésus, a commencé à se répercuter sur la ville de Jérusalem
et le reste du monde.
« Un seul cœur et une âme » – La mission intégrale dans l’Église primitive
(Ac 2.42-47 ; 4.32-35)
J’ai récemment entendu la théologienne costaricienne, Ruth Padilla DeBorst,
offrir une description merveilleuse de la vision de la nouvelle communauté.
En lui opposant la nature fragile de la Pax Romana à l’époque de la première
Église, elle a souligné la place centrale accordée à Jésus dans l’enseignement
de l’apôtre Paul. L’autorité de Jésus reposait sur le don de soi, donnant de la
force et la libération aux opprimés. Au cours de sa vie, les actions et les
paroles ont été fondamentales pour sa mission intégrale. Elle a fait
remarquer que dans un monde déchiré, Jésus a obtenu notre réconciliation
et le rétablissement de l’ordre créé. Ça c’est une bonne nouvelle ! Par son
œuvre sur la croix, Jésus est notre paix (Ép 2.14). Par sa vie et sa mort et à
travers les actions quotidiennes de service et du don de soi rempli de
compassion, Jésus établit notre paix (v. 15). Et par l’Esprit, Jésus le libérateur
est venu annoncer la paix (v. 17). Ses paroles ont été enracinées et fondées
dans le fait qu’il est la paix et qu’il établit la paix.
Jésus est notre paix
=
Jésus établit notre paix =
AGIR
Jésus a prêché la paix
DIRE
=
ÊTRE
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Voilà le modèle que donne Christ de la mission intégrale : être, agir et dire.
Vous pouvez visionner sa conférence à
http://conversation.lausanne.org/en/conversations/detail/10969
Page | 38
Les premiers chapitres des Actes captent la saveur de ces premiers jours
excitants de la nouvelle communauté de Christ, et nous attirons votre
attention en particulier sur deux belles scènes – Actes 2.42-47 et 4.32-35. Il
est d’une importance cruciale que les premiers chrétiens étaient unis : d’« Un
seul cœur et une âme » (4.32). C’est la conséquence directe de la puissance
du Saint-Esprit. Leurs relations entre eux sont liées à leur relation avec Dieu,
qu’ils ont loué et adoré (Ac 4.47). Ils ont prié ensemble et « ils rompaient le
pain, » expression qui indique le repas du Seigneur, mais aussi les repas
quotidiens. Leur unité n’était pas forcée mais c’était avec joie et simplicité de
cœur (2.46). Ils étaient partenaires dans la mission.
« Koinonia, » le mot que nous associons à la communion fraternelle,
signifiait plus que la simple camaraderie ou l’esprit d’équipe. Il vaudrait
mieux traduire « partenariat », dans le sens du partage des ressources
matérielles (2 Co 9.12-13).
« Car le secours de cette assistance non seulement pourvoit aux besoins des
saints, mais il est encore une source abondante de nombreuses actions de
grâces envers Dieu. En considération de ce secours dont ils font l’expérience,
ils glorifient Dieu de votre obéissance dans la profession de l’Évangile de
Christ. »
L’apôtre Paul a utilisé le même mot pour exhorter les chrétiens de Corinthe à
partager leur abondance avec les croyants et les malades en Israël lors d’une
famine. Cette distribution a été « selon les besoins de chacun » (2.45 ; 4.35)
parce que l’attitude était que « tout était commun entre eux » (4.32 ; 2.44).
Paul présente une belle image du partenariat dans la mission. La richesse
matérielle de l’Église de Corinthe peut répondre à la pauvreté matérielle de
l’Église de Jérusalem. Et la richesse spirituelle de l’Église de Jérusalem peut
aider à remédier à la pauvreté spirituelle de l’Église de Corinthe. Ce
partenariat crée un effet de croisement qui ressemble à ceci :
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L’Église de Jérusalem
Richesse spirituelle
Pauvreté matérielle
En partenariat, les ressources
partagées répondent aux besoins
de l'autre.
En partenariat, les ressources partagées répondent aux besoins de l'autre.
Cela ne signifie pas que les gens n’avaient plus de biens personnels. C’est
plutôt qu’ils étaient prêts à les rendre disponibles aux autres et à partager les
ressources. Ainsi, « il n’y avait parmi eux aucun indigent » (4.34). De cette
façon, les premiers disciples de Jésus ont continué à vivre selon les priorités
du ministère de Jésus qui a amené « une bonne nouvelle aux pauvres » (Lu
4.18), aussi bien matériellement que spirituellement. Ils ont également
accompli l’intention du Royaume de Dieu qui remonte au début d’Israël,
lorsque Dieu a dit à son peuple : « il n’y aura point d’indigent chez toi » (De
15.4).
La première église a activement proclamé et confessé le Christ ressuscité. Il
ne s’agissait aucunement d’une proclamation faible ou avec une aire
d’excuses, mais « Les apôtres rendaient avec beaucoup de force, témoignage
de la résurrection du Seigneur Jésus. Et une grande grâce reposait sur eux
tous. » (Ac 4.33).
Il n’est pas surprenant que « le Seigneur ajoutait chaque jour à l’Église ceux
qui étaient sauvés. » (2.47)
Ce que les chrétiens ont appelé plus tard « l’évangélisation » n’était pas un
programme spécial ou une activité sporadique. C’était le résultat naturel
d’avoir mangé ensemble, d’avoir partagé les ressources matérielles et de
s’être tenus prêts à voir agir la puissance de Dieu pendant qu’ils proclamaient
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Jésus ressuscité. Le théologien bolivien Arias Mortimer l’a caractérisé
d’« évangélisation par l’hospitalité. » C’était tout comme lorsque Jésus a
proposé de manger chez Zachée et que le percepteur a trouvé le salut ce
même jour, il a promis de partager ses ressources matérielles avec les
pauvres et les victimes de l’injustice.
Ces deux vignettes de l’Église primitive doivent être vues dans le contexte de
la persécution (Ac 4.1-31). Quand les disciples de la Voie ont confessé que
« Jésus est Seigneur » ils savaient qu’ils feraient face à une opposition
farouche de la part de ceux qui croyaient que c’était l’Empire romain qui était
l’espoir du monde. Les autorités religieuses se sont fortement opposées au
message et à la seigneurie de Christ.
En étudiant le livre des Actes en général et Actes 2.42-47 en particulier, nous
voyons les activités principales qui s’intégraient à leur mission :
Communauté – trouver des façons de se rassembler pour un soutien mutuel
tant physique que spirituel, croître dans leur foi et montrer au monde
comment Jésus-Christ les avait unis et réalisait à travers eux les intentions de
son Royaume.
Justice et compassion – répondre aux besoins des pauvres, des marginalisés
et des vulnérables : les femmes seules et les veuves, les malades et les
handicapés, les orphelins.
Hospitalité – manger ensemble et régler les tensions ethniques et religieuses
à l’intérieur de l’Église, en particulier, les différences de culture et de
spiritualité entre les Juifs et les Gentils qui se tournaient vers Christ.
Proclamation et confession – déclarer au monde que « Jésus est Seigneur »
et accepter la réalité de la persécution de la part de ceux qui adoraient et
pensaient autrement.
Page | 41
En quittant Jérusalem pour suivre Christ dans le monde entier, les apôtres
ont évidemment continué d’exercer un ministère intégré. Des leaders comme
Jacques, Paul et Pierre ont travaillé avec créativité et courage pour orienter
les Juifs et non-Juifs chrétiens vers un ministère d’innovation. Ils ont reconnu
les besoins de « l’étranger » et y ont subvenu. Les dirigeants de l’Église
primitive ont relevé les défis des différences culturelles, religieuses et
ethniques en écoutant attentivement et en s’adaptant avec sagesse. Le
Repas du Seigneur a brisé les barrières entre les Juifs et les Gentils ainsi
qu’entre les riches et les pauvres. Tous étaient également les bienvenus à la
table de Christ. Une nouvelle humanité où tous étaient égaux prenait
naissance : hommes et femmes, esclaves et libres, Juifs et Gentils. Tous
suivaient la Voie. Ils ont répondu aux philosophies et aux idées culturelles
populaires par la vérité de Jésus-Christ. La vérité et la vie de Christ était en
train de transformer le monde par le moyen de ministères qui à la fois
proclamaient et démontraient la bonne nouvelle.
Pour ce faire l’Église primitive et ses dirigeants se sont écoutés l’un l’autre,
ont appris ensemble et se sont appuyés sur le Seigneur qui transformait leur
monde. Ainsi, l’influence du Royaume s’est propagée dans toute la Galilée, la
Judée, la Samarie et au-delà. Elle continue de se propager aujourd’hui, aux
endroits et dans les moments où la Voie est partagée.
La mission intégrale aujourd’hui dans un monde déchiré
Dans nos réflexions sur la mission intégrale, nous ferions bien de nous
rappeler certains des défis incroyables auxquels est affronté le monde dans
lequel nous vivons, respirerons et servons. Si nous sommes vraiment le cœur,
les mains et la voix de Dieu dans le monde, nous devrions réfléchir et d’agir
de manière responsable et intégrale.
Dressez la liste de ce que vous pensez être les besoins actuels les plus criants
de notre monde.
1.
6.
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2.
7.
3.
8.
4.
9.
5.
10.
Nous allons examiner quelques-uns des défis mondiaux qu’affronte la
mission intégrale.
La faim : Comptez jusqu’à six (pas trop lentement). Un, deux, trois, quatre,
cinq, six. Un enfant vient de mourir de malnutrition quelque part dans le
monde. Comptez encore une fois – même résultat. Vous commencez à vous
rendre compte du sort horrible des pauvres. Toutes les six secondes, un
enfant meurt de faim et de malnutrition. Les guerres civiles, les sécheresses
et le réchauffement climatique ont tous contribué à la lenteur terrible du
progrès vers l’atteinte de même le premier des objectifs du millénaire pour le
développement, xiv celui de mettre fin à la pauvreté et la faim d’ici 2015. Un
enfant sur quatre dans le monde est en grave sous-poids. D’innombrables
millions de personnes dans le monde sont contraints de vivre dans
l’insécurité alimentaire chronique à cause de l’augmentation récente et très
rapide des prix des denrées. (Le prix moyen du maïs, un des principaux
aliments de base au monde, a presque doublé entre 2007 et 2011.) Alors que
presque tous les pays en voie de développement utilisent le maïs comme
élément important de leur alimentation, aujourd’hui 40 % de la production
de maïs est destinée à la production d’éthanol de maïs, souvent pour
rassasier l’appétit féroce des Nord-américains de conduire des voitures et
des camions. Près de la moitié des enfants en Inde sont mal nourris, plus que
dans toute l’Afrique. Nous vivons dans un monde affamé. Voilà un défi pour
la mission intégrale de l’Église.
Les disparités : Peu des sujets se débattent avec autant d’intensité dans
notre monde que celui des disparités économiques, ou l’inégale répartition
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des richesses. Ce grand fossé a déclenché les protestations Occupy Wall
Street et ses innombrables rejetons en 2011. Il ne s’agit pas uniquement de la
disparité entre les riches et les pauvres au sein d’une même société, mais
aussi de l’incroyable écart entre pays riches et pays pauvres, sans parler de
régions et de continents pauvres. L’ONU a signalé qu’en 2007, 1 pour cent
des adultes possédaient 40 pour cent des actifs du monde. Et – tenez-vous
bien – les trois personnes les plus riches du monde possédaient plus d’actifs
que les actifs réunis des 48 pays les plus pauvres ! Peu importe avec quel
mouvement idéologique ou politique nous nous alignons, l’exploitation
injuste des pauvres et l’accumulation excessive de la richesse dans le monde
de Dieu n’est pas juste. Nous devons utiliser toutes les ressources possibles –
l’éducation, la technologie, la volonté politique, la persuasion et la
compassion – pour corriger la disparité tragique que nous voyons dans le
monde de Dieu. Il s’agit d’un défi pour la mission intégrale de l’Église.
La violence : Des images de violence mondiale nous entourent et
envahissent quotidiennement notre vie. Depuis les enfants soldats en Afrique
de l’Ouest aux enfants victimes en Syrie, des trafiquants d’armes au Timor
oriental aux trafiquants de drogues le long de la frontière américanomexicaine, nous savons tous que nous vivons dans un monde violent. Nous
les Canadiens, nous avons une peine particulière à cause de l’indifférence de
l’Occident vis-à-vis des victimes du génocide contre les Tutsi au Rwanda. Les
Américains se préoccupent de la violence du terrorisme mondial et
combattent violemment pour protéger leurs frontières. Mais la plupart
d’entre nous restons parfaitement ignorants du coût de la vie humaine, des
corps meurtris et des esprits abattus que connaissent des millions de gens
dans le monde. Dans le livre magistral de Paul Collier, The Bottom Billion, il
écrit qu’un étonnant 73 pour cent des gens parmi le « milliard le plus
pauvre » (les 15 % de gens les plus pauvres de la population mondiale) sont
actuellement pris dans une guerre civile, ou en ont récemment traversé une.
Les auteurs de violence sont pour la plupart, jeunes, mâles, inculte, sans
emploi et sans personne à charge. Généralement, les conflits civils auxquels
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ils ont été soumis leur ont laissé un héritage douloureux de meurtres brutaux
qui perdure bien au-delà du conflit organisé lui-même. C’est tout un défi
pour la mission intégrale de l’Église.
[sidebar]
Un des partenaires des MBC est un groupe dynamique de baptistes en
République démocratique du Congo, où une guerre civile a englouti la plupart
de la partie orientale du pays depuis le milieu des années 1990. Les
estimations varient considérablement, mais certainement plus de 5 millions
de personnes ont péri. Beaucoup plus ont fui leurs maisons et leurs familles,
se cachant dans la jungle pour éviter la brutalité des soldats armés. Nos
églises partenaires ont fait des progrès louables pour répondre aux besoins
physiques, émotionnels, sociaux et spirituels des femmes et des enfants, qui
sont généralement les premières victimes des violations des droits de
l’homme. Dans bon nombre de leurs églises, les victimes de viol sont plus
nombreuses que toutes les autres sortes de victimes réunies. Des milliers
d’enfants sont orphelins. Dans d’autres pays où nous avons des partenaires
dans la mission, les femmes et les enfants sont les premiers à souffrir et
souffrent le plus. Le manque d’éducation et un accès très limité à la
formation professionnelle et d’autres possibilités sont le sort de la majorité
des femmes et des enfants. Partout, il s’agit là d’un défi pour la mission
intégrale de l’Église.
Les soins de santé : En 2010, le rapport Burrill, présenté à l’Organisation
mondiale de la santé, a déclaré que chaque année, près de 100 millions de
personnes sombrent dans la pauvreté à cause de la hausse rapide des coûts
des soins de santé. Dans de nombreuses régions de la terre, le prix croissant
des médicaments, l’insuffisance des infrastructures, des routes dangereuses
et une pénurie de médecins formés, ont l’effet de restreindre l’accès aux
soins de santé fondamentaux. Les pauvres ont plus de maladies que d’autres,
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en particulier les maladies endémiques comme le choléra, le paludisme, ou la
tuberculose, ainsi que la pandémie continue du VIH/sida, qui sont des
maladies bien gérées dans les pays riches mais qui continuent de ravager bon
nombre des pays les plus pauvres du monde. Pendant une grande partie de
l’histoire récente, l’Église a été à l’avant-plan des soins médicaux. Les
premiers hôpitaux étaient gérés par des églises et portaient le nom de
« Hotel-Dieu » car c’est là où les plus faibles, les malades et les mourants
pouvaient trouver Dieu. Aujourd’hui, le secteur privé, les entreprises
pharmaceutiques mondiales, les gouvernements, les compagnies d’assurance
et la libre entreprise ont repoussé l’Église en marge des soins des malades et
des blessés. Mais la propagation de nombreuses maladies peut et doit être
arrêtée par des efforts concertés et des partenariats, où le peuple de Dieu
jouera un rôle principal. Dans l’Occident riche, dans les économies
émergentes et dans les régions les plus pauvres de l’hémisphère sud, il s’agit
d’un défi pour la mission intégrale de l’Église.
La corruption et la mauvaise gouvernance : Ce problème conduit à des
états fragiles et à des environnements dangereux pour les citoyens de ces
états. La recherche des profits et du pouvoir sont les causes de la corruption.
Les Nord-américains et les Européens ont tendance à porter un jugement
sévère sur la corruption dans les pays du Sud. Nous nous imaginons un mode
de vie opulent et indulgent de leurs dirigeants corrompus. Ils ont des
comptes bancaires suisses remplis, un comportement excessif et des actes
oppressifs – et nous les jugeons sévèrement. Par contre, nous oublions
facilement les abus de pouvoir dans notre propre contexte. La corruption est
endémique dans les organisations humaines partout dans le monde. Les
valeurs d’honnêteté et d’intégrité ne devraient jamais être tenues pour
acquises. Parmi les attributs du leadership on trouve le service, l’humilité,
l’honnêteté et un engagement à l’égard de la justice, la miséricorde et la foi
(Mt 23.23). Voilà un défi pour la mission intégrale de l’Église.
Soins de la création : Prendre soin de la création divine nous oblige à nous
repentir de notre part dans la destruction et la pollution des ressources de la
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planète et de notre propre dépendance toxique au consumérisme. La mission
intégrale comprend la responsabilité écologique. La lutte pour défendre
l’environnement, une domination responsable et la pratique d’une bonne
gestion font tous partie de l’Évangile intégrale que nous sommes appelés à
partager. L’engagement de Cape Town, signée par plus de 3 000 dirigeants
chrétiens, déclare :
La mission intégrale consiste à discerner, proclamer et vivre la vérité
biblique selon laquelle l’Évangile est la bonne nouvelle de Dieu, annoncée
par la croix et la résurrection de Jésus-Christ, pour les personnes
individuellement, et pour la société, et pour la création. Ces trois
destinataires de l’Évangile sont brisés et souffrent à cause du péché ; tous
trois sont inclus dans l’amour et la mission rédempteurs de Dieu ; tous trois
doivent faire partie de la mission complète du peuple de Dieu. xv
Lorsque nous regardons la dévastation environnementale dans notre monde,
il est clair que nous n’avons pas toujours honoré nos obligations comme
gestionnaires de la création divine. Que ce soit sous forme d’eaux
empoisonnées, de forêts décimées, de décharges urbaines débordantes,
d’espèces en voie de disparition ou de pollution atmosphérique toxique,
notre échec est évident tout autour de nous. Nous n’avons pas besoin
d’attendre le réchauffement planétaire et les changements climatiques pour
nous pousser à devenir des gardiens responsables, de la terre qui nous a été
donnée. Il s’agit d’un défi pour la mission intégrale de l’Église.
[sidebar]
Un excellent exemple de l’engagement chrétien dans les soins de la création
est le travail de A Rocha, une organisation chrétienne internationale pour la
conservation qui, inspirée par l’amour de Dieu, s’engage dans la recherche
scientifique, dans l’éducation environnementale et dans des projets
communautaires de conservation. Par le reboisement, l’agriculture de
conservation, des initiatives dans la biodiversité, l’éducation et la
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sensibilisation, elle montre l’exemple à la mission chrétienne envers toute la
création de Dieu. Consultez son site internet : www.arocha.org.
J’ai aussi trouvé très utiles les écrits de scientifiques environnementaux
chrétiens, comme Katherine Hayhoe, co-auteure avec son mari, le pasteur
Andrew Farley, d’un livre très acclamé qui traite du mandat de l’Église vis-àvis de l’environnement, intitulé Climate for Change (FaithWorks, 2009).
Face aux redoutables défis de notre monde déchiré, dont nous n’avons
regardé qu’une infime pointe de l’iceberg, nous ferions bien de nous rappeler
qu’en pratiquant la mission intégrale, nous sommes co-ouvriers dans le plan
rédempteur de Dieu. Pour partager la voie de Jésus nous commençons par
endosser son œuvre de rédemption dans notre propre vie et ensuite nous
faisons l’analyse minutieuse et systématique de notre contexte local. Ceci est
possible grâce à une multitude de moyens, allant de la simple promenade et
l’écoute, à des groupes de discussion, des ateliers participatifs, l’enquête
appréciative et l’évaluation des besoins. Il existe d’excellentes ressources
pour vous aider à comprendre et à vous engager dans une telle réflexion.
Nous vous recommandons de commencer par
http://www.tearfund.org/en/resources/
[possible activity]
Soins de la création : Une étude de cas en mission intégrale
Imaginons que votre église vient d’acquérir un terrain adjacent à votre édifice
actuel, avec l’intention de construire un centre polyvalent :
auditorium/gymnase/centre d’arts. Selon les règlements municipaux locaux,
on doit faire faire une étude environnementale du terrain pour assurer la
sécurité et la viabilité. Mais le rapport est assez négatif. Il y a bien des
années, des déchets toxiques y ont été enfouis. On devra effectuer un
Page | 48
nettoyage massif de la propriété avant d’en faire un usage public. Tandis que
le Comité de construction a du mal à accepter cette « mauvaise nouvelle »
inattendu, ce même comité décide d’y voir une « bonne nouvelle ». Il veut
aider la congrégation à s’engager avec une passion renouvelée dans la
« mission intégrale » touchant le soin de la création. Oui, il sait qu’un
nettoyage doit se faire. Mais il veut plus qu’une solution rapide. Ceci, selon
lui, devrait être un point de basculement par lequel le peuple de Dieu
deviendra « autre chose » que des consommateurs habituels. Il veut joindre
les paroles aux actions pour changer de façon tangible le monde qui
l’entoure.
Maintenant, imaginez que vous êtes membre du Comité missionnaire. On
vous invite à réfléchir sur le défi d’intégrer le témoignage de la congrégation
avec juste à côté, un sérieux risque environnemental. Que pensez-vous que
les gens doivent savoir, faire et dire pour les aider à s’engager
intelligemment, efficacement et de façon proactive à s’occuper du morceau
de la planète de Dieu juste à côté ?
SAVOIR
FAIRE
DIRE
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Agents locaux de la Mission intégrale
Qui sont les personnes, les églises et les agences dont vous avez entendu
parler qui sont engagés dans des modèles innovateurs de la mission, en
partageant la voie de Jésus ? Prenez la peine de leur téléphoner, de leur
envoyer un courriel ou de les inviter à prendre un café avec vous afin de
mieux comprendre ce qui fonctionne – ou ne fonctionne pas – dans leur
travail, et pourquoi.
Personnes/églises que je dois contacter cette semaine
pour en savoir plus sur leur travail.
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Voici quelques exemples de personnes et d’églises engagées dans des
approches prometteuses pour la mission intégrale.
(Altadore, removed re request)
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La Pasteur Gato Munyamasoko, équipier Global au Rwanda pour les MBC,
partage avec nous son expérience personnelle de bâtisseur de paix et de
réconciliation.
Mes parents ont fui le Rwanda au cours de la révolution de 1959 et se sont
installés dans le nord-est du Congo, où je suis né. Trente-cinq ans plus tard,
après le génocide de 1994, nous sommes revenus au Rwanda. Quand je suis
arrivé, l’Association d’églises baptistes au Rwanda m’a engagé comme
directeur d’une école secondaire et ensuite elle m’a élu directeur de
l’éducation, responsable de toutes les écoles primaires et secondaires.
A cette époque, il y avait énormément de méfiance et de haine parmi les
étudiants. Au début de 1996, on trouvait des grenades dans le sac à dos de
certains étudiants. Certains survivants du génocide refusaient de parler ou
même de rire. On commençait à percevoir des signes de traumatisme dans
l’école. Motivé par ce constat et passionné de voir améliorer les relations
entre les élèves et aussi entre les enseignants, j’ai commencé un programme
de paix et de réconciliation.
J’ai commencé dans ma propre école où j’étais le directeur. Plus tard comme
directeur de l’éducation, j’ai organisé dans chaque école de notre
dénomination trois jours d’évangélisation. J’ai travaillé avec deux théologiens
et j’ai également invité trois frères chrétiens de la République démocratique
du Congo à m’aider dans ce programme. Il nous a fallu deux ans pour visiter
toutes les écoles.
Dans notre enseignement, nous avons abordé des sujets tels que la
réconciliation avec Dieu, avec nous-mêmes et avec les autres. À travers ce
programme beaucoup d’étudiants ont commencé à s’assembler, à prier
ensemble, à chanter ensemble et les écoles ont commencé à devenir des lieux
de guérison après le génocide. Les survivants, y compris des étudiants dont les
parents étaient en prison, ont eu de bonnes occasions de parler et se
comprendre l’un l’autre.
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Après deux ans du programme, 313 élèves et enseignants ont été baptisés et
beaucoup d’entre eux sont maintenant impliqués dans la promotion de la paix
et dans la prédication de l’Évangile. Aujourd’hui, certains sont maintenant des
gouverneurs, des agronomes, des théologiens ou ils occupent d’autres postes
où ils continuent le ministère de la mobilisation des Rwandais pour la paix et
le développement.
(Main Street Baptist Church, removed re request)
Jasmine Jonathan, Visag, Inde
Depuis plus de 40 ans, Jasmine Jonathan a servi parmi les personnes
marginalisées en Inde, son pays d’origine – tout d’abord comme infirmière et
coordonnatrice des programme du Conseil des hôpitaux chrétiens, une de
nos agences partenaires des MBC, puis comme coordinatrice du
développement avec les MBC en Inde. Elle a eu un impact permanent sur une
histoire incroyable de mission intégrale au cœur des communautés hindoues,
musulmanes et tribales.
« Jasmine croit que l’adoration et le travail doivent être unis, » dit Suraj
Komaravalli, chef d’équipe des MBC en Inde. « Son appel particulier était de
se soucier des opprimés... et le soutien de villages afin qu’ils deviennent
autonomes et par la suite, soient une bénédiction pour d’autres. »
Pour Jasmine, le sort des femmes pauvres des milieux ruraux est une
préoccupation particulière. Elles se voient souvent refuser l’accès à
l’éducation, sont en manque d’opportunités, sont forcées à se marier jeunes,
n’ont pas accès aux soins médicaux et ont beaucoup d’enfants (souvent trop
rapprochées en âge). L’Inde déplore un des taux les plus élevés au monde de
mortalité maternelle et infantile ainsi que l’un des plus hauts taux de
malnutrition infantile et d’enfants qui travaillent.
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L’extrême pauvreté est à l’origine de la souffrance. Jasmine rapporte
comment elle et son équipe travaillent en partenariat avec des sanghams
(des groupes d’entraide communautaires) afin d’améliorer la santé et les
moyens de subsistance pour toutes.
Nous adoptons un village et travaillons avec eux pour repérer les besoins.
Nous concentrons nos efforts sur les femmes, que nous considérons être celles
qui vont provoquer des changements dans la communauté et au foyer. Nous
leur parlons et les encourageons à commencer un sangham et de se réunir
souvent pour discuter des problèmes familiaux et des besoins dans le village.
Grâce au microcrédit nous les aidons également à améliorer la stabilité
financière de leur famille. Elles commencent à épargner, chaque femme
versant un petit montant chaque mois, qu’elles déposent dans un compte
bancaire du groupe. Après six mois, elles peuvent demander des subventions
de contrepartie gouvernementales pour améliorer leurs foyers et leurs
villages.
Avec leurs économies, les femmes débutent de petites entreprises comme la
vente de tissues (saris), la couture, ou l’achat de riz ou autres produits en gros
pour les revendre. La plupart des femmes sont aussi des ouvrières agricoles.
Elles se mettent ainsi à louer une ou deux acres de terre pour démarrer leur
propre entreprisse agricole. Elles cultivent du riz, de la canne à sucre ou des
légumes en se partageant le travail et les profits.
Des milliers de femmes ont été habilités et des centaines de sanghams créés
qui ont mené le développement dans plus de 700 villages – construction
d’écoles et de routes, pavage de ruelles (le paludisme est diminué par
l’élimination des mares d’eau stagnante qui sont propices à la multiplication
des moustiques), amélioration des aqueducs, lancement d’entreprises
locales, offre de programmes de sensibilisation aux mesures de santé tels
que la prévention du sida et dispenser des soins médicaux par des bénévoles
de la santé qualifiés et par des camps médicaux.
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La foi est semée lorsque les villageois rencontrent l’amour, le témoignage
personnel et les actions de l’équipe de développement chrétien. Aujourd’hui
au moins 60 pour cent des membres des sanghams sont devenues des
disciples de Jésus, et les bonnes nouvelles continuent à se propager, lorsque
les villages voisins voient les changements et demandent de l’aide. Chaque
année, 42 nouveaux villages sont ajoutés au programme.
Centre communautaire Eastleigh, Nairobi, Kenya
Erica Kenny a servi avec son mari, Aaron, au Kenya avec les MBC depuis 2006.
Leur ministre est auprès des groupes de réfugiés, des gens déplacés qui
vivent dans les ghettos urbains de Nairobi. Elle aborde son travail avec un
engagement clair à partager l’amour de Jésus et à contrer l’injustice
systémique et les disparités économiques, surtout chez les femmes. Il y a des
projets de lecture de l’anglais, des groupes d’entre-aide, de la formation
professionnelle, du développement des micro-entreprises, des initiatives de
santé communautaire et, au Centre communautaire Eastleigh, des projets
pour promouvoir la paix.
Erica décrit ainsi la mission intégrale :
Je dirais que notre ministère pour atteindre les musulmans urbains est une
mission intégrale puisque nous joignons des préoccupations sociales et
spirituelles dans le travail de l’église locale auprès des réfugiées musulmanes.
Récemment, j’ai accueilli dans notre maison six femmes musulmanes qui font
partie de l’un des groupes d’entre-aide. Elles ont bénéficié d’un projet de
fabrication de bijoux qui apporte un revenu régulier à leurs foyers (ainsi que
d’autres bienfaits du projet : le soutien psycho-social, la formation
nutritionnelle, le jardinage en sacs et l’alphabétisation), mais en même
temps, elles tissent des relations avec des voisines chrétiennes. Les femmes
ont travaillé côte à côte avec un groupe d’entre-aide de femmes chrétiennes,
participant à des moments de prière familiale. À Noël, elles se sont habillées
Page | 56
et ont assisté à un concert avec nous, ce qui leur a donné une compréhension
chrétienne de Noël. Nous avons pu partager nos expériences de foi
personnelle avec eux. C’est ça la mission intégrale, vivre authentiquement
l’Évangile avec nos voisins en montrant l’amour par des gestes pratiques.
(Lorne Park, removed re request)
[sidebar]
« Autrefois, pour attirer les gens vers l’église, on pouvait organiser des
programmes grandioses, et ils venaient. Je pense que maintenant l’église
s’oriente autrement. Il s’agit plutôt de libérer les gens pour sortir vers leur
communauté afin de créer des communautés incarnationnelles, devenir le
visage de Christ au sein de la communauté... cela représente un grand
changement dans la pensée de cette église. » – Dale Rose, pasteur,
Yorkminster Park Baptist Church
Centre de mission intégrale, El Alto, Bolivia
Olivia, jeune mère mariée avec deux enfants, est devenue orpheline à deux
ans et a connu beaucoup de difficultés au cours des années, ce qui l’a obligée
à abandonner le rêve de faire carrière en droit. Pourtant, dans son parcours,
elle est devenue disciple de Jésus et s’est jointe au Centre de la mission
intégrale à El Alto.
En partenariat avec des Baptistes boliviens et européens, les MBC ont
entrepris le développement du Centre afin de permettre aux églises locales
de mieux répondre à des besoins locaux. Situé à El Alto, la ville ayant le plus
fort taux de croissance en Bolivie, le Centre aide les parents pauvres comme
Olivia qui peinent à trouver un emploi adéquat. Il offre des ateliers sur le
ministère personnel et la formation de la foi, l’assistance médicale, dentaire,
Page | 57
juridique et psychologique et la planification et le développement
d’entreprises, y compris la formation sur les pratiques commerciales éthiques
et l’accès à des micro-prêts.
À la suite de la formation et le soutien qu’elle a reçus, Olivia a pu acheter les
instruments et les matériaux qu’il lui fallait pour lancer une petite entreprise
de couture. Maintenant, elle produit des châles, des jupes et des couvertures
et peut aider à gagner un revenu familial avec son mari. Olivia a également
reçu une formation dans la foi chrétienne et des enseignements sur la vie de
famille, être parent et le mariage, en vue d’une vie plus heureuse et saine.
[Sidebar]
« Parfois, nous sommes appelés à partager l’Évangile avec des paroles ;
tantôt les gens sont tellement enfermés dans leurs propres besoins
personnels, surtout là où il y a de la pauvreté, que nous devons plutôt agir
parce qu’ils ne peuvent tout simplement pas entendre nos paroles » – Duane
Guthrie, équipier Global des MBC en Bolivie et fondateur du Centre de la
mission intégrale
Grandview Calvary Baptist Church, Vancouver, Colombie-Britannique
(Canada)
On appelle la rue Commercial Drive, dans le quartier de Grandview, la
« Mecque spirituelle de Vancouver ». Là se trouvent presque toutes les
spiritualités : le Yoga, la lecture des cartes de Tarot, le bouddhisme,
l’hindouisme et le christianisme. Pendant une foire de rue, l’église a monté
un kiosque de lectures gratuites de bénédictions pour tenter d’être une
présence contextualisée dans le quartier. Un grand nombre de personnes se
sont mis en fil pour recevoir des prières et des conseils et les gens de l’église
espèrent maintenant faire le suivi avec un programme comme Alpha pour
répondre à la faim profonde qu’ils ont vue chez leurs voisins.
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Une vie partagée et une espace partagée ont une place importante dans la
vision de Grandview. Environ 60 % de leurs membres vivent dans le quartier,
et un de leur principaux ministères est le logement communautaire tel que la
Salisbury Community Society, qui offre un toit aux personnes vulnérables,
telles que les malades mentaux, les toxicomanes et les familles
monoparentales ; et Kinbrace House qui offre de loger temporairement et
d’assister les demandeurs d’asile qui cherchent à s’établir au pays.
« Un bénéfice de vivre la vision du Royaume de Dieu lorsque vous habitez
dans un quartier, et que vous cherchez le bien de vos voisins...c’est que la
justice prend un nouveau sens lorsque vous habitez un même espace avec
d’autres, » dit le pasteur Tim Dickau.
[photo]
JustWork est une autre initiative qui assiste ceux que font face à des
obstacles à l’emploi par le biais de trois entreprises sociales : un atelier de
poterie, un service de traiteur et une entreprise de rénovation. L’an dernier,
elle a généré plus de 150 000 $ en salaires pour les participants du
programme.
[sidebar]
« Une des façons que la mission intégrale s’exprime est grâce à l’imagination
renouvelée qui cherche des moyens de vivre différemment, de façon à toucher
toute la vie, cherchant la transformation dans toutes les couches de notre vie
– à la fois la vie personnelle et la vie en communauté, mais en fournissant
vraiment aux gens les moyens de vivre différemment dans le monde. » - le
pasteur Tim Dickau, Grandview Calvary Baptist Church
Saphano Chol, un leader dans le Conseil des églises du Soudan au SudSoudan, nous raconte son expérience personnelle et sa vision pour les
ministères auprès des réfugiés.
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Mon séjour dans le camp de réfugiés [Kenya] a coïncidé avec la période où
l’UNHCR (l’Agence des Nations Unis pour les réfugiés) s’occupait d’amener
par avion des réfugiés émaciés du Darfour. En raison de la pénurie de
logements dans le camp, tous les réfugiés nouvellement arrivés ont été
rassemblées dans un stade ouvert. Ils ont subi la pluie, des nuits fraîches et un
sol humide sans parler d’une nourriture inadéquate...Je n’avais jamais vu une
situation aussi épouvantable... un soir j’ai vu mourir cinq jeunes enfants. J’ai
assisté à l’enterrement de l’un d’eux. J’étais au bord des larmes tout au long...
La question des réfugiés et des personnes déplacées devrait figurer en tête de
liste des préoccupations mondiales aujourd’hui, pas seulement en raison de
son importance humanitaire mais aussi à cause de son incidence sur la paix,
la sécurité, la justice et la stabilité... Nous ne pouvons pas avoir une société
stable sans aborder le problème des réfugiés et les personnes déplacées.
En Afrique, les réfugiés sont obligés de fuir leur patrie en raison des conflits,
de la violence, de l’intimidation et des violations des droits de l’homme. La vie
des réfugiés et des personnes déplacées est très stressante, humiliante et
insécuritaire. N’ayant aucun revenu, ils dépendent d’autres pour tout ce qu’il
leur faut. En tant que chrétiens et en tant que l’Église d’Afrique, nous devons
aller au-delà de la prière pour nous identifier aux réfugiés et aux personnes
déplacées, comme Christ l’a fait pour les pauvres, les étrangers et les
nécessiteux... Ce faisant nous mettrons en pratique l’Évangile et la rendront
pertinente pour des situations réelles dans le monde.
Un des moyens les plus sûrs pour résoudre le problème des réfugiés en
Afrique est d’en traiter les causes profondes. L’Église d’Afrique doit être à
l’avant-garde du travail d’encourager et enseigner les masses à prendre des
moyens non violents pour résoudre les problèmes par opposition à la guerre
et à d’autres formes de violence. En outre, les chrétiens et les églises doivent
agir en sensibilisant leurs gouvernements au besoin de promouvoir les droits
de l’homme.
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L’Église est la conscience de chaque nation et son devoir prophétique consiste
à défendre les droits de tous. Néanmoins, l’Église d’Afrique a été
complaisante dans ce domaine depuis trop longtemps.
L’Église a besoin d’ajouter à leur prières le travail pratique pour la paix et la
justice sociale dans la société...Les chrétiens d’Afrique, individuellement et
collectivement peuvent donner un coup de main à la fois aux solutions à court
terme et celles qui sont à long terme... une assistance sous forme de livres à
lire, de nourriture, de vêtements et de logement... et aussi témoigner aux
réfugiés, partager la foi et son témoignage...Ce serait un moyen majeur de
démontrer la solidarité et l’amitié qui aideraient grandement les réfugiés à se
sentir aimés, acceptés et respectés... Une telle réponse de la part des
chrétiens montrerait qu’ils s’intéressent vraiment aux réfugiés et aux
personnes déplacées et qu’ils les voient comme créés à l’image de Dieu et
qu’ils ont un mandat biblique pour les aider dans leur misère... C’est ce que
nous avons commencé à faire au Sud-Soudan.
Nabil Costa, directeur exécutif de la Société libanaise pour l’éducation et le
développement social, partenaire des MBC au Liban, montre un exemple de
la mission intégrale au Moyen-Orient.
En 2009, Nabil Costa a pris position – à nouveau ! Cet homme d’affaires,
devenu défenseur chrétien, a décidé que son engagement envers la mission
intégrale exigeait de lui un engagement intelligent auprès des enfants ayant
des besoins spéciaux. Au Moyen-Orient, les enfants aux prises avec des
déficiences particulières d’apprentissage sont souvent laissés en marge de la
société. Nabil a décidé qu’il était temps pour l’Église d’agir. Avec l’aide de sa
femme compatissante qui avait, comme lui, un souci pour les enfants ayant
des besoins, Nabil a mis à profit son profil comme leader Protestant au Liban
pour lancer SKILD, (Enfants intelligents ayant les différences individuelles
d’apprentissage), qui offre un soutien individualisé dans les domaines des
besoins spéciaux, de la relation d’aide et de la sensibilisation de la
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communauté. Le personnel de SKILD se livre à une approche
transformationnelle pour les familles, les enfants/adolescents et les
professionnels qui luttent avec les différences d’apprentissage. Actuellement,
ses efforts l’ont amené à conseiller les dirigeants politiques du Liban dans
l’élaboration d’une nouvelle loi sur les droits des enfants ayant des besoins
spéciaux.
Un an plus tôt, Nabil a participé dans la défense des droits de chrétiens en
Jordanie, défendant la légitimité de leur mission, même jusque dans le
cabinet privé du roi de Jordanie. En tant que président de la société libanaise
pour le développement éducatif et social, Costa a aidé à défendre la cause de
la minorité chrétienne au Moyen-Orient. Plus récemment, étant donné sa
passion pour la mission intégrale dans un contexte largement musulman,
Nabil Costa a invité des écoles confessionnelles non-chrétiennes à profiter du
processus d’accréditation des écoles privées au Liban. Ne voulant pas que les
objectifs de sa mission soient axés uniquement sur lui-même et sur son
organisation, Nabil a compris le mandat biblique de porter le ministère
rédempteur à l’ensemble de l’humanité.
Dans un contexte complexe, où les chrétiens ont souvent recours à un
désengagement cloîtré et protectionniste dans leur contexte local, Nabil est
un témoin puissant de la transformation par le biais de la mission intégrale.
[sidebar]
« La réconciliation est au cœur de la foi chrétienne. C’est alors entre les
mains des chrétiens que se trouve la responsabilité pour la paix. Nous
sommes un petit groupe de Baptistes tentant d’allumer quelques bougies
dans les ténèbres du monde. » -Nabil Costa, directeur exécutif, société
libanaise pour le développement éducatif et social
Indicateurs clés de la mission intégrale dans votre contexte.
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Voici donc la mission chrétienne à son meilleur : atteindre les endroits où il y
a douleur et marginalisation afin de nouer des relations, en offrant la
guérison, l’espoir et une restauration. C’est lorsqu’elle desserre le joug des
opprimés par un engagement public et la promotion d’une vie de paix avec
tout le monde que l’intégration de la foi et de l’action sociale atteint
vraiment la personne en tant qu’enfant de ce Dieu dont le règne vient.
Dans le cheminement de votre église dans le partage de la Voie de Jésus,
examinez certains des points suivants. Ce sont des « indicateurs » qui
peuvent être présents et le seront probablement lorsqu’il y a mission
intégrale. Les indicateurs ne disent pas tout. Mais ils aident à nous orienter
sur le chemin de la transformation.
Évangélisation – Les membres de l’église ou de la communauté de foi
s’invitent et s’encouragent les uns les autres à partager une foi vivante. Ils
participent à divers événements où les gens de tous âges peuvent avoir une
perspective de l’espoir d’une vie nouvelle en Christ, par le biais de rencontres
individuelles, de séminaires, de conférences (tous les âges sur des sujets
divers) et s’engager dans des discussions formelles et informelles sur la façon
de vivre en tant que disciples de Jésus. Voici quelques ressources utiles pour
apprendre à partager votre foi dans le contexte de votre église : le
programme Alpha http://www.alphacanada.org/fr/ ou Christianity
Explored http://www.christianityexplored.org/. Voici un autre outil novateur
et efficace : I Am Second, développé par e3. Allez voir sur
http://www.iamsecond.com/
Faire des disciples – Tous les chrétiens ont besoin d’être formés dans leur foi
et d’apprendre sa pertinence pour la vie au complet. Il ne s’agit pas
principalement de transmettre de l’information, mais plus de mentorat et de
formation en vue d’une nouvelle façon de vivre. Aux fins de la croissance
spirituelle, la communauté de foi doit continuellement offrir des possibilités
pour l’étude de la Parole de Dieu afin de mieux comprendre la foi chrétienne.
Les disciples peuvent utiliser leurs dons et habiletés au profit de tiers. La
Page | 63
formation, tant formelle qu’informelle, dans des conférences, de
l’enseignement en classe et à distance, des expériences pratiques y compris
les voyages missionnaires à court terme, de sages conseils et une communion
entre pairs permettent au peuple de Dieu d’acquérir les connaissances, les
compétences et le style de vie requis pour être des agents efficaces de
transformation dans le monde.
Culte et l’adoration – La pratique du culte envers notre Dieu et l’exercice
quotidien des disciplines spirituelles de la prière, de la lecture de la Bible et
de la méditation, nous aident à nous rendre compte à nouveau de nos
responsabilités en tant que croyants, nous efforçant de vivre l’appel de Dieu
dans notre vie et dans notre monde. Au fur et à mesure que notre adoration
fait tourner notre attention vers Dieu plutôt que vers nous-mêmes, nous
devenons plus conscients de l’appel au service de compassion et nous
célébrons un Dieu qui recrée constamment son monde autour de nous.
Les plaidoyers politiques, l’engagement public et le développement
communautaire – En tant que praticiens de la mission intégrale, les membres
de l’église s’impliquent dans l’action publique, contestant l’oppression des
systèmes injustes et les structures exploitantes et abusives et ils aident
activement ceux qui sont opprimés et marginalisés. L’église s’engage
publiquement sur les questions qui touchent les gens vulnérables et participe
avec d’autres dénominations et organisations pour représenter les valeurs du
Royaume de Dieu dans toutes les facettes de la foi chrétienne et du
témoignage. L’église n’est pas un club social. Elle existe pour le bien-être de
ses membres et de ceux qui sont en dehors de ses murs. La mission intégrale
se produit lorsque les femmes et les hommes se mettent à bâtir des
communautés saines et durables dont le tissu économique et social répond
aux besoins des autres.
Santé et bien-être – Lorsque l’église s’implique dans des programmes de santé
et de bien-être, adaptés au contexte, elle s’engage dans le travail de
rencontrer les besoins physiques et émotionnels des gens de la communauté.
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Souvent, l’église peut miser sur un domaine spécifique où elle s’occupe des
malades et des personnes âgées et se met à l’écoute de ceux qui souffrent.
Par la prière, le dialogue compatissant et le service, l’église devient un agent
guérisseur pour ceux qui sont aux prises avec un traumatisme, de la crainte,
de la dépression et d’autres problèmes de santé mentale. Les croyants ne
doivent porter aucun jugement, faire de l’écoute active et croire dans la
capacité de Dieu de guérir toute blessure profonde.
Promouvoir la paix et la réconciliation – Le processus doit débuter au sein de la
communauté de l’église qui adore Dieu ensemble et puis il s’étend vers
l’extérieur à des voisins et à la communauté plus large. Si nous, en tant que
communauté de foi, ne pouvons pas agir pacifiquement entre nous, nous ne
pouvons pas nous attendre à inciter d’autres à vivre en paix, ni avoir un
témoignage authentique auprès de ceux qui sont à l’extérieur ou en marge
de la famille des croyants. La paix et la réconciliation sont au cœur de la foi
chrétienne et au cœur de la mission intégrale.
Servir également hommes et femmes et tous les âges – Comme Christ a tendu à
tous une invitation de faire partie de sa famille, de même l’église doit
accueillir tous et leur permettre de participer activement. Il ne suffit pas de
lancer l’invitation, il faut aussi l’encouragement de s’impliquer et de jouer un
rôle actif au sein de la communauté de foi. Au sein de communautés
intégrales, il ne se forme aucun mur ni barrière pour empêcher certaines
gens d’être des agents de réconciliation. Nous rendant compte que tout
enfant de Dieu a un rôle important à jouer dans son royaume, nous
permettons aux femmes et aux hommes, aux jeunes et aux vieux, aux
enfants, aux adolescents et aux adultes de prendre leur juste place au sein de
l’église, exerçant leurs talents et formés pour le service.
Accueille la diversité (leaders/membres) – Puisque nos différences sont une
richesse dans une communauté de croyants, nous devons nous efforcer de
les accepter et de les accueillir. Des communautés intégrales célèbrent ce qui
rend unique chacun de nous et offrent des possibilités pour profiter de notre
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diversité culturelle, linguistique, éducative et socio-économique pour
atteindre une croissance transformationnelle.
Un développement durable – Dans la mesure du possible, l’église initie des
programmes profitables qui répondent contextuellement aux besoins de sa
communauté. Lorsque ces programmes sont mis en place, les participants
sont habiletés à vivre de façon transformationnelle et peuvent former
d’autres pour qu’ils développent des compétences de vie et de travail, avec le
soutien qu’ils reçoivent de la communauté. Bien que cette orientation tende
souvent la main pour répondre aux besoins des pauvres, des églises qui
vivent la mission intégrale cherchent à bâtir des communautés saines, quelle
que soit leur classe socio-économique.
Ayant la vision d’être des agents de shalom, les praticiens de la mission
intégrale recherchent intentionnellement des partenariats, forment des
coalitions et s’efforcent d’atteindre des objectifs communs. Ils réfléchissent
profondément et discutent ensemble pour élaborer et appliquer des
stratégies locales particulières qui sont enracinées dans une analyse attentive
et un dialogue avec tous les niveaux de services sociaux, d’églises,
d’institutions et d’autres gens intéressés. Que le voyage commence...
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L’engagement des MBC à la mission intégrale
Nous, le Conseil et le personnel des Ministères baptistes canadiens, aimons
Dieu et aimons sa mission de bâtir shalom - la paix avec la justice - dans un
monde déchiré. Notre amour pour Dieu et pour sa mission s’enracinent dans
le fait qu’il nous a aimés le premier et nous a sauvés, déchirés que nous
étions. Comme signe de notre reconnaissance envers lui, nous acceptons
volontiers et avec enthousiasme son invitation à se joindre à lui dans sa
mission. Nous faisons partie d’une famille mondiale de disciples de JésusChrist, appelée « l’Église », qui cherche à apporter de l’espoir dans un monde
de pauvreté, de relations déchirées, de destruction environnementale,
d’espoir perdu et de toutes sortes d’oppression. Notre appel est d’être
radicalement disciples de Christ. Nous le faisons à travers la mission
intégrale.
La mission intégrale unit nos paroles et nos actions. Par nos paroles, nous
partageons l’amour de Dieu et la rédemption offerte en Jésus-Christ et nous
invitons les gens à répondre en acceptant le cadeau d’une nouvelle vie. Par
nos actions, nous contribuons à la guérison et à la transformation en bien, de
personnes et de communautés par le moyen de programmes physiques,
spirituels, économiques, psychologiques et sociaux. Nous croyons que les
deux sont essentielles, l’un ne l’emporte pas sur l’autre. On ne doit pas non
plus faire l’un sans l’autre. C’est pourquoi nous avons choisi l’expression
« intégrale » pour notre mission – parce que nous pensons que les deux
parties sont essentielles et nécessaires pour accomplir l’ensemble de ce que
Dieu veut pour sa création. Tout comme les gens sont constitués de plusieurs
parties, la bonne nouvelle est en réalité la somme de nombreux éléments
différents. Ils ne peuvent pas et ne doivent pas se faire séparément les uns
des autres.
Nous aimons aussi l’Église et souhaitons la voir grandir. L’Église est la
présence visible de Dieu dans le monde, un lieu de guérison, de croissance et
de service. Lorsque les gens acceptent la bonne nouvelle, ils entrent dans des
Page | 67
communautés de foi, qui se donnent à l’adoration, à l’enseignement, au
témoignage et au service. Parmi les moyens que nous, en tant que disciples
du Christ, démontrons notre engagement envers l’Église c’est par le
baptême.
Aux MBC, nous considérons que notre contribution la plus importante est
d’aider à fortifier nos équipiers global dans leurs habiletés et dans leur
engagement à offrir des initiatives de mission intégrale dans leur contexte
local. C’est pourquoi l’éducation et la formation, le développement des
ressources et la responsabilisation sont indispensables dans nos
programmes.
L’amour en action, la parole en action, l’espoir dans la guérison, les individus
dans la communauté – nous sommes très heureux de faire partie de l’espoir
de Dieu et de sa mission dans le monde. Et nous sommes très heureux de
partager le voyage avec vous...
Remerciements
Cette amorce parvient des efforts d’innombrables participants qui ont,
sciemment ou non, contribué au contenu de ces pages. Premier parmi eux,
mentionnons John Prociuk, un pasteur doué et un écrivain. Jim et Diane
McBeth, anciens membres de l’équipe MBC en Angola et en Bolivie ont
beaucoup aidé dans le travail. Gordon King, un collègue et l’un des
directeurs des MBC, a contribué à façonner une grande partie de notre
planification et les bases bibliques pour la mission intégrale. René Padilla et
Chris Wright ont contribué beaucoup de sagesse, de connaissances et de
compréhension des principes bibliques à travers leurs écrits. J’ai essayé dans
la mesure du possible en les citant de mettre une note de fin, mais certaines
omissions peuvent persister. Je suis extrêmement reconnaissant envers les
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partenaires et le personnel des MBC qui ont ajouté à chaque page leur
expérience et leur perspective, comme envers les étudiants qui ont suivi mon
cours sur la mission intégrale.
La motivation pour ce projet
Il y a plusieurs années une famille a décidé de verser une partie de leur
revenu à la mission globale des MBC. Nous l’avons invitée à voyager et à
visiter plusieurs projets. Ces gens ont été profondément émus par les besoins
qu’ils ont vus et frappés par la complexité de la mission parmi les pauvres. Ils
étaient réconfortés et découragés par le bon et le mauvais développement.
Et ils m’ont dit ceci : « Terry, les MBC ont besoin d’aider les gens comme
nous, les membre ordinaires de l’Église, à comprendre pourquoi la mission
intégrale est d’une si grande importance. Tu devrais écrire une amorce et
nous aider à aider d’autres à comprendre ce qu’est vraiment la mission
intégrale ! » C’est précisément ce que nous avons tenté de faire.
Merci à tous et chacun.
Terry Smith
Directeur, Partenariats internationaux
Ministères baptistes canadiens
Page | 69
NOTES DE FIN
i
Wendell Berry, The Real Work, Collected Poems, 1992
ii
- , Manifesto: The Mad Farmer Liberation Front, 1992
iii
Timothy Smith, The Great Reversal: Evangelism Versus Social Concern, Philadelphia, Lippincott, 1972.
iv
D.L. Moody, Selected Sermons, Christ Seeking Sinners, p. 127,128, add reference.
v
The Lausanne Covenant, Article 5. The Lausanne Movement, 1974. http://www.lausanne.org/en/documents/lausannecovenant.html
vi
The Manila Manifesto, Articles 8 & 9, The Lausanne Movement, http://www.lausanne.org/en/documents/manilamanifesto.html
vii
Cité de Padilla dans Making the Crossing, Mosaic, (add reference)
viii
Kuyper, Abraham (1998). « Sphere Sovereignty ». Dans Bratt, James D.. Abraham Kuyper, A Centennial Reader. Grand Rapids,
MI: Eerdmans. p. 488
ix
Le nouveau petit Robert, Le Robert, Paris, 2009
x
Vous trouverez cette définition ainsi que bien d’autres ressources utiles dans le site internet du Réseau Michée sous l’onglet
Resources. Voir
http://www.micahnetwork.org/sites/default/files/doc/page/mn_integral_mission_declaration_en.pdf
http://www.micahnetwork.org/fr
xi
Chris Wright, The Mission of God’s People, 2010. Chapitre 6 (p 109-113)
xii
Voir le site internet de Richard Stearn au http://www.theholeinourgospel.com/
xiii
Voir David Barrett, World Christian Trends, 2001.
xiv
Vous pouvez en apprendre davantage sur les objectifs de développement du millénaire, ainsi que d’autres
informations utiles concernant des questions de développement mondial au
http://www.undp.org/content/undp/en/home/mdgoverview.html
http://www.undp.org/content/undp/fr/home/mdgoverview/
xv
Lisez l’engagement de Cape Town en entier et d’autres ressources du Mouvement de Lausanne au
http://www.lausanne.org/en/documents/ctcommitment.html#p1-7
http://www.lausanne.org/fr/tous-les-documents/engagement-du-cap.html
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