unite d`action syndicale (uas) - CGT-B
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UNITE D’ACTION SYNDICALE (UAS) / BURKINA FASO LES CENTRALES SYNDICALES : Confédération Générale du Travail du Burkina (CGT-B) Confédération Nationale des Travailleurs Burkinabé (CNTB) Confédération Syndicale Burkinabé (CSB) Force Ouvrière – Union Nationale des Syndicats Libres (FO- UNSL) Organisation Nationale des Syndicats Libres (ONSL) Union Syndicale des Travailleurs Burkinabé (USTB) Et LES SYNDICATS AUTONOMES : SAIB – SATB – SAMAE–SATEB– SNEAB –SYNATEB –SYNATIC SYNTAS–SYNTRAPOST– SYNAPAGER–SYNATIPB SYNATRAD–SYSFMAB– SYNATEL – UGMB L’UNITE D’ACTION SYNDICALE AU BURKINA FASO : BILAN CRITIQUE DE DIX ANS DE LUTTES UNITAIRES (1999 – 2009) Ouagadougou, 18 décembre 2009 2 LISTE DE QUELQUES SIGLES ET ABREVIATIONS SAIB : Syndicat Autonomes des Infirmiers du Burkina SATB : Syndicat des Agents du Trésor du Burkina SAMAE : Syndicat des Agents du Ministère des Affaires Etrangères SATEB : Syndicat Autonome de Travailleurs de l‟Enseignement de Base SNEAB : Syndicat National des Enseignants Africains du Burkina SYNATEB : Syndicat National des Travailleurs de l‟Enseignement de Base SYNATIC : Syndicat National des Travailleurs de l‟Information et de la Culture SYNTAS : Syndicat National des Travailleurs de l‟Action Sociale SYNTRAPOST : Syndicat National des Travailleurs des Postes SYNAPAGER : Syndicat National des personnels d‟Administration de Gestion de l‟Education et de la Recherche SYNATIPB : Syndicat National des Travailleurs des Industries polygraphiques du Burkina SYNATRAD : Syndicat National des Travailleurs des Douanes SYSFMAB : Syndicat des Sages-femmes et Maïeuticiens du Burkina UGMB : Union des Gens de Maison du Burkina ONSL : Organisation Nationale des Syndicats Libres USTB : Union Syndicale des Travailleurs du Burkina CNTB : Confédération Nationale des Travailleurs du Burkina CSB : Confédération Syndicale Burkinabé SNEAHV : Syndicat National des Enseignants Africains de Haute-Volta SYNTSHA : Syndicat national des Travailleurs de la santé Humaine et Animale STOV : Syndicat des Techniciens et Ouvriers Voltaïques MNR: Mouvement National pour le Renouveau CMRPN: Comité Militaire de Redressement pour le Progrès National CNR: Conseil national de la révolution FSB: Fédération Syndicale des Boulangers SNAID: Syndicat National des Agents des Impôts et Domaines SYNTB: Syndicat national des Travailleurs des Brasseries SYNTER : Syndicat National des Travailleurs de l‟Education et de la Recherche SYNTETH : Syndicat National des Travailleurs de l‟Environnement, du tourisme et de l‟Hôtellerie SYNTRAGMIH : Syndicat National des Travailleurs de la Géologie, des mines et des Hydrocarbures SYNTSHA : Syndicat National des Travailleurs de la santé Humaine et Animale 3 SYTTPBHA : Syndicat National des Travailleurs des Travaux Publics, du Bâtiment, de l‟Hydraulique et Assimilés SAMAB : Syndicat Autonome des Magistrats Burkinabè UGEV : Union Générale des Etudiants voltaïques ANEB : Association nationale des Etudiants Burkinabè SYNACB : Syndicat national des Cheminots SYNAJ : Syndicat National des Agents de Justice MBDHP : Mouvement Burkinabè des Droits de l‟Homme et des Peuples CRADH : Collectif pour le Règlement des Affaires Pendantes en matière de Droits de l‟Homme SAP : Société Africaine de Pneumatiques SIFA : Société Industrielle du Faso SN-SOSUCO : Société Nouvelle/Société Sucrière du Faso SOTRACO : Société de Transport en Commun PANAF/MEFOCE : Projet syndical éducatif panafricain/Méthode de Formation par les Cercles d‟Etudes PADEP : Programme Africain pour la Participation des Travailleurs CODMPP : Collectif des Organisations Démocratiques de Masse et de Partis Politiques CCVC : Coalition Nationale de Lutte contre la Vie Chère, l‟impunité, la corruption, la Fraude et pour les Libertés UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine CEDEAO : Communauté Economique des Etats de l‟Afrique de l‟Ouest OHADA : Organisation pour l‟Harmonisation du Droit des Affaires 4 UNITE D’ACTION SYNDICALE (UAS)/ BURKINA FASO LES CENTRALES SYNDICALES : Confédération Générale du Travail du Burkina (CGT-B) Confédération Nationale des Travailleurs Burkinabé (CNTB) Confédération Syndicale Burkinabé (CSB) Force Ouvrière – Union Nationale des Syndicats Libres (FO- UNSL) Organisation Nationale des Syndicats Libres (ONSL) Union Syndicale des Travailleurs Burkinabé (USTB) Et LES SYNDICATS AUTONOMES : SAIB – SATB – SAMAE–SATEB– SNEAB –SYNATEB –SYNATIC SYNTAS–SYNTRAPOST– SYNAPAGER–SYNATIPB SYNATRAD–SYSFMAB– SYNATEL – UGMB L’UNITE D’ACTION SYNDICALE AU BURKINA FASO : BILAN CRITIQUE DE DIX ANS DE LUTTES UNITAIRES CONTINUES (1999 – 2009) INTRODUCTION 1999-2009 ! L‟unité d‟action syndicale en cours au Burkina Faso a 10 ans ! 10 ans, ce n‟est sans doute pas extraordinaire. Mais au regard de l‟histoire syndicale de notre pays, au regard aussi de celles des autres pays, cette durée de vie d‟un tel regroupement relève de l‟exception. Mais pourquoi l‟unité syndicale ? L‟expérience du mouvement syndical nous enseigne que l‟unité de l‟action syndicale reste tant au plan international que national un désir profond et une aspiration légitime des travailleurs dans leur combat quotidien contre l‟exploitation capitaliste et pour de meilleures conditions de vie et de travail. Cette unité syndicale est apparue comme une préoccupation pour les travailleurs surtout avec le développement du pluralisme syndical exacerbé au plan international comme à l‟intérieur des états. La force du mouvement syndical ouvrier étant fondée essentiellement sur l‟unité et la solidarité des travailleurs, il apparaît clairement qu‟à l‟échelle du monde et des pays, le pluralisme syndical constitue un risque d‟affaiblissement de la classe ouvrière. Les Etats-patrons, tout comme le patronat l‟ont bien compris qui ont ici et là suscité la création de syndicats, l‟objectif étant d‟affaiblir le mouvement syndical qui existait ou de dévoyer la lutte des travailleurs. Cette politique qui répond au principe du diviser pour mieux régner prospère plus ou moins longtemps en fonction du niveau de la prise de conscience des travailleurs. 5 Au Burkina Faso, le mouvement syndical a été très tôt marqué par le pluralisme. En effet, contrairement à ce qu‟on a pu observer dans nombre de pays africains, tous les pouvoirs qui se sont succédés dans notre pays, n‟ont jamais réussi à imposer une centrale syndicale unique liée à un parti – Etat bourgeois unique. Certes, la 1ère République de Maurice YAMEOGO l‟a tenté et a même légiféré dans ce sens en 1964, mais il n‟a jamais réussi à faire appliquer cette loi. Face à ce pluralisme, la solution trouvée par le mouvement syndical burkinabé a été l‟unité d‟action. C‟est elle qui a permis aux travailleurs de notre pays et à leurs organisations de jouer le plus souvent un rôle de premier plan aux différentes étapes importantes de l‟histoire de notre peuple. En l‟occurrence, il s‟agissait, à travers des luttes larges et unitaires, de faire échec à des tentatives de caporalisation des syndicats, de confiscation des libertés démocratiques, et/ou de remise en cause des acquis des travailleurs. ″L’unité d’action syndicale au Burkina Faso : bilan critique de dix ans de luttes unitaires continues (1999 – 2009 )″. Tel est le thème retenu pour ce dixième anniversaire d‟Unité d‟Action Syndicale au Burkina Faso. I. CONTEXTE DE LA COMMEMORATION I.1. AU PLAN INTERNATIONAL La commémoration des 10 ans de l‟Unité d‟Action Syndicale intervient dans un contexte international marqué par l‟approfondissement de la crise économique, sociale et politique du système capitaliste, impérialiste mondial. a. Sur le plan politique, les puissances impérialistes avec à leur tête la superpuissance américaine, dans leur politique de pillage des richesses et de domination hégémonique impérialiste, ont plongé le monde dans l‟instabilité et l‟insécurité. Ainsi, les foyers de guerres et d‟insécurité s‟élargissent et se multiplient, faisant peser de lourdes menaces contre la paix et la sécurité des peuples. Cela se traduit entre autres par : la guerre en Irak à l‟occasion de laquelle, des millions d‟irakiens, principalement des civils, ont été massacrés, le renforcement de la présence militaire étrangère en Afghanistan, constituée essentiellement d‟américains l‟installation du bouclier américain en Pologne pour prétendument contrecarrer le terrorisme, les menaces et chantages contre l‟Iran à propos du nucléaire le réchauffement climatique causé par les exploitations et productions massives désordonnées et qu‟elles font mine de combattre etc. 6 b. sur le plan économique et social, la crise frappe tous les domaines de la vie économique et sociale : elle est à la fois industrielle, agricole, financière, avec des cortèges de faillites, de fermeture d‟usines, de banques, de maisons d‟assurances suivis de licenciements massifs de travailleurs. Partout, les phénomènes du chômage et de la vie chère prennent de l‟ampleur. Face à cette offensive du capitalisme, qui tente par tous les moyens de faire supporter le fardeau de la crise par la classe ouvrière, les travailleurs et la jeunesse, ces derniers, partout dans le monde, n‟ont pas baissé les bras. Ils s‟organisent, développent des luttes et se battent contre l‟exploitation capitaliste, pour la justice et pour le progrès social, pour leur liberté et pour un mieux-être. Les luttes des peuples palestinien, irakien, afghan, iranien, soudanais, etc. constituent des exemples vivants du refus de la soumission et de l‟exploitation. En Amérique latine, c‟est le rejet des pouvoirs néo-libéraux au profit des partis qui proposent la justice et le progrès social qui est à l‟ordre du jour. C‟est le cas en Bolivie, au Brésil, au Chili, au Pérou, au Venezuela, en Equateur, etc. Même en Europe, les élections en Espagne, en Italie, en Hongrie et en Roumanie, s‟inscrivent dans cette dynamique. I.2. AU PLAN AFRICAIN En Afrique, la crise est accentuée par la mauvaise gouvernance, le déficit politique et démocratique des pouvoirs pour la plupart issus de coups d‟état ou d‟élections frauduleuses ou scandaleuses. Le chômage, la misère, les pandémies et l‟exode sont le lot quotidien des africains, conséquences des atteintes graves et répétées aux droits de l‟homme perpétrées par des pouvoirs illégitimes, des conflits et instabilités ouvertes ou sourdes, des guerres civiles ou rébellions, des coups d‟Etat militaires et autres manipulations de Constitutions dans de nombreux pays et régions comme au Burkina Faso, en Côte d‟Ivoire, au Tchad, en République Centrafricaine, en République Démocratique du Congo, en Guinée, en Somalie, au Soudan avec le Darfour, au Niger, au Mali, etc. Là aussi, malgré cette situation d‟ensemble insupportable, les peuples développent de puissantes luttes contre la guerre, contre les méthodes autocratiques de gestion des pouvoirs en place et contre la misère. Et, ce sont des millions de travailleurs, de jeunes qui ont pris d‟assaut les rues et les places publiques pour exprimer leur ras le bol contre la cherté de la vie. A cette colère légitime, les différents pouvoirs ont répondu par une répression féroce entraînant des arrestations, des emprisonnements, des blessés et même des morts comme au Cameroun, en Egypte, etc. I.3. AU PLAN NATIONAL La situation nationale, quant à elle, reste marquée par l‟aggravation de la crise politique, économique et sociale qui tenaille notre pays avec l‟application des Programmes d‟Ajustement Structurel (P.A.S.). La preuve que les PAS sont un échec comme politique de développement économique et social, c‟est qu‟ils se sont soldés par l‟élection de notre pays dans le concert des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE). 7 A contrario, ces P.A.S ont permis aux hommes du pouvoir et à leurs acolytes : - d‟élargir et de consolider leur base économique par le « rachat » des sociétés bradées et la légalisation de fait de la corruption et de la fraude, la création de nombreuses sociétés dans les différents secteurs d‟activités notamment le Bâtiment et les Travaux Publics, le transport, le commerce ; - de mettre l‟appareil judiciaire sous contrôle de l‟exécutif en vue de garantir l‟impunité de tous les crimes de sang et crimes économiques et maintenir la répression contre les travailleurs par le refus manifeste d‟exécuter certaines décisions de justice de dernier ressort relatives à des conflits de travail. Quant à la grande majorité des burkinabè, elle vit une situation sociale très pénible avec des besoins immenses en matière de santé, d‟éducation, de nourriture et logement. Elle connaît également le développement prodigieux des fléaux sociaux tels que le chômage, la prostitution, la toxicomanie, le banditisme, etc. Le crime est devenu ces dernières années un acte banal : il ne se passe pas une semaine sans que la presse ne fasse cas de jeunes ou de vieilles personnes assassinées de manière cruelle dans tel secteur, ville ou village. C‟est contre ces maux intolérables que le mouvement syndical, à l‟instar d‟autres forces sociales, mobilise les travailleurs et le peuple et engage des luttes pour leur éradication. C‟est également contre de tels maux (corruption, crimes abominables impunis, injustice sociale, etc.), que parfois de manière spontanée, les populations de tous secteurs, expriment et parfois, de manière violente, leur colère et indignation. C‟est dans ce registre, qu‟il faut situer la création le 12 mars 2008, de la Coalition contre la vie chère, la corruption, la fraude, l‟impunité et pour les libertés, suivie des manifestations successives de la dite Coalition dès le 15 mars 2008, consécutives aux violentes manifestations des 20, 21, 22 et 28 février 2008 à Bobo-Dioulasso, Banfora, Ouahigouya et Ouagadougou. Cette année 2009, la misère s‟est accentuée pour une importante partie des populations de Ouagadougou et de certaines localités du pays, suite à la pluie diluvienne du 1er septembre qui a occasionné d‟importants dégâts tant matériel qu‟humains ; dégâts largement aggravés par la politique d‟urbanisation hasardeuse du pouvoir de la IV° République. Comme pour corroborer notre analyse sur l‟état de détresse des masses populaires Burkinabé, le PNUD vient de publier son rapport mondial sur le développement humain 2009. Voici un passage de ce qu‟en dit le quotidien Burkinabé, l‟Observateur Paalga du 16 novembre 2009 : 8 « Si un pays comme la Norvège occupe le premier rang à l'issue de cet exercice qui a porté sur les données de 2007, ce n'est pas du tout le cas du Burkina Faso, malheureusement, qui continue de se démener dans les profondeurs du classement avec un rang peu enviable de 177e sur 182 pays. Le « Pays des hommes intègres » fait légèrement mieux que le Mali (178e), la République centrafricaine (179e), la Sierra Leone (180e), l‟Afghanistan (181e) et le Niger (182e). Comme on le voit, le Burkina Faso devance des pays qui sont en bute aux troubles sociaux, voire en guerre. En effet, le Mali et le Niger ont maille à partir avec leurs rébellions touarègues respectives. Ce qui n'est pas propice à tout projet de développement. La République centrafricaine contrôle difficilement une rébellion. L'Afghanistan est en guerre depuis, et la Sierra Leone sort à peine d'une longue guerre civile. Alors si on ne dépasse que ces pays en guerre, il n'y a pas de quoi se frotter les mains. » Et d‟ajouter plus loin ceci : « Il est temps que nos gouvernants sachent qu'on n'a pas besoin du PNUD pour reconnaître que le Burkina ne se porte pas bien. Il se porte même très mal, avec une paupérisation qui gagne chaque jour du terrain. Au Burkina, la misère semble la chose la mieux partagée. Ce récent classement reste un cinglant démenti, voire un aveu d'impuissance. Il est temps de reconnaître que le Burkina est bel et bien malade, de misère, de pauvreté, afin de travailler à lui administrer la bonne cure ». II. LES CARACTERISTIQUES ESSENTIELLES DU SYNDICAL BURKINABE ET LES TENTATIVES D’UNITE D’ACTION SYNDICALE MOUVEMENT ANTERIEURES II.1. Les caractéristiques essentielles du mouvement syndical burkinabé : Le mouvement syndical burkinabé, présente les caractéristiques essentielles suivantes : Une tradition de lutte contre les tentatives de caporalisation et pour la sauvegarde des libertés démocratiques et syndicales. En effet, depuis les indépendances de 1960, les travailleurs burkinabé ont livré de nombreuses batailles contre les pratiques des différents pouvoirs qui ont usé de mille et une astuces pour caporaliser, réduire et soumettre les travailleurs et leurs organisations. Tour à tour, les pouvoirs de Maurice YAMEOGO, de Sangoulé LAMIZANA puis les pouvoirs du Comité Militaire de Redressement pour le Progrès National (CMRPN) du Colonel Saye ZERBO, du Conseil de Salut du Peuple (CSP) du médecin – commandant Jean Baptiste OUEDRAOGO et surtout l‟arrivée au pouvoir du Conseil National de la Révolution (CNR) du Capitaine Thomas SANKARA le 4 août 1983, du Front Populaire (FP) du capitaine Blaise COMPAORE, de la IVème République, ont tenté, à défaut de liquider les syndicats, de les affaiblir, de les caporaliser et /ou les contrôler par la répression, la corruption, la division, etc. Cette situation ayant été encouragée par l‟insuffisante mobilisation des travailleurs à certains moments. Un attachement, dans une large mesure à son indépendance et à son esprit critique vis-à-vis des pouvoirs qui se succèdent au Burkina Faso; 9 un pluralisme et une diversité des orientations syndicales héritées de la période coloniale et des centrales syndicales de la métropole ( les orientations d‟obédience religieuse, libérale, anti – impérialiste, révolutionnaire de lutte de classes, etc. ) avec cependant une volonté de recherche constante d’unité d’action syndicale qui produit ses effets ; des difficultés manifestes à s‟appuyer sur des organisations véritablement représentatives et financièrement indépendantes pour construire une véritable unité d‟action syndicale forte. II.2. Rappel historique sur quelques expériences d’unité d’action syndicale conjoncturelle, totale et/ou partielle de 1960 à 1999 ( 40 années) : Comme rappelé ci – dessus, le pluralisme syndical est sans doute une des caractéristiques essentielles du syndicalisme burkinabé depuis toujours. Cependant, l‟unité d‟action a été la forme de luttes unitaires des travailleurs burkinabé et de leurs organisations syndicales, aux différents tournants importants de l‟histoire du pays, pour contrer les tentatives de caporalisation des syndicats, de confiscation des libertés démocratiques et de réduction drastique du pouvoir d‟achat. Un regard rétrospectif dans la période des années 60 à la fin des années 90, montre de constants regroupements du mouvement syndical Burkinabé, qui ont conduit à de grandes luttes. Quelques exemples : II.2.1. de 1960 à 1980 Il convient avant tout de noter que sous la période coloniale, les leaders syndicaux étaient en même temps engagés dans la lutte anticoloniale. En fait, il y avait à l‟époque une unité d‟action entre l‟Union Générale des Travailleurs d‟Afrique Noire (UGTAN) et le Rassemblement Démocratique Africain (RDA) qui conduisait la lutte anti – coloniale notamment dans les pays de l‟Afrique Occidentale Française. Ce n‟est pas un fait du hasard si la plupart des premiers hommes politiques dont les chefs d‟Etat ont aussi été pour la plupart des dirigeants syndicaux. Des hommes politiques comme les présidents Félix Houphouet BOIGNY de Côte D‟Ivoire, Sékou TOURE de Guinée, Daniel Ouezzin COULIBALY de Haute – Volta (qui créa dès 1937 un syndicat d‟enseignants avec le soudanais Mamadou KONATE), Maurice YAMEOGO de l‟ex-Haute Volta, Joseph OUEDRAOGO, Bégnon KONE (qui ont tous deux dirigés l‟Assemblée Nationale de Haute – Volta), Tom BOYA, premier ministre du Kenya, etc., ont fait leurs premières armes dans les syndicats. Après les indépendances, diverses expériences d‟unité d‟action ont été vécues en rapport avec le cours des événements politiques que connaissait le pays. Ainsi : En décembre 1965, c‟est à l‟occasion du congrès de l‟USTV (le 28 décembre 1965) avec la participation des deux autres centrales syndicales de l‟époque ( CNTV et OVSL) et des syndicats autonomes que les bases de l‟unité d‟action syndicale ont été posées à travers l‟inter syndicat qui fut l‟âme du soulèvement populaire du 3 janvier 1966 contre le pouvoir autocratique et gabégique du Président Maurice YAMEOGO (1ère République); 10 En 1975, face aux tentatives d‟embrigadement du peuple engagées par le général Sangoulé LAMIZANA et ses hommes avec son projet de parti unique, le Mouvement National pour le Renouveau (MNR), les organisations syndicales réussissent une unité d‟action extraordinaire qui aboutit à la grève générale – ville morte des 17 et 18 décembre 1975. LAMIZANA est contraint d‟abandonner son projet ; De 1978 à 1980, sous le Régime de la 3ème République, des centrales syndicales et des syndicats professionnels (OVSL, USTV, CNTV, CSV, SNEAHV, SYNTSHA, STOV), engagèrent la lutte contre les atteintes aux libertés syndicales, des projets de loi antigrève, etc. Malgré la répression, les luttes aboutirent à la libération de responsables syndicaux interpellés, au retrait du projet de loi anti – grève de l‟Assemblée Nationale, etc. Un exemple frappant de répression est le licenciement en février 1978 (à la charge de la 3ème République), de tous les dirigeants et délégués du personnel du SNTV (Syndicat National des Travailleurs de la Voltelec, affilié à l‟USTV) pour fait de grève et qui revendiquaient un minimum de respect des textes en matière de législation du travail. Le régime du Général Lamizana fut soutenu dans cette répression des militants du SNTV-USTV, par des formations politiques et syndicales qui jetèrent certains grévistes en prison et organisèrent contre eux des procès fallacieux. II.2.2. sous les régimes d’exception (1980-1991) De 1980 à 1982, sous le CMRPN, malgré la répression (interdiction des Assemblées Générales syndicales, perquisitions de domiciles, arrestations et détentions de responsables syndicaux, suppression, puis limitation du droit de grève, déportations de militants syndicaux pour faits de grève, licenciements et procès de syndicalistes, dissolution de la centrale syndicale CSV et mandat d‟arrêt contre son Secrétaire Général, Soumane TOURE, etc.) ; la lutte contre la répression, pour le libre exercice des libertés s‟est poursuivie. Cette lutte pour les libertés renforça l‟unité d‟action entre travailleurs, élèves et étudiants sous les CSP 1 & 2 (82 – 83) pour se matérialiser sous le CNR à partir de 1983. De 1983 à 1987, sous le régime du CNR, une répression jamais égalée s‟est abattue sur les citoyens (crimes abominables) et de façon ciblée sur les syndicats sous le couvert de la lutte contre les réactionnaires et les anarcho-syndicalistes. La volonté de substituer les CDR aux syndicats est manifeste et se traduit par l‟organisation de putschs syndicaux (SYNTSHA,…), les licenciements massifs, les arrestations, détentions et tortures de militants syndicaux de centrales syndicales et syndicats autonomes du front syndical, levées d‟assemblées générales et d‟instances( interruption du congrès de l‟USTB à Bobo – Dioulasso par des individus armés), attaques et occupations de la Bourse du Travail (1er mai 1985, 1er mai 1987, juin 1987, etc.). Contre cette remise en cause des libertés démocratiques et syndicales pour le relèvement du pouvoir d‟achat largement entamé par les différentes mesures du CNR deux expériences d‟unité d‟action vont marquer la période : 11 Le “ Front Syndical ”. Il est le produit d‟une unité d‟action syndicale entre les syndicats autonomes FSB, SNAID, SYNTB, SYNTER, SYNTETH, SYNTRAGMIH, SYNTSHA, SYTTPBHA, le SAMAB, l‟UGEV et la CSB réalisée en décembre 1984 et révélée le 28 janvier 1985 à travers une déclaration désormais historique et portant son nom. La plate forme d‟action du Front syndical portait sur le libre exercice des libertés démocratiques et syndicales, le respect des libertés individuelles et collectives, la défense du pouvoir d‟achat des travailleurs. L’unité d’action du 1° mai 1987 : le 17 mars 1987, les centrales syndicales CNTB, CSB, ONSL, USTB et les syndicats autonomes FSB, SNAID, SYNTB, SYNTER, SYNTETH, SYNTRAGMIH, SYNTSHA, SYTTPBHA, SAMAB, publient ensemble un communiqué de quelques lignes dans lequel ils informent „ensemble des travailleurs d‟une démarche unitaire engagée autour de la défense des intérêts des travailleurs. C‟est dans cet élan que le 1° Mai 1987 sera préparé dans l‟unité d‟action et réalisé. Malgré l‟occupation de la Bourse du travail de Ouagadougou par des militaires armés, notamment le Bataillon d‟intervention aéroporté (BIA) de Koudougou, les travailleurs envahiront littéralement la Bourse du Travail de Ouagadougou à l‟appel de leurs dirigeants syndicaux. Par une gestion souple de cette situation, les dirigeants syndicaux présents sur les lieux, réussiront à éviter l‟affrontement. II.2.3. sous le régime du Front Populaire Le 15 octobre 1987, un coup d‟Etat militaire qui a coûté la vie au Président du Faso, Thomas SANKARA et à douze de ses compagnons, mettait fin au régime du Conseil National de la Révolution (CNR) et instaurait celui du Front Populaire du Capitaine Blaise COMPAORE. A l‟avènement du Front Populaire en octobre 1987, le Front syndical adressera au Président du Front Populaire, dès le 12 décembre 1987, un mémorandum synthétisant les atteintes graves aux libertés démocratiques et syndicales et au Droit du Travail sous le Conseil National de la Révolution (CNR) et demande la réhabilitation de tous les travailleurs sanctionnés pour délit d‟opinion et leur réintégration dans leurs emplois (Cf. dossier sur la répression du Front syndical, réalisé en octobre 1987 et publié en mars 1988). Au sortir de la décennie de régimes d‟exception et à la veille de l‟écriture de l‟avantprojet de Constitution en 1990, le bilan dressé par le mouvement syndical sur la répression qu‟il a subi est suffisamment lourd : près de 2000 travailleurs licenciés ou dégagés dont des enseignants, une centaine de cas de suspensions, plus de 200 cas d‟arrestations, 47 cas de tortures, 55 cas de bourses coupées, 15 cas d‟exclusions d‟élèves, 3 occupations de sièges (ANEB, SYNTER, SYNTSHA), une vingtaine de levées d‟Assemblées Générales et d‟interventions armées, le maintien voire la poursuite de putschs syndicaux sous le Front Populaire (SYNTSHA, CNTB, …), d‟incessantes mutations de responsables et militants syndicaux dans le but de désorganiser les syndicats. 12 Hormis ces expériences unitaires, on note des actions syndicales dispersées face à des événements nationaux importants tels que le bilan de quatre (4) années de révolution du CNR (du 8 au 10 janvier 1988), le bilan de un (01) an de Rectification du Front Populaire ( du 26 au 28 janvier 1989), le Forum national sur le Programme d‟Ajustement Structurel (P.A.S) le 12 mai 1990, les travaux de la Commission Constitutionnelle ( Mai à septembre 1990), etc. Néanmoins, même de façon dispersée, il faut retenir que le mouvement syndical burkinabé s’est appuyé sur des regroupements tantôt sectoriels et partiels, tantôt unitaires et larges pour contribuer de manière significative, à asseoir les fondements de l’Etat de droit et de la IVème République. Quelques exemples de la contribution du mouvement syndical pour asseoir les fondements de l’Etat de droit et de la IVème République : Le 12 décembre 1987, dans un document transmis au Président du Front Populaire, comme contribution au „‟bilan critique de quatre années de Révolution Démocratique et populaire‟‟, le “ Front Syndical ”, regroupement à l‟époque de onze syndicats dont une centrale syndicale, la CSB et un syndicat d‟étudiants, l‟UGEB, disait attendre du Front Populaire entre autres : “ - l‟extension du Communiqué N°5 à tous les militants syndicaux licenciés ou dégagés arbitrairement et la levée de toutes les mesures répressives et arbitraires prises contre des militants et responsables syndicaux, ainsi que leurs dédommagements et leur rétablissement dans leurs droits juridiques et pécuniaires au regard des textes réguliers qui les régissent ; - le respect et la garantie des libertés démocratiques et individuelles et collectives, à savoir notamment les libertés démocratiques d‟opinion, d‟expression, d‟association, de presse et de circulation, le secret de la correspondance et d‟inviolabilité du domicile etc., l‟abolition de la torture et la traduction des tortionnaires et des mouchards devant les tribunaux…. ”. Il convient de noter que le communiqué n°5 du Front Populaire d‟octobre 1987 annonçait des mesures de levées de sanctions, notamment le licenciement de plus d‟un millier et demi d‟enseignants licenciés pour faits de grève. En substance, le communiqué annonçait ceci : « 1. Tous les enseignants licenciés en 1984 pour fait de grève sont repris dans leur corps d‟origine ; 2. Tous les agents de l‟Etat, suspendus, voient leurs sanctions levées ; 3. Tous les prisonniers politiques et internés administratifs sont élargis. » Décembre 1990 : Aux Assises Nationales sur l’avant-projet de Constitution, une unité d’action syndicale est enfin réalisée. Une déclaration commune des organisations syndicales CGT-B, CNTB, CSB, ONSL, USTB et SNEAB avec comme porte-parole, Tolé SAGNON Secrétaire Général de la CGTB, a été livrée aux assises nationales puis publiée. En exemples, les points suivants ont été fermement défendus à l‟occasion : 13 1- la question de l‟inutilité de la deuxième chambre et de son rejet par la commission constitutionnelle; 2- la nécessité d‟une amnistie générale pour l‟ensemble des burkinabé qui ont été lésés dans leurs droits de manière individuelle et/ou collective ; 3- un multipartisme intégral devant permettre la libre expression de l‟ensemble des sensibilités politiques et des courants d‟idées qui traversent notre société. Toutefois doivent être interdits les partis régionalistes, racistes, religieux, fascistes ; 4- du mandat Présidentiel de sept (7) ans renouvelable une seule fois, que nos Organisations Syndicales trouvaient “ inutilement long ” et proposait de le ramener de sept à cinq (7 à 5) ans renouvelable une seule fois; 5- des pouvoirs du président lui autorisant de “ dissoudre l‟Assemblée des Députés du peuple, gagnerait à être plus limitatif pour ne permettre qu‟une seule dissolution au cours d‟un mandat présidentiel ”. Au sortir des Assises Nationales sur le projet de Constitution, les syndicats n‟ont malheureusement pas pu rendre compte aux travailleurs de manière unitaire. Chaque centrale syndicale a utilisé la forme de compte rendu qui lui convenait. Le 2 juin 1991, la Constitution de la IVème République est adoptée par référendum. Elle est promulguée le 11 juin 1991. En juillet 1991, suite à une rencontre avec le Président du Front Populaire, les Centrales Syndicales CGT-B, CNTB, CSB, ONSL, USTB et les Syndicats Autonomes SAMAB, SNEAB, SYNACB, SYNAJ, SYNATIC, qui avaient comme porte – parole, Boniface SOMDA, Secrétaire Général de l‟USTB, adressent le 8 juillet 1991, une lettre au Président du Faso dans le cadre de leur “ Contribution à la mise en œuvre de la constitution ”. Parmi les propositions formulées, figuraient l‟Amnistie Générale et la réhabilitation de tous ceux qui ont été sanctionnés sous les régimes d‟exception pour leurs opinions politiques et/ou syndicales, l‟amélioration des conditions de vie des travailleurs et la sécurité de l‟emploi, le rôle de l‟armée, la dénonciation des gouvernements pléthoriques, des détournements, des nominations politiques aux postes techniques, de l‟approfondissement du processus démocratique, la dénonciation (déjà) des conséquences du P.A.S. En novembre 1991, se tiennent les Etats Généraux du syndicalisme Burkinabé : L‟ensemble du mouvement syndical contribue à la convocation et à la tenue des Etats Généraux du Syndicalisme Burkinabé, les 15,16 et 17 novembre 1991. A l‟occasion, les syndicats, unanimement, ont condamné et rejeté le P.A.S et proposé des solutions internes concertées aux problèmes de l‟économie du pays. Une motion a même été adoptée qui stipule notamment ceci : - “Considérant les expériences négatives du P.A.S dans les pays en voie de développement où ils ont été appliqués; 14 - Considérant les promesses des autorités sur les avantages du P.A.S au Burkina Faso ; - Considérant qu‟en fait d‟avantages, l‟application du P.A.S n‟a engendré que des inconvénients, licenciements, compressions, mises à la retraite anticipée, fermetures de sociétés, désengagements de l‟Etat des secteurs sociaux (santé, éducation, logement, etc); - Considérant que de ce fait, le P.A.S se révèle contraire à toute démocratie économique et de justice sociale ; Les états Généraux du syndicalisme burkinabé, tenus à Ouagadougou les 15, 16 et 17 novembre 1991, - Dénoncent et condamnent le P.A.S dans sa philosophie et dans son application. Et par conséquent demandent l‟arrêt immédiat du Programme d‟Ajustement Structurel ; - Proposent une recherche concertée de solutions internes à la crise de l‟économie burkinabé. ”. (CF. document final des Etats Généraux). Par ailleurs, les Etats Généraux, ont formulé des revendications pour la consolidation des libertés démocratiques et syndicales, et une fois encore, exigé la réhabilitation de citoyens sanctionnés pour délit d‟opinion. La plate forme unitaire minimale issue des états généraux, fera l‟objet de négociations avec le gouvernement, négociations qui aboutiront à la signature d‟un protocole d‟accord gouvernement/ syndicats le 18 décembre 1991 à 4heures. L‟engagement pris par les états généraux d‟appeler à une grève générale le 7 janvier 1992 si la plate forme minimale n‟était pas satisfaite par le gouvernement, ne sera pas respecté. Cette situation va conduire à une fracture au sein du mouvement syndical. En effet, en juin 1992, un collectif syndical, constitué de la CGT-B et d‟un groupe de syndicats autonomes, organise la première grève générale après la décennie de régimes d‟exception, les 1er et 2 juin 1992 pour exiger la mise en œuvre par le gouvernement du protocole d‟accord Gouvernement/Syndicats du 18 décembre 1991. Cette grève qui a connu un franc succès, donnait l‟occasion au mouvement syndical de renouer avec la lutte légale. Dès lors, deux groupes vont se constituer qui vont matérialiser la bipolarisation du mouvement syndical. Il s‟agit du « Collectif syndical CGT-B » et du « Groupe des 13 ». 1° mai unitaire, 1993 : dénonciation des privatisations sauvages. Ce 1° mai 1993 se réalise dans l‟unité d‟action contre les privatisations sauvages, la gestion gabégique des sociétés d’Etat, la corruption et avec l’exigence d’un point précis des opérations de privatisations et de l’assainissement de la gestion de la chose publique. Malheureusement, il n‟a pas été possible de réaliser une unité de lutte autour de ces préoccupations. C‟est dans ces balbutiements de l‟unité d‟action du mouvement syndical qu‟intervient l‟année 1994, une année mouvementée pour les syndicats. En effet, on retiendra : La dévaluation du FCFA le 12 janvier 1994 : Le mouvement syndical réagit mais dans des regroupements sectoriels. - Le Collectif CGT-B appelle à la mobilisation et à la grève les 6, 7 et 8 avril 1994 pour exiger le respect par le gouvernement, du protocole d‟accord gouvernement - syndicats, le rétablissement de la valeur du point indiciaire, la détaxe (TVA) des produits de consommation courante, etc. et le relèvement du pouvoir d‟achat des travailleurs particulièrement détérioré par la dévaluation. 15 Dans la même période, le groupe des “ 13 ” rassemble les autres centrales syndicales et certaines d‟entre elles lancent une grève pour les 14 et 15 avril 1994. Cette grève, soutenue par certaines structures de la CGT-B par solidarité, n‟obtiendra pas le succès escompté parce que certains initiateurs même de ladite grève, la boycotteront. Le mouvement syndical est ainsi divisé et chaque groupe tente de s‟affirmer le mieux possible : qui par la grève et l‟occupation des rues, qui, par les négociations avec le gouvernement. Entre 1994 et 1998, l’unité d’action syndicale est mise à rude épreuve. Une rivalité tantôt ouverte, tantôt sourde entre les deux regroupements du mouvement syndical burkinabé est constatée sur le terrain. Les 1er° mai sont commémorés dans la rivalité ouverte et par des meetings différents. La gestion des événements suivants illustre notre propos : Octobre à décembre 1994, contre la violation des textes de lois du travail du Burkina Faso, par le DG de la BRAKINA M. Marc BAUQUENES, 48 travailleurs de la Brakina, tous délégués et militants du SYNTB/CGT-B, dont le secrétaire général dudit syndicat, Bakary MILLOGO sont abusivement licenciés. La CGT-B entreprendra des actions (meetings, marches, …) en direction du METSS, de l‟Assemblée Nationale, du 1er Ministère. Sur le dossier, il n‟y eu point d‟unité d‟action syndicale. Certains leaders syndicaux iront jusqu‟à prêter main forte au patronat dans la répression de représentants des travailleurs. Le 9 mai 1995, deux élèves de Garango, SIDIANI Blaise et ZIGANI Emile sont abattus par balles par les forces de l‟ordre, suite à une manifestation de solidarité avec le SYNTER/ CGT-B en lutte. Il n‟y aura pas de réaction unitaire. Le Collectif CGT-B organise, à la Bourse du Travail un meeting contre l‟impunité des crimes de sang en collaboration avec le MBDHP, L‟UGEB, l‟AESO, des partis politiques (PDP, UGD, UVDB) et l‟ADABA le 3 juin 1995. Par la suite, les participants audit meeting créèrent le Collectif pour le Règlement des Affaires Pendantes en matière de Droits de l‟Homme (C.R.A.D.H). Le 20 octobre 1995 : Une timide concertation unitaire, mais sans un écrit commun, se réalise pour dénoncer les P.A.S face au DG du FMI Monsieur Michel CAMDESSUS, en visite officielle au Burkina Faso. Le 19ème sommet France-Afrique se tient à Ouagadougou du 4 au 6 décembre 1996, sans une réaction unitaire du mouvement syndical. L’année 1997, verra le déverrouillage de l‟article 37 de la Constitution par l‟Assemblée Nationale, autorisant les mandats présidentiels illimités. De même un Code électoral et une Commission d‟Organisation des Elections taillés sur mesure, sont adoptés. Les syndicats sont divisés. Certains dénoncent ces faits par des actions et des propositions, d‟autres ne réagissent pas. 16 L’année 1997 verra également l’entrée en scène du processus de mise en place de la RGAP. Les syndicats agissent séparément. Des campagnes d‟information et de dénonciation de la réforme, ainsi que des grèves nationales sont organisées contre la Réforme globale de l’administration publique (RGAP), respectivement le 24 avril 1997 et le 9 décembre 1997. Ces actions seront relayées par des meetings et des marches de protestation dans diverses provinces. A la suite de ces grèves, les employeurs des sociétés industrielles SAP, SOFACI, SIFA et SONACEB, toutes du Houet, prennent des sanctions arbitraires contre les grévistes par : - le licenciement de 30 travailleurs de la SAP dont 11 délégués syndicaux et du personnel ; - le licenciement de 30 travailleurs de la SOFACI ; - des mises à pied de 3 jours à 4 travailleurs de la SIFA - des avertissements écrits à 5 travailleurs de la SONACEB. Certains de ces dossiers sont toujours en traitement et cette fois, pris en charge par l‟ensemble du mouvement syndical. L’année 1998, verra la poursuite de la même campagne. A celle-là s‟ajoute la contribution des syndicats à la mise en place d‟une Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI). Par la suite, en 2001, les syndicats seront « éjectés » de la CENI par les partis politiques de l‟opposition et du pouvoir prenant part à ladite CENI. Une structure parallèle, l‟office national des élections (ONEL), sans pouvoir réel, sera créée à côté de la CENI, avec l‟intention d‟y mettre les syndicats et les mouvements de défense des droits de l‟Homme. Unitairement, les syndicats boycotteront ladite structure, qui sera finalement supprimée. - Cette même année verra enfin l’adoption de la Loi 033/98 du 28 avril 1998 portant coordination CNSS-CARFO au bénéfice des travailleurs ayant cotisés sous des régimes différents en matière de sécurité Sociale, concrétisant ainsi la lutte entreprise par l‟USTB, soutenue par la CNTB ; - Le 1er mai 1998 est commémoré dans la division du mouvement syndical, dans un contexte de verrouillage du processus démocratique avec la révision de l‟article 37 de la constitution, la mise sous tutelle des institutions telles que la justice, l‟Assemblée Nationale, la Chambre des Représentants dite 2è Chambre, le Conseil Economique et Social, sans oublier les atteintes et restrictions aux libertés démocratiques et syndicales ; - L’unité d’action est ponctuellement relancée à travers la tentative du gouvernement de supprimer le 3 janvier. Entre septembre et décembre 1998 en effet, suite à la volonté du gouvernement de supprimer le 03 janvier comme jour férié, chômé et payé, l‟ensemble des Centrales syndicales firent front contre cette volonté, dans une lettre en date du 03 décembre 1998 adressée au Ministre de l‟Emploi du Travail et de la Sécurité Sociale dans laquelle elles disent ceci : 17 “ …Dores et déjà sachez que les organisations syndicales tiennent à cette journée en tant que symbole de leur lutte unitaire contre l‟injustice et pour la démocratie. En tout état de cause nos organisations syndicales s‟opposent à toute tentative de suppression de cette historique journée du 3 Janvier. ” Le 3 janvier sera réhabilité grâce à la résistance et à l‟unité d‟action du monde du travail. - Le 13 décembre 1998, Norbert ZONGO, alias Henri SEBGO, directeur de publication du journal “ L’INDEPENDANT ” et Président de la société des éditeurs de presse privée (SEP), est assassiné de manière bestiale avec ses trois compagnons, leurs corps arrosés d‟alcool et brûlés. Suite à cet horrible crime, l‟émotion est immense dans le pays. La colère et la révolte des populations notamment la jeunesse, montent. Le mouvement syndical se divise sur le type de regroupement à réaliser pour la lutte. D‟une part, le Collectif syndical CGT-B prend très tôt une part active à la création, à l'orientation et la direction du Collectif des Organisations Démocratiques de Masse et de Partis Politiques (CODMPP), pour conduire le mouvement ''trop c'est trop'' ; d‟autre part, des centrales syndicales comme l‟USTB, la CSB et autres organisations dénoncent sans réserve ces assassinats mais posent le problème de regroupement même conjoncturel, avec des partis politiques. Un débat, qui divisa davantage le mouvement syndical, s‟engagera sur l‟occupation de la Bourse du Travail par des hommes politiques à la faveur des activités du Collectif sur la nécessité de clarifier les prérogatives ! II.2.4. l’amorce et la réalisation d’une unité d’action syndicale continue depuis 1999 En effet, l’unité d’action syndicale se reconstitue à l’occasion du 1er mai 1999, autour d‟un accord sur l‟élaboration d‟une plate-forme commune de lutte et à la décision de commémorer la Fête du Travail dans l‟unité. Cette relance a été faite, grâce, il faut le reconnaître, à la persévérance et aux démarches engagées cette année – là, par les Secrétaires généraux de certaines centrales syndicales comme Abdoulaye IRA de l‟ONSL, Mamadou NAMA de l‟USTB, mais grâce aussi à la disponibilité et à l‟engagement politique des autres Secrétaires Généraux des centrales syndicales que sont Tolé SAGNON de la CGT-B, Mahamadi OUEDRAOGO de la CNTB, Roger TAPSOBA de la CSB, Joseph TIENDREBEOGO de FO/UNSL, et de leurs directions exécutives. Il faut noter que la suspension de la participation de certaines centrales (CNTB, …) aux activités du Groupe des 13 contribuera également au rapprochement. Les plates formes minimales syndicales communes intègreront par la suite la lutte contre l‟impunité et pour la vérité et la justice pour Norbert ZONGO et ses compagnons et pour toutes les autres victimes de la violence en politique. 18 Le 22 mai 1999, l‟ensemble des Centrales syndicales, rendait publique une adresse aux militaires, gendarmes et policiers et dans laquelle on peut lire : “ …Depuis de nombreuses années, nous observons le rôle négatif que les pouvoirs en place font jouer à vos corps respectifs. Des casernes militaires, des gendarmeries et commissariats sont couramment transformés en centres de détention et de tortures de travailleurs, élèves et étudiants qui osent légitimement revendiquer leurs droits. Les revendications légitimes des travailleurs, élèves et étudiants sont devenus des délits que l‟on vous charge de réprimer avec la dernière énergie, et vous vous en donnez à cœur joie. Pourtant les retombées positives de ces luttes sont souvent bénéfiques pour vos corps respectifs. Des éléments parmi vous, commettent des exactions, voire des assassinats, ce qui ternit votre image. Les exemples sont nombreux : - Assassinat par un gendarme de deux (02) élèves à GARANGO le 09 Mai 1995 ; - Arrestations, détentions, tortures et liquidations physiques de citoyens dans les locaux du Conseil de l‟Entente (Guillaume SESSOUMA, DABO Boukary, David OUEDRAOGO, et certainement bien d‟autres) ; (…) - Tortures ayant entraîné la mort de Auguste Pépin OUEDRAOGO à la Brigade de Recherches de Bobo-Dioulasso en Janvier 1999 ; Après l‟odieux assassinat de Norbert ZONGO, Directeur de publication de l‟INDEPENDANT et de ses trois compagnons, la pression populaire a entraîné la mise en place d‟une Commission d‟Enquête Indépendante, qui, au bout de ses travaux, a identifié de “ sérieux suspects ” qui sont des éléments de la garde présidentielle. - etc. Au lieu que les responsables de ces actes crapuleux et odieux soient arrêtés, traduits en justice et punis conformément à la loi, ce sont plutôt ceux qui élèvent la voix pour réclamer justice, c‟est à dire les populations, à travers tout le pays, qui sont poursuivies gazées, arrêtées, torturées, menacées de mort, etc. Des éléments cagoulés et armés arpentent les artères des villes, terrorisent les populations sans être inquiétés. (…………) Vous, dont la mission est de garantir la sécurité des populations dans la justice sociale, de les rassurer, vous qui avez une mission de protection de l‟intégrité territoriale, vous qui avez une mission républicaine, c‟est paradoxalement vos éléments qui terrorisent et causent la désolation. Nos Centrales syndicales s‟adressent à vous, à votre conscience, car nous sommes persuadés que vous en avez encore. Sachez que chaque fois que vous agissez de la sorte, c‟est la démocratie, la justice véritable qui sont assassinées, sachez que l‟impunité est source de rancœurs et qu‟il faut la combattre. Les violences physiques et morales exercées à l‟encontre des jeunes, des femmes, des hommes qui se battent pour le triomphe de la vérité, de la démocratie, d‟une véritable justice sociale, ne feront que dégrader davantage le climat social. ALORS, ARRETEZ ! …. ” Fin. Conformément aux engagements pris par les différentes organisations syndicales à l‟occasion de la commémoration unitaire du 1er mai, l‟ensemble du mouvement syndical prépare une grève générale les 29 et 30 Juin 1999 autour d‟une plate forme unitaire. En réaction à cette grève, la Direction Générale de la SOSUCO, en violation du Code du Travail qui protège les représentants des travailleurs, licencie des délégués et responsables syndicaux. Pour exiger la levée de ces sanctions, le mouvement syndical engage une deuxième grève générale le 15 Août 1999, puis rédige un mémorandum sur la situation à la SNSOSUCO. La lutte contre les sanctions arbitraires à l‟encontre des camarades de la SNSOSUCO ne connaîtra son dénouement qu‟en 2007 avec la condamnation de la société à payer aux travailleurs abusivement licenciés leurs droits et des dommages et intérêts. 19 Entre temps, le lundi 1er juillet 1999, une délégation unitaire du mouvement syndical burkinabè rencontre le Collège de Sages, à l‟initiative de celui-ci. A la suite de la rencontre une adresse unitaire fut transmise audit Collège dans laquelle on peut lire : “ …Suite à la rencontre, à votre initiative, entre votre auguste Collège et une délégation du mouvement syndical burkinabè, le lundi 1er Juillet 1999, et comme convenu, nous avons l‟honneur de vous transmettre par écrit, notre analyse de la situation nationale. Cette analyse part de la contribution du mouvement syndical burkinabè depuis 1987 pour l‟engagement de notre pays dans un processus démocratique, ses suggestions et ses luttes pour contribuer à l‟approfondissement dudit processus, pour la défense des libertés démocratiques et syndicales et pour le pouvoir d‟achat des travailleurs et des populations. Nous joignons nos déclarations des 10 et 22 Mai 1999 qui synthétisent notre analyse de la situation nationale actuelle et les préoccupations des travailleurs. Nous faisons quelques propositions, qui, nous pensons, si elles étaient prises en compte, contribueraient, sans nulle doute, à créer les conditions pour la promotion d‟une réconciliation nationale et d‟une paix sociale ”. L‟organisation des 2ème Etats Généraux du syndicalisme burkinabé programmés pour décembre 1999, ne connaîtra pas la participation unitaire et le succès escomptés. En effet, la délégation de la CGT-B demandera en vain le report, parce que son secrétaire général, était poursuivi devant les tribunaux pour attentat à la sûreté de l‟Etat et appel à sédition de l‟armée ; la CGT-B se retirera desdits états généraux. Toutefois, il convient de souligner qu‟une démarche unitaire des autres syndicats, sera initiée pour exiger la relaxation du secrétaire général de la CGT-B. L‟unité d‟action se poursuivra cependant à travers les activités de formation du BIT, mais aussi avec d‟autres activités communes. On peut citer entre autres : La production d‟un bilan des Centrales syndicales sur les privatisations au Burkina Faso (décembre 2001) ; La concertation Gouvernement / Syndicats de mars 2002 autour du cahier de doléances 2001 ; Le soutien actif de l‟ensemble des centrales syndicales aux luttes des travailleurs de Faso Fani, de SN/SOSUCO particulièrement entre 1999 et 2001; Les luttes des travailleurs des sociétés et entreprises sous la direction des délégués syndicaux et délégués du personnel desdites sociétés réunis en unité d‟action à la base ; Un meeting unitaire en mars 2002 autour des réponses du Gouvernement au cahier de doléances 2001 suivi des grèves unitaires larges menées les 23 et 24 avril 2002 puis les 28 et 29 mai 2002 et la journée nationale de protestation le 18 juillet 2002, autour d‟une plate-forme minimale en 6 points ; La concertation syndicats / gouvernement du 30 septembre et 3 octobre 2002 autour du cahier de doléances 2002 ; Les 12 sorties unitaires dans les autres provinces de mars à mai 2002 ; 20 La réalisation avec succès d‟une journée nationale de grève et de manifestation le mardi 27 mai 2003, faisant suite aux manifestations du 15 avril et du 1er mai 2003. Cette manifestation visait à exiger du gouvernement le respect des travailleurs et de leurs organisations syndicales, le respect des engagements pris, la satisfaction de la plate forme minimale et l‟arrêt du pillage organisé des ressources de l‟Etat. C‟est le jour de cette manifestation, le 27 mai 2003, qu‟a eu lieu l‟incendie du grand marché de Ouagadougou qui ne rouvrira ses portes qu‟en 2009, soit six (6) années après ! En somme depuis 2002, l‟unité d‟action est effective sur le terrain avec en moyenne 2 luttes nationales unitaires par an, précédées ou suivies de concertations et/ ou négociations avec le Gouvernement, d‟une part, avec le patronat du privé depuis 2008, d‟autre part. II.2.5. Malgré cette avancée positive, l’unité d’action connaît quelquefois des soubresauts Cette situation nous semble du reste normale du fait de la nature et de la diversité d‟orientations qui compose cette unité d‟action. Quand il devient difficile de concilier les positions, chaque organisation ou groupe d‟organisations assume ses prises de positions. Quelques exemples : La participation à la création et à l’animation du collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques (CODMPP) en décembre 1998 suite à l‟assassinat du journaliste Norbert ZONGO et de ses compagnons. La relecture décidée en Juillet 2004 par le Gouvernement, de la loi n°013/98/AN du 28 avril 1998 portant régime juridique applicable aux emplois et aux agents de la fonction publique, relecture qui a donné lieu à la loi n°O19-2005/AN du 18 mai 2005 portant modification de la loi 013/98/AN du 28 avril 1998. Un consensus n‟ayant pas été obtenu sur la participation ou non à cette relecture décidée par le Gouvernement, le mouvement syndical s‟est retrouvé divisé en deux groupes : 1. les syndicats qui ont refusé de prendre part à la relecture et proposent l‟abrogation de la RGAP en lieu et place d‟une relecture concertée de l‟ancien statut de la Fonction Publique et qui ont communiqué leurs analyses – critiques et propositions au gouvernement. Il s‟agit des centrales syndicales CGT-B, ONSL et des syndicats autonomes SYNATIC – SYNATEB – SYNTAS – SYNATEL ; 2. les syndicats qui ont pris part à la relecture. Il s‟agit, sauf erreur ou omission involontaire des centrales syndicales CNTB, CSB, UNSL/FO, USTB et des syndicats autonomes SNEAB, SYNAPAGER, SATEB, SYSFMAB, SAIB, SYNATRAD, SYNATIP-B, SYNTRAPOST ; 21 3. Des résultats de cette relecture on peut retenir ceci : Des acquis : - la création d‟une indemnité de départ à la retraite ; - la légalisation du maintien de l‟indemnité de résidence ; - l‟introduction d‟une disposition permettant de passer du statut de contractuel à celui de fonctionnaire par voie de concours ou examen professionnels ; - la couverture des risques professionnels par l‟Etat ; - etc. des dispositions négatives: - la légalisation du maintien de la quasi–totalité des anciens fonctionnaires à la première classe de leur catégorie au mépris de leur ancienneté ; - la légalisation de dispositions discriminatoires, ex : non assujettissement de certains agents à l‟évaluation, salaire spécial pour certains contractuels (art 181 et 192); - etc. Les luttes (unitaires et sectorielles) autour de la question de la réforme globale de l‟administration publique (RGAP) avec comme étapes officielles, la relecture de la loi 013 suivie de la loi corrective 019 du 18 mai 2005 puis la validation de l‟étude de consultants sur « RGAP, dix ans après » les 26 et 27 octobre 2009 dernier, conduisent à une reconnaissance de l‟échec de cette réforme au profit de l‟élaboration d‟un « Plan Stratégique Décennal de Modernisation de l‟Administration » (PSDMA). III. BILAN CRITIQUE DE L’UNITE D’ACTION SYNDICALE III.1. Principales revendications et manifestations unitaires depuis 2002 Depuis cette période (2002), une plate forme minimale unitaire de luttes est établie et axée sur les points centraux suivants : - Augmentation de 25% des salaires et pensions pour compter de janvier 2001 ; - Exécution des jugements et arrêts de juridiction relatifs à des conflits de travail (BRAKINA, SOREMIB, FASO FANI, SCFB, Ex BATA, etc.), traitement diligent des dossiers de conflits de travail (SN-SOSUCO, CEMOB, CIMAT, SONAR, INB, LONAB, etc.), respect des libertés syndicales ; - Abrogation de la loi n°13/98/AN du 28 avril 1998 portant régime juridique applicable aux emplois et aux agents de la Fonction Publique; déblocage effectif des avancements d'échelons et de classe; - Baisse de l’IUTS de 15% sur toutes les tranches ; - Réduction des impôts et taxes, notamment sur les produits pétroliers ; - Reconstruction diligente du marché central ROOD – WOKO de Ouagadougou ; 22 - Arrêt des privatisations et paiement immédiat et en une tranche des droits des travailleurs licenciés suite aux privatisations et/ou liquidations ; Arrêt du désengagement de l'Etat des secteurs sociaux, notamment l'éducation et la santé. Arrêt du recours facile à la pratique du chômage technique et sa réglementation effective ( en attendant, assurer à tout travailleur mis en chômage technique, un minimum équivalent au 1/3 de son salaire); Paiement des arriérés de salaires qui ont cours dans certaines sociétés ( abattoir frigorifique, INB, etc.) ; - Une politique cohérente favorable à la promotion du secteur informel, son organisation efficace ; - Annulation de l’arrêté n° 2003-37 du Ministre des Finances et du Budget en date du 31 janvier 2003 et relatif à l'octroi d'un prêt sans intérêt aux présidents d'institutions, aux membres du gouvernement et au députés non siégeant et destiné à l'acquisition en hors taxe, hors douane d'un véhicule à usage personnel. N.B. Les exemples de luttes et d‟activités unitaires sus – citées non seulement ne sont pas exhaustifs, mais encore, ce ne sont que des exemples au sommet. En effet, il se réalise également une unité de luttes à la base, entre les syndicats professionnels de différentes centrales syndicales et syndicats autonomes, entre les structures syndicales décentralisées (Unions Provinciales, Unions Régionales, au niveau des délégués syndicaux et délégués du personnel des entreprises et sociétés, à l‟intérieur des entreprises, etc.) III.2. Les acquis matériels et moraux de l’unité d’action syndicale Les luttes unitaires menées depuis 1999 ont produit, au profit des travailleurs en particulier et des populations en général, de nombreux acquis matériels dont les plus significatifs sont : des augmentations de salaires même si elles sont faibles et appliquées de façon sélective ; la réduction de l‟IUTS à travers la prise en compte des charges professionnelles et la réduction des tranches en 2008 ; la reprise du transport en commun marquée par la création de la SOTRACO ; le déplafonnement de l‟assiette de cotisation à la CNSS ; le relèvement du taux de cotisation et d‟annuité avec pour conséquence un relèvement sensible des pensions au profit des travailleurs relevant du Code de Sécurité Sociale ; la réduction du prix des hydrocarbures ; le relèvement des allocations familiales ; le règlement effectif avec paiements de droits et indemnités ou en cours de certains dossiers relevant du domaine du gouvernement à savoir l‟ONBAH, la SOREMIB, la CEMOB, FASO FANI et l‟ONASENE ; la reconstruction du marché Central ″Rood Woko″ ; relèvement du SMIG de 6,5 % ; 23 l‟augmentation de salaires dans le privé en 2008 avec l‟institution d‟un cadre bipartite de négociation salariale syndicats/patronat privé ; le règlement des arriérés d‟avancements 2003, 2004, 2005 et 2006 des agents publics ; la prise en charge des risques professionnels des agents publics ; l‟institution de l‟indemnité de fin de contrat pour les fonctionnaires ; le maintien de l‟indemnité de résidence ; le relèvement des tranches sociales (même si l‟application reste à revoir) de l‟eau et de l‟électricité respectivement à 8m3 et à 75 KWH ; etc. Les acquis de l‟unité d‟action ne sont pas seulement matériels ou économiques : il ya aussi des acquis organisationnels, moraux et politiques importants parmi lesquels nous pouvons citer : l‟adoption de documents, de programmes de formation syndicale, ou de projets (PANAF/MEFOCE, PADEP, BIT-DANIDA, etc.) au contenu positif ou favorable aux travailleurs ; Les commémorations unitaires du 1er mai depuis 2000 ; la reconnaissance dans le Code du Travail de la grève de solidarité et l‟inscription dans la dite loi de certains principes comme les élections professionnelles pour déterminer la représentativité des organisations syndicales, le chômage technique, le check – off, etc. ; le principe de pouvoir recevoir et écouter toutes les forces sociales et politiques à la Bourse du Travail sans préjuger des différentes positions ; des prises de position unitaires sur certaines grandes questions ou événements comme les PAS, la situation en Côte-d‟Ivoire, en Guinée, au Niger, les candidatures indépendantes, etc. ; l‟élévation du niveau syndical et politique du mouvement syndical et des travailleurs, à travers les prises de position unitaires sur les situations internationale et nationale ; le regroupement des syndicats de la Fonction Publique en vue de la prise en charge des problèmes spécifiques des agents de l‟Etat ; la participation des centrales syndicales à la conférence internationale annuelle de l‟OIT d‟abord une fois tous les sept (7) ans, puis une fois tous les deux (2) ans et enfin à partir de juin 2008, toutes les centrales syndicales y participent ; la rédaction d‟un mémorandum sur la situation à la SN-SOSUCO ; le bilan écrit des privatisations (2001) ; des sorties unitaires auprès des structures décentralisées ; la plate forme minimale unitaire de lutte qui se réactualise selon l‟évolution de la situation nationale et des préoccupations des travailleurs ; 24 les batailles autour de la RGAP avec comme étapes officielles la relecture de la loi 013 suivie en mai 2005 de la loi corrective 019, puis la validation de l‟étude de consultants sur « RGAP, 10 ans après » en octobre 2009, étude qui met de l‟eau au moulin des syndicats en relevant les limites de la RGAP. les rencontres annuelles gouvernement/Syndicats sur le cahier de doléances et la plate forme minimale unitaire ; l‟instauration de négociations directes Patronat – syndicats dont le 1er acte a été posé en août 2008 ; le soutien aux luttes des autres composantes de la société : cas des luttes de l‟UGEB, etc. ; la prise en compte de la lutte contre l‟impunité et pour la vérité et la justice notamment le dossier Norbert ZONGO dans la plate-forme minimale syndicale ; l‟adresse et les démarches en direction des associations et mouvements de la société civile pour la création de la coalition contre la vie chère (CCVC) ; la vigilance développée sur la question centrale des libertés démocratiques et syndicales, et l‟expérience nous montre qu‟il faut toujours et constamment les défendre pied à pied ; la défense et le maintien de l‟historique date du 3 janvier 1966, symbolisant le 1er soulèvement populaire d‟après les indépendances de 1960, comme journée fériée, chômée et payée ; la présidence tournante au conseil d‟administration de la CNSS ; etc. III.3 les faiblesses constatées la difficulté à construire une véritable unité d’action syndicale basée sur des organisations véritablement représentatives. En effet, l‟unité d‟action doit être constamment réajustée en s‟appuyant sur des syndicats véritablement représentatifs et en la dotant d‟une direction souple mais véritablement représentative des intérêts des travailleurs ; la faiblesse financière des organisations syndicales entraînant, l’inexistence de véritables mécanismes de solidarité pour soutenir les luttes, soutenir les victimes de la répression lors des luttes et cultiver ainsi un véritable esprit de solidarité ; la faible mobilisation des travailleurs de l’économie informelle aux luttes. En effet, si au niveau des travailleurs des secteurs structurés, la participation aux luttes est généralement satisfaisante, celle des secteurs non structurés est habituellement faible. Or, avec le développement prodigieux de l‟économie informelle ces dernières années, les luttes qui ne connaissent pas la participation des acteurs de l‟économie informelle ont du mal à être visibles ; 25 la liberté syndicale constamment remise en cause. Si la lutte contre les atteintes aux libertés syndicales a permis d‟obtenir quelques acquis tels que la reconnaissance de la grève de solidarité, il reste qu‟elle se poursuit pour la levée des sanctions arbitraires prises contre des responsables et militants syndicaux, des délégués du personnel, etc. Exemples : sanctions contre des membres de bureau et délégués du personnel de la Voltelec-SNTV, agents de justice, Brakina, SAP, SAMAE, SATB, coupures abusives de salaires, … la formation syndicale gagnerait à être renforcée et les questions des élections professionnelles et le check off, réglées ; les questions de rénovations des Bourses du Travail de Ouagadougou et de Bobo Dioulasso, de construction de Bourses du Travail et de mise à disposition de locaux syndicaux, de permanents syndicaux au profit des structures syndicales au niveau national, des régions et des provinces doivent faire l‟objet d‟une attention particulière. Ces faiblesses et insuffisances sont inhérentes à la nature même de ce type de regroupement. En effet, dans le cas d‟espèce, il s‟agit d‟organisations syndicales ayant des orientations et conceptions syndicales différentes, des capacités et forces différentes tant au niveau organisationnel que des directions. Il s‟agit également de prendre en compte l‟opposition légendaire du patronat et de l‟Etat – patron à l‟existence même des syndicats, puis leur volonté constante à diviser les syndicats, les affaiblir et les utiliser. Ce travail constant de sape du patronat et des représentants de l‟Etat- patron se poursuit par l‟utilisation de la corruption, du chantage, du flicage des organisations syndicales et de leurs dirigeants, de l‟opportunisme de certains dirigeants qui ne respectent pas toujours les mots d‟ordre qu‟ils signent, de la création et du soutien de syndicats fantômes, etc. IV. QUELQUES ENSEIGNEMENTS l‟unité d‟action a contribué à faire du mouvement syndical une force face au gouvernement et au patronat. A l‟occasion des rencontres avec ces deux partenaires, les syndicats parlent d‟une seule voix pour formuler les revendications, discuter avec eux et apprécier les réponses. Cela contribue sans nul doute à donner plus de force à l‟action syndicale ; à l‟heure de la mondialisation, l‟unité d‟action, celle qui est bâtie autour du mot d‟ordre “ unité et lutte ”, doit être plus que jamais à l‟ordre du jour. Car, face à la mondialisation de l‟économie néolibérale et à ses inégalités qui sont loin d‟être irréversibles, face à ces misères, nous devons opposer la mondialisation des résistances et des luttes pour un monde meilleur; l‟unité d‟action a facilité la mise en place d‟un regroupement plus large à savoir la CCVC qui rassemble, outre les organisations syndicales, des réseaux, mouvements et associations de la société civile autour de préoccupations communes telles que la vie chère, l‟impunité, la corruption, etc. 26 Cependant, il y‟a lieu de revoir et être attentifs aux aspects suivants, pour renforcer l‟unité d‟action : 1. L’objet du regroupement : Il est indispensable de bien s‟accorder sur l‟objet du regroupement : unité d‟action avec qui et pourquoi faire ? Quelques pistes : - Elaborer une plate forme revendicative consensuelle axée sur les intérêts véritables (actuels et à venir) des travailleurs. Elle est la base de l‟adhésion à l‟unité d‟action ; - Mettre l‟accent sur la formation axée sur des thèmes définis de façon consensuelle ; - montrer une volonté réelle à justifier et défendre effectivement ladite plate forme à travers des méthodes éducatives et de luttes bien définies ; - Initier des programmes de consolidation des acquis et de renforcement des capacités ; - etc. 2. La volonté réaffirmée des dirigeants à tous les niveaux de réaliser une véritable unité de lutte Elle est importante pour réaliser l‟unité d‟action véritable au profit des travailleurs et du peuple. 3. les méthodes de luttes Ecrire des revendications unitaires et les soumettre à l‟autorité ne suffisent pas pour réaliser une unité d‟action soutenue de la base au sommet. Il faut ensuite retenir le mode de suivi et de réaction puis de défense de ces revendications. Retenir des décisions consensuelles par la concertation entre responsables, une bonne circulation de l‟information et/ou des instructions aux structures et militants de base. 4. le mode de direction et de fonctionnement La direction de l‟unité d‟action doit être souple. Adopter une coordination qui passe par une concertation permanente et une bonne circulation de l‟information entre les responsables en vue de décisions consensuelles. Toutefois, chaque organisation membre conserve son autonomie et toute décision qui va vraiment à l‟encontre de ses principes d‟organisation ne lui est pas forcément opposable. Dans ce cas, elle le fait savoir. Une solution consensuelle est alors recherchée. A défaut, l‟idée ou la proposition peut être purement écartée du cadre unitaire, chaque organisation ou groupe d‟organisations assumant ses positions. L‟expérience de la présidence tournante peut être revue et améliorée. Par exemple, la présidence peut – être tournante entre les trois organisations les plus représentatives ou à défaut désignées de façon consensuelle par le collège des secrétaires généraux des centrales et des syndicats autonomes. Les deux autres étant vices Présidents. Les responsables des autres organisations peuvent cependant, être membres d‟un bureau de sept (7) membres au plus. Le Président doit consulter régulièrement, les deux vices – présidents pour des décisions urgentes, à défaut de réunir le bureau. 27 L‟expérience du porte - parole du mouvement syndical peut être aussi retenue. Il s‟agit de désigner un porte-parole et un ou deux adjoints, devant conduire les rencontres avec les autorités et le patronat, défendre les positions consensuelles du mouvement syndical sur les grandes questions nationales et internationales d‟intérêt pour les travailleurs. Ces différentes désignations pour la direction et le fonctionnement de l‟unité d‟action, doivent tenir compte des réalités et des sensibilités des composantes du mouvement syndical Burkinabé. 5. les moyens de fonctionnement Elles proviennent pour l‟essentiel : - des cotisations des membres, en veillant au règlement effectif de la question du check- off - des subventions - des legs - des aides. CONCLUSION Avec le pluralisme syndical qui caractérise le mouvement syndical burkinabè, l‟unité d‟action est la réponse appropriée pour permettre l‟expression de la solidarité des travailleurs, force principale du syndicat. Cette unité d‟action a permis, à l‟occasion des luttes, de rassembler encore plus largement les travailleurs dont bon nombre, faut-il le rappeler n‟est pas syndiqué. Sans compter que l‟unité prive d‟arguments, ceux des travailleurs qui brisaient les grèves avec comme prétexte facile « les syndicats ne sont pas unis » ou « mon syndicat n‟a pas signé le préavis » ! Il reste à stabiliser et à renforcer le fonctionnement de l‟unité d‟action à travers une structure de coordination stable, efficace et consensuelle et à faire en sorte que cette unité d‟action se vive plus régulièrement au niveau décentralisé (régions, provinces, communes, départements, villes et arrondissements). Il faut travailler à élever constamment le niveau de conscience politique et syndicale des travailleurs, par la formation, afin de les hisser au niveau de compréhension adéquat pour des actions unitaires plus massives, plus efficaces, autour du mot d‟ordre “ unité et lutte contre l’exploitation et l’oppression ” ! De même, il faut surveiller et défendre fermement les libertés démocratiques et syndicales. C‟est pourquoi, il nous faut faire l‟inventaire des travailleurs abusivement sanctionnés et non encore rétablis dans leurs droits et entreprendre des mesures et actions idoines pour le règlement de ces situations. 28 Au plan régional et international, il nous faut construire avec les organisations syndicales sœurs de la sous région, d‟Afrique et du monde, différents types d‟unité d‟action plus larges, commandées par la mondialisation, ainsi que par le poids de plus en plus grand de structures comme l‟UEMOA, la CEDEAO, l‟OHADA, etc. En tout état de cause, à tous les niveaux de notre action, nous devons garder à l‟esprit le fait que la force des travailleurs réside dans l‟unité et la solidarité dont ils peuvent faire montre. Fait à Ouagadougou, le 18 décembre 2009. Ont signé : Pour les Centrales sy0ndicales : CGT-B CNTB CSB Tolé SAGNON Secrétaire Général Augustin Blaise HIEN Secrétaire Général Jean Mathias B. LILIOU Secrétaire Général FO/UNSL ONSL USTB Joseph L.TIENDREBEOGO Secrétaire Général Paul N. KABORE Secrétaire Général El Hadj Mamadou NAMA Secrétaire Général Pour les Syndicats Autonomes : SATB SAMAE SATEB Idrissa KABORE Secrétaire Général Boniface SOME Secrétaire Général Bonaventure SEGUEDA Secrétaire Général SNEAB SYNATEB SAIB Jean KAFANDO Secrétaire Général Tahirou TRAORE Secrétaire Général Pascal O. OUEDRAOGO Secrétaire Général SYNTAS SYNTRAPOST SYNAPAGER Victor Sansan. HIEN Secrétaire Général Achille PARE Secrétaire Général Apollinaire KABORE Secrétaire Général SYNATEL SYNATIC SYNATIPB Souleymane SO Secrétaire Général Justin COULIBALY Secrétaire Général Jean Baptiste OUEDRAOGO Secrétaire Général SYNATRAD 0 Etienne ILBOUDO Secrétaire Général SYSFMAB UGMB Mariam TIEMTORE Secrétaire Générale Gabriel S.SEBGO Secrétaire Général