Alcool et médicaments du SNC : un cocktail à éviter
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Alcool et médicaments du SNC : un cocktail à éviter
Alcool et médicaments du SNC : le cocktail à éviter La consommation de boissons contenant de l’éthanol est très répandue depuis l’Antiquité. L’effet souhaité par les consommateurs se produit dans le cerveau. L’alcool passe directement du tube digestif aux vaisseaux sanguins. Miscible dans l’eau et liposoluble, il traverse aisément toutes les barrières de l’organisme (barrière hémato-encéphalique, barrière placentaire). C’est ainsi qu’il atteint le cerveau en quelques minutes. Même si on le consomme tout d'abord pour ses effets euphoriques, il est faux de croire que l'alcool a un effet stimulant. Consommé en faible quantité, il peut sembler stimulant du fait qu'il agit sur la partie du cerveau régissant les inhibitions. Lorsqu'une personne perd ses inhibitions, elle devient plus volubile et semble avoir plus d'énergie. Mais en fait, l'alcool est un dépresseur qui ralentit les fonctions cérébrales et provoque des atteintes physiologiques parfois irréversibles. Dans l’alcoolisme chronique, les capacités fonctionnelles du cerveau sont altérées (troubles de la mémoire, du raisonnement, de l’apprentissage, anxiété, dépression, …). On peut mettre en évidence une diminution mesurable du nombre de neurones qui constitue le signe d’une lésion irréversible. On observe également des atteintes du pancréas, du foie, une augmentation du risque de certains cancers, d’hémorragie cérébrale, des troubles de la tension artérielle, … Alcool et médicaments du système nerveux central (SNC) L’alcool est une substance psychoactive. Il provoque, au niveau du SNC, différents effets pouvant entrer en interaction avec la prise de médicaments. L’alcool a des propriétés hypnotiques et sédatives. C’est un « neurodépresseur ». Combiné avec la prise de médicaments sédatifs, l’alcool conduit à une augmentation du risque de somnolence et à une diminution de la vigilance et des réflexes. Bien que stimulant et désinhibiteur à faible dose, l’alcool pourrait aggraver les symptômes d’anxiété s’il est consommé de manière plus régulière. La prise chronique d’alcool pourrait aggraver une dépression. C’est une des raisons pour laquelle les notices des « antidépresseurs » recommandent de ne pas consommer d’alcool durant le traitement. Or, il n’est pas rare de retrouver une consommation importante d’alcool chez les patients dépressifs. L’alcool diminue le seuil convulsivant Tout individu bien portant peut convulser dans certaines circonstances. La susceptibilité individuelle est variable. Le seuil convulsivant dépend de facteurs endogènes (notamment génétiques) et exogènes (fièvre, alcool et de nombreux médicaments). Chez le patient épileptique, il faudra tenir compte de tous ces facteurs, y compris de la consommation d’alcool. Par ailleurs, un sevrage brutal d’alcool (ou de benzodiazépines) peut induire des crises convulsives. Ce type de sevrage doit être suivi médicalement. L’alcool peut influencer les propriétés pharmacocinétiques de certaines substances L'alcool agit sur le métabolisme des médicaments en augmentant ou en ralentissant leur destruction suivant qu'il s'agisse d'un alcoolisme aigu ou chronique. Exemple : une consommation aigue d’alcool augmente le taux plasmatique de la phénytoine une consommation chronique accélère son élimination, nécessitant un réajustement éventuel de la posologie Certains médicaments peuvent ralentir la dégradation de l'alcool. Des résidus toxiques d'alcool restent alors plus longtemps dans le corps. Cet effet, appelé « antabuse », est provoqué par l'accumulation d'acétaldéhyde (produit de dégradation de l'éthanol par notre organisme). Il se manifeste par des bouffées de chaleur, de la tachycardie, une augmentation de la fréquence respiratoire, des nausées et vomissements. Parmi les principaux médicaments à effets «antabuse », on retrouve certaines céphalosporines, le co-trimazole (Bactrim®), le kétoconazole (Nizoral®), et les antiparasitaires dérivés de l’imidazole (Flagyl®, Fasigyn®, Tiberal®). Conduite officinale SSPF septembre 2011 Tableau 1 : principales interactions entre l’alcool et les médicaments du SNC Classe/DCI Antiépileptiques Mécanisme interaction et conséquences L’alcool est un des facteurs pouvant diminuer le seuil convulsif. En cas de sevrage alcoolique, le risque de convulsions est important. + Acide valproïque (Depakine® et gén.) et phénobarbital Modification des taux plasmatiques possible si consommation d’alcool modérée. + Carbamazépine (Tegretol® et gén.) et phénytoine (Diphantoïne®, Epanutin®) Modification des taux plasmatiques possible si consommation d’alcool importante et/ou chronique + Carbamazépine (Tegretol® ↑ de l’effet sédatif (Gardenal®) et gén.) + Diazépam (Valium® et gén.) Somnolence, ↓ réflexes et vigilance + Phénobarbital (Gardenal®) Recommandations Tout sevrage alcoolique devra se réaliser sous contrôle médical strict. Le seuil convulsif est influencé par une série de facteurs, dont la prise d’alcool et de certains médicaments. La susceptibilité individuelle est variable. L’addition de ces facteurs peut aboutir à une crise convulsive. Une consommation modérée d’alcool ne semble pas poser de problème. Il est préférable de ne pas conduire après une consommation même modérée d’alcool (surtout si antiépileptiques sédatifs) + Primidone (Mysoline®) + Topiramate (Topamax®) Antidouleurs et antitussifs opioïdes L’alcool renforce l’effet sédatif des médicaments opioïdes (codéine, éthylmorphine, morphine, tramadol, buprénorphine, …) + Méthadone ↑ du taux sanguin de méthadone si consommation importante d’alcool + Tramadol (Contramal®,...) Diminution du seuil convulsif : risque de crises convulsives Anxiolytiques, hypnotiques Alcool et benzodiazépines ralentissent les fonctions cérébrales. Benzodiazépines et apparentés ↓ réflexes et vigilance, ↑ risques d’accidents (route, conduite machines) ↑ de l’effet sédatif (parfois prolongé au lendemain de la prise !) ↓ de la qualité du sommeil : sommeil non réparateur ↓ de l’effet anxiolytique de certaines benzodiazépines (ex lorazepam) + Clobazam (Frisium®)/ Diazépam (Valium® et gén.) ↑ du taux sanguin du clobazam et du diazépam par l’alcool + Alprazolam (Xanax® et gén.) ↑ du taux sanguin de l’alcool par l’alprazolam Anti-histaminiques H1 L’alcool renforce l’effet sédatif des anti H1 (essentiellement ceux de 1ère génération) Conduite officinale SSPF septembre 2011 Eviter ou limiter la consommation d’alcool Eviter de conduire ou d’utiliser des machines Pour le tramadol, prendre en compte les autres facteurs pouvant diminuer le seuil convulsivant Eviter ou limiter la consommation d’alcool Eviter de conduire ou d’utiliser des machines Tenir compte de l’effet prolongé sur la somnolence ! Eviter ou limiter la consommation d’alcool Eviter de conduire ou d’utiliser des machines Tableau 1 (suite) : principales interactions entre l’alcool et les médicaments du SNC Classe/DCI Mécanisme interaction et conséquences Recommandations L’alcool et les antidépresseurs sont 2 substances psycho-actives. La plupart de notices mettent en garde contre l’utilisation concomitante d’alcool. Lorsque l’antidépresseur provoque de la sédation, cet effet est renforcé par la prise d’alcool. Antidépresseurs ISRS Fluoxétine (Prozac® et gén.) et fluvoxamine (Floxyfral® ↑ « possible » de l’effet sédatif Autres ISRS Peu d’impact pour consommation modérée et occasionnelle Tricycliques (tous) ↑ possible de l’effet sédatif et gén.) ↑ troubles psychomoteurs Limiter la consommation d’alcool. Eviter la conduite ou l’utilisation de machines en cas de consommation d’antidépresseurs sédatifs. Modifications du métabolisme ↑ effets toxiques des tricycliques Diminution du seuil convulsif : risque de crises convulsives Eviter la consommation d’alcool en début de traitement avec un tricyclique. Autres Duloxétine (Cymbalta®) Possibilité d’effets indésirables hépatiques (peu précis dans notice) Venlafaxine (Efexor® et Peu d’impact pour consommation modérée Mirtazapine (Remergon®) ↑ de l’effet sédatif Miansérine (Lerivon®), Maprotiline (Ludiomil®) et ↑ de l’effet sédatif + ↓ des capacités à conduire ou à utiliser des machines, surtout en début de traitement gén.) Trazodone (Trazolan® et Rassurer si prise « modérée » et/ou occasionnelle d’alcool avec ISRS non sédatif gén.) Antipsychotiques (= neuroleptiques) Avec la plupart des molécules (mais à des degrés divers), il y a risque d’aggravation des effet indésirables : ↑ de l’effet sédatif ↓ des facultés de conduite et de la vigilance Effets extrapyramidaux* Eviter l’alcool pour ces molécules *symptômes extrapyramidaux : perturbation des mouvements (raideur, contractions, mouvements rapides), besoin de bouger, tremblements Source principale : Baxter K. (2008) : Stockley’s drug interactions. » Pharmaceutical press 8th edition Conduite officinale SSPF septembre 2011