pression arterielle et paroi vasculaire

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pression arterielle et paroi vasculaire
PRESSION ARTERIELLE
ET PAROI VASCULAIRE
Docteur Etienne SAVIN
Sce. Expl. Fonctionnelles
Hôpital Lariboisière
INTRODUCTION
Quelques définitions
1. Pression artérielle
• Lorsque, dans le langage courant, on parle de « tension
artérielle », il s’agit en fait de PRESSION ARTERIELLE.
Selon la loi de Laplace, T = Pt . r (T = tension, Pt = p. transmurale, r = rayon)
• Cette grandeur oscille durant le cycle cardiaque entre une
valeur maximale, la pression systolique (PS) et une valeur
minimale, la pression diastolique (PD).
• La pression systolique dépend de la fonction cardiaque et de
l’élasticité des grosses artères (aorte par exemple).
• La pression diastolique est surtout fonction de la vitesse
d’écoulement du sang dans les vaisseaux c’est à dire de la
résistance périphérique totale (résistance vasculaire, RPT).
2. Parois vasculaires
Les parois vasculaires des vaisseaux (à l’exception des
capillaires) sont constituées de trois couches cellulaires
concentriques qui sont respectivement de l’extérieur vers
l’intérieur :
- l’adventice, faite de cellules conjonctives de soutien
- la média faite de cellules élastiques et musculaires, enfin
- l’intima constituée de cellules endothéliales athrombogènes
On voit donc que la paroi vasculaire (et ses différents
composants) joue un rôle très important dans les valeurs et les
fluctuations de cette pression, non seulement au cours du cycle
cardiaque mais aussi dans le temps, c’est à dire au cours du
vieillissement.
Celui-ci est encore considéré comme le principal facteur de
risque des maladies vasculaires, mais des études récentes
suggèrent que le mode de vie jouerait lui aussi un rôle
déterminant.
Il existe en effet une rigidification progressive des artères avec
l’âge. Chez certaines personnes pourtant, et pour des raisons
encore mal comprises, ce phénomène banal devient
pathologique. Ce phénomène porte différents noms :
durcissement des artères, rigidité vasculaire ou encore
artériosclérose.
La rigidité artérielle est la principale cause de l ’hypertension
artérielle des sujets âgés. Celle-ci est un facteur de risque
majeur d’accident cardiaque mais aussi d’accident vasculaire
cérébral (AVC). Enfin, la rigidité artérielle rend les artères plus
sensibles aux transformations cellulaires qui conduisent à
l’athérosclérose et ses complications gravissimes.
Avec le temps, les modifications de la rigidité artérielle sont
beaucoup plus importantes que les variations de PA et peuvent
constituer un meilleur indice de l’état cardio-vasculaire.
Des méthodes de mesure fiable de la rigidité artérielle ont été
mises au point et deviennent maintenant un excellent outil
permettant un diagnostic clinique et pronostique.
I. LA PRESSION ARTERIELLE
La pression artérielle (PA) est un phénomène périodique constitué
d’une composante continue, la pression moyenne (PAM) et d’une
composante pulsatile, la pression pulsée (PP) qui est calculée quelle
que soit la méthode de mesure utilisée comme la différentielle entre
la valeur haute, systolique (PAS) et la valeur basse, diastolique
(PAD).
PP = PAS - PAD
1. La pression artérielle systolique (PAS)
Valeur maximale 135-140 mm Hg
Cette pression dépend d’un certain nombre de facteur (4) que l’on appelle
déterminants, lesquels jouent un rôle fondamental. Ce sont respectivement :
- l’éjection ventriculaire gauche,
- la compliance des gros troncs artériels,
- les ondes de réflexion,
- les résistances périphériques
2. La pression artérielle diastolique (PAD)
Valeur maximale quelque soit l’âge : 95 mm Hg
Cette pression est également sous la dépendance de certains facteurs,
essentiellement deux.
Les principaux déterminants de la PAD sont respectivement :
- les résistances périphériques, plus spécialement au niveau des
petites artères et artérioles,
- la rigidité de la paroi des gros troncs artériels
3. La pression artérielle moyenne
La pression artérielle moyenne est définie comme la pression
diastolique plus un tiers de la différentielle. C’est un outil commode
pour évaluer le niveau de pression. Il ne faut toutefois pas oublier que
c’est une pression théorique, définie comme la pression qui assurerait,
toutes choses égales par ailleurs, le même débit artériel dans un système
continu et non pulsatile.
PAM = PAD + 1/3 PP
La pression artérielle moyenne est cependant une grandeur
fondamentale car sa valeur décroît régulièrement de l’aorte
jusqu’en périphérie et c’est elle qui détermine le sens du flux
dans un système hydraulique.
Cependant, elle suppose un débit cardiaque constant et non
pulsatile comme cela est observé dans la vie courante.
Comme notre cœur bat et que la pulsatilité cardiaque est une
caractéristique de la vie (la PA varie tout au long du cycle
cardiaque autour de sa valeur moyenne), il faut donc tenir
compte non seulement de cette PAM mais aussi des fluctuations
autour de cette valeur donc de la pression différentielle (PP).
Pour mémoire :
PAM = Débit cardiaque . Résistances périphériques
II. LA PRESSION PULSEE
Plusieurs travaux ont montré ces dernières années que la
pression pulsée reflète l’état des gros troncs artériels et
qu’elle est très bien corrélée aux différents indices
traduisant l’hypertrophie ventriculaire gauche, et cela
indépendamment de la PAM.
Elle dépend de trois facteurs hémodynamiques différents :
- la vitesse de l’éjection ventriculaire,
- le degré de rigidité de l’arbre aortique,
- le régime des ondes de réflexion de la pression
artérielle.
Pression pulsée.jpg
Ainsi, pour une fonction cardiaque donnée, alors que la pression
moyenne dépend avant tout de l’état des artérioles, la pression
pulsée dépend beaucoup plus de la rigidité des gros troncs
artériels, en particulier de l’aorte. Comme la rigidité artérielle
augmente avec l’âge beaucoup plus que le rétrécissement du
calibre des petites artères, le sujet hypertendu est caractérisé
avant tout par une augmentation très marquée de la pression
pulsée et de manière plus accessoire de la pression artérielle
moyenne. Notons que l’augmentation de la pression pulsée
résulte simultanément d’une augmentation de la pression
systolique et d’une diminution de la pression diastolique, ces
deux modifications étant la conséquence de l’augmentation de la
rigidité des artères de gros calibre. La pression pulsée est donc
un excellent reflet de l’état d’élasticité des parois artérielles.
La pression pulsée est donc un excellent
reflet de l’état d’élasticité des parois
artérielles ; ainsi, une perte de l’élasticité de
l’aorte et des gros troncs artériels est
toujours responsable d’une augmentation de
la pression pulsée, mais sans aucune
modification de la pression artérielle
moyenne.
a. Conséquences de l ’élévation de la pression pulsée
sur le coeur
• augmente le travail
cardiaque
• augmente la consommation
d’oxygène
• facilite l’installation de
l’hypertrophie ventriculaire
gauche
• provoque une baisse de la
perfusion coronaire (PAD)
sur les artères
• provoque des cassures des
bio-élastomères
• provoque des lésions
structurales de la paroi
artérielle
b. implications épidémiologiques
• La pression pulsée est un excellent élément prédictif de la
mortalité cardio-vasculaire
• elle permet de modifier la prise en charge des sujets
hypertendus
c. valeur normale de la pression pulsée
• obtenue suite à l’étude d’un grand nombre se sujets
• 95 % des sujets normaux étudiés ont une pression pulsée <
60 mm Hg ( 41 +/- 18 mm Hg : valeur moyenne +/- 2
déviations standards)
• 60 mm Hg est donc la valeur limite de référence
d. implications thérapeutiques
• la compliance des artères de gros et moyen calibre est le
principal déterminant de la pression pulsée
• du point de vue pharmacologique et thérapeutique, il faudra
déterminer
les
classes
thérapeutiques
agissant
préférentiellement sur les parois vasculaires de ces vaisseaux
pour favoriser l’abaissement de la pression pulsée
III. RIGIDITE ARTERIELLE
• son évaluation clinique n’est pas de pratique
courante
• s’accentue avec la sédentarité
• modifie l’hémodynamique cardiaque
• principal facteur du vieillissement artériel
• facteur majeur des risques d’AVC, IC, IDM
• dépendant du mode de vie (aggravé par les
régimes riches en sel et en protéines animales)
• constitue un meilleur indice de l’état cardiovasculaire que la pression artérielle
Plusieurs éléments modifient la rigidité de la paroi vasculaire. En
réalité, ces éléments affectent surtout les différentes couches de la
paroi. Les propriétés viscoélastiques d’une artère dépendent de la
proportion de fibres collagènes et d’élastine dans la paroi.
Or, avec l’âge,
- les fibres élastiques deviennent moins déformables (diminution de
l’élasticité) ; les artères se dilatent moins bien en systole.
- les fibres collagènes s’épaississent.
On suspecte enfin la rigidité de rendre les artères plus sensibles aux
mécanismes qui génèrent l’athérosclérose. Tous ces processus vont
diminuer sensiblement le diamètre interne des artères. En
conséquence, l’hydraulique se modifie s’accompagnant :
. d’une diminution de la vitesse d’écoulement du sang
. d’une diminution du débit sanguin.
Différents examens permettent de mesurer cette
rigidité artérielle et donc dévaluer l’âge du
système artériel. Ce bilan vasculaire a pour but
d’apprécier le degré de vieillissement du
système artériel et de permettre un meilleur
choix du traitement dans les maladies cardiovasculaires. Pour cela, deux examens sont
utilisés : la vitesse de l’onde de pouls (V.O.P.)
et la tonométrie d’aplanation.
1. Mesure de la vitesse de l’onde de pouls
• Mesure indolore (non invasive), simple, répétitive, destinée
à évaluer la rigidité artérielle.
• Le patient est allongé bras légèrement fléchi.
• Deux capteurs de pression sont placés sur l’artère carotide et
l’artère fémorale et permettent d’enregistrer la vitesse de
l’onde de pouls carotido-fémorale.
• La mesure est répétée une dizaine de fois.
• Une courbe en fonction de l’âge est établie à la fin de
l’examen qui dure en totalité 20 minutes.
2. La tonométrie d’aplanation
• Méthode nouvelle, non invasive, faite sur le sujet allongé,
particulièrement adaptée pour mesurer la pression pulsée et
analyser le rôle des ondes de réflexion.
• Utilise une sonde placée sur l’artère radiale.
• L’enregistrement des mesures permet d’apprécier la courbe
de pression artérielle aortique à partir d’une courbe de la
pression artérielle radiale.
• L’examen, d’une durée de 20 minutes, renseigne sur l’état
des artères du patient par rapport à « l’effet âge » dans le
cadre du développement de l’hypertension artérielle.
• L’interprétation de l’examen est faite le jour même et
adressée au médecin prescripteur.
La forme de la courbe de pression est caractérisée par un point
d'inflexion qui divise l'onde de pression en un pic systolique
précoce (Pi) et un autre un peu retardé (Ppk). Ce pic est dû au
retour systolique de l'onde réfléchie provenant de la périphérie et
qui va entraîner une élévation de la pression différentielle et de la
PAS. Des études publiées par plusieurs équipes montrent que le
vieillissement artériel entraîne une augmentation de la pression
pulsée centrale (PP aortique) environ deux fois plus importante
que celle des pressions mesurées aux niveaux périphériques.
Conclusion
Dans plusieurs centres, la mesure de la PP est maintenant intégrée
dans les paramètres d'évaluation du niveau de pression d'un sujet.
La recherche pharmacologique devra déterminer s'il existe des
classes thérapeutiques abaissant durablement la PP, pour un même
abaissement de la PAM, démontrant ainsi un effet artériel propre.