grande salle - Théâtre Le Public

Transcription

grande salle - Théâtre Le Public
LA CRUCHE
CASSÉE
FARCE SATIRIQUE
DE HEINRICH VON KLEIST
DU 29/01 AU 23/02/08
GRANDE SALLE
PROGRAMME
LA CRUCHE CASSÉE
CRÉATION
Avec CHRISTELLE CORNIL (Louise), NOÉMIE DUJARDIN (Eve), EMMANUEL GUILLAUME
(Ruprecht), JAN HAMMENECKER (Adam), FRANCIS LEPLAY (Walter), DAVID MIGEOT
(Lumière), AGNÈS PONTIER (Dame Brigitte) et LAURENCE ROY (Dame Marthe)
Adaptation ARTHUR ADAMOV
Mise en scène FRÉDÉRIC BÉLIER-GARCIA
Assisté de CAROLINE GONCE
Décor JACQUES GABEL
Son ANITA PRAZ
Lumière FRANCK THÉVENON
Costumes CATHERINE LETERRIER
Maquillage CATHERINE NICOLAS
Habilleuse LUCIE GUILPIN
Régie plateau KATIA THUIA ET AXEL PRUD'HOMME
Construction décor ATELIERS DE DÉCORS MUNICIPAUX DE LA VILLE D'ANGERS (FABRICE
BOISTAULT, JOËL CHARRUAU, PIERRE LEROY) ET LE GRAND T
Régie SAMIR GUENNOUN et LOUIS-PHILIPPE DUQUESNE
Direction technique PIERRE MOCKEL
Photos du programme SOLANGE ABAZIOU
COPRODUCTION NOUVEAU THÉÂTRE D'ANGERS / CENTRE DRAMATIQUE NATIONAL PAYS DE LA LOIRE /
THÉÂTRE ROYAL DE NAMUR, COMÉDIE DE PICARDIE, AVEC LA COLLABORATION DE LA COMPAGNIE DES
PETITES HEURES ET DU GRAND T - SCÈNE CONVENTIONNÉE DE LOIRE-ATLANTIQUE
COMME UN FAIT DIVERS
En 1805, Kleist commet une farce foudroyante, La Cruche cassée, la grande comédie du répertoire allemand…
Adam, juge peu scrupuleux d'un village de la très bourbeuse province d'Utrecht, est
inspecté par le très sévère Conseiller de Justice. En ce jour d'audiences publiques, il
se trouve contraint d'instruire le procès de sa propre faute (une visite nocturne sulfureuse chez la jeune Eve).
Dans ce procès, où le juge est le coupable, la jubilation du spectateur réside dans
l'observation des efforts démoniaques que le juge déploie pour détourner le soupçon de lui-même.
Nous monterons l'instruction réjouissante de cette rencontre nocturne du juge
Adam et de la petite Eve, et la chute qui s'ensuivit… dans le même éclat de rire
allègre, avec lequel Kleist raconte sa propre histoire du monde, notre monde et sa
cocasse genèse, comme un fait divers grotesque et sulfureux.
Frédéric Bélier-Garcia
UN ŒDIPE COMIQUE
C'est en 1802 que Heinrich von Kleist entreprit d'écrire La Cruche cassée, sa seule
comédie : elle lui fut inspirée par une gravure de Le Beau qu'il décrit ainsi : « On y
remarquait tout d'abord un juge siégeant gravement au tribunal; devant lui se
trouvait une vieille femme qui tenait en main une cruche cassée et semblait faire la
preuve des torts qu'elle avait subis, l'accusé, un jeune paysan que le juge apostrophait avec violence, comme si sa culpabilité était établie, se défendait encore, mais
faiblement; une jeune fille qui avait vraisemblablement témoigné en cette affaire
(car qui sait à quelle occasion le délit avait été commis ?) se tenait entre sa mère et
son fiancé en tortillant son tablier - on ne peut avoir une mine plus défaite après
avoir porté un faux témoignage - ; et le greffier (il avait peut-être regardé la jeune
fille peu avant) jetait maintenant sur le juge le regard soupçonneux que Créon jetait
sur Oedipe dans une semblable occasion ».
DE HEINRICH VON KLEIST
FARCE SATIRIQUE
DU 29/01 AU 23/02/08
A 20H30 RELÂCHES DIMANCHES ET LUNDIS
GRANDE SALLE – THÉÂTRE LE PUBLIC
RÉSERVATIONS:
0800/944 44
www.theatrelepublic.be
Il s'agit là, on le voit, moins d'une description que d'une interprétation poétique; en
fait, le sujet de la gravure est un des sujets les plus banals, les plus habituels du
dix-huitième siècle français, mais Kleist y transporte son obsession majeure: celle
de la justice, ou plus exactement du justicier confondu par la justice même qu'il est
tenu de faire respecter.
Un tel sujet n'avait jusqu'alors été traité (et par Kleist lui-même) que sur le mode
tragique. Comment Kleist a-t-il fait du juge Adam un œdipe comique ? D'abord en
donnant à la culpabilité un caractère dérisoire : Oedipe, en tuant son père et en
épousant sa mère, attire sur la cité la malédiction des dieux ; Adam, lui, a simplement tenté de séduire une petite paysanne et s'apprête à condamner injustement
un jeune homme fort niais, et sa faute n'aura de fâcheuses conséquences que pour
lui. Il n'est pas jusqu'à l'infirmité d'Oedipe qui ne soit prêtée au juge Adam, mais elle
devient un grotesque et pitoyable pied bot.
De plus, Adam, contrairement à Oedipe, se sait coupable, et le drame ne réside pas
pour lui dans la découverte de cette faute par les autres. Le spectateur accordera,
tout au plus, à ce vieillard libidineux (dont certains aspects, de l'aveu même de
Kleist, ne sont pas sans rappeler le Tartuffe de Molière) une pitié méprisante. Enfin,
comble de dérision, ce personnage borné, sans grandeur, porte le nom du premier
coupable de l'humanité dont il n'a même pas pu reproduire la faute : le juge Adam a
seulement désiré Eve, et son désir, malgré les voies tortueuses qu'il a empruntées,
n'a pas été satisfait.
Traitant dans sa comédie un thème bien connu, Kleist l’a néanmoins construite
selon sa manière propre, celle que l’on retrouve, portée à la perfection dans La
Marquise d'O. Un fait est posé: le jugement. Ce jugement sert de pivot à l'action qui
progresse de façon circulaire, le rappel d'un acte déjà accompli entraînant une
découverte fragmentaire de la vérité, jusqu'à ce que rappels et découvertes forment
autour du coupable un cercle de plus en plus étroit, de plus en plus rigoureux, dont
le centre devient intenable.
Le mérite exceptionnel de la pièce consiste sans doute dans l'art précis, mathématique, avec lequel Kleist a su faire intervenir, alternativement, les quelques éléments
accusateurs (cruche, perruque, pied bot, etc.), chacun de ces éléments apparaissant
d'abord comme une menace, puis comme une chance de salut, pour venir finalement prendre une juste place dans le puzzle parfait que redoutait le juge Adam.(...)
Il est temps que l'on reconnaisse dans le juge Adam, une des premières incarnations, sinon la première, du héros moderne, coupable et sordide, et pourtant
appelé, par la situation centrale qu'il occupe, à la destruction absolue, celle qui n'a
pas la gloire pour contrepartie.
Arthur Adamov
UN FAIT HISTORIQUE
Un fait historique sur lequel, au demeurant, il ne me fut possible de découvrir aucun
renseignement, est vraisemblablement à l'origine de cette comédie. Une estampe,
vue il y a quelques années en Suisse, m'en a fourni la trame.
On y voyait d'abord un juge, l'air grave, trônant sur son siège, et, devant lui, une
vieille femme portant une cruche cassée, laquelle semblait clamer l'injustice dont
elle avait pâti ; l'accusé, un jeune paysan que le juge admonestait vertement, continuait à se défendre, bien que fort mollement; une jeune fille, qui sans doute avait
témoigné en cette affaire (car nul n'est informé des circonstances du délit), triturait
son tablier, debout entre sa mère et son fiancé; l'auteur d'un faux témoignage
n'aurait eu physionomie plus contrite; le greffier quant à lui (peut-être, l'instant
d'avant, avait-il regardé la jeune fille) observait le juge d'un air suspicieux, comme
Créon sans doute avait regardé Œdipe en situation analogue. Au-dessous était écrit
La cruche cassée. L'original, ce me semble, était d'un maître hollandais*.
Heinrich von Kleist
* il s'agit d'une estampe de Le Beau datant de 1782 (d'après un tableau disparu de Debucourt), dont Kleist a eu connaissance lors d'un voyage en Suisse en 1802.
HEINRICH VON KLEIST
La nature lui avait donné plus de ses « ingrédients » qu'un seul homme n'en peut
supporter pour une seule vie; ainsi de l'abondance naquit la lutte; le dosage était trop
fort et devint foison. Il y avait chez Kleist infiniment plus de ces forces et de ces
humeurs que la faible enveloppe d'un corps terrestre n'en peut contenir, ce fut là sa
fatalité. Aussi devait-il éclater comme une chaudière surchauffée: son démon n'était
pas l'absence de mesure, mais la démesure.
Stefan Zweig, Le Combat avec le démon
Heinrich von Kleist naît le 18 octobre 1777 à Francfort-sur-l’Oder. Fils aîné d'un
capitaine d'état-major, il entre dans l'armée à Potsdam à l'âge de 15 ans. A 20 ans, il
est lieutenant, mais il abandonne la carrière militaire en 1799 pour étudier à l'université de Francfort. Après une première tragédie (La Famille Schroffenstein), il écrit La
Cruche cassée, que Goethe mettra en scène en 1808, mais la pièce ne remportera
pas le succès escompté. Durant une période de désespoir, il détruit le manuscrit de
Robert Guiscard. Il voyage dans divers pays d'Europe. En 1807, après la victoire de
Napoléon (à qui il voue une haine profonde), il est soupçonné d'espionnage et incarcéré par les français pour quelques mois au fort de Joux. Il travaille encore sur des
nouvelles (La Marquise d'O), publie des journaux (Phébus et le Berliner Abendblatter),
et écrit ses plus grandes pièces, qu'il ne verra jamais représentées de son vivant.
Après l'échec de sa dernière pièce (Le Prince de Hombourg), il signe un pacte de
suicide avec sa compagne Henriette Vogel, atteinte d'un cancer. Le 21 novembre
1811, il se suicide au bord du lac de Wannsee près de Potsdam, après avoir tiré sur
elle.
Durant les dix années de sa vie active, Heinrich von Kleist fut incroyablement
productif : sept pièces, plus une inachevée; huit nouvelles en deux volumes
(Erzählungen, 1810-1811); des essais sur l'art et la littérature, des textes journalistiques et de la poésie. Son œuvre paradoxale, ambiguë et souvent provocante, reflète
les conflits entre conscience individuelle et société. La quête de l'absolu est l'unique
toile de fond de sa vie publique, littéraire et privée.
FRÉDÉRIC BÉLIER-GARCIA
Frédéric Bélier-Garcia est né en 1965. Après avoir étudié et enseigné la philosophie,
il signe sa première mise en scène (Biographie: un jeu de Max Frisch avec François
Berléand et Emmanuelle Devos) en 1999. Suivront notamment Un garçon impossible de Peter Rosenlund à la Comédie-Française, L'Homme du hasard de Yasmina
Reza, créé au Théâtre du Gymnase à Marseille avec Philippe Noiret et Catherine
Rich, Un Message pour les cœurs brisés de Gregory Motton au Théâtre de la
Tempête, Une Nuit arabe de Roland Schimmelpfennig, Et la nuit chante de Jon Fosse
au Théâtre du Rond-Point, La chèvre ou qui est Sylvia? de Edward Albee au Théâtre
de la Madeleine et Dans la luge d'Arthur Schopenhauer de Yasmina Reza à Théâtre
Ouvert.
BIBLIOGRAPHIE
Il crée pour la première fois une pièce de Marie N'Diaye, Hilda, avec Zabou Breitman, et reçoit le Prix de la meilleure création du Syndicat de la critique 2002.
La Famille Schroffenstein, 1801
La Cruche cassée, 1803
Robert Guiscard, 1803 (manuscrit brûlé par l'auteur, dont il ne reste que le premier
acte)
La Marquise d'O, 1805 (adapté au cinéma par Eric Rohmer en 1976)
Penthésilée, 1805-1807
La Petite Catherine de Heilbronn, 1808
La Bataille d'Arminius, 1808
Le Prince de Hombourg, 1811
Si vous me faites un jour (...) l'honneur d'une visite, prenez garde à une maison en
bordure de route, sur laquelle on peut lire le verset suivant : « Je viens, je ne sais d'où. Je
suis, je ne sais quoi. Je vais, je ne sais où. Je m'étonne d'être si gai. » - Ce verset me plaît
beaucoup et je n'y pense jamais sans joie quand je vais me promener.
Kleist. Correspondance. 1er février 1802
Il est aussi coauteur avec Emmanuel Bourdieu du Mental de l'équipe, une pièce pour
quatorze comédiens, qu'il a mise en scène avec Denis Podalydes au Théâtre du
Rond-Point en 2007.
A l'opéra en 2003, après un opéra contemporain, Verlaine Paul de Georges Boeuf,
puis Don Giovanni de Mozart, il réalise en avril 2007, à l'Opéra de Marseille, la mise
en scène de Lucia di Lammermoor de Donizetti; il a créé Le Comte Ory de Rossini à
l'Opéra de Nantes en novembre 2007 et créera La Traviata de Verdi aux Chorégies
d'Orange en 2009.
Au cinéma, Frédéric Bélier-Garcia est coscénariste des films de Nicole Garcia, Place
Vendôme, L'adversaire et Selon Charlie (en sélection officielle au festival de Cannes
2002 et 2006).
Frédéric Bélier-Garcia a été metteur en scène associé au Théâtre National de
Marseille-La Criée de janvier 2002 à décembre 2006.
Il dirige depuis le 1er janvier 2007 le Centre Dramatique National Pays de la Loire à
Angers.
Saison 2007-2008
De folles soirées !
A L’AFFICHE
Eros Médina de Thierry Debroux
Tout au bord de Bernard Cogniaux et Marie-Paule Kumps
La Cruche cassée de Heinrich von Kleist
PROCHAINEMENT
T’appartenir de Stéphanie Blanchoud et Claude Enuset
Garde à vue d’après Michel Audiard
Je l’aimais d’Anna Gavalda
Dialogues d’exilés de Bertolt Brecht
Trahisons de Harold Pinter
A mi-chemin d’Anne Beaupain
Le mariage de Figaro (la folle journée) de Beaumarchais
Pensées de Blaise Pascal
Info/Réservation: 0800/944 44
www.theatrelepublic.be
.
.
.
.
Restaurant Parking Taxi Baby-sitting / Théâtre Le Public, rue Braemt 64-70 1210 Bruxelles