Le Pacte de stabilité et de croissance

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Le Pacte de stabilité et de croissance
6REPÈRES ET TENDANCES 4CONJONCTURES
4DOSSIER
4LIVRES ET IDÉES
FINANCES PUBLIQUES
PHILIPPE D’ARVISENET
*
Le Pacte de stabilité
et de croissance
L’idée d’encadrer les politiques budgétaires au sein
de l’Union européenne par des règles est un héritage des
années 1970 et 1980. Dans de nombreux pays, cette
période a été caractérisée à la fois par une forte accélération de l’inflation et par des finances publiques
s’orientant parfois vers des situations insoutenables (avec
des dettes publiques à trois chiffres en Belgique, Italie et
Irlande). Dans ce contexte, l’efficacité de la politique
budgétaire discrétionnaire (par opposition au simple
jeu des stabilisateurs automatiques) comme instrument
de soutien de l’économie s’est trouvée mise en cause.
L’
ouverture des économies abaissant
le niveau des multiplicateurs keynésiens1, les effets d’éviction2, les situations
de chômage classique, les analyses mettant
en avant les comportements ricardiens
des ménages (schématiquement une
baisse d’impôts aujourd’hui conduit à des
anticipations d’impôts futurs plus élevés
afin de faire face aux charges de la dette
qui se trouvent accrues, en conséquence
l’épargne augmente, ce qui annule l’effet
expansionniste attendu de la mesure budgétaire), les propositions des théoriciens
du cycle réel mettant l’accent sur les
déterminants réels du côté de l’offre, les
cycles électoraux, l’illusion budgétaire (la
notion de contrainte intertemporelle de
solvabilité est mal comprise), les comportements stratégiques conduisant les autorités à revenir sur leurs engagements
(inconsistance temporelle) figurent parmi
les considérations ayant créé un environnement propice à l’adoption de règles.
Ainsi a-t-on vu plusieurs pays mettre en
place des plafonds d’évolution des dépenses (États-Unis, Suède, Royaume-Uni,…)
ou des dettes (Nouvelle-Zélande), dans
un contexte où la maîtrise des déficits est
venue au rang des priorités.
POURQUOI LE PACTE ?
L
a mise en place de règles s’imposait
plus encore dans une union monétaire. Face à une politique monétaire unique avec une priorité de stabilité des
prix, la gestion des situations particulières supposait que l’on puisse disposer
d’un instrument de stabilisation de l’activité. La politique monétaire ne pouvant
jouer en cas de choc asymétrique, la
tâche en incombe à la politique budgé-
* Directeur des études économiques de BNP-Paribas.
taire sous la contrainte de respecter
la soutenabilité des finances publiques
à moyen terme. Cela implique le libre
jeu des stabilisateurs automatiques. Dans
ce cadre, un plafond de 3 % n’est pas
de nature contraignante si le solde
budgétaire est proche de l’équilibre
en moyenne de cycle, les marges de
manœuvre nécessaires étant alors disponibles. Un tel contexte permet d’écarter,
sauf circonstances exceptionnelles (déflation…), le recours à la politique discrétionnaire ; il est d’ailleurs possible de
1. De manière générale, une impulsion budgétaire
de un point de PIB a un effet sur l’activité inférieure
à un point. L’effet diffère selon le type de mesure
adopté, l’effet de la dépense est supérieur à celui
de la recette. Dans l’hypothèse d’une hausse de la
consommation publique de un point de PIB, l’effet
sur l’activité est de l’ordre de 0,6 point à horizon
de 2 ans en France, de 0,8 point en Allemagne ou
en Italie (Barrell et Davis, 2005).Dans certaines circonstances, des petits pays ont connu des épisodes de consolidation budgétaire expansionnistes
(Irlande, Danemark...). Ces évolutions ont été rendues possibles par de fortes baisses de taux d’intérêt, une dévaluation, les succès rencontrés sont
apparus liés à la nature des mesures de consolidation adoptées, la réduction des dépenses courantes se révélant plus efficace que la baisse des
dépenses d’investissement, la hausse des impôts à
la consommation plus efficace que celle des impôts
directs (Alesina, Perotti, 1995).
2. Les estimations empiriques concluent pour la
plupart qu’une baisse des déficits de un point de PIB
se traduit, toutes choses égales par ailleurs, par un
recul des taux réels de 20 à 60 points de base. Selon
des estimations portant sur la période 1970-1998,
une hausse de 10 points du taux d’endettement
débouche sur une hausse des taux réels de
60 points de base, toutefois l’effet s’est fortement
modéré après 1980, vraisemblablement en raison
de la globalisation financière (Barrell et Davis, 2005).
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montrer, à partir d’une situation de jeu,
que la polarisation de la politique monétaire sur l’objectif de stabilité des prix et
la polarisation de la politique budgétaire
sur un objectif d’activité conduisent à des
situations sous-optimales.
LA NÉCESSITÉ DE RÈGLES
EST RENFORCÉE DANS
LE CADRE D’UNE UNION
MONÉTAIRE
A
u départ, l’objectif était de s’assurer
le maintien de la discipline budgétaire au-delà des progrès accomplis dans
la phase de convergence préalable à la
formation de l’UEM. Par ailleurs, il s’agissait d’écarter le risque d’incitation à
l’adoption de comportements de passager clandestin, c’est-à-dire d’éviter de
voir tel ou tel pays mettre à profit son
appartenance à l’UEM pour gonfler ses
déficits sans en payer le prix, les incidences sur les taux d’intérêt se trouvant
mutualisées sur toute la zone. Il s’agissait, en d’autres termes, d’éviter que les
bons élèves puissent être amenés à
payer pour les mauvais.
Cela s’accompagnait du souci d’assurer la
solvabilité des États de façon à éviter que
les autorités monétaires ou les autres
États ne soient soumis à des pressions en
faveur d’un sauvetage. Même avec l’interdiction de bail out , le souci d’éviter l’éclatement d’une crise systémique ne peut
être écarté. En cas de problèmes de solvabilité d’un État, les détenteurs de titres
émis par l’État concerné seraient amenés
à vendre non seulement ces titres, mais
aussi ceux de meilleure qualité, des problèmes de liquidités pourraient voir le
jour, les autorités monétaires pourraient
être amenées à intervenir et rien n’assure, compte tenu du degré de diversification des avoirs bancaires par
nationalité d’émetteurs, que la règle de
Bagehot – stipulant que l’on peut prêter
sans limite sous la condition de prendre
des collatéraux d’excellente qualité –
puisse être respectée. Un dispositif fondé
sur des règles renforce ainsi l’indépendance de la Banque centrale et sa capacité à mener une politique de stabilité.
On peut citer à cet égard M. King, le gouverneur de la banque d’Angleterre :
« Central banks are often accused of
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being obsessed with inflation, this is
untrue, if they are obsessed with anything, it is with fiscal policy » (King, 1995).
Ainsi, l’efficacité de la politique monétaire
dépend de la politique budgétaire. Sans
solvabilité assurée, les autorités monétaires peuvent rencontrer des difficultés
dans la conduite d’une politique visant la
maîtrise de l’inflation. Si par ailleurs une
politique budgétaire excessivement
expansionniste conduit à une hausse des
taux d’intérêt propre à conserver la maîtrise de l’inflation, l’investissement peut
se trouver freiné, avec pour résultat une
hausse de la part de la dépense publique
dans le PIB et une baisse du taux d’investissement, ce qui ne peut être favorable à
la croissance potentielle.
Un argument supplémentaire tient au fait
que la zone euro ne présente en rien les
caractéristiques d’une zone monétaire
optimale – même si l’on peut espérer que
cela change avec le temps (idée du caractère endogène de l’optimalité d’une union
monétaire). La mobilité géographique du
travail est limitée (transférabilité des
droits de retraite, obstacles linguistiques…), tout comme la flexibilité des
rémunérations. En outre, il n’existe pas de
budget centralisé permettant de lisser la
conjoncture (dans un système de fédéralisme budgétaire, les collectivités territoriales touchées par un choc asymétrique
défavorable contribuent moins fortement
au financement du budget fédéral et bénéficient automatiquement de transferts
provenant des collectivités se trouvant
dans une meilleure conjoncture). C’est le
cas pour les États-Unis, où le budget fédéral représente 15 % du PIB. Le budget
européen est beaucoup plus faible (1,1 %
du PIB) et se trouve largement pré-affecté
(aux fonds structurels et à la PAC). En
visant un solde nul ou excédentaire en
phase de bonne conjoncture, et en créant
ainsi les marges de manœuvre nécessaires
au jeu de stabilisateurs automatiques en
phase de conjoncture défavorable, on
imite en quelque sorte ce qui se passerait
dans le cadre d’un système de fédéralisme
budgétaire.
Ajoutons qu’il est difficile d’imaginer que
la coordination puisse se substituer aux
règles compte tenu de l’importance des
coûts de transaction qu’elle entraînerait.
Quant à lui, le seul recours au jugement
des marchés comme instrument de discipline ne va pas de soi (voir infra).
LES INSUFFISANCES
ET LES CRITIQUES
L’excès de rigidité. Le critère des 3 %
pour le déficit a le mérite de la simplicité. Sa place dans les débats avant l’entrée dans l’UEM, tant au niveau des
opinions que des marchés financiers,
vient sans doute de là en grande partie.
Toutefois, la crédibilité n’implique pas
seulement la simplicité. Elle suppose un
minimum de flexibilité. Or, l’arbitrage
simplicité/flexibilité devient problématique lorsque la zone s’élargit et qu’en
conséquence, les préférences collectives
et les intérêts deviennent plus variés. Les
critères de 3 % et de 60 % (pour le taux
d’endettement) sont-ils arbitraires ? On
peut le concevoir aujourd’hui, il reste
que l’on ne peut les juger que sur la base
du contexte dans lequel ils ont été adoptés. Avec une croissance nominale de
5 %, un déficit de 3 % assure la convergence vers un taux d’endettement de
60 % (D. Gros, 2003).
Si l’hypothèse d’une croissance nominale
de 5 % peut apparaître inappropriée au
vu des toutes dernières années, il faut
rappeler que la croissance était sensiblement plus élevée dans les années 1990.
En réalité, le propre du Pacte n’est pas
seulement d’établir un plafond. L’idée centrale est d’assurer une situation d’équilibre sur le cycle, c’est-à-dire en moyenne
période (ce qui se traduit par l’objectif
« close to balance or surplus ») afin que
soient dégagées les marges de manœuvre
nécessaires à la fois face aux conséquences du vieillissement de la population et
au jeu des stabilisateurs automatiques
dans les périodes de conjoncture défavorable. Comme on va le voir, la faiblesse du
Pacte tient plus au non-respect de ces
règles qu’au chiffre de 3 %.
L’insuffisante prise en compte de la
conjoncture a été largement corrigée
par les adaptations apportées au Pacte
en 2003 avec la référence au solde
structurel (c’est-à-dire corrigé des
influences du cycle), mais les situations
LE PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE
particulières impliquent plus que cela.
D’abord le jeu des stabilisateurs automatiques est une notion complexe. La
mesure du solde structurel est incertaine comme en témoignent par exemple les écarts des estimations qui
émanent du FMI, de l’OCDE ou de la
Commission européenne. Le rythme de
la croissance potentielle peut être surestimé, conduisant à une surestimation des
outputs gaps négatifs. De plus, tous les
pays ne présentent pas la même sensibilité au cycle et la portée des mécanismes
de stabilisation automatique liée au
niveau des prélèvements et à leur caractère plus ou moins progressif varie de
l’un à l’autre.
Les mêmes règles s’appliquent à des pays
dont la situation du point de vue de l’endettement public est très diversifiée. Les
exigences pour les pays à faible endettement sont excessivement contraignantes.
L’insuffisante prise en compte des
besoins d’investissements publics propres à soutenir la croissance future (par
opposition à la dépense courante). Cette
critique repose sur le fait que, dans bien
des pays, l’ajustement des comptes
publics a principalement porté sur les
dépenses en capital et très accessoirement sur les dépenses courantes hors
intérêts. En réalité, c’est là la conséquence
logique de considérations politiques, les
soutiens à ce qui n’existe pas encore sont
bien faibles par rapport à ce que peut
être la défense d’intérêts établis.
Ces deux dernières critiques – insuffisante prise en compte de l’endettement
et de l’investissement public – ont vu
leur portée renforcée avec d’une part,
les objectifs de Lisbonne visant à améliorer les perspectives de croissance
potentielle, et avec d’autre part l’adhésion à l’Union des pays d’Europe centrale et orientale. Ces derniers ont des
retards à rattraper du point de vue des
infrastructures, tout en présentant des
situations d’endettement public la plupart du temps meilleures que celles de
bien des membres de l’UEM. De surcroît, ces pays en phase de rattrapage
étant appelés à connaître à la fois une
croissance et une inflation supérieures à
la moyenne (effet Balassa) devraient en
toute logique bénéficier d’un contexte
favorable à leurs finances publiques.
Ceci n’implique pas que l’exclusion des
dépenses d’investissement dans le calcul
du déficit soit une question simple. On
peut ainsi se demander si le salaire des
enseignants n’est pas, in fine, plus productif que la construction d’établissements scolaires. On peut également
craindre que les dérogations portant sur
certains types de dépenses puissent
déboucher sur une requalification favorable de certaines d’entre elles.
L’insuffisante prise en compte des
réformes structurelles. Dans la mesure
où la mise en œuvre des réformes comporte des coûts à court terme, elle peut
être freinée du fait des contraintes budgétaires, alors même que son effet positif
sur la croissance potentielle, et donc sur
les soldes publics futurs, est favorable.
La procédure pour déficit excessif.
Viser l’équilibre à un horizon donné
n’est pas une tâche simple si la croissance est faible. Les critères d’exemption
(baisse de 2 % du PIB ou entre 0,75 % et
2 % sous réserve d’une approbation du
Conseil) sont apparus rigides à l’excès et
inadaptés.
Le dépassement des objectifs de façon
récurrente en atteste avec éloquence,
même si la dérive pour une année donnée ne conduit pas à une exigence de
rattrapage (un effort accru par rapport à
la tendance dans les années ultérieures).
Dès lors, l’objectif d’un retour sous les
3 % est parfois apparu de facto comme
un « objectif glissant ».
Ceci a amené à l’automne 2003 à des
modifications en faveur de plus de souplesse, la durée prévue pour revenir à
une situation proche de l’équilibre a été
portée à trois ans et l’exigence a été
rendue contingente aux performances
de croissance.
Les circonstances ont amené les États
membres à souvent surévaluer la croissance dans leurs hypothèses, les dérives
des soldes budgétaires qui en résultèrent furent alors exagérément imputées
au cycle. Il faut aussi prendre en compte
la tentation de recourir aux mesures
exceptionnelles (one-offs), aux opérations hors budget qui gonflent la dette
au-delà de ce qui provient des déficits,
toutes choses qui réduisent la transparence (Von Hagen et Wolff, 2004).
La qualité des projections et de l’information est contestée (révisions de la
situation des comptes portugais en
2002, grecs en 2004). Cela a amené à
prôner une harmonisation des calendriers des projections de la Commission
et des autorités nationales et, à la limite,
la prise en compte des projections de la
Commission pour l’établissement des
hypothèses budgétaires nationales.
LE PACTE N’A PAS ÉLIMINÉ
LA MISE EN ŒUVRE
DE POLITIQUES
DISCRÉTIONNAIRES
EXPANSIONNISTES ET
POLITIQUEMENT MOTIVÉES
L
a principale insuffisance du Pacte à
l’origine des difficultés récentes réside
dans son caractère asymétrique, avec d’un
côté un dispositif visant à assurer la discipline en cas de dérapage au-dessus du
seuil de 3 %, avec le cas échéant des sanctions pécuniaires, mais sans incitation à la
vertu dans les phases de bonne conjoncture. Le caractère asymétrique est renforcé par le fait que le processus qui
conduit à d’éventuelles sanctions est long
et son issue de toute façon incertaine. Elle
résulte en effet d’une décision politique de
la part d’une instance dont les membres
sont juges et parties. L’espoir de certains
de voir, chez les pays membres, le souci
d’éviter les politiques susceptibles de
déboucher sur la mise en œuvre des procédures pour déficit excessif, pour des raisons d’image, de prestige… s’est révélé
exagérément optimiste.
Cela tranche avec la situation qui prévalait
dans les années qui ont précédé le lancement de l’euro. Au cours de cette
période, des progrès très significatifs ont
été accomplis. L’incitation à la bonne
conduite était patente, avec une carotte et
un bâton à caractère symétrique. D’un
côté, le non-respect du critère de convergence se soldait par la non-entrée dans
l’euro, avec une référence précise (les 3 %)
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et un timing clair. D’un autre côté, l’enjeu
de l’entrée était évident : bénéficier de
conditions (en particulier taux bas ) permettant d’entrer dans un cercle vertueux.
Le Pacte n’a pas éliminé le cycle politicoéconomique, ce qui a contribué au
caractère procyclique des politiques
budgétaires.
Au-delà d’une préférence générale pour
les déficits liée au fait que les futures
générations ne font pas partie de l’électorat, la littérature a amplement fait état
de cycles politiques liés à la tentation de
manipuler l’électorat dans les périodes
d’élections (modèles à la Nordhaus avec
une expansion préélectorale, modèle de
type partisan, Alesina, assis sur des comportements visant à récompenser les
« bons électeurs »), de l’incidence du
caractère plus ou moins émietté des
partis politiques, de la durée de vie des
gouvernements, de leur caractère (gouvernement de coalition qui conduit à des
compromis sur la base de dépenses
accrues ou au contraire gouvernement
majoritaire), ou encore de la nature des
systèmes électoraux (systèmes majoritaires, qui stimulent la mise en place de
programmes ciblés en faveur des circonscriptions « marginales » versus systèmes proportionnels) (Masciandaro,
Tabellini). (Ph. d’Arvisenet,1999 pour
une synthèse). La mise en place de règles
aurait dû limiter la portée de ces mécanismes. De ce point de vue, le track
record du Pacte est décevant. Buti et al.
(2004) ont ainsi corroboré dans une
étude récente portant sur la période
1999-2003, particulièrement riche en la
matière, avec vingt-sept années d’élections ou préélectorales ou avec des
élections anticipées dans la zone, les
résultats plus anciens obtenus sur la
base du comportement des soldes budgétaires structurels (Von Hagen, 2002).
Les auteurs distinguent, dans l’évolution
des soldes budgétaires, ce qui relève
d’une part de la politique discrétionnaire
pure (ce qui se passe en matière de
dépenses et de recettes par rapport à
une politique neutre définie par une
dépense qui évolue en ligne avec le trend
et une recette liée à la croissance nominale), et, d’autre part, ce qui relève de
dividendes d’inflation (écart entre l’infla-
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tion observée et la cible retenue par
la BCE) et de croissance (écart par
rapport aux prévisions). Ils concluent
qu’au-delà d’un élément correcteur (un
dérapage du déficit d’un point sur l’année passée se traduit par une politique
plus restrictive à hauteur d’un demipoint de PIB, toutes choses égales par
ailleurs) et d’un aspect contra-cyclique,
la politique discrétionnaire devient plus
expansionniste dans les années d’élections ou dans les années préélectorales,
la correction des dérapages de déficit
éventuellement enregistrés dans l’année
précédente étant alors entièrement
neutralisée. De 1999 à 2002, les écarts
par rapport aux objectifs de déficit ont
été systématiquement plus élevés dans
les années électorales. L’utilisation des
dividendes d’inflation et de croissance a
suivi la même logique. Rien d’étonnant,
dès lors, de voir, tout comme avant
la mise en place du Pacte, la prédominance de politiques procycliques
(Briotti, 2004) et l’insuffisance corrélative de l’effort de mise en place de marges de manœuvre pour les périodes de
vaches maigres.
Cela plaide en faveur de l’extension des
early warnings aux épisodes de comportement procycliques en phase de bonne
conjoncture.
DE NOMBREUSES
PROPOSITIONS
Une règle d’or : c’est le dispositif adopté
par le Royaume-Uni à côté d’un plafond
d’endettement à 40 %. Sur le cycle,
le déficit doit rester dans les limites de
l’investissement public. Il paraît de fait
justifié d’étaler le financement des infrastructures dans le temps dans la mesure
où les générations actuelles n’en seront
pas les seules bénéficiaires. L’expérience
montre que les gouvernements ont
généralement eu tendance à faire prioritairement porter leurs efforts d’ajustement sur l’investissement plutôt que sur
les dépenses courantes de fonctionnement ou de transferts, ce que la règle
d’or a pour objet de prévenir. Le « sacrifice » de l’investissement provoque naturellement moins de résistance (dans la
zone euro, les dépenses d’investissement
public représentaient 3,3 % du PIB en
moyenne entre 1971 et 1990, mais 2,4 %
en 2002) que la diminution des dépenses
courantes qui provoque la réaction de
leurs bénéficiaires.
L’adoption d’une règle d’or ne va pas sans
difficultés. D’abord il faut soulever la
question du périmètre : qu’est-ce que l’investissement public ? Faut-il y inclure des
investissements non tangibles (recherche) ? Ne risque-t-on pas d’ouvrir la porte à une interprétation très large du
périmètre, les bénéficiaires d’un projet
seraient naturellement portés à en exagérer les avantages. De plus l’investissement
public n’est pas automatiquement rentable (favoriser l’investissement privé peut
être tout aussi justifié), ses avantages peuvent être diffus, comporter des externalités dont la mesure est loin d’être
évidente. Quid des fréquents dépassements de coûts ?…
La délégation des responsabilités de
stabilisation conjoncturelle à une
entité indépendante. Celle-ci pourrait
décider de mesures de soutien, par
exemple lorsque le manque de production atteint un certain seuil (Wyplosz,
2003)
Cela permettrait de revenir sur le
caractère partisan des processus de
décision (le Conseil). Dans cette optique, une entité budgétaire indépendante
conduirait une politique de stabilisation
dans un cadre défini par les pouvoirs
publics, lesquels conserveraient naturellement l’initiative sur les deux autres
fonctions budgétaires, l’allocation des
ressources et la répartition, lesquelles
reflètent les préférences collectives et
ressortissent incontestablement à la
souveraineté des États. L’action de l’entité indépendante pourrait reposer sur
l’utilisation d’un fonds spécifique (rainy
days fund) alimenté par les recettes qui
lui seraient allouées dans les périodes
de bonne conjoncture et éventuellement par des transferts d’actifs. Cela
aurait pour avantage d’évacuer la question des délais inhérents à la politique
budgétaire ainsi que le problème de l’irréversibilité des mesures. En périodes
de vaches grasses, l’excédent serait
amputé par les versements dans un
fonds spécifique, inversement les déficits
LE PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE
seraient réduits dans les périodes justifiant un soutien conjoncturel via un prélèvement sur le fonds. Un tel système
assurerait plus de flexibilité et aussi plus
de crédibilité, le respect des règles étant
assuré (L. Calmfors et C. Perotti, 2003).
Dans une version moins radicale, l’autorité indépendante aurait un rôle de
c
o
n
s
e
i
l
,
elle se prononcerait sur la situation
conjoncturelle et sur ses conséquences
sur les variables budgétaires.
Une autre voie consisterait à confier le
processus de sanction à des instances
judiciaires (cour de justice européenne
par exemple). On séparerait ainsi la
législation, la responsabilité des politiques, et les modalités visant à en assurer
le respect. Cela permettrait d’éviter
d’impliquer les décideurs politiques
dans le jugement de leurs pairs, ce qui
est de nature à les conduire à adopter
des comportements typiques de jeux
répétés : quelle est l’incitation à sanctionner un pays qui peut être amené luimême à porter un jugement défavorable
dans l’avenir ?
Une application moins partisane des
règles pourrait impliquer une entité indépendante dans le jugement du caractère
exceptionnel des circonstances qui aboutissent à un relâchement des exigences
de procédure pour déficit excessif.
Des comités de politique budgétaire au
plan national rattachés aux parlements
seraient en charge de définir les objectifs
de déficit en cas de dépassement, ils
seraient amenés à proposer des réductions. Comme ceci peut faire interférer
les fonctions de régulation avec les fonctions de redistribution et d’allocation, les
ajustements proposés seraient proportionnels à la taille des différents postes
budgétaires.
Une règle de déficit s’appliquant à la
zone euro et non aux pays membres.
Cela pourrait bien sûr répondre au problème susceptible de se poser pour l’activité, dans l’hypothèse où tous les pays
seraient amenés à conduire de concert
une politique de restriction. La mise en
œuvre n’est en rien évidente, il faudrait en
effet qu’une instance responsable puisse
imputer les réductions de déficit à mettre
en œuvre au niveau de chaque pays, ce qui
pose un problème de souveraineté.
cit dépasser le seuil des 3 % à compter
de 2002, et elles pourraient être rejointes par l’Italie.
Un jugement sur les mesures prises et
non sur leur résultat constaté ex
post, un tel dispositif serait de nature à
éliminer la transparence et réduirait la
crédibilité du système.
On a observé dans les dernières années
que les petits pays s’étaient comportés
de façon généralement plus vertueuse.
Pour 2004, par exemple, les Pays-Bas ont
adopté un plan de consolidation représentant un point de PIB. En fait, les grands
pays, relativement moins ouverts, ont une
incitation plus grande aux politiques discrétionnaires pour stimuler l’activité, les
fuites à l’importation y étant moins élevées. Les petits pays donnent plus de
place à la modération salariale (l’État
donnant l’exemple) pour améliorer leur
compétitivité et ont mieux intégré les
exigences du Pacte dans la définition de
leurs politiques nationales pour mieux
faire face à des chocs imprévus. Belgique,
Finlande, Irlande, Luxembourg et PaysBas constituent à cet égard ce que l’on
a appelé le commitment group (Van der
Putten, 2003).
Un plafond de dette. Bien sûr la question de la dette est essentielle, bien plus
que celle d’un déficit circonstanciel, car
ce sont les déficits chroniques qui aboutissent à des situations d’endettement
insoutenables. Cela étant, plusieurs
questions seraient alors soulevées. Quid
en premier lieu des exigences de coordination pour éviter les distorsions dans
le policy mix ? Quid ensuite de la prise
en compte des engagements implicites
ou contingents ? En théorie ils sont
incorporés au niveau des soldes futurs
dans la contrainte de solvabilité intertemporelle qui égalise la dette et la
valeur présente des soldes futurs.
Calculer les déficits futurs compatibles
avec un certain niveau de dette ne va
pas de soi. Elle suppose le recours à des
projections à long terme qui ne sont en
rien évidentes : peut-on connaître les
engagements contingents ? la croissance
à long terme, les taux d’intérêt futurs,
les dépenses futures ? La mise en œuvre
touche à l’impossible.
Face aux dérives et suite à de vifs débats,
la Commission européenne a proposé
en septembre 2004 un certain nombre
d’ajustements :
– accorder plus d’importance à la soutenabilité de la dette dans l’évaluation des
situations budgétaires ;
LA RÉFORME DE MARS 2005
– introduire plus de souplesse dans le
dispositif avec notamment la prise en
compte des situations spécifiques de chaque pays dans la définition des objectifs de
déficit à moyen terme, et avec une approche moins mécanique de la conjoncture
par la prise en considération des périodes
de croissance faible (et pas seulement des
épisodes de contraction de l’activité) dans
la mise en œuvre des procédures pour
déficit excessif ;
L
– renforcer la prévention, dégager des
excédents en période de forte activité.
L’abandon des 3 % en faveur d’indicateurs de qualité des institutions budgétaires, de la mise en œuvre des réformes
des pensions et du marché du travail a
été également proposée (Eichengreen).
Outre la difficulté pratique, ce serait là
procéder à un arbitrage très défavorable
à la simplicité du dispositif.
e Pacte de stabilité et de croissance
a été modifié en profondeur en
mars dernier.
Le bilan du Pacte était mitigé. Le déficit
moyen dans la zone a atteint 2,7 % en
2004 contre 1,7 % en moyenne entre
1997 et 2001 (hors effet des ventes de
licences UMTS en 2000), la Grèce, la
France et l’Allemagne ont vu leur défi-
La réforme adoptée lors du sommet
européen des 22 et 23 mars derniers va
bien au-delà de ces propositions.
Les critères de 3 % de déficit et de 60 %
de dette sont réaffirmés, mais ils n’apparaissent de fait plus du tout contrai-
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4DOSSIER
4LIVRES ET IDÉES
FINANCES PUBLIQUES
gnants. Le Conseil a procédé à une distinction entre pays à faible dette ou à
potentiel de croissance élevé et pays fortement endettés ou à croissance potentielle faible. Pour les premiers, l’objectif
de déficit à moyen terme peut atteindre
un point de PIB, pour les seconds le
solde doit être nul ou excédentaire.
Cette modification est justifiée, il est normal d’être moins contraignant pour les
pays dont la situation budgétaire présente (dette faible) ou potentielle (croissance tendancielle forte) est rassurante.
De surcroît les pays d’Europe centrale
dont les besoins de rattrapage en infrastructures publiques sont patents présentent, comme on l’a déjà souligné, de
telles caractéristiques.
« facteur pertinent » représente environ
5 % du PIB dans la zone euro ! Il est en
outre fait mention des « efforts budgétaires nécessaires au développement ou au
maintien de la solidarité internationale
et des objectifs de politiques européennes, en particulier de l’unification de
l’Europe ». Ainsi la France – qui demandait la prise en compte des dépenses
en faveur du développement, et éventuellement des dépenses militaires – et
l’Allemagne – qui demandait qu’il soit
tenu compte des coûts de la réunification et des contributions nettes au
budget européen – ont obtenu satisfaction. Ceci est censé autoriser le franchissement « temporaire » et dans « une
certaine limite » du critère des 3 %.
Le coût des réformes structurelles est
également pris en considération. En fait,
ces réformes qui peuvent avoir un effet
bénéfique pour la croissance potentielle
et les comptes publics à long terme peuvent être coûteuses à court terme et
donc susceptibles de conduire à une
dérive par rapport aux critères du Pacte.
L’absence de souplesse dans ce domaine
comportait en fait le risque d’inciter les
pays concernés à repousser la mise en
œuvre des réformes. Un accent particulier est mis sur la réforme des systèmes
de retraite publics : les dépenses occasionnées pouvant être déduites de façon
dégressive sur cinq ans à compter de
leur mise en œuvre.
Les délais prévus pour la correction des
déficits ont été allongés de un à deux
ans et même au-delà si la croissance
apparaît plus défavorable que prévu. La
période qui sépare la notification et la
décision relatives à l’existence d’un déficit excessif passe de trois à quatre mois,
le pays concerné dispose de six mois au
lieu de quatre pour prendre des mesures correctives.
La principale modification consiste en un
assouplissement du critère de 3 %. Avant
la réforme, le dépassement n’était autorisé que dans des circonstances exceptionnelles (la procédure pour déficit
excessif était suspendue si le PIB reculait
d’au moins 2 % et après délibération du
Conseil dans le cas d’un recul compris
entre 0,75 % et 2 %). La réforme a profondément dilué ce critère, d’abord en
élargissant la notion de circonstances
exceptionnelles aux périodes de stagnation de l’activité, ensuite la Commission
devra « évaluer si le déficit est supérieur
à l’investissement public », et « tenir
compte de tous les autres facteurs pertinents », cela faisant référence à l’agenda
de Lisbonne et donc aux dépenses de
recherche et développement ainsi que
d’éducation. À titre d’illustration, ce seul
20
Sociétal N° 49
g
3e trimestre 2005
Si la souplesse est accrue, la simplicité
est loin d’y trouver son compte. L’arbitrage simplicité/flexibilité a été profondément modifié au détriment de la
première. Si trop de simplicité peut aller
de pair avec trop de rigidité et donc avec
peu de crédibilité, l’excès de flexibilité a
le même résultat.
Contrairement aux recommandations
de la Commission, aucune modification
conséquente n’a été faite sur le plan de
l’endettement public, le Conseil s’étant
borné à souligner que les pays à forte
dette devraient faire plus d’efforts pour
la réduire.
Le Conseil enfin a précisé que l’effort
d’ajustement destiné à atteindre les
objectifs à moyen terme devrait être
plus marqué dans les périodes de forte
croissance (croissance supérieure au
potentiel), mais cela apparaît comme un
vœu pieux. Aucun dispositif contraignant
n’est en effet prévu pour conduire les
États à adopter un comportement vertueux en période de bonne conjoncture.
Un ajustement du Pacte était nécessaire,
la réforme adoptée ne s’attaque pas à la
faiblesse essentielle du Pacte : le manque
de réactivité des politiques budgétaires
dans les phases haussières du cycle. Dans
sa version antérieure, le Pacte était
asymétrique avec un dispositif contraignant en cas de dérive (le plafond de 3 %
assorti de la procédure pouvant déboucher sur des sanctions) et aucune incitation à se comporter de façon vertueuse
en phase de bonne conjoncture. En fait, le
Pacte est devenu symétrique : les sanctions sont devenues des plus hypothétiques et les modifications proposées pour
la conduite des politiques en phase de
croissance restent des plus floues et relèvent du wishful thinking. Il est vraisemblable que l’adoption (ou non) d’une
procédure pour déficit excessif sera
issue non de considérations économiques mais de négociations politiques.
En définitive, avec le nouveau Pacte, l’incitation à dégager des marges de
manœuvre est encore plus faible, tant en
raison de son assouplissement considérable qu’en raison de l’absence d’incitations concrètes à dégager des marges de
manœuvre lorsque la conjoncture le
permet. Les tentations de laxisme préélectoral sont ainsi accrues. Déjà, l’Italie a
mis en place des réductions d’impôts
pour les ménages à hauteur de 0,4 point
de PIB, tandis qu’en Allemagne, les mesures récentes en faveur des secteurs des
transports et de l’énergie et la réduction
de l’impôt sur les sociétés représentent
0,5 point de PIB. Le risque est de voir
renforcées les considérations de court
terme avec des déficits utilisés pour couvrir des dépenses courantes accrues et
non des dépenses d’investissement qui
accroîtraient la croissance potentielle
justifiant ainsi un transfert de charges
sur les générations futures.
CONCLUSION
L
a croissance faible qui a conduit
à maintenir un déficit de production, le niveau de chômage qui pèse sur
la formation des salaires, la force de
l’euro… écartent le risque inflationniste. Ces éléments joints à l’abondance
de la liquidité maintiennent les taux à
un niveau historiquement bas. La pré-
LE PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE
sence de l’euro a de surcroît rendu les
écarts de taux d’intérêt quasi symboliques à l’intérieur de l’UEM. Le traitement des dettes publiques dans le
dispositif du comité de Bâle (pondération à 0 % pour les États de l’OCDE
dans Bâle 1) tout comme peut-être la
croyance dans le fait qu’un débiteur
souverain défaillant serait sauvé jouent
vraisemblablement dans le même sens.
La réforme du PSC permet d’aller bien
au-delà du simple jeu des stabilisateurs
automatiques et ce même si l’on déduit
les investissements publics du calcul des
soldes structurels. Certains pays risquent-ils d’être tentés de revenir aux
errements du bon vieux temps et de
mener des politiques discrétionnaires
avérées alors que celles-ci ne peuvent
trouver de justifications que dans des
circonstances véritablement exceptionnelles ? Si tel était le cas, les autorités
monétaires pourraient difficilement éviter de réagir.
On peut penser que le caractère disciplinant des marchés pourrait réapparaître
avec une prise en compte plus marquée
de la diversité des risques (ce que font
les agences de rating) avec un élargissement des écarts de taux.
Bernoth et al. (2004) ont récemment
quantifié l’ampleur des facteurs susceptibles d’influencer les écarts au sein de la
zone euro entre les rendements à
l’émission de titres de débiteurs souverains et celui des bunds allemands. Une
bonne conjoncture relativement à celle de
l’Allemagne réduit les écarts. Le risque de
liquidité (part de la dette d’un pays donné
par rapport à la dette publique totale de la
zone) joue naturellement en sens inverse.
L’apparition de l’euro a considérablement
réduit les écarts, ce qui est logique suite à
une intégration financière accrue. Avant le
lancement de la monnaie unique, un écart
de déficit d’un point de PIB par rapport à
l’Allemagne avait un coût de 3,39 points
de base, lequel passait à 5,33 points de
base pour un écart s’élevant à 2 points de
PIB. Cet effet s’est considérablement
émoussé avec l’euro. Cela est cohérent
avec l’idée que les marchés anticipent un
soutien dans le cas où la détérioration
de l’endettement n’est pas extrême.
En revanche, la charge du service de
la dette (charge de la dette/ recettes fiscales) a un effet plus marqué depuis
l’adoption de l’euro. Un écart de 5 % par
rapport à l’Allemagne avait une incidence
de 4,43 points de base avant 1998, mais
d’environ 14 points de base depuis lors.
Il serait toutefois dangereux de ne
compter que sur les marchés. Ceux-ci
n’apportent qu’un jugement imparfait et
sont sujets à des comportements irrationnels. La question de l’asymétrie
d’information et des comportements
mimétiques qui l’accompagnent, délais de
réaction, volatilité, non-linéarités…, tout
ceci milite pour le maintien de règles.
Que peut-on envisager aujourd’hui ?
Si l’on est pessimiste, la « fatigue » dans
la mise en œuvre des réformes structurelles – attestée par exemple par le rejet
en France du projet de traité constitutionnel – aurait, si elle devait perdurer,
des conséquences dommageables pour
la croissance, ce qui ne pourrait que
favoriser les dérapages budgétaires dans
l’avenir.
A contrario, si l’on est optimiste, on peut
espérer que la latitude plus grande dont
bénéficient désormais les autorités budgétaires pourra être mise à profit pour
faciliter la mise en œuvre des réformes
qui, si elles sont nécessaires pour redresser la croissance potentielle « à terme »,
présentent des coûts immédiats. n
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