Dix éleveurs en transhumance - Accueil Traditions en Aubrac

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Dix éleveurs en transhumance - Accueil Traditions en Aubrac
Dix éleveurs en transhumance
Christian Bonal à St Côme d’Olt
Philippe Vieillescazes à Bozouls
«Même sans la
fête nous serions
montés à pied».
Comme elle le
fait depuis plusieurs décennies,
la famille Bonal
accompagne une
quarantaine de
ses vaches Aubrac, environ la
moitié, en estives.
«Mon grand-père
a racheté la ferme que nous exploitons à St Côme d’Olt,
en 1939 juste avant la guerre pour préserver ses
enfants car la famille vivait alors à Paris», raconte
Christian Bonal. «Il y avait déjà des Aubrac qui transhumaient au Bartas en estives collectives». Depuis
1991, la famille Bonal a acheté la montagne Fontanilles, à 20 km de la ferme et a abandonné le camion
pour transhumer à pied. «Nous partons à 7 h du matin
pour atteindre Aubrac vers 11 h puis nous marchons
encore trois quart d’heure avant d’atteindre la montagne près du lac des Moines», explique Christian.
Depuis 1997, la famille Bonal s’associe à la Fête. Aidée
d’une douzaine de personnes, et d’autres habitués du
rendez-vous, elle apprécie la convivialité : «Pour certains, ce sont leurs vacances. Ils sont éleveurs de
canards, carrossier ou sage-femme !» raconte Christian, ravi de voir ce mélange de genres et de gens autour
de cette Fête. «A la fin, nous pique-niquons tous ensemble sur la montagne et chacun amène quelque chose».
Une douzaine de passionnés vient ainsi apporter un
coup de main pour les décorations, les fleurs, les houx
installés sur les jougs individuels des animaux dès 5 h
le jour du départ. Les enfants de Christian participent
eux aussi à la fête depuis tout petit. Aujourd’hui avec
une dizaine de copains de classe, ils accompagnent
volontiers le troupeau et notamment la vache Mélodie
qui transhume depuis 1996 !
Philippe Vieillescazes entre dans
l’aventure de la
Fête de la transhumance. Jusqu’alors habitué à descendre son troupeau à pied mais à
le monter en
camion, il a choisi
cette année de se
rallier à la Fête à
Aubrac. Sa famille
n’est pas novice
dans la transhumance. Depuis 92 ans, le troupeau de
Cédals rejoint la montagne louée à Plèches près de Nasbinals. Quand il s’est installé avec ses parents en 1991,
Philippe s’est tourné vers le croisé Charolais-Aubrac
pour conforter le revenu de l’exploitation et créer de
nouveaux débouchés. Aujourd’hui, il revient à la race
Aubrac pure qui correspond davantage à son organisation de travail vers un objectif 100% Aubrac. C’est lors
du concours cantonal de la race à Laissac que Serge
Niel a convaincu Philippe de faire la transhumance :
«C’est la première fois, on verra bien mais j’ai une
équipe autour de moi très motivée, de voisins, de techniciens et d’éleveurs limousins ! Et puis j’aime ça !»
Sélectionneur, Philippe espère ainsi faire connaître son
jeune troupeau en race pure, inscrit au Herd Book, au
contrôle de performance. La préparation n’est pas évidente, la famille s’est mobilisée pour réaliser les décorations, le Père-Noël a apporté quelques cloches et clapes ! Philippe a prévu de faire des essayages avant le
grand jour pour habituer les vaches à porter les jougs
individuels. Il mettra aussi le camion des veaux devant
le troupeau pour lancer la marche. Car le voyage sera
long, en partant à 4 h du matin pour une arrivée à
Aubrac prévue à 13 h, puis encore 4 h de marche jusqu’à l’estive. «Avec les conseils des autres éleveurs,
mon équipe et notre motivation, on veut réussir la fête».
Serge Niel à St Chély d’Aubrac
Serge est la quatrième génération
d’éleveur transhumant dans la
famille Niel. La
ferme d’Aulos,
était une ancienne
dépendance du
Monastère d’Aubrac, par son
arrière grand-père.
Passionnée
et
amoureuse de la
race, cette famille
est très attachée à l’Aubrac, «faite pour vivre ici».
«Notre système d’élevage est basé sur la transhumance.
La rusticité de la race lui permet de s’adapter aux
hivers rudes en altitude (1100 m). Ses bons aplombs
l’aident à alterner entre sa situation hivernale en stalles courtes et travées, la marche jusqu’à l’estive et l’été
sur la montagne ! Sans oublier son régime alimentaire
en accordéon qui lui permet de vivre sur ses réserves et
de nourrir son veau l’hiver», explique le président de
Traditions en Aubrac. Depuis 1939, le troupeau des
Niel transhume au Jas de Patras à 14 km de la ferme.
«Nous avons toujours transhumé à pied, à travers bois.
Depuis le retour de la fête à Aubrac, le troupeau dans
son entier, avec les veaux et le taureau, fait un petit
détour !», poursuit Serge. Fière de montrer son troupeau, la famille Niel garnit toutes ses vaches. Tout le
monde contribue aux décorations, les filles de Serge ont
déjà confectionné leur bâton de marche ! Avec 11 houx
portant chacun 50 fleurs, le travail peut être long mais
«on a hâte de préparer la fête», commente leur maman.
Le troupeau démarre à 10 h pour rejoindre Aubrac vers
12 h puis l’estive à 15 h. Véritable rassemblement de la
famille, la journée se veut conviviale autour de la soupe
au fromage le matin avec les attelages qui accompagnent les troupeaux. «Après un hiver long, la transhumance marque pour nous, le changement de saison».
16 - LA VOLONTÉ PAYSANNE - 14 MAI 2009
Jean-Yves Rieucau à Bozouls
Dans la famille
Rieucau, la transhumance est profondément inscrite
dans l’histoire.
Depuis 1881 et son
arrivée sur la ferme
de Séveyrac, elle
élève la même souche d’animaux en
race pure Aubrac,
dont les premières
traces datent du
XIIème siècle. JeanYves Rieucau, 5ème exploitant de père en fils, explique
ce lien historique : «Notre ferme, ancienne grange de
l’Abbaye de Bonneval, se situe sur le chemin de la
transhumance. Elle fut longtemps une étape. Avant la
Révolution, le troupeau transhumait près de Laguiole
puis près de Curières. Quand notre famille a acheté la
ferme, nous fonctionnions en système d’estives avant de
devenir propriétaire de Regimbal bas tout près d’Aubrac». Fier de cette longue tradition familiale de transhumance, Jean-Yves Rieucau poursuit ce lien au territoire, à la tradition et à la race pure défendue par son
père Joseph, disparu cet automne et à qui il rend hommage : «Je suis très attaché à la race Aubrac, j’ai toujours baigné dans ce système de transhumance, c’est
ancré dans nos gênes. La Fête de la transhumance fait
connaître la réalité économique de nos exploitations et
met en avant l’image de la race, je n’imagine pas de
transhumance de nos vaches sans cornes !». Le troupeau des Rieucau est donc habitué à parcourir les 50 km
qui les séparent de l’estive. A partir de 2 h du matin, l’équipe d’une quinzaine de personnes, prépare les animaux avec cloches, clapes pour un départ à la pointe du
jour et une arrivée à Aubrac à 17 h. «Cette journée est
un grand voyage pour nos animaux comme pour nous,
c’est un repère dans l’année et dans notre histoire».
Christian Puech à St Julien de Rodelle
La famille Puech
a fêté ses 60 ans de
transhumance il y
a deux ans. «C’est
mon père qui au
début de sa carrière a commencé
à transhumer le
troupeau pour
alléger le travail
sur la ferme et entrer le fourrage
pour
l’hiver»,
raconte Christian.
Lui aussi attaché à la race Aubrac, l’éleveur poursuit la
tradition qu’il espère transmettre à ses deux fils qui suivent des études agricoles. La famille Puech réalise les
60 km qui la séparent de l’estive qu’elle loue aux Nègres à côté de Nasbinals en deux jours. «Nous transhumons depuis plus de 35 ans au même endroit. Nous trions les animaux le vendredi, on leur met les cloches,
puis on poursuit l’installation des houx, des fleurs
confectionnées par des groupes de personnes âgées du
coin et des jougs le samedi matin avant de partir». La
vingtaine de personnes accompagnant le troupeau,
essentiellement des amis proches et la famille, partage
un casse-croûte qu’elle a préparé notamment en réhabilitant le four à pain de la ferme. «J’apprécie le côté
convivial de la fête, c’est pour nous un rassemblement
familial» explique Christian. En fin de journée, le troupeau fait une halte au Pouget près de Salgues dans une
parcelle prêtée par un éleveur. Puis le troupeau reprend
sa marche vers Aubrac inaugurant le défilé vers 10h30.
«Mon père et moi avons passé quelques fois la nuit
avec des amis auprès des bêtes, celà fait de bons souvenirs», se rappelle Christian qui évoque aussi d’autres
moments d’émotion comme la cloche offerte par ses
amis et gravée pour ses 40 ans, preuve de l’attachement
familial à la transhumance. «Ce voyage est un peu
stressant mais on se prend au jeu en voyant le plaisir
des gens».

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