L`EPF du Grand Paris sera-t-il si grand

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L`EPF du Grand Paris sera-t-il si grand
A CT I O N F O N C I È R E
Île-de-France
L’EPF du Grand Paris
sera-t-il si grand ?
Depuis le 1er janvier, la
région capitale dispose
d’un « Grand établissement
public foncier » d’État,
résultat du regroupement
des trois EPF locaux
(départementaux) et
de l’EPF régional qui
existaient précédemment.
Ce nouvel outil d’action
foncière, sera-t-il à
l’échelle des ambitions du
Grand Paris ?
ouveau réseau de métro régional, création de la « métropole
du Grand Paris », candidature
aux Jeux Olympiques de 2024 et
à l’Exposition universelle de 2025, la région
capitale se situe à un moment historique de
son développement. À l’heure de l’acte III de
la décentralisation, c’est l’État qui signe son
retour en fixant un nouveau design institutionnel, en impulsant les candidatures internationales et en créant de nouveaux instruments qui aménageront l’Île-de-France pour
les vingt prochaines années. Ces instruments
doivent relever le défi d’un aménagement
aux jeux d’acteurs et aux financements complexes avec l’objectif de maintenir l’Île-deFrance dans la compétition métropolitaine
mondiale. L’État a ainsi conçu la « Société
du Grand Paris », pilote du Grand Paris
Express, il a transformé l’ancienne Agence
foncière et technique de la région parisienne
(AFTRP) en « Grand Paris Aménagement »
et il a créé le « Grand établissement public
foncier Île-de-France ».
N
De l’EPFIF au Grand EPF
Le 1er janvier dernier, dix ans après sa création, l’Établissement public foncier d’Îlede-France (EPFIF)1 devenait un opérateur
intervenant effectivement sur l’ensemble de
l’Île-de-France. Entre 2006 et 2016, quatre
Établissements publics fonciers (EPF) d’État
opéraient en effet sur le territoire francilien :
l’EPF des Yvelines, l’EPF des Hauts-de-Seine
l’EPF du Val d’Oise et l’EPF d’Île-de-France.
Leur action concernait : l’anticipation et la
veille foncière ; la négociation et l’utilisation
des outils juridiques (expropriation et préemption) pour assurer le portage foncier. Leur
objectif : accroître l’offre de logements abordables et de terrains destinés à l’activité économique afin de détendre le marché foncier.
William Le Goff
Professeur-associé (urbanisme et aménagement)
à Paris IV-Sorbonne
Romain Desforges
Lab’Urba, École d’urbanisme de Paris
septembre-octobre 2016 • n° 13
1 L’EPFIF a été créé par le décret n° 2006-1140 du
13 septembre 2006 modifié par le décret n° 2009-1542 du
11 décembre 2009.
La coexistence de quatre EPF s’expliquait
par une division géographique et surtout
politique où les départements de l’ouest francilien désiraient mener leur propre politique
foncière. Ainsi, ils gardaient le contrôle du
financement de leur EPF, à savoir la taxe spéciale d’équipement (TSE) 2 dont le produit
bénéficiait à leur territoire.
Confrontée à l’Acte III de la décentralisation, la fusion des quatre EPF franciliens a
connu bien des remous 3. C’est l’article 13 bis
de la loi Maptam qui a prévu leur regroupement en précisant que « la Région Île-deFrance compte un seul Établissement public foncier d’État ».
Cette volonté s’inscrit dans un double
mouvement : création d’un outil opérationnel cohérent à l’échelle de l’Île-de-France
d’une part et, péréquation financière les territoires franciliens d’autre part.
Un rapport de préfiguration 4 – en vue de
la création d’un Établissement public foncier
unique en Île-de-France – a ainsi été confié en
septembre 2013 par Cécile Duflot, ministre
du Logement, à Gilles Bouvelot, directeur
de l’EPFIF. Ce rapport remis en mai 2014 à
Sylvia Pinel, nouvellement nommée ministre
du Logement, constitue le document de préfiguration du nouvel EPF. C’est un décret du
2 mai 2015 qui acte sa création. D’un point
de vue juridique, cela revient à ce que l’EPFIF
absorbe les trois EPF départementaux.
Régi par les règles d’un urbanisme décentralisé, le Grand EPF est défini comme « un
outil partenarial, au service des politiques w
2 La taxe spéciale d’équipement (TSE) est une taxe additionnelle aux quatre taxes directes locales : taxes foncières
sur les propriétés bâties et non bâties, taxe d’habitation et
contribution foncière des entreprises (CFE). Son montant
a été fixé à 15 €/an/habitant soit près de 177 millions d’euros par an comme ressources fiscales de l’EPF.
3 « Île-de-France : l’Établissement public foncier unique
sera créé avant la fin de l’année », Localtis, 18 juin 2014.
4 Gilles Bouvelot, « Pour un choc foncier durable, un
grand établissement public foncier d’échelle régionale »,
rapport de préfiguration, 31 mars 2014.
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