Chronique de Elisabeth Dath sur RTL

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Chronique de Elisabeth Dath sur RTL
Affaire Mohamed Benchicou
Le règne de l’arbitraire
Chronique de Elisabeth Dath sur RTL
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Chronique de Elisabeth Dath sur RTL
© RTL | avril 2005
Elisabeth DATH
Nous partons ce matin pour l'Algérie. Un an après son élection, le président Bouteflika poursuit sans
faiblir, sa mise au pas de la société. Il a un boulevard devant lui et ceux qui avaient misé sur sa défaite en
avril 2004, en sont aujourd'hui pour leurs frais. Après sa réélection, avec la bagatelle de 85% des suffrages,
on avait dit que le risque était qu'il veuille concentrer tous les pouvoirs entre ses mains. Malheureusement,
on ne s'était pas trompé. Les premières victimes sont les journalistes, anciens alliés objectifs, si on peut
dire, du pouvoir pendant la sale guerre. Ils ont payé de leur sang la condamnation du terrorisme. Mais
depuis que la situation s'est normalisée, ils ont plongé leurs regards ailleurs, et notamment dans la gestion
des affaires publiques. Pour avoir franchi cette ligne rouge, 5 journalistes du journal "Le Matin" viennent
d'être condamnés à des peines de prison ferme. Leur patron est incarcéré depuis 10 mois! et le quotidien
vendu aux enchères. Cette presse algérienne, qui était une des plus incisives du monde arabe, n'ose plus
écrire le mot de trop, par crainte des représailles.
Le FLN est à son tour rentré dans le rang, après avoir tourné le dos à Bouteflika lors de la dernière présidentielle.
Les partisans de son ancien premier ministre, n'ont eu d'autre choix que de se démettre ou se soumettre.
L'opposition est muette, elle ne s'est toujours pas remise de sa défaite. L'armée ne fait plus contrepoids, elle est
sortie du champ. L'union générale des travailleurs algériens a jeté l'éponge, les syndicats sont interdits de
manifestations, la moindre émeute se termine par des arrestations et des condamnations, lourdes. Alors
évidemment, quand vous avez verrouillé à ce point là, tous les espaces de liberté, il ne reste plus beaucoup de
place pour un contre pouvoir.
Et les réformes où en sont elles ?
Mais Bouteflika n'en démordra pas. Il ne s'agit que de dérives individuelles, et non institutionnelles. En clair : l'État
est responsable mais pas coupable.
Site perso de Mohamed ZIANE-KHODJA – www.ziane-online.com
Pas loin. On a vu le résultat de celle du code de la famille tant attendue, et si décevante à l'arrivée, puisque la
femme reste sous la tutelle de l'homme. Les réformes de la justice et du système bancaire sont en panne. Ce qui
freine les investisseurs étrangers, pourtant appelés à la rescousse tant les chantiers sont énormes. Et au milieu de
tout cela, la vie quotidienne de l'Algérien ne s'améliore pas. Pire, l'emploi précaire se généralise en dépit d'une
belle croissance économique. Il ne demande pourtant pas à leur président de sortir un lapin de son chapeau, juste
de pouvoir partager un peu de la cagnotte. Le pays n'a jamais été aussi riche. Il a réalisé près de 10 milliards de
dollars de recettes pétrolières, au premier trimestre 2005, 37,5 % de plus que l'an dernier. Mais pour Bouteflika, la
grande affaire aujourd'hui n'est pas là. Ce qu'il veut au plus vite, c'est son référendum sur la loi d'amnistie générale,
qui inclut les islamistes, mais aussi les forces de sécurité. Un rapport officiel vient pourtant de reconnaître 6.146
cas de disparitions dues à des agents de l'état.