se mettre au vert

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On sort
architecture
Texte // Olivier Gurtner
Se mettre au vert
Focus sur l’architecture, mais cette fois-ci du paysage. Dans le cadre du projet de liaison RER
Cornavin–Eaux-Vives–Annemasse (CEVA), une voie verte va recouvrir l’ensemble du tronçon ChêneBourg–Eaux-Vives. Un trait d’union entre centre et périphérie, ville et campagne, Suisse et France.
Rencontre avec son concepteur, l’architecte-paysagiste Gilbert Henchoz, qui compte parmi ses
réalisations la place de la Navigation ou encore celle de la Mairie à Plan-Les-Ouates. Ce créatif en
cravate et jeans a la tête sur les épaules mais les idées plein la tête.
Quels sont les défis de la ville du XXIème siècle?
On se rend compte depuis quelques décennies
que les espaces ouverts –urbain en ville et verts
en campagne– sont devenus prioritaires. En effet,
ils permettent de tisser des liens indispensables
entre le bâti et non-bâti. Même les collectivités
privées le réalisent. Pour résumer, le seul espace
que les gens peuvent investir, c’est celui «entre» les
bâtiments. Il suffit de voyager pour le comprendre.
A New York par exemple, on remarque une
ambiance incroyable dans ces espaces, alors
que les immeubles sont clos et verrouillés. Ces
zones doivent pouvoir être investies; c’est une
question d’équilibre social et de qualité de vie.
Le CEVA a été un sujet très politique. Vous
êtes-vous sentis soutenus ou freinés?
La voie verte est la résultante de plus d’un siècle
et demi de liaison entre territoires (au départ
ferroviaire finalement RER) pour réaliser un
ouvrage d’art exceptionnel en concertation entre
Confédération, Canton, communes et France
voisine. Un tel projet grandit une région. C’est
un outil de communication et un moyen de
développement des savoirs-faire locaux. Il s’agit
d’un dossier complexe, avec des attentes des
communes qu’il faudra discuter avec les CFF et la
Confédération, qui financent le projet en majorité.
Pour répondre précisément, nous sommes appuyés
dans notre démarche de réalisation, et nous
sentons que la population est en attente; de voir ces
gares, cette voie, et ces aménagements paysagers.
D’ailleurs, je trouve que les travaux sont bien gérés,
avec finalement peu de nuisances, ni de pollution.
La voie verte sera un axe de transport, mais aussi
un instrument de cohésion sociale. Comment?
Ce sera un espace et une surface, qui vont permettre
de lier les quartiers entre eux, une sorte de long
bandeau qui parcours le territoire genevois. De
part et d’autre de cet axe, on traverse beaucoup de
communes et plus d’une centaine de propriétés
privées. Comment concilier ces vies communales
et individuelles? Notre parti est de retenir une
approche liée au développement durable, qui
implique, entre autres, la mise en valeur de la faune,
une dimension pérenne, et la mobilité douce (la
circulation piétonnière et cycliste). Concrètement
cela se traduit par des revêtements adaptés, des
bancs, de l’éclairage, et un entretien peu onéreux.
Du côté de la végétation, on l’a d’abord analysée:
pionnière, indigène, propre aux gravats des voies
ferrées. On a proposé de garder ces végétaux dans
le projet, mais avec une touche contemporaine.
Le paysage architectural romand est souvent timoré; il
manque d’artistique. Comment l’expliquer?
La Suisse romande est une des régions qui a été le
moins touchée ces dernières décennies en Europe.
De fait, la qualité intrinsèque du paysage urbain et
naturel existant est formidable. A Lyon, on a créé 20
places en 20 ans, parce qu’il y avait une immense
demande. A Genève, certains aménagements sont
assez simplistes, comme la place Bel-Air. Heureusement, il y a des contre-exemples, notamment
les places Longemalle et Molard, magnifiques.
Globalement, je dirais qu’on vit un renouveau plus
de créativité, de qualité, de diversité de matériaux.
On voit ici une évolution positive des mentalités. |
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