Article_atelier agriculture - institutfrancais

Transcription

Article_atelier agriculture - institutfrancais
Atelier régional « Agriculture, environnement et changement climatique :
Perspective de l’Amérique centrale en vue de la COP21 »
Les 9 et 10 juin 2015, 89 spécialistes centraméricains, français et internationaux se sont
réunis à San José, Costa Rica, dans le cadre d’un atelier régional sur le thème de
l’agriculture et du changement climatique, dans le cadre de la préparation de la
Conférence Paris Climat 2015 (COP21) qui aura lieu fin 2015, afin d’identifier des options
d’atténuation et d’adaptation et de préciser plusieurs thèmes de travail communs.
L’atelier régional « Agriculture, environnement et changement climatique : Perspective de
l’Amérique centrale en vue de la COP21 » était co-organisé par l’Institut français d’Amérique
centrale (IFAC) et le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le
développement (CIRAD), en collaboration étroite avec les Ambassades de la région et l’Institut
interaméricain de coopération pour l’agriculture (IICA). Cet événement a également reçu l’appui de
l’Université du Costa Rica (UCR) et du Conseil agricole centraméricain (CAC), organisation régionale
de l’agriculture au sein du Système d’intégration centraméricain (SICA).
Il s’est tenu au siège de l’IICA et a rassemblé 89 participants, dont 21 spécialistes centraméricains
invités par l’IFAC (délégations de trois à quatre personnes par pays, représentant les ministères de
l’agriculture et/ou de l’environnement, des universités, des associations de producteurs et
organisations de la société civile), ainsi que des experts français (dont Sébastien Treyer, directeur de
programmes à l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI), Bruno
Rapidel, Jean-François Le Coq et Abigaïl Fallot, chercheurs du CIRAD basés au Costa Rica) et
internationaux (dont Julie Lennox, point focal sur le changement climatique au siège sous-régional
de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC)), ainsi que divers
représentants d’organisations locales, régionales et internationales (CAC, Organisation des Nations
Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Centre agronomique tropical de recherche et
d'enseignement supérieur (CATIE), Centre International d’Agriculture Tropicale (CIAT), etc.).
Contexte : Un projet régional sur les stratégies d’atténuation et d’adaptation au changement
climatique dans le secteur agricole
Cette réunion s’inscrit dans le cadre d’un projet régional « Agriculture et changement climatique :
Perspective de l’Amérique centrale en vue de la COP21 », initié et coordonné par l’IFAC et le CIRAD,
avec le soutien de l’Institut français à Paris (Fonds d'Alembert - Sciences & Société). Dans la
perspective de la 21e Conférence des Parties (COP21) à la Convention-cadre des Nations unies sur les
changements climatiques (CCNUCC), ce projet a pour objectifs l’échange, la formalisation et la
diffusion des expériences et initiatives innovantes des pays d’Amérique centrale en matière de
stratégies d’atténuation et d’adaptation au changement climatique dans le secteur agricole, en
permettant aux acteurs centraméricains de proposer des actions et de communiquer sur des bonnes
pratiques validées sur le terrain. Il vise également à présenter les agendas de recherche et les
orientations nationales pour la COP21, identifier des points de convergence entre les pays
centraméricains et promouvoir la coopération régionale dans le domaine.
Dans le cadre de cette initiative, six experts centraméricains (Guatemala, El Salvador, Honduras,
Nicaragua, Costa Rica et Panama) ont été identifiés fin 2014 et désignés comme référents pays pour
le projet. Ils ont participé, sur invitation de l’IFAC et avec l’accompagnement du CIRAD, à la
Conférence internationale sur l’agriculture climato-intelligente (CSA), du 16 au 19 mars 2015 à
Montpellier. Ils ont ensuite organisé au mois de mai, dans les six pays d’Amérique centrale, avec
l’appui du CIRAD et des Ambassades de France, des ateliers nationaux sur la thématique
« agriculture et changement climatique », afin de présenter les résultats de la Conférence de
Montpellier et d’établir l’inventaire des initiatives innovantes dans chacun de ces pays. Dans ce
contexte, l’atelier régional avait notamment pour objectif de partager ces options techniques et
politiques identifiées au niveau national, et d’en faire une synthèse prenant en compte les trois
dimensions de l’agriculture climato-intelligente : atténuation, adaptation et sécurité alimentaire.
Déroulement : Une première partie publique suivie de sessions d’échanges et de débats
thématiques
L’atelier régional a été inauguré par Víctor Villalobos, Directeur Général de l’IICA, Jean-Claude Reith,
Directeur de l'IFAC, Flor Elizondo, représentante du Ministère de l’agriculture costaricien, Patricia
Madrigal, Vice-Ministre costaricienne de l’environnement, et Julio Calderón, Secrétaire exécutif du
CAC. L’inauguration a été suivie d’une session publique, retransmise en direct sur Internet par
vidéoconférence et composée de six conférences introductives (Julie Lennox de la CEPAL, Peter
Läderach du CIAT, Edwin Castellanos de l’Université del Valle de Guatemala, Bruno Rapidel du CIRAD,
Manuel Jiménez du CAC et Olivia Gilmore du Département d’Etat américain) relatives aux défis
climatiques mondiaux et centraméricains auxquels est confrontée l’agriculture, ainsi que ses moyens
de réponse.
Un groupe de travail plus restreint (environ 55 personnes) a ensuite poursuivi les discussions sur les
deux demi-journées suivantes, découpées en trois sessions, chacune composées d’un panel de six
participants centraméricains représentant chacun des pays :
-
-
La première session consistait à présenter les contextes et résultats des six ateliers
nationaux ;
La seconde session, introduite par une conférence de Cristina Chinchilla, chercheuse à
l’Université du Costa Rica, visait à débattre des options techniques et expériences concrètes
de l’agriculture face au changement climatique ;
La troisième session, introduite par une conférence de Nelson Cuellar, directeur adjoint de la
Fondation PRISMA (El Salvador), concernait les options politiques, institutionnelles et de
financement.
L’atelier s’est conclu par une demi-journée de synthèse, introduite par une conférence de Sébastien
Treyer (expert de l’IDDRI) sur l’état actuel des négociations climatiques et la place de l’agriculture
dans les contributions nationales (INDCs). La session plénière au terme du programme a permis
d’identifier des thèmes, approches et agenda de travail communs. L’atelier s’est clôturé par les
interventions de Fabrice Vaillant, correspondant du CIRAD pour l’Amérique centrale, Salvador
Fernández, Directeur de coopération technique de l’IICA et Jean-Luc Belmonte, Directeur adjoint de
l’IFAC.
Résultats : Vers un rôle significatif de l’Amérique centrale dans la définition d’options techniques
et politiques en réponse au changement climatique
L'atelier régional a permis de confirmer la situation particulière de la région où le problème du
changement climatique se pose d'abord en termes de pertes et dommages imputables à des
évènements climatiques extrêmes (Lennox). La reconnaissance et l'anticipation de ces pertes et
dommages en lien avec les scénarios de changement climatique (Läderach) constitue la base de
l'adaptation au changement climatique dans la région (Castellanos), adaptation sans laquelle les
efforts d'atténuation sont difficilement envisageables et ne seraient pas durables (Rapidel).
Une autre spécificité de la région concerne l'importance des écosystèmes pour l'adaptation au
changement climatique (Treyer). Avec la richesse de son expérience pour mieux assurer la fourniture
de services écosystémiques, l'Amérique centrale peut donc jouer un rôle moteur (Gilmore) dans la
définition, pour l'agriculture et plus largement le secteur des terres, d'options techniques et
politiques en réponse au changement climatique.
Quelles options techniques ?
Différentes options techniques du secteur agricole centroaméricain, pour la réduction des émissions
de gaz à effet de serre (GES), l’adaptation au changement climatique et la sécurité alimentaire, ont
été présentées et débattues. Ces options relèvent surtout de l’agroécologie, l’agroforesterie et du
sylvopastoralisme, considérés à l'échelle du territoire. Elles concernent particulièrement :
-
les flux d’information aux producteurs (pour l'amélioration de bonnes pratiques) et la
systématisation d'expériences ;
la restauration de la fertilité des sols ;
la captation d’eau de pluie ;
l’éducation formelle ;
les systèmes d’alerte précoce (SAP) fondés sur la météorologie ;
les engrais à diffusion lente ;
les aliments pour bétail à faible empreinte carbone.
En particulier, l’agroécologie représente une série d'options d’agriculture climato-intelligente déjà
mises en œuvre sur des centaines de milliers d’hectares, ayant fait leurs preuves en termes
d’atténuation et, dans une moindre mesure, d’adaptation. Afin de préciser et consolider ces apports
et mieux affronter les différents risques auxquels est confrontée l'agriculture centroaméricaine,
notamment de maladies (rouille du café par exemple), les systèmes de surveillance de ces risques et
l’adaptation de méthodes ou pratiques climato-intelligentes à différentes échelles, apparaissent
comme fondamentaux pour la région. Enfin, il serait utile de proposer une modification des modèles
de consommation humaine (alimentation moins carnée), d’agroécologie originales, mises en œuvre
et validées sur le long terme dans la région, et d’assurer davantage la diffusion de bonnes pratiques
agricoles.
Quelles options politiques ?
Les options politiques identifiées au niveau centraméricain visent la mise en œuvre, la pérennisation
et la diffusion de :
-
-
cadres intégratifs pour davantage de cohérence, entre atténuation et adaptation, entre les
niveaux nationaux et régional, et pour l'intégration des co-bénéfices ou bénéfices croisés de
mesures particulières ;
l’approche territoriale (exemple : El Salvador) et l’approche intégrale (exemple : Guatemala) ;
expériences phares impulsées par certains secteurs en pointe (exemple : NAMA café au
Costa Rica) ;
autres expériences encore à systématiser telles que les crédits à taux zéro, les assurances
agricoles, d’autres incitations économiques (payement pour services environnementaux), la
certification des produits, l'évolution de la demande de produits agricoles, l'assistance
technique en appui à la diversification agroécologique.
Face aux barrières constituées par l'instabilité gouvernementale, le manque de transparence et de
sécurisation de l'accès à la terre, ainsi que de ressources financières et d’accès au crédit, différentes
pistes ont été identifiées:
-
-
-
-
au niveau institutionnel :
o renforcer les plateformes pluri-acteurs telles que des organisations locales pour le
développement territorial ;
o élaborer et diffuser des informations concrètes concernant les coûts, l’efficacité et
les impacts attendus de mesures d'atténuation et d'adaptation au changement
climatique;
o développer des espaces d’échange au niveau régional et des partenariats publicprivé ;
aux niveaux informationnel et scientifique :
o définir des systèmes de suivi-évaluation-vérification (MRV) adaptés aux petits
producteurs et des plateformes de coordination des réseaux d’information existants;
au niveau des instruments de politiques publiques:
o évaluer et valoriser l'expérience acquise avec les mesures existant déjà dans certains
secteurs ;
o développer des mesures politiques différenciées et appréhender les interactions
entre instruments existants (« policy-mix ») ;
au niveau du financement :
o développer une force de proposition de projets à financer;
o financer la recherche.
Enfin, dans une perspective de positionnement régional à un niveau politique et institutionnel, les
points communs des pays centraméricains et leurs divergences méritent d'être soulignés :
-
-
Points communs:
o ratification des accords internationaux liés au changement climatique avec des
cadres politiques relativement nouveaux (stratégies nationales par exemple) ;
o transversalisation du changement climatique et son rapprochement avec
l’agriculture ;
o importance de l’adaptation et intérêt pour la sécurité alimentaire ;
o recours limité au financement climatique ;
Divergences ou différences sur:
o l’intérêt politique du thème du changement climatique, la conception du
changement climatique comme une opportunité de développement ;
o le niveau de mise en œuvre des outils existants ;
o l'expérience en matière de constitution de plateformes et associations de
producteurs ou autres acteurs ;
o la participation des gouvernements locaux.
Perspectives : Restitution au niveau latino-américain et Conférence Paris Climat 2015
Les interventions de haut niveau technique et institutionnel, le partage d’expériences et la qualité
des échanges ont permis d’atteindre les objectifs escomptés pour cette réunion. Les résultats des six
ateliers nationaux et de l’atelier régional donneront lieu à une synthèse qui sera éditée et publiée par
l’IFAC, le CIRAD et l’IICA, afin d’être diffusée auprès des acteurs du secteur et des négociateurs de la
COP21. Une présentation de cette synthèse est envisagée lors d’une réunion de restitution latinoaméricaine organisée par la coopération française à la CEPAL au mois de septembre, à Santiago du
Chili, ainsi que dans le cadre d’un « side-event » qui serait organisé par un partenaire accrédité pour
cela durant la Conférence Paris Climat 2015.