Droit fiscal : 1. Abus de droit et holding patrimonial luxembourgeois

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Droit fiscal : 1. Abus de droit et holding patrimonial luxembourgeois
N° 23 – Novembre 2014
Droit fiscal :
1.
2.
3.
4.
5.
Abus de droit et holding patrimonial luxembourgeois
Régime mère-fille
Intégration fiscale horizontale
TVA sur prestations de services rendues par un siège à sa
succursale
Transfert de déficit d’un holding pur
Droit des affaires :
1.
2.
3.
Respect de l’intérêt social
Nullité du contrat conclu par une société en formation
Réforme des baux commerciaux : décret d’application
Droit social :
1.
2.
3.
4.
5.
Portée d’une transaction
Recours à l’intérim et notre d’accroissement temporaire
d’activité
Egalité professionnelle au sein d’un Comité de Direction
Confidentialité des documents remis au Comité
d’Entreprise
Résiliation judiciaire du contrat d’un salarié protégé
Droit fiscal / N°23 - Novembre 2014
ABUS
DE
DROIT
ET
HOLDING
PATRIMONIAL LUXEMBOURGEOIS
Le Comité de l’abus de droit fiscal se
prononce sur les éléments caractérisant
la substance économique d’un holding
patrimonial luxembourgeois au regard
de l’abus de droit
En l’espèce, dans le cadre d’une opération de
rachat d’entreprise, un management
package a été mis en place au profit des
managers sortants. A ce titre, l’un des
managers a décidé d’interposer un holding
patrimonial au Luxembourg afin de détenir
et gérer sa participation dans la société ad
hoc.
Cependant, conformément aux dispositions
du pacte d’actionnaires, les titres de la
société ad hoc ne pouvaient être cédés en
dehors des conditions prévues par le pacte
d’actionnaires, privant ainsi le manager
sortant de tout pouvoir de décision.
Suite à la cession des titres de la société ad
hoc, la plus-value a bénéficié du régime
d’exemption des plus-values de cession de
titres de participation, en vigueur au
Luxembourg.
A cet égard, l’Administration fiscale a mis en
œuvre la procédure de l’abus de droit,
considérant que l’interposition de la société
au Luxembourg était constitutive d’un
montage artificiel n’ayant eu d’autre motif
que de bénéficier d’une exemption
d’imposition du gain de cession. En effet,
l’administration a considéré que le holding
luxembourgeois était dénué de véritable
substance économique en raison du défaut
de pouvoir décisionnel sur les cessions des
titres qu’il détenait et de l’absence de siège
social effectif au Luxembourg.
A l’inverse, le Comité saisi de la question a
estimé que le holding était doté d’une
véritable substance économique puisqu’il
disposait d’un patrimoine propre constitué
(i) des titres de participation, (ii) des valeurs
mobilières financées par emprunt puis (iii)
des liquidités obtenues lors de la cession des
titres de la société ad hoc. Par ailleurs, les
titres du holding avaient vocation à être
transmis aux enfants de l’associé-manager,
écartant ainsi tout but exclusivement fiscal.
L’administration n’ayant pas suivi l’avis du
Comité, le juge administratif aura
l’opportunité de préciser sa jurisprudence
sur la notion de substance économique.
(CADF/AC n° 6/2014 Affaire n°2014-13)
REGIME MERE-FILLE
Participation représentant moins de 5%
des droits de vote
Le Conseil d’Etat a validé l’arrêt de la Cour
administrative d’appel de Versailles en date
du 11 septembre 2012 (cf. Newsletter 1 –
Janvier 2013) et considère que les
dispositions de l'article 145 du CGI, relatives
à l’application du régime mère-fille, n'ont ni
pour objet ni pour effet de réserver
l'application du régime aux seules sociétés
détenant des titres de participation
représentant au moins 5 % du capital et 5 %
des droits de vote. Ainsi, selon le Conseil
d’Etat, ces dispositions ne subordonnent
l'application du régime mère-fille qu'à la
seule détention de 5 % du capital de la
société émettrice sans aucune référence aux
droits de vote. Cependant, l’exonération sera
limitée aux seuls dividendes correspondant
aux titres auxquels sont attachés les droits
de vote.
(CE 5 novembre 2014 n° 370650A)
Le prêt de titres et l’engagement de
conservation de deux ans
L’application du régime mère-fille suppose
que la société mère détienne les titres de la
filiale en pleine propriété pendant deux ans.
S’agissant des modalités de cette détention,
le Conseil d’Etat a récemment jugé que le
prêt de titres, ayant les mêmes
conséquences qu’une cession, fait échec à
l’application du régime mère-fille, dès lors
qu’il se traduit par la sortie des titres de
l’actif en contrepartie de l’inscription
comptable d’une créance de valeur identique.
(CE 26 septembre 2014 n°363555)
INTEGRATION FISCALE HORIZONTALE
Prochaine mise en conformité avec le
droit de l’Union Européenne (« UE »)
Actuellement, seule une société française
détenant 95% du capital d’autres sociétés
françaises, peut se constituer redevable de
l’impôt pour le groupe. Dans un arrêt en date
du 12 juin dernier, la Cour de Justice de
l’Union Européenne a reconnu que la loi
néerlandaise était une restriction à la liberté
d’établissement en ce qu’elle n’autorisait pas
la constitution d’un groupe fiscal entre
sociétés sœurs résidentes détenues par une
société mère établie dans l’UE. Le projet de
loi de finances rectificative pour 2014
amenderait le régime afin que puisse être
constitué un groupe d’intégration fiscale
entre sociétés françaises sœurs d’une même
mère établie dans un Etat membre de l’UE.
(Projet de loi de finances rectificative du 12
novembre 2014)
TVA SUR PRESTATIONS D’UN SIEGE A SA
SUCCURSALE
Selon la Cour de Justice de l’Union
Européenne, les prestations de services
fournies par un siège à sa succursale
peuvent, dans certaines hypothèses, être
soumises à la TVA
En l’espèce, les prestations de services
avaient été fournies par un établissement
principal établi aux Etats-Unis à une
succursale membre d’un groupement TVA
en Suède.
La Suède ayant usé de la faculté offerte par
l’article 11 de la Directive TVA de
reconnaître la qualité d’assujetti unique à
l’ensemble du groupement TVA, la Cour a
considéré que les prestations fournies par le
siège devaient être soumises à la TVA.
Ainsi, selon la Cour, l’appartenance d’une
succursale à un groupement TVA au sens de
l’article 11 de la Directive TVA doit primer
sur le principe d’unité de l’assujetti constitué
par un siège et sa succursale.
Il est ainsi possible de s’interroger à l’avenir
sur le régime applicable aux prestations
fournies par un siège français à une
succursale membre d’un groupe TVA à
l’étranger.
(CJUE 17 septembre 2014, affaire 7/13)
TRANSFERT
DES
DEFICITS
D’UN
HOLDING PUR EN CAS DE FUSION
Selon le Conseil d’Etat, le transfert d’un
déficit d’un holding pur absorbé ne peut,
systématiquement,
être
refusé
à
l’absorbante
Par opposition à la doctrine administrative
applicable avant l’entrée en vigueur de la loi
du 16 août 2012, le Conseil d’Etat juge que
les déficits réalisés par les sociétés détenues
par un holding pur peuvent être transférés
dès lors que (i) un holding absorbant détient
les titres de participation dans les sociétés
dont l’activité est à l’origine des déficits
pendant un délai minimum de trois ans, et
(ii) les sociétés à l’origine des déficits
poursuivent leur activité durant ce même
délai. La poursuite de l’activité doit, ainsi,
être appréciée au niveau des sociétés
opérationnelles détenues par le holding pur
absorbé et non au niveau du holding
absorbant.
Dans le cadre du régime actuellement
applicable, cette solution pourrait également
trouver à s’appliquer aux déficits d’un
holding pur absorbé issus de sa participation
au
sein
de
sociétés
fiscalement
transparentes.
(CE, 19 septembre 2014, n°370163)
Droit des affaires / N°23 – Novembre 2014
RESPECT DE L’INTERET SOCIAL
Les actes non conformes à l’intérêt social
peuvent être entachés de nullité
La conformité d’une décision à l’intérêt de la
société est un sujet sensible. En la matière,
un contentieux abondant est intervenu
autour de l’octroi de garanties consenties
par des sociétés civiles. L’arrêt rendu le 23
septembre dernier par la Chambre
commerciale en offre une nouvelle
illustration.
Dans cet arrêt et conformément à une
pratique assez répandue mais souvent
sanctionnée, une société civile immobilière
avait affecté hypothécairement son seul bien
immobilier, en garantie du remboursement
d’un prêt consenti à son gérant associé, pour
les besoins de l’activité commerciale qu’il
exerçait à titre personnel. Dans cette
perspective, les associés avaient décidé, à
l’unanimité, de modifier l’objet social afin d’y
inclure la faculté pour la SCI de se porter
caution solidaire en faveur d’un associé et de
conférer toutes garanties sur les immeubles
sociaux. Le gérant ayant fait l’objet d’une
procédure collective, le prêteur a engagé des
poursuites de saisie immobilière. Ce dernier
s’est vu débouté de ses prétentions par les
juges du fond qui, après avoir constaté que la
SCI ne tirait aucun avantage de son
engagement, ont déclaré nulle la sûreté
souscrite par cette dernière.
La Cour de cassation, conformément à une
position déjà bien établie, a rejeté le pourvoi
en rappelant que la sûreté accordée par une
société civile, en garantie de la dette d’un
associé, n’est pas valide « dès lors qu’étant de
nature à compromettre l’existence même de la
société, elle est contraire à l’intérêt social ».
Elle précise « qu’il en est ainsi même dans le
cas où un tel acte entre dans son objet
statutaire ».
De cette manière, la Cour de cassation
rappelle sans ambigüité la distinction qu’elle
établit entre objet social et intérêt social et
enracine le second comme condition
autonome de validité.
Si c’est avant tout l’atteinte manifeste à
l’intérêt de la société qui est sanctionnée, il
est important de considérer ce dernier dans
toutes les décisions sociales, y compris celles
prises à l’unanimité et quelle que soit la
forme de la société, le risque de nullité et de
mise en jeu de la responsabilité concernant
tous les actes sociaux et pas seulement
l’octroi de garanties.
(Cass. Com., 23 sept. 2014, n° 13-17347)
NULLITE DU CONTRAT CONCLU PAR UNE
SOCIETE EN FORMATION
L’acte mentionnant une société en
formation en qualité de preneur est nul
La prise d’engagements pour le compte
d’une société en formation doit suivre à la
lettre la procédure formaliste prévue par les
textes (art. 1843 du Code civil et L. 210-6 du
Code de commerce). La position constante et
très rigoureuse de la Cour de cassation n’a
jamais été assouplie et s’illustre à nouveau
dans un arrêt du 21 octobre dernier. Dans
cet arrêt, la haute juridiction s’est prononcée
sur la validité d’un acte conclu par une
société en formation représentée par ses
fondateurs. Un acte de location-gérance d’un
fonds de commerce assorti d’une promesse
de vente du fonds et de l’immeuble
d’exploitation avait été conclu en
mentionnant en qualité de preneur la société
en cours d’immatriculation représentée par
ses associés. L’acte indiquait par ailleurs que
les fondateurs agissaient « en application de
l’article 1843 du Code civil, et au nom de la
société en formation ». Il était également
précisé de manière expresse que
l’immatriculation de la société emporterait
automatiquement reprise par cette dernière
des engagements objet du contrat, qui serait
réputé avoir été conclu dès l’origine par la
société, et qu’à défaut d’immatriculation, les
associés seraient soumis solidairement
entre eux à toutes les obligations leur
incombant en vertu dudit contrat. Malgré ces
précisions, la Cour d’appel de Chambéry a
considéré que, le preneur étant une société
en cours d’immatriculation, le contrat avait
été conclu par une société dépourvue de
toute capacité juridique et que la nullité
absolue affectant cette convention privait de
tout effet les promesses de vente consenties.
La Cour de cassation a suivi l’appréciation
souveraine des juges du fonds et a rejeté le
pourvoi selon lequel ces derniers avaient
dénaturé les termes de la convention. Cet
arrêt rappelle une nouvelle fois la position
extrêmement rigoureuse de la Cour de
cassation quant au respect des conditions à
remplir pour agir valablement pour le
compte d’une société en formation.
En conséquence, un acte, pour être valide,
doit nécessairement mentionner comme
partie au contrat des personnes qui
déclarent agir « au nom et pour le compte »
de la société en formation et non, comme
c’était le cas en l’espèce, la société en cours
d’immatriculation représentée par ses
fondateurs.
(Cass. Com., 21 octobre 2014, n° 13-22.428)
REFORME DES BAUX COMMERCIAUX :
DECRET D’APPLICATION
Le décret 2014-1317 du 3 novembre
2014 dresse la liste des charges, travaux
et impôts qui ne peuvent plus être laissés
à la charge du locataire
La loi Pinel a réglementé la question des
charges locatives, des impôts et des taxes. Ce
décret vient en préciser les conditions,
sachant que toute clause contraire
introduite dans un bail conclu ou renouvelé
à compter du 5 novembre est réputée non
écrite. Parmi les dispositions les plus
importantes on retiendra que l’article L. 14540-2 du Code de commerce prévoit que tout
bail doit comporter un inventaire précis et
limitatif des charges, impôts, taxes et
redevances liés au bail, avec une clé de
répartition entre le bailleur et le locataire.
Cet inventaire donne lieu à un état
récapitulatif annuel adressé par le bailleur
au preneur, au plus tard le 30 septembre de
l’année suivante ou dans les trois mois de la
reddition des charges de copropriété. En
outre, le bailleur doit joindre au bail (puis
tous les trois ans), un état prévisionnel des
travaux qu’il envisage de réaliser dans les
trois années suivantes, avec le budget
prévisionnel et un état récapitulatif des
travaux qu’il a réalisé au cours des trois
années précédentes, précisant leur coût.
Le décret introduit également (article R.
145-35 nouveau du Code de commerce) la
liste des charges, impôts et taxes qui ne
peuvent plus être mis à la charge du preneur,
contrairement à la pratique antérieure des
baux dits « triple net ». Il s’agit : (i) des
dépenses relatives aux grosses réparations
(article 606 du Code civil), (ii) des dépenses
engagées pour remédier à la vétusté ou la
mise en conformité du bien loué, dès lors
qu’elles relèvent des grosses réparations
précitées, (iii) des impôts, taxes et
redevances dont le redevable légal est le
bailleur, à l’exception de la taxe foncière et
des autres impôts ou taxes liés à l’usage des
locaux ou à un service dont bénéficie le
preneur qui peuvent être maintenus à la
charge de ce dernier, (iv) des honoraires du
bailleur liés à la gestion des loyers du local
ou de l’immeuble faisant l’objet du bail et (v)
dans un ensemble immobilier, des charges,
impôts, taxes, redevances et coût des travaux
relatifs à des locaux vacants.
Enfin, les travaux d’embellissement peuvent
être mis à la charge du preneur si leur
montant excède le coût de remplacement.
(Décret n° 2014-1317 du 3 novembre 2014 relatif
au bail commercial)
Droit social / N°23 – Novembre 2014
PORTEE D’UNE TRANSACTION
Une clause générale de renonciation à
tout recours fait obstacle à une action en
justice postérieure
A la suite d’un licenciement pour faute grave,
un salarié signe une transaction prévoyant le
versement d’une indemnité excluant
explicitement la perte de salaire que le
salarié aurait subi du fait de la rupture du
contrat. En contrepartie, le salarié s’engage à
n’avoir plus rien à réclamer « à quelque titre
que ce soit et pour quelque cause que ce soit,
tant en raison de l’exécution que de la rupture
de son contrat ». Sur le fondement de cette
clause, la Cour considère irrecevable la
nouvelle demande du salarié fondée sur une
perte de salaires. La Cour revient donc sur sa
décision en date du 24 avril 2013 (n°1115.204) qui faisait droit à une nouvelle
demande de réparation fondée sur une
discrimination, en dépit de la présence d’une
clause générale de renonciation.
(Cass. Soc.5 novembre 2014, n°13-18.984)
RECOURS A L’INTERIM ET NOTION
D’ACCROISSEMENT
TEMPORAIRE
D’ACTIVITE
Le
lancement
d’un
produit
correspondant à l’activité habituelle de
l’entreprise ne permet pas le recours à
l’intérim
Amenée à se prononcer sur la validité du
recours à un intérimaire dans le cadre de
plusieurs missions successives, la Cour de
cassation rappelle son interprétation stricte
de la notion d’accroissement temporaire
d’activité. Une société fonde ce recours sur le
démarrage de la production d’un nouveau
produit, considérant que ce lancement
entraînait un surcroît d’activité au
« caractère temporaire et non pas durable et
constant ». Sans surprise, la Cour approuve
les juges du fond d’avoir retenu que « le
lancement de ce nouveau type de produit
s’intégrait dans l’activité normale [de
l’entreprise],
faisant
ressortir
que
l’employeur n’établissait pas que le lancement
en question s’accompagnait de circonstances
caractérisant un accroissement temporaire
d’activité ». Les différents contrats de
mission encourent donc une requalification
en CDI. Dans une précédente décision, la
Cour a récemment confirmé cette position
concernant l’hypothèse de l’ouverture d’une
nouvelle boutique.
(Cass. Soc. 29 octobre 2014, n°12-27.936)
EGALITE PROFESSIONNELLE AU SEIN
D’UN COMITE DE DIRECTION
A travail égal, l’égalité salariale doit être
assurée au sein du Comité de direction
Une Directrice des ressources humaines,
membre du Comité de direction, demande
un rappel de salaire pour manquement à
l’égalité de traitement, sa rémunération et sa
classification étant inférieures à celles des
autres membres du Comité. Sa demande est
rejetée en appel, au motif qu’elle dirige le
seul service des ressources humaines et
qu’elle ne dispose d’aucune délégation de
pouvoirs importante. La Cour de cassation
censure ce raisonnement et rappelle que la
Cour d’appel aurait dû se livrer à une analyse
comparée de la situation, des fonctions et
des responsabilités de la salariée avec celles
des autres membres du comité et rechercher
si les fonctions exercées par les uns et les
autres n’étaient pas de valeur égale à celles
de l’intéressée. Une différence de traitement
entre des salariés ayant des fonctions
distinctes
mais
un
même
niveau
hiérarchique ne peut être instaurée qu’après
s’être assuré que leur travail n’est pas de
valeur égale, ou que cette différence de
traitement est justifiée par des éléments
objectifs.
(Cass. Soc. 22 octobre 2014, n°13-18.362)
EGALITE
PROFESSIONNELLE
A
L’EMBAUCHE
L’égalité de traitement doit être
respectée à l’embauche, un diplôme
supplémentaire ne pouvant justifier une
disparité de traitement que s’il est utile à
la fonction exercée
Un salarié, titulaire du Bac, a gravi en 20 ans
les échelons jusqu’à occuper un poste de
responsable de zones ventes et marketing. Il
demande un rappel de salaire car un de ses
collègues a été recruté au même poste avec
une classification supérieure et une
rémunération majorée de 20%. L’employeur
invoque pour justifier cette situation les
qualités professionnelles supérieures et le
diplôme d’ingénieur du collègue. Ces deux
justifications sont écartées par les juges car
(i) si les qualités professionnelles peuvent
justifier des augmentations de salaires plus
importantes, elles ne justifient pas une
différence de traitement lors de l’embauche,
l’employeur n’ayant pas pu apprécier les
qualités professionnelles, et (ii) un diplôme
supplémentaire ne permet pas de fonder une
différence de rémunération, à moins que ce
diplôme
atteste
de
connaissances
particulières utiles à la fonction. Le diplôme
d’ingénieur du collègue n’étant pas utile à
l’exercice de ses fonctions, essentiellement
commerciales, il ne pouvait justifier une
différence de salaire.
(Cass. Soc. 13 novembre 2014, n°13-10.274)
CONFIDENTIALITE DES DOCUMENTS
REMIS AU COMITE D’ENTREPRISE
L’employeur qui abuse de son droit
d’exiger la confidentialité des documents
remis au CE devra reprendre la
procédure
d’information
et
de
consultation à son début
Au cours d’une réorganisation, l’employeur a
adressé aux élus du comité central
d’entreprise (CCE) deux documents classés
confidentiels dans leur intégralité. La Cour a
estimé que l’employeur en procédant ainsi
avait « porté une atteinte illicite aux
prérogatives des membres du CE dans la
préparation des réunions ». La Cour précise
que « l’information donnée aux membres du
comité d’entreprise, doit non seulement être
déclarée confidentielle par l’employeur, mais
encore être de nature confidentielle, au
regard des intérêts légitime de l’entreprise, ce
qu’il appartient à l’employeur d’établir ». En
l’espèce, la société ne justifiait d’aucun
intérêt légitime à placer sous le sceau de la
confidentialité l’intégralité des documents
transmis au CCE et a donc été contrainte de
reprendre la procédure d’informationconsultation à son début.
(Cass. Soc. 5 novembre 2014, n°13-17.270)
RESILIATION JUDICIAIRE DU CONTRAT
D’UN SALARIE PROTEGE
La demande de résiliation judiciaire
introduite avant la désignation d’un
délégué syndical ne peut produire les
effets d’un licenciement nul
Un salarié saisit le tribunal d’une demande
de résiliation judiciaire de son contrat sur le
fondement du non-paiement d’heures
d’astreinte et de rappel de primes quelques
semaines avant sa désignation en tant que
DS. Le Conseil de Prud’hommes fait droit à sa
demande en considérant que la rupture du
contrat devait produire les effets d’un
licenciement nul et lui accorde les
indemnités correspondantes, dont celles
liées à la violation du statut protecteur.
Confirmant la position des juges d’appel, la
Cour affirme que, si la résiliation du contrat
est justifiée, elle produit les effets d’un
licenciement sans cause réelle et sérieuse,
exclusif des indemnités liées au statut
protecteur, dans la mesure où la désignation
est postérieure à la demande de résiliation.
Cet arrêt s’inscrit dans la droite ligne de la
jurisprudence applicable, le salarié ne
pouvant bénéficier du statut protecteur que
lorsque la désignation est antérieure à
l’envoi de la convocation à entretien
préalable.
(Cass. Soc.28 octobre 2014, n°13-19.527)