Les choses de la vie (quotidienne)

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Les choses de la vie (quotidienne)
Les choses de la vie (quotidienne)*
Pierre Delion
Angers
Cette année, j'avais envie de partir du thème qui est prévu pour le congrès d'Angers en 1996,
c'est-à-dire " La Vie Quotidienne " et d'essayer de voir en quoi elle concerne directement la
vie des enfants autistes et psychotiques et peut-être aussi ce qui est touché de la vie familiale
et des parents de ces enfants ; la vie quotidienne des soignants qui s'occupent de ces enfants et
de ces parents, et puis également de leurs pédagogues avec qui c'est intéressant de réfléchir
ensemble sur ce sujet.
Oury a déjà fait toute une année de séminaire là-dessus à Ste-Anne, et il avait appelé ça
"Psychopathologie institutionnelle de la vie quotidienne "...!
C'était sorti de la "Psychopathologie de la vie quotidienne " de Freud que vous avez sûrement
tous lu, relu, dévoré ; c'est un livre très intéressant et même si ça a l'air d'être loin de la
psychose et de l'autisme, mon idée, c'est quand même que les soignants, par leur
psychopathologie de la vie quotidienne de soignants, vont répondre de ces signes cliniques
des enfants autistes et psychotiques ; c'est donc intéressant d'aborder le contre-transfert avec
les autistes et psychotiques par le biais de la Psychopathologie Institutionnelle de la Vie
Quotidienne.
J’avais déjà distingué, l'année dernière deux types différents de temps de présence avec les
enfants autistes et psychotiques :
- un temps thérapeutique officiel par exemple dans l’atelier contes. Chaque soignant qui
participe à un atelier contes va, avant de commencer, réfléchir à la façon dont il pourrait
fonctionner ; et, puis au fur et à mesure que cet atelier se déroule, on parle un petit peu de ce
qui s’y passe, et puis, au bout d'un certain temps, on demande au Dr Lafforgue de venir faire
une formation dans le service pour mieux comprendre ce qu'est un atelier contes ; et après, on
essaye d'avoir des lectures sur les atelier contes pour comprendre comment ils marchent ; et
puis, là où on en est rendus dans notre expérience, on se dit : « Bon, eh bien ça y est, ça fait
trois ans maintenant qu'on fait des ateliers contes, et on voit à peu près comment ça
fonctionne, c’est la durée nécessaire de mise en forme ». Et, alors, il arrive un moment où,
quand on est essentiellement avec des autistes et des psychotiques, on sent que notre surface
de réparation interne, notre appareil psychique s'assèche progressivement, si on n'y fait pas
attention.
- Il faut, pour continuer, être extrêmement attentif à ce qui se passe dans les ateliers contes ;
on fait très attention au sourire que va faire tel enfant, Johann, qui ne sourit pas souvent mais,
justement sourit quand le loup est en train de manger le troisième petit cochon. Et puis,
finalement, on est tellement dans l'observation que, peut-être, du côté de la vie, de l'épaisseur
de notre travail psychique, il y a quelque chose qui se lyophilise un petit peu. En discutant de
ça avec Lafforgue et son équipe, on s'est rendu compte qu'ils étaient tous eux-mêmes passés
par quelque chose de cet état-là. Ce qui leur avait permis de ne pas se lyophiliser (j'aime
beaucoup le café), se dessécher dans ce processus de coller attentivement,
presqu'adhésivement à la pathologie des enfants autistes et psychotiques, c'était qu'ils avaient
pu s'appuyer, comme on en parle avec l'objet d'arrière-plan, sur leur propre mythologie
personnelle et groupale, sur le paysage personnel de leur enfance, ou de leur mythologie de
service. Et là, en faisant ce travail de recherche, au bout d'un certain temps, ils avaient pu faire
en sorte que le lyophilisât se retrouve dans un état suffisamment aqueux pour que ça
“ baigne ” à nouveau.
- Ça, c'est un aspect important de ces ateliers : le transfert du sujet psychotique nous attire —
la pulsion de mort est à l'œuvre de façon prévalante dans ces histoires-là — dans quelque
chose d’un dépérissement progressif qui a donné l'asile au sens strict ; si on n'y fait pas
attention, même avec des moyens très élaborés pour comprendre ce qui se passe, on se fait
happer par ce mécanisme de la Pulsion de Mort, avec les risques que cela comporte. Au bout
d'un certain temps, on pourrait devenir ce que Oury a repris, mercredi dernier, dans son
séminaire, un distributeur automatique de concepts qui n'en sont plus : on fait l’atelier contes,
l'atelier journal, l'atelier Machin-truc et, en fait, on n'y est plus en tant que Sujet mais en tant
que lyophilisat.
Et alors ça peut paraître un peu grossier parce qu’on n'est pas tous lyophilisés en même temps
dans l'atelier en question et c'est l'intérêt d'avoir des ateliers groupaux ; mais quand on y est
tout seul, on peut être lyophilisé... et, à ce moment-là, c'est très difficile de tenir sa position de
Sujet Supposé Savoir en face d'un autre qui vous demande quelque chose. Donc, les liens
qu'on institue avec notre arrière-pays à nous, paraissent tout à fait essentiels pour ne pas
tomber dans la trappe du Père Ubu (la trappe du Père Ubu a la particularité de ne s'ouvrir que
dans un seul sens). Pour ne pas tomber là-dedans, il y a la nécessité de faire des liens avec
notre arrière-pays. Je prends l’atelier contes mais on peut prendre d'autres exemples, tout un
tas d'ateliers dans lesquels on est officiellement là pour soigner.
J'avais distingué cela d'autres types d'espace et de temps qui sont les temps interstitiels ou
temps de bouinage, les temps de lisière (Didier Petit). J’ai parlé de l'histoire clinique d'un
jeune garçon de quinze ans, psychotique, soigné avec un dispositif malheureusement
inadéquat ; c'est-à-dire une séance de psychothérapie par semaine en tout et pour tout. Pour
soigner une psychose infantile pendant 10 ans c'est tout de même un peu juste.
Ce jeune nous a montré dans un travail fait à son sujet que l'espace qu'il investissait dans
l’atelier contes avec beaucoup d'efficacité pour lui, et que nous n’avions pas repéré comme ça
sinon en reprenant les choses plusieurs fois après, c'était la lisière entre la scène et les
spectateurs, la lisière entre la maison des petits cochons et la forêt. Et je trouvais intéressant
de lier lisière, espace interstitiel, et même espace transitionnel dans les bons cas. Ce ne sont
pas souvent des espaces transitionnels, c'est-à-dire des espaces dans lesquels il puisse, dans
des moments privilégiés, faire une séparation à peu près tenable, pour lui, entre moi et non
moi.
Et justement, on avait été intéressés par l'histoire de cet enfant parce qu'il était, en
permanence, en pleine confusion ; cette confusion, quand il était dans la lisière, avait un
certain sens social ; c'est-à-dire qu'il était dans un endroit où les espaces, par définition, se
croisaient. La lisière c'est la fin de la forêt, le début du champ, ou alors, j'ai regardé dans le
dictionnaire étymologique et c'est très intéressant parce que le dernier sens qu'on trouve au
mot lisière, c'est le même mot que liseré, c'est la couture qu'on fait au bord d'un vêtement ou
d'un drap ou d'un mouchoir. Ça veut dire que la lisière serait la fin d’un espace bien particulier
dans lequel on est bien accroché et en même temps la limite entre deux espaces. Et alors, ces
temps interstitiels, ces temps de lisière, s'opposent au premier (le temps thérapeutique officiel)
par le fait qu'il s'agirait d'y cultiver la rêverie propre à l'espace transitionnel alors que l'espace
thérapeutique officiel servirait davantage, comme je le proposais dans un mauvais jeu de
mots, à-te-lier. A-te-lier la pulsion avec les objets, la pulsion partielle avec ses objets partiels.
Un enfant va investir le loup, le cochon, son packing, va investir un certain nombre de choses
donc faire du lien entre la pulsion qui cherche des objets, et les objets qu'on lui propose. Et
par opposition à cela, dans les lisières, on serait plutôt du côté de la pulsion et il ne faut pas
forcément lui trouver des objets dans la réalité du temps thérapeutique, mais plutôt se dire :
« Qu'est-ce que l'enfant qui sort de son espace thérapeutique va trouver comme représentation
des objets qu'il vient de quitter ? »
Et la problématique du psychotique c'est que les représentations de ses objets ne tiennent pas.
On pourrait dire que c'est une définition aphoristique de la Psychose : la représentation
psychique de l'objet ne tient pas.
Et là, on en revient à la Pulsion de Mort dont le travail principal chez le psychotique est de
faire le coup du bûcheron entre la pulsion et ses objets. La représentation de la Mort par la
faux n’est pas sans intérêt. Dans cette histoire-là, il y a quelque chose qui concerne justement
la vie quotidienne au travers des trois fonctions :
- Il y a une première fonction qui est la fonction phorique, fonction d'accueil du sujet autre
qui vient nous rencontrer parce qu'il a besoin de soins. Il a une particularité, ce sujet autre qui
ne demande rien parce qu'il est trop petit ou qu'il ne parle pas, c'est qu'il va faire demander par
quelqu'un d'autre, ses parents ou sa famille d'accueil, ou les institutions qui accueillent les
enfants tout petits ; par exemple, la directrice de la crèche : « Les enfants qui mordent à la
crèche, moi je connais la question, vous savez, j'en ai vu beaucoup, mais celui-là alors, ce
n'est pas comme les autres, il ne mord pas pareil que les autres. Cet enfant-là, il m'adresse un
signe dont il faut que je fasse quelque chose avec les autres, parce que moi, je ne peux pas être
toute seule dans ma crèche ; alors qu'avec les autres j'ai pu me débrouiller toute seule, là, je ne
peux pas être toute seule dans ma crèche. »
Donc, on va rencontrer cet enfant avec ce symptôme-là et on va essayer de comprendre
pourquoi ce signe clinique est, en fait, une représentation de l'angoisse et de la défense contre
l'angoisse. Pour que ce signe puisse prendre sens, il faut l'accueillir quelque part, dans une
pièce, mais surtout dans des appareils psychiques si possible salariés en tant que tel, c'est-àdire des soignants, quel que soit leur statut professionnel. Depuis l'accueil matériel jusqu'aux
conditions dans lesquelles on accueille quelqu'un psychiquement je parle de la fonction
phorique.
Ça, c'est un premier temps qui me semble, sur le plan logique, très important. Ça permet
d'ailleurs de dire que la fonction phorique est toujours un complexe assez élaboré : pour
accueillir quelqu'un, il faut un quelqu'un et un quelque part. Mais ce n'est pas parce qu'il
existe quelqu'un quelque part que ça va marcher.
La fonction phorique, en même temps qu’elle est le premier temps logique, peut
chronologiquement survenir très tard dans l'histoire d'une rencontre. On connaît bien des
enfants qui sont là depuis je ne sais combien d'années et c'est dix ans après qu'il y a quelque
chose qui fonctionne comme fonction phorique ; les signes qu'ils portent en eux, avec lesquels
ils ont essayé de se débrouiller, doivent émerger et arriver à quelqu'un d'autre.
- La deuxième fonction que j'ai un peu plus détaillée, l'année dernière, dont j'avais eu
l'occasion de discuter, notamment à Reus avec un de nos amis qui fait de la sémiotique à
Perpignan, Michel Balat, c'est la fonction sémaphorique. Sémaphorique, ça veut dire que des
signes ( séma = signe en grec, un sème ...) qui émergent du sujet qui souffre sont comme
aspirés par un appareil psychique qui est en disposition de les recevoir.
Vous voyez que c'est un peu compliqué comme formulation et, en même temps, tous ces
temps-là sont nécessaires. Il se peut très bien qu'un enfant autiste ou psychotique ait des tas de
signes sur lui, il en a plein ses poches, plein sa tête... s’il a affaire à des gens qui sont en état
de cécité psychique, c'est-à-dire de non-accueil, l'autiste, ses signes, il peut se les garder ; ils
ne sont pas des signes pour les autres ; ils restent des riens du tout pour lui, parce que lui, il ne
sait pas quoi en faire. Ça ne devient des signes que quand ce sont des signes pour quelqu'un
d'autre.
Alors les signes peuvent être vus par quelqu'un d'autre, et puis, on en reste là ; on pourrait dire
que c'est plus élaboré que lorsque quelqu'un a des signes et que personne ne les voit. Mais ça
peut rester aussi quelque chose de trop archaïque, de trop élémentaire. L'exemple, ce serait le
DSM III ou le DSM IV maintenant : quelqu'un va être en position de regarder l'autre, qui va
être tout à fait prêt, disposé à recevoir les signes en question... mais pour les mettre dans des
cases. Donc, c'est une manière particulière d'exercer la fonction sémaphorique, ça ; le risque,
c'est que la fonction sémaphorique en question ne soit pas utile pour le sujet qui a les signes,
mais soit utile pour celui qui les recueille ; il va en faire des statistiques - le DSM III c'est fait
pour ça - et des statistiques qui vont donner lieu à pronostic ; et le pronostic va donner lieu à
la clôture du champ ouvert par la pathologie. Par exemple, ce soir, on a eu l'occasion de voir
un petit bébé qui a maintenant deux ans avec un retard très important ; il a un certain nombre
de signes qui sont de l'ordre du syndrome autistique mais en aucun cas un autisme de Kanner,
parce qu'il a eu au départ une pathologie extrêmement grave mettant en jeu le pronostic vital ;
ça a entraîné des distorsions dans les interactions précoces. C’est une dysharmonie évolutive.
La maman, ce soir, après un an de travail ensemble, arrive en disant : « Alors, est-ce que c'est
un autisme ou pas ce qu'elle a ma fille ? » Les gens qui font du DSM III disent que c'est
absolument nécessaire de dire : « C'est un autisme ou c'est pas un autisme. » Donc, que faiton, là ? Je sentais très bien, depuis 1 an que je vois ces gens, que si on répondait : « C'est un
autisme » — on aurait pu, puisque là, elle a un syndrome autistique — j’avais vraiment
l'impression que si on répondait oui à cette femme, elle prenait sa gamine sous le bras et ciao !
Elle serait sûrement revenue car elle a bien vu qu'on aidait sa fille à quelque chose, mais il y
aurait eu quelque chose qui se serait refermé. Alors, j'ai répondu : « Votre enfant, elle a eu...
voilà... j'ai repris l'histoire... elle a eu ça et là-dessus, ça vous a mise dans un certain état. » et
je lui ai parlé de l'évolution dysharmonique. Je me permettais de dire ça parce que j'en avais
parlé depuis un an avec elle, de l'angoisse de mort et de tout ce qu'elle avait pu dire.
Donc, quelque chose s'est produit là qui a été de réintroduire l'histoire dans le diagnostic —
vous vous rappelez, diagnostic, ça veut dire connaître l'autre en avançant avec lui dans le
temps et dans l'espace ; j'aime beaucoup cette définition, elle est magnifique, c'est
l'étymologie de diagnostic et souvent on oublie dans le temps et dans l'espace avec lui. On dit
que c'est une étiquette... pas du tout. Donc, il y a cet aspect qui est très important et qui
montre que pour que ce soit une fonction sémaphorique au sens où j'en parle habituellement,
il faut qu'il existe aussi ce que j'appelle l'aspiration. Je prends souvent l'exemple de votre
cheminée dans votre baraque. Si vous n'ouvrez pas la porte de la cuisine, la cheminée fume
dans la pièce. Alors vous avez compris que pour qu'elle ne fume pas dans la pièce, il fallait
faire un truc là-bas.
Là, on pourrait dire que c'est toute la problématique du manque telle qu'elle a été élaborée par
Lacan ; pour que quelque chose vienne se déposer dans votre appareil psychique et que vous
continuiez à faire votre travail pour le sujet dont il est question, il faut que ça s'inscrive dans
du transfert. C'est la partie transférentielle du diagnostic. Ça parait antinomique, ces choseslà, mais à mon avis, c'est tout à fait complémentaire. C'est ce que j'avais raconté à St-Alban
sur le transfert ; il y a une partie diagnostic et il y a une partie plus transférentielle classique. Il
ne s'agit pas de traiter un schizophrène comme on traite une névrose hystérique. Si on se
“plante” sur le diagnostic, on va manifestement se “planter” dans le transfert. Donc, cette
fonction sémaphorique est quelque chose qui, dès le départ, s'inscrit et, en même temps, est le
résultat du transfert. C'est dire que c'est déjà un processus dialectique.
Donc avec la fonction phorique, puis la fonction sémaphorique, les signes cliniques sont
aspirés par votre appareil psychique, s’y inscrivent, et après ? C'est bien beau de se dire :
« Voilà, j'ai observé tel et tel signe chez tel enfant », et puis après, qu'est-ce que vous faites ?
C'est pour ça qu'il faut, après, passer à un troisième temps logique qui serait, au fond — je
joue sur les mots, vous le devinez — phorique, sémaphorique et métaphorique, le troisième
temps qui permet de retrouver du sens dans cette histoire.
L'enfant psychotique par définition, ne va pas pouvoir trouver du sens tout seul à la répétition
de ses signes cliniques en situation transférentielle, par opposition à ce qui se passe dans la
névrose. Quand, dans la névrose, vous êtes sur votre divan en train de vous dire : « Ça fait
trois fois que je rate mon rendez-vous chez le dentiste, ça doit vouloir dire quelque chose », et
qu'à ce moment il vous revient que la première fois que vous étiez chez le dentiste, vous étiez
sur les genoux de votre maman, et manifestement, elle avait l'air d'avoir plus mal que vous ;
alors, à ce moment-là, ça vous fait penser que le dentiste, la maman... l'inceste... enfin, vous
avez eu une conférence magnifique de Jean Oury là-dessus, donc je ne remets pas ça... le type
tout seul sur son divan, le psychanalyste, il n'a qu'à être là et tendre la main à la fin de la
séance, ça marche tout seul. La personne sur le divan, elle va tout de suite, au bout d'un
certain temps, trouver que les signes cliniques, actes manqués, ça s'organise comme ci,
comme ça et, donc, ça veut dire ci ou ça. Je schématise un peu la cure-type, mais c’est pour
rire !
Chez le psychotique, ce n'est pas du tout ça qui se passe. Notamment pour celui qui n'a pas de
langage, l'autiste, comme il n'a pas rencontré l'objet total, c'est vous, en position d'équipe
soignante, qui allez jouer le rôle d'objet total. Et, comme on ne peut pas jouer le rôle de l'objet
total tout seul puisqu'on n'est pas dans le domaine de la névrose, mais dans le domaine de la
psychose, eh bien, on le joue en équipe. Et donc, du sens va pouvoir émerger du fait que vous
allez mettre ensemble les objets partiels réceptacles du transfert multiréférentiel du sujet
psychotique.
Il y a un processus que Lafforgue nous a rappelé la semaine dernière : dans les situations
X,Y,Z, l'enfant psychotique va vous proposer des choses qui sont pareilles et des choses qui
ne sont pas pareilles, moyennant quoi vous allez avoir un accès, par ce mécanisme-là, à la
structure du sujet et à ce qui est appelé, depuis les structuralistes classiques, les invariants
structuraux ; c'est-à-dire que tel enfant dans telle activité thérapeutique, va utiliser tel
mécanisme de défense par rapport à tel type d'angoisse. Et il se trouve qu'il va utiliser le
même mécanisme de défense par rapport à des angoisses similaires dans une autre activité
thérapeutique. C'est parce que vous pouvez comparer les trois activités thérapeutiques
différentes ou les activités thérapeutiques et les temps de lisière, ou temps interstitiels, ces
choses qui, apparemment, sont différentes, que vous allez trouver une proximité structurale.
Et, c'est par ce biais-là, à mon avis, qu'on peut avoir accès à la structure du sujet psychotique.
Vous voyez que ça nécessite quand même tout un chemin extrêmement complexe qui fait
appel à quelque chose de fondamental : l'institution. D'où les recherches nombreuses faites sur
ce sujet de l'institution.
Qui dit Objets Partiels, dit le Petit Poucet ; pour retrouver le chemin de l'Objet Total, il faut
suivre celui des Objets Partiels, à la manière du Petit Poucet ses petits cailloux, objets partiels
déposés sur le chemin du Grand Autre qui vont vous indiquer la manière dont sa structure
fonctionne avec l'objet a. Alors ça, c'est les trois fonctions, les trois temps logiques ; on
pourrait dire que ce sont les trois nouveaux temps logiques du soin en institution par rapport
aux enfants psychotiques et autistes. Ne vont pouvoir se structurer entre eux-mêmes ces trois
temps logiques que s'il existe un quatrième temps qui est celui du recul pris avec les situations
transférentielles, de ce que l'on appelle la supervision, le contrôle, la réflexion
organisationnelle sur ce qu'on est en train de faire, l'amélioration à partir de l'organisationnel
de ce qu'on fait déjà par ce qu'il serait mieux de faire parce que ça répondrait d'une façon plus
adéquate à ce qui est en question, etc. tout ce travail que les équipes ont à faire sur la façon
dont l'outil thérapeutique peut être plus proche de l'objet dont il est question, l'objet du sujet.
Et ce quatrième espace en dehors des trois premiers, c'est ce que Oury appelle la fonction
diacritique, mais c'est aussi ce qu'André Green appelle la Tiercéité. Ils ne le savent pas, mais,
c'est le même mot qui est utilisé par Peirce pour parler pour parler du symbole. Et la tiercéité,
c'est prendre du recul par rapport à ce qui se passe dans une situation X et de pouvoir, quand
on est en période de conflit, déposer les armes pour réfléchir à la paix. Et, quand on est en
période de paix, "si vis pacem para bellum " ; donc, de toute façon, il y a toujours quelque
chose à faire en position de retrait par rapport à ce qui se passe. Je vous signale à ce sujet
qu'André Green a écrit un livre qui est sorti cet été qui s'appelle "La Causalité psychique ", où
il reprend la vieille discussion Lacan, Bonnafé et d’autres, et où il intègre toute une réflexion
très intéressante sur le plan épistémologique par rapport à toutes ces sciences dures actuelles
qui n'arrêtent pas de nous rebattre les oreilles sur le fait que la psychiatrie, c'est bientôt fini,
parce que les neurosciences sont en progrès. Alors là, il reprend ça lui avec les textes à l'appui
de toutes ces neurosciences depuis Changeux jusqu'au Cognitivisme en passant par le
généticoïde pour mettre un petit peu ça sur la table et expliquer ça d'une façon très claire et
rationnelle : l'appareil psychique n'est pas du tout incompatible avec les neurones. Et que, ce
n'est pas parce que les neurosciences avancent que ça supprime le concept d'appareil
psychique ; je vous conseille de perdre un peu de temps à lire ça, vous en gagnerez beaucoup
par la suite.
Alors, pour ce qui concerne cette psychopathologie de la vie quotidienne, on pourrait dire
qu'elle va nous intéresser parce qu'elle est le réservoir dans lequel le sujet et son transfert, le
sujet en transfert, va puiser les matériaux de la relation transférentielle.
Il y a plusieurs plans différents dans cette histoire-là, la psychopathologie de la vie
quotidienne sur un plan individuel et aussi sur un plan institutionnel. Le premier concerne
notre position éthique vis-à-vis de l'enfant ou de l'adulte qu'on reçoit pour le soigner, selon
que l’on considère l'enfant comme un sujet ou comme un objet. Cela conditionne et est
conditionné par ce travail en profondeur que l'équipe doit faire sur elle-même pour savoir si
elle s'adapte au sujet qui vient pour des soins, ou si elle adapte “ l'objet ” aux soins.
On voit bien que tous ces textes sur l'humanisation des hôpitaux, dans les hôpitaux généraux,
ont été quelque chose de très important car ils ont permis de réfléchir sur le fait que lorsque
un enfant est hospitalisé en pédiatrie, il est essentiel de se préoccuper de sa vie quotidienne,
de réfléchir à ce que sa maman ou son papa puisse coucher dans la chambre avec son enfant
pendant qu'il est hospitalisé ; parce qu'on a vu des choses dramatiques qui se passaient quand
ce n'était pas possible. Toute cette réflexion-là est centrée sur : « Comment améliorer les
prestations par rapport à une hospitalisation d'enfant ? ». Et l'enfant en question, ça n'est pas
forcément un Sujet. Il s'agit d'un client qu'il faudrait satisfaire et c'est très différent de toute la
réflexion qu'on peut mener en psychiatrie sur l'humanisation dont on a souvent vu qu'elle était
réduite à repeindre les murs et faire les tapisseries ou les moquettes or, ce qui compte
beaucoup dans notre travail, c'est de faire en sorte que l'enfant qui vient pour des soins, soit
considéré tout le temps comme un Sujet... Et tout nous pousse toujours à faire l'inverse...
Pour un adulte en difficulté psychologique, on a tendance à aller vers les tutelles et les
curatelles ou à parler de sa difficulté à trouver du travail, en disant que « l'A.A.H. ça sera
peut-être mieux que le R.M.I. et puis vous n'aurez pas besoin de vous emmerder avec
l'enquête sociale, et puis... » c'est tellement plus simple ; et si on ne fait pas attention, c'est une
espèce de spirale entropique qui nous attire vers le gouffre. Finalement, il peut être l'objet de
nos bons soins, mais ce n'est plus le sujet de nos bons soins. Quand vous analysez déjà ceci
chez les adultes et que vous le transposez aux enfants qui n'ont pas, eux, la responsabilité au
sens juridique, vous voyez que l'existence en tant que sujet chez l'enfant peut être oubliée,
scotomisée ; et ça a des effets désastreux tous les jours, car ça va évidemment conditionner
directement tout ce dont je vous ai parlé sur le sémaphorique, c'est-à-dire sur cette pompe à
aspiration du désir. Si l'enfant en question est dans un milieu dans lequel il a l'impression —
même s'il n'a pas fait d'études — grâce à l'ambiance que son avis importe dans ce qu'il se
passe, s'il sent que son désir est attiré vers quelque part où on va faire quelque chose avec lui,
les signes cliniques ne seront pas du tout pareils que s'il est dans un endroit où il n'y a pas ce
mécanisme d'appel du désir. Donc l'organisation d'un service va conditionner un tas de
choses.
Alors dans les services de psychiatrie pour adultes, ils ont trouvé depuis longtemps des trucs
pour faire émerger non seulement du citoyen, mais du Sujet désirant. C'est, bien entendu, en
psychothérapie individuelle, etc., mais c'est surtout avec l’aide des clubs thérapeutiques. Ceux
qui travaillent dans les services de psychiatrie adultes, le savent bien. Alain Buzaré me
racontait l'autre jour une histoire tout à fait intéressante à ce sujet-là, l'histoire d'une jeune fille
qui s'appelle Corinne qui était dans le service de pédopsychiatrie, il n'y a pas très longtemps ;
et parce qu'on a pu travailler avec son service correspondant pour une part au même territoire
géographique, cela a permis de travailler avec eux le passage de cette adolescente du service
d'enfants dans le service d'adultes dans des conditions intéressantes, parce que, arrivée dans
les service d'adultes, Corinne a pu utiliser le club thérapeutique. L'exemple est le suivant : la
première fois elle vient accompagnée de soignants de la pédopsychiatrie pour passer du temps
avec les gens de la psychiatrie adultes, alors qu'elle a 16 ans plus ou moins quelque chose ;
des rencontres entre les soignants sont organisées ; ils peuvent discuter de son cas clinique.
Elle-même fait des rencontres avec différentes personnes de ce nouveau service, et puis, au
bout d'un certain temps, les rencontres sont plus nombreuses et, elle commence à désinvestir
le service de Pédopsychiatrie, puisqu'elle commence à investir le service de psychiatrie
adultes. Un jour, le médecin reçoit Corinne dans son bureau, et lui dit : « Qu'est-ce que vous
voulez faire aujourd'hui ? » Elle commence à parler un petit peu et dit qu'elle voudrait faire un
dessin ; le médecin sort un papier, un crayon, des stylo-feutres, des petits, des gros, et puis il a
même des fusains et puis aussi des crayons de couleur. Il montre tout cela à Corinne qui n'en
veut pas mais... mais, elle veut des pastels, et il n'y a pas de pastels...
Corinne est invitée par le médecin à la réunion d'achats du club où elle va dire : « Je voudrais
des pastels pour faire un dessin avec le médecin. » Là, elle rencontre les schizophrènes et les
autistes du coin... et elle raconte, elle sent que les gens sont attentifs à ce qu'elle raconte.
Alors, elle dit : « Je veux des pastels. » Et comme elle demandait d'une façon assez insistante,
les gens votent. On a débloqué de l'argent pour qu'elle puisse acheter des pastels ; elle est allée
acheter des pastels avec untel ou unetelle, pour faire un dessin au médecin. J'aurais bien aimé,
moi, qu'elle lui fasse comme souvent avec nous, qu'elle dise aussi qu'elle voulait des
pinceaux, ou de la peinture au doigt, par exemple. Elle ne l'a pas fait, et, c'est peut-être le
signe qu’elle avait été tellement bien accueillie dans sa demande. Cela lui a permis des
rencontres, de sortir, d'avoir une autonomie relative, d'avoir du fric pour acheter des trucs, de
la conforter dans le chemin désirant de son transfert.
Donc, dans un exemple comme ça c'est le club thérapeutique qui sert de dispositif sur lequel
le désir vient se poser ou s’enter et puis, ding dong, il joue des cordes et finalement, ce son-là,
ça lui plaît. Corinne a trouvé dans le club l’instrument avec lequel jouer son air...
La psychiatrie adultes est intéressante pour ça entre autres choses. Transposer le club
thérapeutique chez les enfants, c'est tout un problème. Chez les adultes, on peut faire le pari
qu'un adulte, même s'il est à l'hôpital parce qu'il a foutu tout son fric en l'air, jugé incapable de
s'en occuper, peut un jour être trésorier du club ; on peut penser qu'au bout d'un certain temps,
il ne sera plus sous tutelle, il y a des exemples. Eh bien ! allez faire ça avec un enfant ! On ne
peut pas le considérer comme un sujet responsable, puisqu'il ne l'est pas ! alors vous êtes
obligés de faire un pari sur un autre plan, celui de la subjectalité et de sa subjectivité. Il va
donc être utile d’organiser un club thérapeutique chez les enfants pour permettre qu'ils aient
une tablature sur laquelle ils viennent déposer leur désir ou plutôt pour que les enfants se
prennent les pieds dedans ! J'avais déjà raconté cet exemple intéressant de Morgan, un enfant
autiste qui ne parle pas et pour lequel Eric — un autre enfant qui parle et n’est pas bien dans
sa peau mais n'est pas autiste — a bien compris que Morgan, ça lui plairait de faire du vélo à
trois roues ; à deux roues, il pensait qu'il n'y arriverait pas, il se casserait la figure ; il avait
proposé à cette réunion que le vélo à trois roues, on pourrait le faire avec trois morceaux de
vélos à deux roues. Il faut dire que, lui, connaissait bien la question, parce que son grand
exercice, en arrivant dans le service, était de casser les vélos. Donc, dans ce lieu de la réunion
des enfants, Eric avait pu comprendre que Morgan aimerait bien faire du vélo à trois roues, et
en faisant cela, il aidait l'autre et se soignait lui-même. Est-ce que c'est cela la sublimation
pour lui, le débat reste entier, il faudrait approfondir un peu ; c'est un processus de réparation,
c'est le moins qu'on puisse dire : essayer de faire la soudure entre différents espaces. Alors
pour faire un club thérapeutique d'enfants, il va falloir réfléchir beaucoup à ce qui se passe et
notamment dans l'équipe des soignants ; parce que dans les clubs thérapeutiques d'adultes, la
plupart des adultes y prennent des décisions. Et si vous tenez pas ce que vous leur aviez
demandé de décider, ils vont vous le faire savoir. Les petits enfants qui ne parlent pas, ça pose
un autre genre de problème, parce que les signes en question qui viennent des enfants ne sont
pas faciles à repérer. Et alors là, qu'est-ce qu'on constate ? Les enfants qui parlent, parlent
aussi des enfants qui ne parlent pas. Alors ça, c'est plutôt intéressant comme méthode
indirecte, on se sert des espaces à côté : c’est la méthode de l’observation indirecte ! Donc,
le club thérapeutique, ça aide sûrement à mettre en place une certaine qualité de vie
quotidienne pour les enfants. Des choses peuvent s'organiser autour d’eux pour qu’ils aient à
leur disposition suffisamment de choses hétérogènes pour les utiliser si besoin comme objets
partiels.
Le club thérapeutique de nos amis du secteur 2 a gentiment mis à notre disposition une ferme,
là-bas, à la campagne où on pourrait aller. Mais comme condition préalable, ils ont dit : « Faut
que vous créiez un club pour adhérer à notre club ». C'était plutôt sympa parce que cela nous
a obligé à réfléchir : « Il faut qu'on fasse un club, mais alors, comment va-t-on faire un club
? » Donc nous voilà en train de réfléchir à cette question grâce à un autre service qui, lui, a
déjà un club. On voit bien que ça a déjà des effets dans la vie quotidienne. On commence déjà
à se poser la question de savoir comment on va trouver l'argent pour pouvoir faire un piquenique là-bas avec les enfants ; et, puis cela donne aussi des idées à celui qui fait des confitures
et qui vend le journal : l'argent récolté va pouvoir aller quelque part pour payer le pique-nique
de ceux qui vont à la ferme. Donc, il va falloir qu'on réfléchisse à partir des différentes
réunions d'enfants : « Comment est-ce qu'on organise la gestion de l’argent avec les
enfants ? » C'est peut-être un des moyens de tenir notre pari : c'est un sujet désirant, son désir
doit être pris en compte, aussi en l'associant à la gestion de l'argent du club ; c'est-à-dire
passer du phénomène classique, familial, occidental poids-moyen de la gestion de l'argent de
poche individuel à la gestion collective d'une certaine somme par la réunion du club des
enfants. On en est là de nos réflexions actuellement et je trouve que cela fait avancer le sujet.
Ça, c'est le plan individuel, encore qu'on ait abordé, ce faisant, beaucoup d'aspects collectifs...
Mais sous l'aspect institutionnel, sur le plan du groupe, en tant que tel, la psychopathologie a
un effet intéressant, dans la mesure où elle donne la couleur du contre-transfert
institutionnel, au sens de Tosquelles. Alors dans ce contre-transfert institutionnel, il y a deux
niveaux, un niveau du soignant à titre individuel et un niveau du soignant à titre collectif. Si
on commence déjà par le soignant à titre individuel, il va se passer, comme dans tout
phénomène transférentiel — contre-transférentiel, un certain nombre de choses qui tournent
autour des résistances au traitement.
Les résistances sont un vaste sujet qui va conditionner la manière dont la vie quotidienne
interfère ou pas avec la thérapeutique. Les résistances, Freud en avait déjà parlé quand il
parlait de l'impact de la psychanalyse dans la vie culturelle ; et au début, il utilisait une espèce
d'expression qu'on retrouve dans le Laplanche et Pontalis, qui indique l'impact qu'a eu la
psychanalyse, en tant que telle, dans la population à laquelle il en parlait, c'est-à-dire
essentiellement chez les universitaires témoins ; il parlait de vexation psychologique. La
psychanalyse explique que tout ce qui se passe dans la vie d'un adulte est essentiellement en
rapport avec le développement de sa sexualité depuis qu'il est enfant ; les gens qui en ont pris
conscience au départ, ont d'abord sécrété des anticorps de façon absolument énorme. D'abord
la sexualité infantile, ça n'existe pas ! C'est la première réaction, ça. Ça a déclenché ce que
Freud a appelé, des vexations psychologiques dans la population.
Alors, si on transpose ça dans toute une équipe qui n'est pas sur cette longueur d'onde, est-ce
qu'on ne peut pas utiliser cette locution un peu archaïque des vexations psychologiques ? A
certains endroits, quand on a introduit ce type de réflexion psychanalytique dans la
psychiatrie, cela a donné lieu à des résistances sur le plan conscient, sans parler des
inconscientes.
C'est un premier plan de résistances importantes à débusquer. Il y a d'autres résistances que
Freud a décrites dans un grand nombre de textes et qui sont les résistances inconscientes.
Quand, dans une synthèse, on est en train de travailler sur quelque chose qui touche un
soignant dans sa problématique individuelle, subjectale, et que le superviseur ou le
psychanalyste, propose une interprétation alors que c'est pas tout à fait mûr, il va se produire
ce que Freud appelle la résistance inconsciente au traitement.
Et cela donne lieu à un autre concept très important dans notre travail, celui de la
perlaboration. Et le concept de perlaboration, cela veut dire que, entre le moment où
quelqu'un a compris intellectuellement ce qui était en question dans telle et telle résistance et
le moment où il l'a accepté, il y a celui de la gestation psychique de la problématique en
question.
Prenons un exemple simple. Il peut se faire qu'un psychanalyste, dans une cure individuelle,
suggère un peu trop tôt, à propos des trois rendez-vous manqués chez le dentiste : « Peut-être
que... vous ne pensez pas que... » et puis au lieu d’en rester là, il va dire : « Inceste, œdipe, je
ne sais quoi », le type qui est sur le divan va se dire — il va pas lui dire à son psychanalyste,
parce que les psychanalysants sont polis en général — au fond de lui il va se dire : « Va te
faire voir, c'est rien du tout ». Et puis, trois séances plus tard, après en avoir rêvé la nuit, il va
d'un seul coup trouver que c'était tout à fait translucide ce qu'il avait eu comme proposition et
à ce moment-là, il va se dire : « Finalement ce type là derrière, il avait raison. Donc cette foisci c'est normal que je le paye ! » La fois d'avant, il l'avait payé aussi mais il trouvait que ce
n'était pas normal. Le grand problème, c'est de savoir ce qui se serait passé si le psychanalyste
avait fermé sa gueule.
Et puis, il y a un troisième niveau de résistance qui n'est pas plus simple, c'est la résistance
proposée par le surmoi qui, elle, s'enracine dans les imagos parentaux que vous avez intégrés
plus ou moins bien, qui ont pris racine plus ou moins bien, et peuvent se déraciner en surface
ou en profondeur. Cette résistance du surmoi va être, en général, très efficace sur le plan de
la censure, c'est bien connu ; c'est souvent ça les actes manqués, la résistance du surmoi y est
pour beaucoup.
Mais il y a aussi un autre aspect des résistances qu'on utilise moins couramment, souvent
galvaudé dans le langage des équipes, qu'on appelle les bénéfices secondaires. Les bénéfices
secondaires, c'est peut-être la résistance la plus colossale. Vous avez votre symptôme, prenons
l'exemple de l'arrêt de travail. A notre niveau, c'est assez répandu. Vous en avez ras le bol de
votre équipe dans laquelle vous travaillez, et le médecin-chef, « quel con etc. » et donc, vous
attrapez une angine, vous arrêtez de travailler ; ça n'a évidemment rien à voir avec votre
médecin-chef ; et puis en plus, ‘y a un gamin psychotique qui vous a bien pris la tête... si vous
ne vous reteniez pas, vous lui foutriez sur la gueule... et des fois même, je me prends à penser
que je pourrais le zigouiller, hein ! et puis alors, d'un seul coup, vous vous réveillez avec une
angine le matin et vous vous dites : « Je m'arrête de travailler ! » Alors là, on est dans une
position différente parce que, au bout de huit jours, vous avez pris des antibiotiques, l'angine
est guérie. Il faut savoir que quelque fois des angines guériraient de toute façon sans
antibiotiques... Vous vous réveillez une semaine après et vous vous dites : « Maintenant, je
reprends mon travail. » Vous n'avez plus votre angine, mais vous avez toujours dans la tête
votre médecin-chef ("quel con, celui-là") et puis ce gamin dont vous avez rêvé, cauchemardé,
etc.... il est toujours là aussi. Alors, vous vous posez la question : « Est-ce que je redemande
un arrêt de travail à mon médecin ? », et à ce moment-là, vous êtes dans quelque chose qui est
la réflexion approfondie sur les bénéfices secondaires. Et vous vous posez la question de
savoir en quoi vous vous êtes trompé d'agresseur. Donc le bénéfice secondaire, c'est un
mécanisme qui nous permet de différer la rencontre avec l'objet de la résistance. C'est un
mécanisme très élaboré, une des manières de négocier la réalité ou une des formes cliniques
du mécanisme fondamental du refoulement.
Dans toutes ces choses que je vous ai décrites, qu'est-ce qui est à l'œuvre ? C'est le
refoulement, c'est-à-dire : « Qu'est-ce qu'on est bien avec le principe de plaisir et quand ça
s'arrête, qu'est-ce que c'est dommage ! ». Et quand ça s'arrête, le principe de plaisir, c'est en
général que le principe de réalité n'est pas très loin. Et quand le principe de réalité n'est pas
très loin, forcément, ça va vous amener du déplaisir. Alors Freud n'a pas inventé, mais il a
découvert que ce que l'esprit humain a mis au point pour faire avec un principe de plaisir qui
pourrait continuer à minima en tenant compte du principe de réalité, c'est le mécanisme du
refoulement, avec le premier temps fondateur, celui du refoulement originaire qui permet de
fonder secondairement le refoulement proprement dit.
Or, toutes ces choses-là, c'est ce que Lacan a décrit dans son séminaire fameux sur les
Formations de l'inconscient. Alors je ne peux que vous inciter à reprendre cet ouvrage très
intéressant, ainsi que celui de Freud dont je vous relis la liste des titres de chapitres :
- L'oubli des noms propres - Vous croisez un type que vous connaissez bien, il est peut-être
même hiérarchiquement responsable d'un service dans lequel vous travaillez et « zut ! je ne
me rappelle plus son nom ». Vous êtes avec votre femme et il vous faut lui présenter ce
monsieur. Il est là devant vous, et, voilà... vous ne vous rappelez plus... bonjour le
refoulement !
- L'oubli des mots appartenant à des langues étrangères - L'oubli des noms et des suites de noms - Les souvenirs d'enfance et souvenirs-écran - Comment dans notre existence, on est
toujours en train de modifier les choses secondairement pour s'arranger, pour rationaliser le
situation présente.
- Le lapsus - bien sûr, avec ses différentes formes.
- Les erreurs de lecture et d'écriture - Ça vaut le coup de relire ça pour ceux qui font de
l'orthophonie, des ateliers écriture, etc... et des choses très intéressantes sur la fonction des
erreurs d'écriture et de lecture.
- Les oublis d'impression - les oublis de projets - Les méprises - les maladresses - Les actes symptomatiques et accidentels - Les erreurs - Les associations de plusieurs actes manqués - Alors ça, c'est le top... non pas les mêmes
mais d'actes manqués différents. Il donne des petits exemples qui le concernent directement
ou ses copains ou ses ex-copains plutôt, et puis il y a un chapitre un peu hétérogène par
rapport à ça, mais intéressant parce qu'il aborde là un point qui a un peu un rapport avec ça,
c'est le problème du déterminisme, de la croyance au hasard, les superstitions et tout le
problème qu'il aborde à d'autres endroits sur la télépathie etc., c'est-à-dire en fait les
retrouvailles avec tout un tas d'objets et d'états bizarres qu'on a projetés chez l'autre pour faire
quelque chose et, tout d'un coup, il y a quelque chose qui résonne d’une inquiétante
étrangeté. Toutes ces choses-là sont intéressantes parce qu'au fond, de quoi est faite la vie
quotidienne du soignant moyen, dans son rapport avec les gens qu'il soigne, sinon d'un certain
nombre de choses comme ça, quand on y réfléchit de près. Alors il semble que ce serait
intéressant d'utiliser toutes ces résistances à la manière dont le judoka utilise la résistance de
son adversaire, c'est-à-dire non pas frontalement mais dans le cadre d'une sorte de judo
psychique qui consiste à prendre la résistance, à en utiliser la force pour la transformer en acte
thérapeutique.
Cela me faisait penser à un exemple qu'Annette connaît bien, un petit garçon qu'on soigne
ensemble, avec d'autres également, pour lequel il s'est passé récemment un certain nombre de
choses dans la réunion de travail qu'on fait avec les soignants qui nous occupons de lui, qui
sont une espèce de description de la psychopathologie de la vie quotidienne des soignants. Je
ne prétends pas que ce que je vais dire soit la seule explication de ce qui s'est passé dans les
actes manqués, ce n'est jamais unicausal. C'est toujours un ensemble de choses qui, à un
moment donné, prennent ensemble. Pour cet enfant-là quelqu'un a mis sa voiture dans un mur,
un poteau ou autre chose, un éducateur s’est cassé le doigt de pied et s’est retrouvé en arrêt de
travail alors qu'il avait cet enfant-là en charge, un certain nombre de soignants de la
constellation en question se réveillent la nuit, font des cauchemars à son sujet ; et puis, autre
formation de l'inconscient, un instituteur décrète, après n'avoir vu le gamin que huit heures
cette année : « Il n’apprendra pas à lire, celui-là ». Il me semblait que là, c'était une sorte de
reprise de la vie quotidienne, une histoire de sa manière de déposer dans nos appareils
psychiques la violence de ses symptômes. On s'est réunis déjà, on a essayé de réfléchir un peu
à cette question-là, on a un peu avancé mais pas énormément. En tout cas, quelque chose s'est
produit d'une inscription dans notre appareil psychique non seulement l'inscription de
symptômes, mais de la violence véhiculée par cet enfant-là pour que nous en arrivions à
produire des actes manqués dont une part est transférentielle.
Comme si on se rapprochait là de ce qui est décrit comme le refoulement originaire, c'est-àdire la création de l'inconscient par l'effraction du pare-excitation. Là, on pourrait dire que cet
enfant, dans le transfert, a projeté, dans nos appareils psychiques la violence de ses
symptômes. Et, à partir de cette violence-là, puisqu'on ne l'a pas assez élaborée entre nous, va
nous faire faire tel ou tel type d'acte manqué. Je trouve que quand on fait quelque chose de
cette violence, bien sûr, ce sont des économies de réparation de voiture, mais surtout
l'économie de la violence pour l'enfant. Il y a un gros problème qui se pose avec les enfants
psychotiques très intrusifs, parce qu'à certains moments on en a plein la tête, ça serait de
mettre au point dans nos appareils psychiques une gare de triage dans laquelle on pourrait
orienter la violence vers une possibilité que cette violence lui nuise moins.
Dans certaines routes ou autoroutes de montagne, on voit maintenant apparaître une formation
réactionnelle très intéressante que sont les voies de freinage. On a tous vu ça, dans les
montagnes maintenant ; il y a l'autoroute qui descend avec une pente à je ne sais pas combien
de degrés et puis, juste avant la pente, il y a une espèce de voie qui part sur la droite avec
plein de sable partout et le camion de vingt tonnes peut éventuellement s'arrêter là en cas de
besoin.
On pourrait dire qu'il faudrait mettre au point dans notre appareil psychique un tel système
avant la descente de la violence à son état brut, à son état Réel au sens de Lacan, mettre là en
place une voie de freinage de cette violence ; et qu'au fond, tout le travail de la constellation
transférentielle, c'est comme cette voie de freinage. C'est à dire qu'il ne s'agit pas de
supprimer le camion qui descend pour qu'il n'y ait plus d'accident, il s'agit d'arrêter ou de
ralentir ce camion qui descend pour voir qui conduit et où les freins ont lâché. Comme ça on
sait pourquoi le schizo freine, évidemment !
Donc, cette histoire-là me parait très importante parce que, dans un certain nombre de cas, on
est embarqués avec le sujet psychotique dans la descente et on n’a jamais le temps de prévoir
quelque chose quand on sent que les freins commencent à lâcher. Donc ça me semble une
nécessité absolue de mettre ces choses-là en réflexion dans les équipes pour que les
inscriptions tiennent, mais pas au prix du pare-excitation. Pour reprendre cette idée que vous
avez tous sûrement lue : Wunderblock de Freud, le bloc magique, où il prend cette idée
intéressante que l'appareil psychique, pour qu'il y ait des inscriptions qui se déposent dans le
système perception-conscience, il faut qu'il y ait un pare-excitation, et il prend l'exemple de
ces écrans rectangulaires où on fait des dessins avec un crayon dur sur une surface en
plastique transparent et dessous, il y a une surface en carbone. Si on enlève la surface en
plastique, ce qu'ont essayé un certain nombre d'enfants, on peut écrire après, mais on n'écrira
qu'une fois, parce qu'une fois qu'on a écrit là, il y a pas eu de voie de freinage. On a écrit et
c'est fini, le truc n'est plus utilisable ; et s'il n'y a plus de carbone, vous avez beau avoir une
surface de protection, vous n'écrivez rien du tout. Ça nous renvoie là à deux types d'autisme :
- l'autisme à carapace, il n'y a que la surface pare-excitante
- l'autisme poulpe, il n'y a que la surface d'inscription, elle est aussi projetée chez l'autre.
Vous voyez que ça rappelle qu'il faut qu'il y ait ces deux fonctions exercées : le pareexcitation et la surface d'inscription.
Qu'est-ce qui se dépose de l'inscription en provenance du sujet psychotique ? C'est peut-être
ce que les sémioticiens appellent les Icônes ou les Indices qui sont deux formes élémentaires
du Signe. Peirce a décrit le signe sous trois rubriques : deux archaïques l'icône et l'indice.
L'icône étant une représentation élémentaire de ce qu'est le symbole. Par exemple, vous
passez dans la Beauce et vous voyez un petit dessin ridicule de la cathédrale de Chartres. On
pourrait dire que ce dessin-là, c'est l'icône de la cathédrale de Chartres. Au milieu de la
Beauce, si vous regardez ce dessin, vous verrez que ça ressemble pas beaucoup, n'empêche
que vous avez que c’était la cathédrale de Chartres. Ça, c'est des icônes.
L'indice, c'est le rapport métonymique avec l'objet — il n'y a pas de fumée sans feu —, de la
fumée sort de la cheminée, ça veut dire qu'il y a du feu dedans, parce qu' il n'est jamais arrivé
qu'il sorte de la fumée sans qu'il y ait du feu.
Donc ces deux types d'inscriptions du signe sont décrits comme archaïques par rapport au
troisième, le symbole repris par Lacan, qui nécessite un Autre, parce qu'il faut décider
arbitrairement que le symbole Cu = cuivre. Donc ça, ce sont les trois niveaux ; ce qui nous
intéresse dans la psychose, ce sont icône et indice et, sans doute préférentiellement l'icône,
parce qu'elle existe dans le domaine de la représentation de chose sous son aspect visuel, par
opposition à la représentation privilégiée de la langue qui se fait sous forme de mots. C'est
rare que vous appreniez, par le bain de langage à un enfant, d'abord les mots écrits avant les
mots parlés. Donc on voit bien que c'est secondaire dans l'élaboration vers le symbole. Alors
ce sont les icônes qui viennent dans notre esprit et qui nous font cauchemarder. Quand on se
réveille à trois heures du matin en pensant au petit garçon dont je viens de parler, c'est parce
qu'il s'est déposé dans notre esprit une icône attachée à un affect de violence dans lequel il y a
quelque chose qui se produit qui va donc être cette inscription sémaphorique. Et c'est à la
réunion métaphorique, la réunion où l'on essaie de retrouver du sens, qu'il peut y avoir
éventuellement un passage à un niveau topique dans lequel l'affect devient moins nocif pour
le sujet en souffrance avec sa violence originelle.
Voilà pour aborder ce qui se passe à titre individuel ; mais si vous regardez ce qui se passe à
titre collectif — sur le plan institutionnel — vous mettez entre crochets tout ce que je viens de
dire et vous l'élevez au carré. Toutes les résistances dont je viens de parler, à titre individuel,
vous multipliez ça par le nombre de gens qu'il y a dans l'équipe et chacun avec ses résistances
individuelles vient faire une somme, une intégrale... Alors je ne connais pas bien les maths, ce
que ça donnerait ! Les résistances en question deviennent alors quelque chose d'astronomique.
D'où la nécessité de prévoir des opérateurs dans les équipes pour pouvoir travailler cette
question. Quels sont les opérateurs pour pouvoir travailler cette question dans les équipes ?
Vous n'avez pas des idées ? Je pensais que peut-être un des moyens qui semblait important
pour travailler les résistances, c'est bien sûr la formation. Je crois que sur le plan du conscient,
de la vexation psychologique freudienne, la formation peut mettre en mouvement un certain
nombre de choses qui pourraient rester figées dans la position passéiste. Et, ce n'est en tout
cas pas suffisant. Il faut aussi qu'il existe d'autres systèmes de mobilisation.
Il y a, peut-être, un aspect organisationnel. J'ai l'impression que si jamais on s'approprie, d'une
façon un peu plus collective les moyens de production du soin, peut-être par l'opérateur
réunion — planning, mais ça demande à être travaillé, on voit bien que l'on se heurte à tout un
tas de choses qui sont les résistances au carré dont je parlais ; ça peut sûrement être un
opérateur intéressant parce que ça permet de régler cette équation difficile entre la vie privée,
individuelle, singulière et la vie professionnelle. On voit bien que les résistances dont je
parlais précédemment, ce ne sont pas des résistances qui croisent soit la vie professionnelle
soit la vie privée ; ce sont des résistances qu'on a toujours avec nous ; on n'a pas besoin de les
emmener dans une valise, elles sont toujours avec nous, qu'on soit au boulot, qu'on soit chez
nous. Donc, ces résistances-là, il faut des endroits où on puisse les travailler dans un repère
orthonormé dans lequel on peut définir une courbe avec vie privée, vie professionnelle.
On en reparlera sûrement au cours de l'année de ces histoires, comment la réunion-planning
peut permettre de régler ce problème compliqué, par exemple, dans des équipes qui
découvrent la dimension de l'extra-hospitalier, du passage concret de : « J'ai envie de faire de
l'extra-hospitalier, mais je ne laisse pas tomber l'intra-hospitalier » comme deux aspects
complémentaires nécessaires pour mieux comprendre ce qu'on fait avec un enfant, en partant
du principe que ce qui compte, c'est de suivre l'enfant dans son chemin transférentiel et pas
d'être spécialiste de l'intra-hospitalier ou de l'extra-hospitalier. Il faut qu'il y ait un endroit où
ça se règle ça sinon on voit bien que ce type de problématique est aussitôt l'objet de
résistances ou que par ce problème-là, se montrent les résistances, concrètement. Par exemple,
je connais des endroits dans lesquels pour échapper à la confrontation avec la psychose en
direct, des gens se sont arrangés pour ne faire que de l'extra-hospitalier avec des enfants
névrosés. Pourtant, on peut pas dire : « Ça, c'est une résistance », « c'est le problème de... » on
l'assume cette prise en charge, quel que soit l'endroit. Des exemples comme ça, vous en avez
tous, moi aussi. Un autre moyen aussi, me semble-t-il, d'utiliser sa résistance avec cette
espèce de judo psychique dont je parlais, c'est peut-être de reprendre ce que Jacques
Hochmann met au point depuis un certain temps et qu'il nous a redit à Bordeaux, c'est de
reprendre ce qu'il appelle la mise en récit de notre expérience contre-transférentielle.
Il donne l'exemple d'un enfant qui est accueilli dans un petit groupe et qui va se livrer à telle
ou telle activité thérapeutique avec ses objets partiels dans ce groupe Contes ; et puis dans
l'école, il va faire ci ou ça et puis les gens se réunissent entre eux et décryptent au fur et à
mesure qu'il existe des invariants structuraux. Eh bien, il propose de faire ce que Vladimir
Propp avait déjà trouvé depuis longtemps avec les fonctions du conte, de mettre en récit les
différents invariants structuraux de la vie de cet enfant-là pour que ça prenne du sens dans
notre appareil psychique à nous. Et, ce faisant, il nous dit avec son expérience de vingt ans et
quelques sur cette question-là, qu’il y a un phénomène de polarisation des résistances qui se
produit. Et, le pire de la résistance collective étant que tout le monde tire dans sa direction et
qu'à ce moment-là, le sujet dont il est question, ne peut qu'être écartelé entre toutes ces
directions-là ; le fait de le mettre en conte fait que ça se polarise et que ça prend un sens dans
lequel tout le monde va avec l'enfant.
Vous le voyez, la vie quotidienne abordée dans tous ces sens-là, a bien à voir avec notre
praxis et de ne pas vouloir en tenir compte n’est que la manière concrète de montrer que la
pratique de la psychiatrie pourrait y perdre son humanité. La vie quotidienne n’est pas un
artefact, c’est le matériau même des choses de la vie.