L`utilisation de l`image dans l`enseignemenrt de la religion
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L`utilisation de l`image dans l`enseignemenrt de la religion
BERNARD KAEMPF Faculté de Théologie prostestante Université Marc Bloch <[email protected]> L’utilisation de l’image dans l’enseignemenrt de la religion Remarques préliminaires et définitions ■ 1) Importance du contexte Dans ce qui suit, je me placerai du point de vue du protestant luthérien alsacien que je suis et qui a à faire professionnellement avec cette confession, puisque j’enseigne la théologie pratique ou pastorale, ce qui requiert une bonne connaissance du terrain et un contact quasi permanent avec lui. Cet arrièreplan sera peut-être perceptible dans ce que je serai amené à dire, mais j’espère cependant que mes réflexions et propos sauront dépasser l’horizon purement confessionnel et régional et se révéler pertinents dans d’autres contextes religieux. Je ferai également, – et je ne suis évidemment pas le seul à tenir cette position – une distinction entre l’enseignement de la religion en milieu scolaire et l’enseignement de la religion au sein d’une communauté croyante, dans le cadre de la catéchèse paroissiale ; les objectifs ne sont, en principe, pas les mêmes dans les deux contextes. Dans le milieu scolaire, dans l’École laïque et au niveau du Ministère de l’Éducation Nationale (et même si l’Alsace et la Moselle ont un statut particulier à cet 94 égard), on a bien pris conscience, assez récemment, de l’importance de promouvoir ce que l’on a coutume d’appeler la culture religieuse. L’objectif explicite est alors de familiariser les apprenants avec telle ou telle religion ou confession, afin qu’ils puissent la situer dans l’histoire, et en connaître les origines, les sources (d’où aussi l’appellation de culture biblique, quand la source est la Bible), son ou ses fondateurs, et ce en-dehors de toute référence ecclésiale (hormis en Alsace et en Moselle). La matière sera, ou devrait alors être – je suis prudent – pensée et dispensée selon les mêmes critères que les autres disciplines scolaires. L’accent sera mis sur un certain nombre de savoirs et de savoir-faire, même si le savoirêtre n’est pas absent, ou ne devrait pas l’être – mais cela est une autre histoire. Par contre, dans le cadre d’une communauté croyante, l’objectif de la culture religieuse existera certes également, mais d’autres objectifs, comme celui de la transmission de traditions, de valeurs, de doctrines, pour ne pas dire de la foi, ainsi que la recherche commune de sens seront au moins autant, sinon plus, présents. En principe on y évoquera davantage de questions existentielles (telles que celles de Dieu, de la personne humaine, de la relation à autrui, de naître, vivre, mourir, renaître), que de questions de pure connaissance.1 Bernard Kaempf La différence au niveau des objectifs se marquera déjà dans l’appellation, car on parlera rarement d’enseignement de la religion, mais plutôt de catéchèse (paroissiale ou ecclésiale), – du moins dans le cadre de la religion chrétienne – et on mettra au moins autant l’accent sur le savoir-faire (célébrer, prier) et le savoirêtre (éthique), que sur l’acquisition de connaissances pures. Si les objectifs sont différents, ou ne se recouvrent pas en totalité, la méthode d’enseignement, la didactique, sera de ce fait sans doute également différente, et, par là même, le statut des outils, parmi lesquels l’image qui nous intéresse plus spécialement ici, sera lui aussi différent. Je me situerai aujourd’hui très clairement dans une perspective de culture religieuse et ma préoccupation sera surtout d’ordre psychopédagogique et didactique, mais il me faudra quand même évoquer, au moins brièvement, le contexte de la catéchèse paroissiale. 2) L’image Le concept d’image est pris dans son sens et son acceptation les plus larges. Image désignera de façon globale le dessin, la peinture, y compris la peinture comme œuvre d’art2, les statues, mais aussi les dessins animés, les bandes dessinées, les photos, et tous documents disponibles actuellement sur supports audio-visuels, y compris les logiciels informatiques et les CDRom, en tant qu’ils sont des tentatives pour représenter des choses et des événements et les rendre présents et visibles, et en particulier pour donner accès à la dimension de l’invisible et du transcendant. Dans ce cas l’image sera considérée à la fois comme métaphore et comme symbole. Et puis j’ajouterai encore, que la parole elle-même, par les mots, les sons, les paraboles et la plastique employés, peut très bien être ou faire image. Il ne saurait évidemment être question de traiter ici toutes ces catégories d’images ; en procédant par touches, je prendrai deux exemples d’images modernes dont l’utilisation dans le cadre de l’enseignement n’est pas encore courante, mais qui pourrait se généraliser dans l’avenir : il s’agit d’un document sur CDRom et d’un ouvrage basé sur la publicité. L'utilisation de l'image dans l'enseignement de la religion Je me sens d’autant plus libre de proposer cette démarche que tout ou presque a déjà été dit au sujet des images au sens classique du terme. Un rappel historique relativement bref à ce sujet devrait donc suffire. Rappel historique ■ Ce bref rappel historique a pour but de montrer d’où nous venons, afin de mieux savoir où nous en sommes, à défaut d’être parfaitement au clair par rapport à ce vers quoi nous allons. Le débat concernant l’utilisation des images en Église ne date pas seulement du temps de la Réforme. La querelle des images (cf. Christus, 66ss) remonte aux VIe et VIIe s. et elle a ébranlé l’Empire romain d’Orient : la controverse tournait autour de la place de l’art dans l’Église. L’argument, devant l’envahissement progressif de l’image, était, déjà à ce moment-là, que le culte rendu au Dieu invisible est un culte « en esprit et en vérité » et qu’il n’a donc pas besoin des images. Si l’iconophilie a finalement triomphé, cela était dû en partie à une sorte de « purification » du culte de l’image, et en partie à une réflexion théologique autour de l’incarnation. Le raisonnement était le suivant : en Jésus-Christ Dieu lui-même prend corps et visage, et par lui la dimension de l’éternité entre dans l’histoire. L’incarnation de Dieu est l’événement décisif de l’histoire humaine, et cela nous autorise à faire des images et à nous appuyer sur des représentations visibles qui reçoivent un autre statut que celui qu’elles ont dans l’Ancien Testament. Cette dernière réflexion se concrétise dans des considérations pédagogiques et didactiques, qui ont été reprises et approfondies par la suite. C’est surtout le pape Grégoire le Grand qui aurait – je dis aurait, car cela est contesté par certains historiens, et je ne suis moi-même pas assez qualifié pour me prononcer – revêtu cette idée de son autorité et défini l’image chrétienne comme la Bible des illettrés ou des pauvres3. Cette formule qui convenait parfaitement à des objectifs didactiques, cultuels et pastoraux s’est imposée sans trop de peine. « Ainsi, dans sa définition de sa doctrine Illustration 1 – L’ascension de Jésus-Christ, in La Bonne Nouvelle, p. 188. 95 de la Biblia Pauperum, Grégoire le Grand prend soin de ne pas réduire l’image à être une simple répétition visuelle du texte ; à côté des deux fonctions principales qui sont celles d’instruire et de fixer la mémoire (anamnèse), l’image possède également une troisième fonction que Grégoire le Grand appelle la componction. Il s’agit d’une fonction affective, que l’on pourrait rapprocher [d’une] ‘esthétique de l’expérience’ : le fait de voir des scènes représentées suscite chez le fidèle une émotion qui favorise l’expérience religieuse. » (J. Cottin, Prédication et images, p. 635-636) Malgré cette argumentation, l’usage de l’image dans l’Église conduisit à une fixation sur le concret et le visible, à l’oubli de la transcendance, à une dérive païenne et à un détournement idolâtrique de l’image. C’est du moins le constat que firent les Réformateurs environ huit siècles après la mise en avant de la Bible des illettrés par le pape Grégoire le Grand. On sait que les Réformateurs s’élevèrent – mais à des degrés divers et variables – contre les abus qu’ils avaient constatés au sujet de l’utilisation des images dans le culte et les dévotions publiques et privées par le catholicisme de leur temps. Ils se référaient pour cela, comme cela avait été fait auparavant par certains théologiens chrétiens, ainsi que dans d’autres religions, aux interdictions de l’image faites déjà par l’Ancien Testament (Exode 20, 2-6) et aussi à l’invitation, dans le Nouveau Testament, d’adorer Dieu « en esprit et en vérité ». (Jean 4, 24) Martin Luther, que l’on dit de toute façon et sans doute à juste titre, être de tous les Réformateurs celui qui est le plus proche de la sensibilité catholique, ne rejetait pas totalement l’utilisation des images en contexte ecclésial, puisqu’il leur reconnaissait une valeur pédagogique. Bien qu’à ma connaissance il ne leur ait jamais appliqué cette dénomination, elles font en quelque sorte partie, pour lui, des adiaphora, des choses indifférentes ou secondaires. Son Grand Catéchisme était d’ailleurs illustré, alors que, paradoxalement, le Petit Catéchisme, destiné explicitement à l’usage des familles, au sein desquelles tout le monde ne savait pas lire, n’était, lui, pas illustré. Il est vrai aussi que des images et des symboles à contempler et à lire ou à interpréter existaient à l’époque à tous les coins de rue (églises, crucifix, calvaires, etc.). Jean Calvin et Huldrich Zwingli avaient, quant à eux, pris position pour un iconoclasme assez sévère et rigoureux, afin d’enlever du culte et de la pratique de la foi toute trace païenne. Ainsi, l’adoration, sous la forme de l’écoute de la Parole, devait se faire dans un espace le plus dépouillé possible, sans images, qu’elles soient sacrées ou non, sans statues, sans représentations, sans mobilier même, autre qu’une table pour l’autel et des bancs et chaises (les plus rudes et inconfortables possibles). Tout cela est relativement bien connu. Aujourd’hui les données ont un peu changé et évolué dans le protestantisme et il faut tordre le cou à un cliché encore trop répandu. Pour le dire avec J. Cottin : « On tend maintenant à différencier entre une tradition protestante, par nature iconoclaste, et la théologie protestante, plus ouverte à une certaine conception de l’image. Quant à la pratique ecclésiale actuelle, elle accueille même favorablement les images (catéchèse, mission, présence dans les médias, méditation, expression liturgique), mais sans que cet accueil soit, sauf exception, véritablement réfléchi, théologiquement, esthétiquement ou spirituellement. » (Encyclopédie du Protestantisme, article « Iconoclasme », p. 712)4 Les images trouvent maintenant leur place dans l’enseignement de la religion, d’une part, parce que l’on a bien compris et depuis assez longtemps, dans les Églises – protestantes incluses5 –, la nécessité de s’adresser et de parler à tout l’homme, et donc à tous ses sens, et pas seulement, comme c’est le cas pour l’emploi exclusif de la Parole, à l’intellect, à la pensée et à l’ouïe, et, d’autre part, parce que l’on a re-découvert l’importance de la communication non-verbale, dont l’usage des images fait partie.6 L’image sous toutes ses formes : dessins, peintures (dans des Bibles illustrées), statuaires, tableaux, photos, mosaïques, et plus récemment la télévision, le cinéma, la BD, les logiciels d’ordinateurs (ou les CDRom), voire la publicité, ont trouvé droit de cité et d’usage comme outils dans la catéchèse et l’enseignement de la religion dans le ou les protestantismes ; l’image y est considérée, non pas tant, comme ce fut longtemps le cas dans le catholicisme, comme ancilla theologiae, servante de la théologie, mais comme servante de la pédagogie et de la didactique. Ainsi l’illustration biblique, notamment, se porte plutôt bien et représente un moyen privilégié de transmission de l’histoire biblique à un public contempo- Illustration 2 – La résurrection de Jésus-Christ, in De la Bible à l’image, p. 127 96 Revue des Sciences Sociales, 2005, n° 34, “Le rapport à l’image” Bernard Kaempf rain qui lit beaucoup moins qu’autrefois et qui est assez déchristianisé. L’ouvrage illustré protestant qui a beaucoup marqué les esprits et qui a été en usage jusque vers 1960 date de la première moitié du XXe siècle et s’appelle La Bonne Nouvelle ; il devait familiariser les catéchumènes avec la Bible à travers le mode narratif. Nous présentons un extrait qui a trait à l’ascension de Jésus (voir illustration 1). Ce dessin ressemble beaucoup à celui qui figure dans un livre d’origine catholique (reproduit dans l’ouvrage De la Bible à l’image, illustration 2), mais où il représente en fait la résurrection de Jésus . Je voudrais ajouter encore un autre dessin, contenu lui aussi dans la même Bonne Nouvelle, car il a marqué – positivement mais surtout négativement – l’esprit de milliers de catéchumènes : c’est la représentation du « sacrifice d’Isaac » appelé aussi « ligature d’Abraham » (illustration 3) ; beaucoup de personnes se souviennent de ces dessins, et retrouvent derrière et grâce à eux le passage ou l’histoire biblique correspondant ; mais certaines disent également, et je l’ai entendu dire plus d’une fois, que c’est précisément cette image du sacrifice et de l’immense couteau qui les a traumatisés L'utilisation de l'image dans l'enseignement de la religion dans leur jeunesse et leur a fait prendre de la distance, aussi bien par rapport à ce Dieu cruel que par rapport à l’Église qui se réclame de lui. Les enseignants de religion comme ceux d’histoire connaissent tous bien l’empreinte durable, mais reposant malheureusement sur des bases souvent fausses ou caricaturales, que peut laisser dans l’esprit des élèves un film du genre peplum ou une bande dessinée consacré(e) à un sujet historique ou religieux. Ces réactions sont bien la preuve, s’il en fallait, que l’image est toujours ambivalente et sa lecture paradoxale, mais aussi que l’image est finalement ce qui reste lorsque l’on a tout oublié, car elle fixe la mémoire de manière beaucoup plus directe et efficace qu’un texte ou qu’une parole. C’est parce que l’on a bien pris conscience de cela, que l’on a fréquemment recours, surtout dans le protestantisme anglo-saxon, à des Bildpredigten, des sermons illustrés par une image (ou une peinture) montrée à l’assemblée cultuelle sous forme de diapositive et commentée en chaire par le pasteur. On aurait là en quelque sorte un moyen terme entre la culture biblique et la catéchèse dont il sera question plus loin. Illustration 3 – « Sacrifice d’Isaac » ou « Ligature d’Abraham », in La Bonne Nouvelle, p. 18 Je serais tenté de voir encore une trace de la différence entre approche catholique et protestante de l’image, dans le fait que du côté protestant, on confectionnera plutôt un CDRom avec le texte biblique et ses différentes langues originelles (hébreu et grec) accompagné d’un certain nombre de traductions (La Bible Online), et on y ajoutera comme seules illustrations quelques cartes géographiques qui sont, elles, difficiles à idolâtrer ; par contre, une maison d’édition catholique créera plutôt un CDRom très ludique et avec beaucoup de dessins, d’animations et de représentations, même en 3D (Jérusalem. La Terre Sainte…) C’est ce CDRom que je prendrai en guise de premier exemple de l’utilisation de l’image dans l’enseignement de la religion à l’époque contemporaine. Le CDRom Jérusalem. La Terre Sainte. Le temple ■ Ce CDRom est d’origine catholique. Les images qu’il nous montre ne sont pas des images de Dieu, mais des supports pour parler de Dieu, de son œuvre, de son peuple. Ce CD est conçu d’abord pour transmettre des connaissances sur un mode didactique assez classique, comme par un livre, mais avec cependant l’interactivité et la dimension ludique en plus (illustration 4). Il y a un premier enjeu et une critique tout à fait formelle liés à ce CDRom, à savoir qu’il n’est pas imprimable dans sa totalité. Il est dommage que l’on ne puisse en saisir et imprimer que la partie Documents : mais cela en fait déjà un instrument de travail qui dépasse les possibilités généralement offertes dans un cadre individuel ou en groupe (avec des ordinateurs mis en réseau). Il y a cependant des enjeux plus importants, voire existentiels. Il est certain qu’en quittant les images, l’utilisateur de ce CDRom, qu’il soit enfant ou adulte, pourra avoir appris quelque chose et accru ses connaissances bibliques, historiques et développé sa culture religieuse concernant les trois religions monothéistes. Il pourra même évaluer lui-même ses connaissances à l’aide des jeux proposés et se délivrer un diplôme sanctionnant la qualité de son 97 savoir, en le tirant sur son imprimante. Il s’agit donc d’une démarche didactique presque complète, sauf qu’il y manque la dimension sociale et communautaire de la relation avec les autres, ce qui représente à mon avis une lacune et un enjeu majeurs. L’utilisation des images du CDRom peut se faire de manière solitaire, alors que, s’agissant de religion, dont la manifestation comprend toujours une dimension horizontale, sociale, relationnelle, voire communautaire, on s’attend – et cet aspect des choses est fondamental – à ce qu’il y ait un médiateur des images, un tiers qui les expose et les explique. Les CDRom font partie du règne de l’immédiateté et de la virtualité, et pour un enseignement vivant – surtout dans le cadre de la religion –, il convient donc de les accompagner, et la question de l’incarnation à travers la relation humaine se pose. Pour que l’image dise et exprime le maximum de ce qu’elle peut dire, il faut la compléter par un acte performatif. Cet acte pourrait consister, d’une certaine manière, dans les opérations faites sur et avec l’ordinateur. Mais l’ordinateur et son logiciel, pour interactifs qu’ils puissent être, ne remplaceront jamais le tiers incarné, le médiateur et aide à l’interprétation des images auquel on devrait avoir droit dans le cadre de tout enseignement. Il manque donc, quand ce genre d’images est utilisé de manière solitaire, le vis-à-vis, le pédagogue, le mentor, autrui en somme ; car à quoi bon un pur savoir, à usage purement interne, personnel et individuel, surtout à propos d’une matière qui s’appelle la religion ? Derrière cette question de pédagogie et de didactique de l’utilisation des images virtuelles se profile donc bien une question d’ordre social et éthique.7 A cela s’ajoute encore une question d’ordre théologique : à force de présenter et de côtoyer des images virtuelles, qui sont pourtant en rapport avec la relation entre Dieu (ou la transcendance) et les Hommes, ne risque-t-on pas de voir se renforcer l’idée que Dieu ou la transcendance est lui-même virtuel, une espèce de deus ex machina, donc finalement inexistant ? Marshall McLuhan a dit, sans doute fort justement que le médium est le message et même Le Message, ajouterais-je, mais en l’occurrence l’utilisateur du CDRom en question devrait prendre conscience que le Message est encore bien plus que le médium, parce qu’il le dépasse. CatéPub ■ Le second exemple que je voudrais présenter est celui de Catépub. J’exposerai d’abord les réflexions méthodologiques préliminaires et la démarche didactique mise en œuvre par les auteurs de l’ouvrage. L’utilisation des images de la publicité est inductive, puisqu’elle s’appuie sur un phénomène universel et bien connu, celui de la publicité ; l’image et la publicité sont ici utilisés comme support pour accéder à une connaissance de la Bible. A partir d’images et de clichés, qui ont souvent trait à la religion, parce que cette dernière en fait régulièrement usage, on essaie de remonter aux textes bibliques sous-jacents, de les reconstituer et de les retrouver à partir des bribes et éléments de connaissance qui demeurent dans notre culture ambiante. La sociologie et la psychologie (surtout d’obédience jungienne) ont bien montré combien « les anciens mythes, les archétypes, les grands thèmes religieux participent de manière vivante à l’imaginaire contemporain qu’ils contribuent à nourrir. » (J. Cottin, Le sacré dans la publicité, p. 73) Catépub contient d’abord une excellente introduction sur les techniques de persuasion de la publicité qui, parce que toute image est polysémique, peut lui faire dire à peu près tout (et n’importe quoi). Dans les lignes qui suivent, je reprendrai assez fidèlement cette introduction. (p. 6ss) Le discours toujours grandiloquent et exagéré de la publicité a pour but de convaincre et de faire croire. Le recours aux mythes – ces derniers se caractérisent par leur refus d’expliquer et leur regard stéréotypé sur les choses –, et le recours au religieux en général, et Illustration 4 – Aperçu du texte de présentation du CDRom Jérusalem. La Terre Sainte. Le temple 98 Revue des Sciences Sociales, 2005, n° 34, “Le rapport à l’image” Bernard Kaempf au christianisme en particulier, fournit un apport iconographique considérable aux publicitaires. Selon Régis Debray, – et c’est une autre façon d’exprimer ce qui a été dit plus haut – « l’image, en Occident, est née avec la représentation du Christ. (…) le verbe s’est fait chair. Or, la chair, ça se voit. On peut donc voir le verbe. L’image c’est le corps, et le corps humanise l’esprit saint. L’image, facteur d’humanisation de l’absolu, a rendu Dieu sensible, charnel, aimable. (D’après une interview dans Télérama, nov. 1992) A côté de cela il faut encore mentionner le recours de la publicité aux questions existentielles que sont : le souci de réussite, la peur de vieillir, de mourir, le désir de plaire, la santé, l’idéal de beauté, la recherche de la convivialité dans les agglomérations urbaines, les fantasmes, la quête d’identité, et encore le souci d’être bien. La publicité prend donc bien en compte les questions que se posent habituel- L'utilisation de l'image dans l'enseignement de la religion lement les adolescents, et elle intègre aussi celles qui ne sont pas explicitement religieuses ou liées à la vie de l’Église pour les utiliser à ses propres fins. Ces questions peuvent être formulées ainsi : Qui suis-je ? À quoi est-ce que je sers ? De quoi ai-je besoin ? À quoi est-ce que je me réfère ? 1) Objectifs Les objectifs d’un enseignement de la religion à partir de la publicité peuvent se décrire de la manière suivante : – apprendre à regarder et à voir ce qui est montré, mais aussi ce qui est caché – donner envie de décrypter l’image publicitaire : en décodant l’ironie, le second degré ; en se familiarisant avec les symboles ; en analysant ce que la publicité dit de moi, des autres, du monde et de Dieu ; en percevant le rôle sous-jacent de la culture religieuse dans la publicité. Dans un premier temps, estiment les auteurs, il suffira de reconnaître l’al- Illustration 5 – Publicité du BHV (Catépub, planche n° 9) lusion qu’une publicité fait à un texte biblique sans que ce dernier ait besoin d’être connu. « La catéchèse a pour but de conduire à l’autonomie de la personne humaine, c’est-à-dire à la liberté de croire, de penser, d’agir, de juger sur la base de la gratuité du salut. » (Texte du Synode de Nantes de l’E.R.F., cité p. 10) Ensuite il faudra : – se confronter aux textes bibliques et se repérer – apprendre à dire Dieu avec le support de l’image. Avec une telle démarche et un tel objectif, nous nous trouvons à la frontière des deux types d’enseignements que sont la culture religieuse et la catéchèse en Église, dont il a été question plus haut. 2) Grille d’analyse L’ouvrage fournit également une grille d’analyse des publicités, une grille dont les points forts se rapportent : au support de la publicité (journal, panneau, télévision) ; à la date de parution ; au destinataire et au commanditaire. Puis vient la description visant à faire l’inventaire de tout ce que l’on voit / lit, avant même de procéder à quelque interprétation que ce soit : en vocabulaire technique, cela s’appelle la dénotation (ce qui se trouve à l’intérieur de l’image). Le description est suivie de l’interprétation, qui met l’accent sur les aspects suivants (p. 16s) : – la symbolique de l’image et l’importance du non-dit. L’image est presque toujours porte-parole d’un discours implicite : « l’image est associée silencieusement à un texte sous-entendu » (Serge Tisseron) – les allusions culturelles (ou connotations) avec, plus spécialement, les allusions à des textes et à des mythes, ainsi que les allusions iconographiques Un autre point consiste à être attentif aux effets de style ou à l’argumentaire. Il s’agit de faire trouver et de mettre en relief l’art de convaincre (la rhétorique) ou les techniques de persuasion dont se sert la publicité ; les deux procédés le plus souvent utilisés en publicité étant ceux de l’opposition et de la comparaison. A titre d’illustration et en vue d’une réflexion critique et pratique concernant la démarche ainsi décrite, je présenterai maintenant un panneau publicitaire mentionné dans l’ouvrage Catépub.8 99 3. Analyse du panneau publicitaire B HV La publicité en question est datée de décembre 1996 et a pour cible le grand public, et plus particulièrement les citadins parisiens (cf. p. 33s, illustration 5). Le commanditaire en était le grand magasin BHV, le Bazar de l’Hôtel de Ville. On peut voir sur l’affiche : à gauche, deux poupons identiques, langés et couchés sur de la paille, flanqués d’un encart informant sur les dates d’ouverture du magasin ; à droite : le slogan et, en-dessous, le logo du BHV ainsi qu’une carte de paiement Cofinoga. On peut lire : le slogan « Pour Noël, le BHV double vos Points Ciel », et deux dates d’ouverture du magasin, les « 15 et 22 décembre ». Quelles sont les interprétations possibles de cette image ? Il n’est pas fait mention explicite des deux jours correspondant aux dates d’ouverture indiquées ; en fait, il s’agit des deux dimanches qui précèdent Noël et pour lesquels le BHV sera exceptionnellement ouvert. Pourquoi ne pas l’avoir précisé ? Était-ce donc tellement évident pour le public ? Pourquoi le non-dit ? Serait-ce parce qu’un magasin ouvrant le dimanche était médiatiquement incorrect il y a quelques années encore ? Il est à noter aussi que l’on ne montre pas des vrais bébés ! Pour ce qui est de la symbolique de l’image, le contexte de parution (un peu avant Noël) détermine à 100% le message. En montrant deux poupons (et non de vrais bébés), le BHV met en scène des jouets qui évoquent évidemment une invitation à faire ses achats de Noël. La publicité joue surtout sur le chiffre 2 : – dans le slogan, puisqu’il s’agit de « doubler les Points Ciel » – dans l’image qui montre deux poupons, qui peuvent induire le message suivant « il n’y a pas un Jésus mais deux: il y a deux fois plus de sacré » (J. Cottin, Le sacré dans la publicité, p. 59) – deux dimanches exceptionnellement ouverts (15 et 22 décembre). L’argument consiste à faire croire que dépenser, c’est gagner : si on achète, on gagne des « Points Ciel » et le message qui doit s’en dégager suggère : si vous achetez au BHV, vous êtes gagnant sur toute la ligne, le BHV vous double la mise ! Il ne faut sans doute pas chercher trop loin pour trouver les allusions culturelles : – avec un bébé langé et posé sur la paille, il est relativement difficile, même dans une civilisation dite post-chrétienne, de ne pas penser à la naissance de l’enfant Jésus ! L’évangéliste Luc, nous apprend que Jésus est né dans une étable. Quant aux langes, il s’agit d’un anachronisme (car les bébés d’aujourd’hui portent tous des couches !) qui renforce encore l’allusion à l’enfant « emmailloté » de l’évangile (Luc 2, 7) – le « ciel » est également une thématique biblique, avec notamment la mention au début du Notre Père : « Notre Père qui es aux cieux... ». Ainsi Jésus est annoncé comme étant le fils de Dieu (Luc 1, 32-35) : on pourrait encore dire le fils ou l’envoyé du ciel. Le BHV offre des « Points Ciel » à ses acheteurs, c’est-à-dire des possibilités intéressantes de réductions, notamment pour des voyages en avion. Les lettres majuscules et l’image du ciel font de ces réductions une offre quasi divine ou sacrée. Le savoir que l’on peut en tirer touche assez directement à la théologie, ce qui montre bien que l’ouvrage se situe à la lisière des deux projets d’enseignement que sont la culture religieuse, d’une part, et la transmission de traditions, voire de la foi, d’autre part. Au plan pédagogique et didactique, cette publicité permet des exploitations multiples et peut être une bonne occasion : – d’aborder le mythe religieux et social de Noël – de parler du temps de l’année ecclésiastique et de sa liturgie – de parler de déguisement, aussi ; la méthode du Noël publicitaire est le recours au déguisement, c’est-à-dire à un autre habillage des produits (biens et services) ainsi que des symboles et images qui s’y rattachent. Un exemple en est le sapin et le Père Noël, qui sont des symboles d’origine païenne christianisés – de parler du Père (Noël) en n’oubliant pas le Fils (de Dieu). Le Père Noël est, on le sait, une habile récupération commerciale de la tradition chrétienne ; il a le titre de «père» et il donne gratuitement 100 Revue des Sciences Sociales, 2005, n° 34, “Le rapport à l’image” (à condition que les parents achètent !). Il n’est pas celui qui s’agenouillerait devant un tout-petit en signe d’humilité et d’adoration comme l’ont fait les mages, mais il est celui devant lequel s’agenouillent des millions d’enfants en adoration, celui devant lequel s’ouvrent des millions de porte-monnaie (p. 112s) – de parler de la date même de Noël qui est la conséquence d’un choix tardif. Ce choix s’est fait dans un contexte de concurrence des religions ; bien que décidée au 4e siècle, la date même de Noël relève déjà de ce que l’on pourrait appeler une logique publicitaire ou une stratégie de communication de la part de l’empereur romain Constantin – de parler de Noël comme fête populaire et quasi universelle. Noël est une fête qui célèbre une naissance ; autrement dit, Noël est ce qui nous ramène aux sources mystérieuses de la vie – de parler, à travers les « rois mages », de politique. « Quel rapport entre la fête de Noël et ce monde de la politique et de la science, ce monde sécularisé, pour ne pas dire païen ? Réponse : les rois mages. La politique était leur métier de rois. La science, leur vocation de mages. L’or, l’encens et la myrrhe étaient les ingrédients de leurs fonctions, probablement même de leurs cultes païens. Joseph et Marie n’ont pas refusé ces présents insolites. Ils magnifiaient l’Enfant. » (p. 113) Enjeux de l’utilisation de ces « images d’images » ■ Ce matériel didactique est pour ainsi dire une réaction à l’idolâtrie du monde et de l’image à travers l’analyse de l’image, ou des images d’images dont est souvent faite la publicité. Mais cette démarche apporte un plus par rapport à la lecture d’images autres que celles de la publicité et à la connaissance à laquelle cette lecture donne lieu en matière de religion, puisqu’elle offre également l’acquisition d’une technique de décryptage des images qui peut être fort utile dans la vie de tous les jours. Comme l’écrit Gilbert Vincent : « Selon ces partisans d’un réformisme culturel, la tâche des héritiers d’un protestantisme Bernard Kaempf attaché à la défense du partage du sens et aux grands desseins pédagogiques du siècle dernier serait de contribuer à la diffusion d’un nouveau savoir-lire, mais concernant cette fois l’image. » (Encyclopédie du Protestantisme, p. 236) On peut donc se servir, en l’occurrence, de la publicité comme d’un instrument didactique, non pas pour manipuler, mais bien au contraire, pour introduire, par une pédagogie inductive, à la Bible. Cela ressemble un peu à la technique du judo, qui a fait ses preuves et qui consiste à ne pas contrer ou s’opposer, mais plutôt à tirer dans le même sens. En effet, pourquoi donc nier ou condamner la profusion de symboles religieux dans la publicité, et ne pas les mettre à profit dans une démarche herméneutique renouvelée du discours chrétien ; et pourquoi pas, selon l’âge du public auquel on a à faire, l’inviter à se poser la question de l’origine de ces symboles et, partant, de l’auteur ou du créateur des archétypes qui sont à la base des mythes et des images de la publicité, pour se demander qui peut bien les avoir imprimés (typein) un jour dans l’âme humaine ? Dans le cadre de la démarche de Catépub, l’image devient en quelque sorte un passage, une porte pour entrer dans la Bible et la comprendre. Mais la critique émanant de certains théologiens peut alors consister à dire que, de centrale qu’elle devrait être, l’Ecriture devient en quelque sorte périphérique, et que l’image en général, et la publicité en particulier, sont utilisées comme prétexte au texte biblique, qui ne devrait pas avoir besoin d’un tel préalable, puisqu’il est censé se suffire à lui-même. Mais, par ailleurs, les images de la publicité qui nous sont si familières peuvent favoriser, plus que d’autres, la réflexion et l’attitude critiques à l’égard de valeurs propagées par la civilisation ambiante, soit pour les approuver, soit pour s’en démarquer. Cette démarche relève à la fois de l’éthique, de la religion et de la culture religieuse, voire de la transmission de valeurs, mais elle ne prétend évidemment pas concerner la transmission de doctrines et de traditions religieuses particulières et elle ne cherche certainement pas à transmettre la foi. La transmission des doctrines et de la foi est pourtant l’un des objectifs privilégiés de l’enseignement de la religion L'utilisation de l'image dans l'enseignement de la religion dans les communautés croyantes, dans les paroisses et dans les Églises, y compris dans ce que Bucer appelait les Églises de maison, les familles. Ces instances ont, bien sûr, également recours aux mêmes images classiques que celles que nous venons d’évoquer dans le point historique, et elles se servent même de plus en plus de la version plus moderne des images évoquée plus haut. Mais ces images, si elle sont utiles voire nécessaires, ne sont néanmoins pas suffisantes pour susciter et transmettre la foi et trouver la réponse à la quête de sens de la part de l’Homme. Cependant Catépub est manifestement à cheval sur les deux objectifs que sont la transmission de connaissances (qui est clairement, mais aussi exclusivement, l’objectif du CDRom que nous avons présenté) et la transmission de la doctrine et de la foi. Dans Catépub l’image doit implicitement conduire au texte de la Parole, alors que le CDRom doit accroître, par un support didactique adapté à notre temps, la connaissance en matière de religion(s). La polysémie des images de la publicité et leur lecture critique peuvent contribuer à une rencontre plus personnelle avec les images, à une attitude responsable vis-à-vis de certaines orientations et propositions de sens, donc à une ébauche de foi personnelle, mais ceci se fera avec l’aide d’un tiers, qui peut d’ailleurs être et sera souvent un groupe ou une communauté. L’ouvrage Catépub est donc bien un instrument de travail approprié en vue de l’utilisation de l’image, à la fois dans le cadre de l’enseignement de la religion visant l’acquisition d’une culture biblique et dans le cadre de l’enseignement catéchétique, dont il sera encore question maintenant. Images et enseignement de la religion dans un cadre communautaire ou ecclésial ■ Cet enseignement, appelé plus communément catéchèse paroissiale, est aussi conçu comme une initiation, puisqu’il a pour objectif de conduire dans la communauté, d’apprendre à connaître ses credos et ses traditions, et de faire participer le catéchumène, lorsqu’il les connaît mieux, à toutes les formes d’expression de la vie de son Église. Cette connaissance est, dans ce contexte, à prendre non seulement au sens de savoir, mais aussi, au sens étymologique du mot, de naître avec : naître non pas avec une image, bien sûr, ni même seulement avec une parole, mais bien avec un être doué de parole, avec un autre ou l’Autre, et même avec des autres, tous les membres de la communauté. Pour le dire autrement, et avec des termes plus classiques, il s’agira d’avoir des connaissances, des savoirs et des savoirfaire auxquels les images, leur méditation et leur interprétation critique peuvent grandement et utilement contribuer : le concept allemand de Erfahrung exprime bien cette idée-là. Mais ces connaissances et savoirs doivent être complétés d’Erlebnis(se), au sens d’expérience(s) entraînant un changement en profondeur, un bouleversement et une remise en question de toute la personne. Cela ne se fera ni par un enseignement traditionnel, ni avec des images, au sens habituel du mot. D’ailleurs le verbe faire est inapproprié, car une telle expérience (Erlebnis) ne se provoque et ne se commande pas, mais elle s’impose, car elle a trait au numineux. Elle peut cependant être favorisée par la parole et le témoignage d’autrui, par des histoires de vie, par des narrations diverses qui font image ; mais ce sont alors des images verbales, par les paraboles, métaphores, visualisations, symboles et même figures rhétoriques qu’elles contiennent. Le Erlebnis sera également favorisé par l’attention prêtée aux visions et aux images oniriques qui s’imposent à nous, et qui ont pour caractéristique que nous les entendons souvent autant que nous les voyons, et qu’il faudrait toujours interpréter avec l’aide et en présence d’un ou de plusieurs tiers – ce qui souligne encore une fois combien la dimension communautaire déjà évoquée à plusieurs reprises est importante. Les images des rêves ne contribuent que rarement à l’augmentation du savoir, mais elles permettent de passer du sehen au schauen, du voir/regarder à la vision. Ces images-là permettront d’avoir non seulement un aperçu des choses visibles, mais de jeter un regard dans le domaine de ce qui dépasse le visible ; elles sont 101 susceptibles, comme le dit Ricoeur en parlant de l’œuvre d’art, « de ‘reconfigurer’ le monde de l’expérience personnelle ». Ici et ainsi l’image devient signe, au sens de ce qui signifie et qui fait signe, qui renvoie à autre chose qu’à elle-même et qu’à nous-même. Conclusion ■ « Anthropologie de la relation à l’image : du culte à la manipulation et à la destruction », tel était le thème du séminaire. J’ai voulu montrer que dans le protestantisme il ne saurait être question de culte de l’image. Par contre on peut parler, me semble-t-il, d’instrumentalisation de l’image : si cette dernière est correctement manipulée (au sens de si on sait bien s’en servir), elle s’avère être un outil de premier ordre pour élaborer un savoir et des connaissances, y compris dans le domaine de la religion et de la culture religieuse. Cependant notre image intérieure – celle qui est en relation avec les visions et les rêves et qui est souvent à la base d’une expérience (Erlebnis) susceptible d’initier la foi – ne peut, quant à elle, pas être instrumentalisée ou manipulée, et il faut s’en réjouir, car cela relativise tout le reste. Ouvrages et articles cités Documents didactiques cités Encyclopédie du Protestantisme, P. Gisel (éd), Paris, Cerf, Genève, Labor et Fides, 1995. (articles image, iconoclasme, illustrateurs de la Bible, art, communication, culture) Jérôme Cottin, « Prédication et images dans le christianisme contemporain », in Cristianesimonelle storia, Bologne, 1993, p. 625-646 Jérôme Cottin, « Le sacré dans la publicité. Une analyse théologique », in Variations Herméneutiques n° 11, Neuchâtel, IRHS, sept. 1999, p. 69-78 Alain Roy, « De l’image du catéchisme à l’image dans les catéchismes : l’image dans les catéchismes du début du XXe siècle », p. 125-155, in De la Bible à l’image. Pastorale et iconographie, sous la dir. de Claude Coulot et René Heyer, Strasbourg, PUS, 2000 Théo Pfrimmer, Freud lecteur de la Bible, Paris, PUF, 1982 (=Philosophie d’aujourd’hui) Jérusalem. La Terre Sainte. Le temple au temps d’Hérode le Grand. Strasbourg, Ed. du Signe. [CDRom] Titia Koen, Marie Hélène Luiggi, Catépub. Quand la publicité parle de nous. Paris, Société des Ecoles du Dimanches, 2001 La Bible Online. Editions Clé, 1997 (avec textes bibliques français, grec, hébreu ; cartes ; dictionnaire biblique...) [CDRom] Georges Weick, La Bonne Nouvelle, Strasbourg, Editions Oberlin, 1949² (Illustrations de Schnorr von Karolsfeld) Ouvrages et articles non cités Pierre-Marie Beaude, « L’auteur et l’illustrateur en catéchèse », p. 207-219, in De la Bible à l’image. Pastorale et iconographie, sous la dir. de Claude Coulot et René Heyer, Strasbourg, Presses universitaires, 2000 Yves-Marie Blanchard, « L’ambiguïté du voir selon le VIe Evangile », p. 26-35, in Christus, n° 181, janvier 1999 (=La traversée des images. Regarder autrement.) Jérôme Cottin, « Luther théologien de l’image », in Etudes Théologiques et Religieuses, 1992/2, p. 561-567 Bernard Reymond, Le protestantisme et les images : Pour en finir avec quelques clichés, Genève, Labor et Fides, 1999 Claude-Henri Rocquet, « Image et icône. Une purification du regard », p. 52-63, in Christus, n° 181, janvier 1999 (= La traversée des images. Regarder autrement.) Chantal Leroy, « L’Eglise et les arts visuels », p. 64-75, in Christus. n° 181, janvier 1999, (=La traversée des images. Regarder autrement.) Olivier Millet et Philippe de Robert, Culture biblique, Paris, PUF, 2001, (=Premier cycle), en particulier les p. 407-470 Anne le Pas de Sécheval, « La réforme des images », in Le Monde de la Bible, n° 139, nov.-déc. 2001, p. 46-51 Pascal Sevez, « Habiter l’ambivalence des images », p. 76-84, in Christus. n° 181, janvier 1999 (=La traversée des images. Regarder autrement.) 102 Revue des Sciences Sociales, 2005, n° 34, “Le rapport à l’image” Documents didactiques non cités Encycl’EYE. Le monde de la Bible dans vos neurones, 71260 St Albain, Ed. Clé, [CDRom] Ichthus. Jeu multimédia. Editions Clé (7500 questions autour de la Bible). (2 disquettes) Jésus et son message de libération, P. Thivollier et P. Rousseau, Paris, Ed. Cheminements, 1975 [Bande dessinée en deux tomes] Rome et le monde. Histoire, sagesse, art, Strasbourg, Ed. du Signe. [CDRom] Notes 1. Encore qu’il y ait souvent eu des examens pour les confirmands ou catéchumènes, afin de tester les connaissances de ces derniers à l’issue du catéchisme – car finalement les connaissances, c’est ce qu’il y a de plus facile à évaluer, contrairement à la foi. 2. Dans le cadre de l’enseignement à des enfants et adolescents, il n’y a peut-être pas lieu de distinguer entre image, peinture et peinture comme œuvre d’art au sens habituel du terme. Par contre, avec des adultes, la distinction est utile et importante, car l’œuvre d’art est susceptible de susciter chez eux une Stimmung, une atmosphère, un sentiment, un affect d’ordre numineux (ce qui peut aussi être le cas chez les plus jeunes), et ils sont plus facilement à même d’en parler, de les exprimer pour, peut-être, les perlaborer et aller plus loin dans l’expérience. 3. Grégoire le Grand avait forgé cette formule pour répondre à Sérénus, l’évêque iconoclaste de Marseille, en l’an 600. Une autre appellation encore était litteratura laicorum, les lettres ou la littérature des laïcs. 4. Il reste malgré tout quelques critiques très sévères (cf. Encyclopédie, p. 235, Vincent, article « Communication ») : « A partir de l’accent mis par Calvin sur la simplicité du sens, on peut tracer diverses lignées divergentes de la manière protes- Bernard Kaempf tante d’aborder certains problèmes dits de communication. D’une part, comme il vient d’être dit, on peut chercher à prolonger la critique des Réformateurs contre l’apologie du « livre des idiots », c’est-à-dire contre une culture duale impliquant qu’on se résigne à considérer qu’une partie – la majorité – des gens ne peut prendre part qu’à une communication sommaire. (…) Dans sa version la plus dure (cf. Jacques Ellul) la critique de la passivité (écho de la critique de la « foi implicite ») irait jusqu’à mettre en cause la capacité des médias audio-visuels à faire autre chose qu’anesthésier le goût pour la responsabilité interprétative. » 5. Le concepteur juif de la Bible (AT) que Freud avait eue entre les mains, notamment quand il était enfant, avait également conscience de l’importance didactique des images. Th. Pfrimmer, écrit : p. 268, à propos de la Bible de Philippson (datant du milieu du XIXe siècle) : « Cet appel constant à se représenter les faits, les événements, les personnes, appuyé par l’abondante illustration de qualité, favorise grandement la réflexion. Le support visuel des gravures favorise un mouvement mental en direction des temps historiques dont parlent les textes et de l’archéologie qui les fait réapparaître sous les yeux du lecteur ». 6. Et ceci notamment à cause de la faiblesse, l’imbecillitas de nos sens et de notre compréhension, comme disait Calvin en parlant des sacrements. 7. L’extrait suivant résume bien ce que je veux dire. « Monique Linar insiste sur le fait que l’enseignement ne se réduit pas à traiter et à diffuser de l’information. ‘C’est un acte individuel complexe qui se déroule dans la durée à partir des interactions du sujet avec son environnement’. L’apprentissage, ce sont des émotions, des regards, des gestes, des attitudes, aussi bien entre élèves qu’avec l’enseignant. Un enseignement à distance peut à cet égard servir d’exemple: confronté à des taux élevés d’abandon, il cherche systématiquement à resocialiser l’acte d’apprendre par des échanges entre pairs, des visioconférences, des rédactions collectives, un suivi individualisé, ce qui contribue d’ailleurs à en augmenter le coût. Reste que l’absence de rapports immédiats pose problème. Est-il plus facile d’envoyer un mail à son tuteur électronique que d’aller voir l’enseignant à la fin du cours ? Philippe Breton critique ce monde sans rencontre, où il faut se séparer physiquement pour mieux communiquer (virtuellement). » (Daniel Rallet in Pour n° 69, déc. 2000, p. 15). L'utilisation de l'image dans l'enseignement de la religion 8. Mon choix avait été dicté par le fait que cette publicité était d’actualité au moment où avait lieu le séminaire, au mois de décembre, et non pas pour manipuler l’auditoire en essayant de faire passer un message subliminal ! 103