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L’humour : entre acte politique et intérêts communs
Emmanuel Choquette
Université de Sherbrooke
Introduction
En dépit des travaux de plus en plus nombreux liant humour et politique 1 , certains
doutent encore du sérieux des études en la matière. Ce n’est pas étonnant pourrait-on
croire en raison de la nature du sujet, mais d’autres facteurs peuvent sans doute expliquer
cette perception. On peut par exemple penser que le genre humoristique, souvent associé
aux arts populaires, s’avère de ce fait considéré comme une simple distraction ou un
champ artistique négligeable. Mais plus fondamental encore, d’autres avancent que le
prisme d’analyse des phénomènes politiques tend à se rétrécir, que les recherches
actuelles en science politique laissent peu de place aux objets d'étude moins classiques.
C'est ce qui emmène Franck Leibovici et Valérie Pihet à prétendre qu'il faut élargir les
champs de recherche. « Tout se passe aujourd’hui comme si le politique ne pouvait plus
être synonyme que de pouvoir, dérision, désillusion, militantisme, etc. N’avons-nous pas
d’autres outils à notre disposition pour nous saisir du politique? 2 » Il peut donc en
résulter une difficulté parfois plus ou moins grande à considérer l’humour comme un
objet politique 3. En effet, il apparaît parfois difficile d’identifier à l’intérieur d’un propos
ou d’un discours humoristique 4 certaines composantes propres aux objets de la science
politique, notamment les notions de pouvoir, de puissance, d’intérêts communs, etc. Voilà
pourtant ce qui constitue en grande partie l’élément déclencheur de la rédaction de ce
document.
Partant d'exemple essentiellement québécois, tout en s'attardant légèrement à d'autres
régions du globe, cet article tentera d’identifier et de souligner certaines composantes
politiques se retrouvant de façon parfois explicite, parfois implicite dans le discours
humoristique. Comme on le constate à l’intérieur de la plupart des manifestations
culturelles, la part de politique peut en effet apparaître de façon plus ou moins évidente
selon les intentions de l’auteur ou du transmetteur du message. L’objectif premier est
clair cependant, celui de faire rire. Mais c’est bien connu, le rire comporte plusieurs
1
On peut souligner ceux de Robert Aird, de Julie Dufort, de Catherine Côté ou de Jérôme Cotte au Québec
ou ceux de Nelly Quemener en Europe ou les recherches de Aïssa Khelladi en Afrique du Nord ou
encore les travaux phares en matière d’humour et de politique de Joseph Boskin aux États-Unis pour
n’en nommer que quelques-uns.
2
Franck Leibovici et Valérie Pihet, « Pour une école des arts politiques? », Tracés. Revue de Sciences
humaines, Hors-Série, no11, 2011, p.117.
3
On peut penser entre autres à Bernard Voutat ou à Pierre Favre qui apporte un regard éclairant sur la place
des objets de recherche dans la science politique.
4
La majorité du texte se penche sur la part de politique dans le discours des humoristes. Cela dit, les
références aux termes discours ou propos humoristiques visent essentiellement à élargir le champ
considéré comme appartenant au domaine de l’humour. Ainsi, ce document inclut l’ensemble des
procédés humoristiques, notamment présent au cinéma, dans la caricature ou dans les arts de la scène.
Le critère principal étant avant tout celui de la forme du message, c’est-à-dire humoristique. On épouse
ici la position de Patrick Charaudeau qui considère l’humour comme un « acte humoristique ou de
discours humoristique comme stratégie d’échange langagier faisant l’objet de diverses catégories ».
Voir :
Patrick Charaudeau, « De l'ironie à l'absurde et des catégories aux effets », dans María Dolores Vivero
García (dir), Frontières de l’humour, Paris, L’Harmattant, 2013, p.15.
fonctions. L’une d’entre elles vise justement à calmer les esprits, à réduire les tensions. Et
cette fonction à la limite pacificatrice ou du moins, venant dédramatiser des situations
parfois délicates possède sans contredit une dimension politique. On conviendra en effet
que la dérision représente un outil efficace d’augmentation du niveau de tolérance des
individus.
Plaisanteries, railleries, moqueries sont reconnues dans la littérature
existante comme des formes particulières de communication qui assurent
certaines fonctions de régulation de l'ordre social, permettant ainsi
l'évacuation d'épisodes de stress, de traumatismes, de conflits ou de
tensions 5.
Toutefois, l'intention de l'auteur d’un discours humoristique n'est pas toujours de
raffermir le tissu social d'une collectivité ou de dénoncer les excès de pouvoir d'un chef
d'État ou d'un gouvernement. Tout comme le public ne considère pas nécessairement un
spectacle d'humour comme une manifestation politique, tant s'en faut. Est-ce à dire
cependant qu'en raison de la prédominance de la fonction divertissante d'un discours ou
d'un propos humoristique, toutes références à une dimension politique ou à une portée
politique de l'humour soient exclues? Bien sûr que non pourrait-on affirmer, mais en quoi
l'humour dans le sens le plus distrayant du terme peut-il être politique? Voilà une question
qui, semble-t-il, mérite que l'on s'y attarde un peu plus.
1. Problématique
Ce document vise ainsi à mettre en exergue ces deux facettes de l'humour politique et ses
principales composantes. La première, celle de l'humour en tant qu'acte politique ou en
tant que manifestation politique sans équivoque. La seconde, celle de l'humour comme
recelant une ou plusieurs dimensions politiques, de façon intentionnelle ou non. Des
dimensions de l'humour politique que l'on pourrait d'une certaine façon placer sur un
continuum, lequel comporterait alors l'éventail complet des degrés de politisation du
discours humoristique. Un spectre manifestement complexe et diversifié.
1.1 Humour et politique
C’est une évidence, diront plusieurs, le rapport entre humour et politique ne date pas
d’hier. Au rayon de la satire et de la caricature québécoise par exemple, les historiens
Robert Aird et Mira Falardeau nous rappellent « qu’entre 1837 et 1876, une cinquantaine
de journaux humoristiques sont nés dans les seules villes de Montréal et de Québec »6. Et
si l’humour politique demeure, comme tant de manifestations sociales et culturelles, le
produit de son temps, les thèmes abordés possèdent souvent un caractère intemporel.
Quand, dans Les Temps modernes, Charlot peine à visser les boulons des pièces qui
avancent sur un convoyeur qui ne s’arrêtera jamais, ce sont bien les excès ou l’efficacité,
selon les points de vue, de la production de masse et de la modernité que Chaplin vient
souligner à grands traits. Certains diront qu’il s’agit également du conflit entre l’individu
et la collectivité. Jusqu’à quel point doit-on mettre de côté ses aspirations personnelles au
5
Laurent Jérôme, « Les rires du rituel : humour, jeux et guérison chez les Atikamekw », Anthropologica,
Vol. 52, No. 1, 2010, p.90.
6
Robert Aird et Mira Falardeau, Histoire de la caricature au Québec, Montréal, VLB, 2009, p.7.
2
profit de la réussite collective? Ce sont également des thèmes importants dans l’œuvre de
l’humoriste québécois Yvon Deschamps à la fin des années 1960 et au début des années
1970. Dans ses monologues sur son « boss » ou sur les « unions », ce sont les
caractéristiques d’une société en pleine émergence qui sont décrites. Si, sans sombrer
dans la victimisation ou la révolte, Deschamps représente efficacement cet ouvrier
sympathique, plutôt soumis au patronat et à l’autorité et visiblement résigné à son sort,
c’est bien sur tout le contraire que veut exprimer l’humoriste.
Moi ça fait quinze ans que j’travaille à « shop », ça fait quinze ans qu’y a
pas d’union « quossa » donne? On n’a pas d’union pis ça empêche pas que
depuis l’année passée on a la semaine de cinquante-quatre heures. Et puis
on a notre congé à Noël « ou bedon » au Jour de l’an. Et puis l’été on a une
semaine de vacances payées. On la prend pas toujours, mais on l’a pareil 7.
La question qu’il pose en filigrane demeure on ne peut plus actuelle et comporte une
véritable portée politique. Comment, en dépit de ses contraintes, de son héritage culturel,
social et politique, un peuple peut-il s’affranchir? Et on peut ultimement se poser la
question : quelle place occupe l’humour dans ce processus?
1.2 Portrait actuel de l'humour
L'humour occupe un large espace dans le paysage culturel, au Québec certainement, mais
aux États-Unis et en France également. Au Québec, les spectacles humoristiques viennent
en tête de la plupart des indicateurs en matière d'offre et de consommation de spectacles.
D'après un rapport de Claude Fortier de l'Observatoire de la culture et des
communications du Québec, l'assistance à des spectacles d'humour est en hausse
constante et les revenus de billetterie ont connu une augmentation de 41 % en 2012 par
rapport à 2011 8 . Le rapport mentionne aussi que « la part des entrées aux spectacles
présentés en périphérie de l’île de Montréal est passée de 26 % à 38 % pour la chanson
francophone et de 30 % à 48 % pour l’humour » 9. S'ajoute à ce portrait l’existence du
Festival Juste pour rire, une des activités estivales les plus courues depuis plus de trente
ans au Québec et la création, il y a 25 ans, de l'École nationale de l'humour. Depuis ses
débuts, plus de 400 humoristes et auteurs d'humour sont d'ailleurs diplômés de cette
institution reconnue par le Ministère de l'Éducation, loisirs et sports du Québec 10. Dans la
province, les humoristes possèdent ainsi un véritable statut professionnel. Il s'agit ainsi
d'un métier que l'on peut apprendre à l'école, au même titre que tant d'autres professions.
Ce portrait démontre sans aucun doute que le domaine de l'humour ne peut être considéré
comme simple objet de divertissement. Du seul point de vue économique, on peut
convenir du poids substantiel que représente cette industrie, parce qu'il s'agit bien d'une
industrie, dans le marché de l'offre culturelle du Québec. Plus important encore, du moins
7
Transcription du monologue d’Yvon Deschamps Les unions « quossa » donne? Le propos est rapporté
dans sa forme originale incluant le respect des expressions typiquement québécoises. Voir :
Yvon Deschamps, Les unions « quossa » donne? Disque vinyle, Étiquette Polydor, 1969.
8
Claude Fortier, « La fréquentation des arts de la scène en 2012 », Optique culture, Institut de la statistique
du Québec, Observatoire de la culture et des communications du Québec, no 28 , 2013, p.1.
9
Claude Fortier, « La fréquentation des arts de la scène en 2012 » , […], p.1
10
École nationale de l'humour, Nos diplômés, http://www.enh.qc.ca/index.php/diplomes/, consulté le 4
juillet 2014.
3
en ce qui nous concerne, l’omniprésence du discours humoristique dans l’espace culturel
québécois vient justifier que l'on s'y attarde sur les plans social et politique. Et ce lien
entre la dimension sociale et la dimension politique de l'humour s'il est souligné au
Québec, s'avère aussi relevé aux États-Unis comme le démontrent les récents travaux de
Rachel V. Kutz-Flamenbaum.
Humor is fundamentally contextual and interactional. Humor is a cultural
product that relies upon shared norms and ideas. In order for a joke to
make sense it needs to reference recognizable cultural symbols and ideas
that are shared by both the joker and the audience 11.
Ce document rejoint en tout point la perspective de Kutz-Flamenbaum. À notre avis,
parce qu'il participe à la construction du contexte social et politique d'une société, le
discours humoristique mérite que l'on s'y attarde, non seulement dans une perspective
sociale, mais également dans une perspective scientifique.
2. Considération théorique
Bien que l’humour (politique ou non) ne soit pas nécessairement au centre des
préoccupations ou des enjeux de recherche en science politique, on peut tout de même
souligner des éléments théoriques pouvant s’y appliquer en totalité ou en partie. Si
certains auteurs abordent directement le sujet, d’autres en traitent indirectement ou
soulignent des notions conceptuelles transposables au procédé humoristique et à ses
répercussions. De fait, l’analyse des phénomènes politiques nous emmène souvent à
élargir les champs à considérer en tant qu’objets d’étude. On parlera ici de la part du
politique dans l’analyse du discours humoristique. Et c’est ici que se complexifie la tâche.
De fait, si l’on convient que l’humour peut comporter une dimension politique (le
discours politique lui-même n’est pas étanche au genre humoristique comme le souligne
Maria-Aldina Marques 12 ), il demeure passablement difficile d’en identifier avec
précisions les constituantes. À l’instar des autres phénomènes sociaux et culturels,
l’humour possède cette part d’intangibilité, voire d’insaisissable limitant la capacité
d’isoler des variables et des indicateurs précis. Comme le précise Jean-Herman Guay,
contrairement aux sciences naturelles où l’on peut maîtriser les principaux éléments
d’une expérience en laboratoire, « [c]es possibilités expérimentales sont rares, voire
impossibles, du côté des sciences sociales » 13. Il devient donc encore plus ardu d’évaluer
l’impact d’un discours humoristique sur les dynamiques politiques. C’est d’ailleurs en
partie à cause de ce constat que ce document propose avant tout une réflexion sur la
nature du lien entre humour et politique.
11
Rachel V. Kutz-Flamenbaum, « Humor and Social Movements », Sociology Compass, no 8, vol.3, 2014,
p.296.
12
Marques affirme en effet que « l’humour, bien qu’épisodique et contrôlé, n’est pas absent des discours
politiques. C’est le cas, par exemple, des débats parlementaires, où l’humour sert une stratégie de
confrontation et de construction d’un éthos d’homme d’esprit intellectuellement stimulant ». Voir :
Maria-Aldina Marques, « Politique, humour et campagne électorale. Les enjeux d’une politiquespectacle », Mots. Les langages du politique, no101, 2013, p.62.
13
Jean-Herman Guay, Statistiques en sciences sociales avec R, Québec, PUL, 2013, p.2.
4
2.1 Humour et action politique
Sans prétendre que l’humour peut constituer l’élément déclencheur d’une révolution ou
de profonds bouleversements au sein d’une société, il peut incarner à tout le moins
l’expression d’une résistance. C’est aussi ce que constate María Dolores Vivero García
dans son texte portant sur le rôle de l’humour dans la littérature française et espagnole en
précisant que « [l]’humour apparaît dans les deux contextes littéraires comme une arme
redoutable au service de l’écriture engagée » 14. Et cet acte tantôt de contestation, tantôt
de dénonciation, bien que mis en forme à travers un procédé humoristique, n’en demeure
pas moins un acte politique. Cela peut être intentionnel ou accidentel et à la limite ce ne
sera pas nous ou les humoristes eux-mêmes qui pourront en juger. Ce sera le public et
plus largement la société en fonction de la portée des mots ou des gestes et le chemin
qu’ils auront parcouru dans son histoire. Il est vrai que, comme l'affirme Étienne Brown,
toute action politique doit être remise en contexte. C'est d’ailleurs en grande partie la
considération de ces éléments contextuels qui permet d'en apprécier de façon plus juste
les effets.
L’analyse de l’action devra donc être menée dans une perspective
contextualiste : il s’agira bien entendu de cerner les motifs réels de l’action
politique, mais ces motifs ne devront jamais être envisagés comme
complètement indépendants des croyances sociales et historiques qui
modèlent l’identité et le comportement des acteurs 15.
Dans cette citation, on relève deux éléments fondamentaux se retrouvant au cœur de tout
acte politique. Le premier, l’action posée doit avoir des velléités politiques, c’est-à-dire
qu’elle est d’abord motivée par une volonté de provoquer un changement ou a minima
une réflexion sur la dynamique politique en place. Mais à ce moment, on demeure au
stade intentionnel. Le second élément réside dans la dimension contextuelle. Ainsi, la
volonté d’agir politiquement prend un sens concret dans la mesure où l’on peut témoigner
de l’implication d’un individu dans un contexte politique précis. On comprend donc que
c’est avant tout l’intentionnalité de l’acteur doublée d’une action manifeste, ne serait-ce
que la prise de parole, qui prédomine dans l’acte politique. Dans cette perspective, la
preuve irréfutable d’un changement politique causé par cette action est secondaire.
D’autant que, comme précédemment souligné, les éléments contextuels rendent difficile
l’identification de liens de causalité sans équivoque.
Voilà, selon certains, ce qui distingue clairement l’humour politique des autres types
d’humour. Mais il y a l’humour à teneur politique et l’humour qui, même en l’absence
d’un propos politique, comporte une ou plusieurs dimensions politiques.
14
Vivero García, María Dolores, « La contestation par l’humour. Étude contrastive de l’humour dans la
littérature espagnole et française contemporaine », Cahiers de Narratologie, no25, 2013, p.12.
15
Étienne Brown, Comment penser le politique? Les tâches contemporaines de la philosophie politique
selon Raymond Geuss, Chantal Mouffe et Pierre Manent, Mémoire de maîtrise, Université d'Ottawa,
2011, p.35.
5
2.2 Humour et pouvoir
Le concept de pouvoir par exemple, objet d’analyse central de la science politique s’il en
est un, s'avère certainement présent dans l'analyse des rapports entre l'humour et la
politique. Bien sûr, il est parfois évoqué sans détour et l'on peut y accorder un poids
relatif ou une signification particulière. C'est notamment le cas de Jérôme Cotte qui,
citant François L’Yvonnet, estime que le pouvoir contestataire de l'humour s'efface
progressivement au profit d'une relation complémentaire entre les humoristes et la classe
politique.
Bref, l’humoriste contemporain ne prendrait plus le risque de s’opposer
intégralement au pouvoir, choisissant plutôt la critique encadrée qui, en fin
de compte, profite à ce qu’il semble dénoncer. Son engagement n’est ni
marqué par une intensité affective, ni par une critique vive des pouvoirs en
place. Ce que les humoristes désirent avant de déranger, c’est, selon
François L’Yvonnet, une place au soleil à côté des grands de ce monde 16.
Presque à l'opposé, Frédérick Gagnon et Julie Dufort prétendent que l'humour présent
dans certains dessins animés satiriques américains tels que South Park, American Dad ou
The Simpsons représente des lieux efficaces de contestation et de remise en question du
pouvoir politique 17.
De toute évidence donc, que ce soit parce qu'on la considère prégnante ou en voie
d'extinction dans le discours humoristique, la fonction de contestation du pouvoir en
place qu'occupe l'humour s'avère un élément récurent dans la littérature. On comprend
alors que, par association, l'individu ou le groupe d'individus responsables de livrer un
discours humoristique possède un certain pouvoir. Ce pouvoir n'est pas forcément et
exclusivement politique, mais il est bien réel. On peut le concevoir tantôt comme une
volonté de changer les choses via l'humour, tantôt comme un élément diffus et aux
contours plus ou moins définis. À titre d'exemple, lorsque dans les années 1990
l'humoriste québécois Jean-Marc Parent présente son émission hebdomadaire à la
télévision, plusieurs milliers de personnes (plus d'un million et demi de cotes d’écoute)
acquiescent à la demande de l'animateur et font « flasher » les lumières de leurs
résidences. Des entreprises emboîtent le pas et même des municipalités entières feront
clignoter les réverbères de certaines artères en signe d'adhésion au « mouvement social »
créé par Parent. Les répercussions politiques d'un tel geste ne sont pas évidentes c'est
certain, mais force est d'admettre que l'humoriste possède bel et bien du pouvoir, lequel
est reconnu et accepté par une masse critique d'individus prêts à répondre favorablement
aux demandes de l'humoriste, même celle à première vue absurde, faut-il l'admettre, de
faire « flasher » ses lumières!
Cette conception plus ou moins saisissable de la portée du pouvoir de l'humour
correspond davantage à la définition postmoderne du pouvoir politique. Elle réfère à une
interprétation élargie du concept incluant les dimensions d'influences et de
16
17
Jérôme Cotte, « Humour et émancipation, Relations », n° 761, 2012, p. 14.
Frédérick Gagnon et Julie Dufort, « Bienvenue à "Homerica" : les dessins animés américains et la
politique de l’immigration non documentée et du mur à la frontière américano-mexicaine », Politique et
Sociétés, vol. 31, n° 1, 2012, p. 68,
6
transformations sociales et culturelles parfois subtiles. Dans le cas d'un spectacle
d'humour par exemple, on peut présumer qu'il s'agit d'une certaine façon d'un partage de
pouvoir. De fait, si l'humoriste a le pouvoir de faire rire une audience et de la faire
réfléchir sur un sujet donné, c'est le public qui décidera si le message portera et
ultimement, si l'humoriste pourra offrir d'autres spectacles. Il s'agit ici d'une « perspective
interactionniste » du pouvoir qui comme le rappelle Pascal Dewit, en citant les travaux
d'Hermet, de Badie, de Birnbaum et de Braud, suppose que « le pouvoir n'est pas une
essence : il n'existe pas de nature abstraite ou immuable du pouvoir. L'interaction évolue
suivant le contexte et les rapports de forces » 18.
3. Question et hypothèse
Ce document vise donc à rendre compte de cette interaction ou, de façon encore plus
précise, des dynamiques politiques présentes dans l'humour. Au final, cette réflexion
tourne autour d'une question centrale : quelles dimensions 19 politiques sont identifiables
dans le discours humoristique? On compte ainsi aborder les différents liens entre la
politique et l’humour à travers deux axes (hypothèses), lesquels se recoupent
inévitablement. Le premier vise à considérer l’humour comme un acte intentionnellement
et résolument politique. Dans cette optique, le propos humoristique possède un objectif
clair; celui de provoquer des changements ou des transformations au sein de la vie
politique d’une collectivité. L’humour apparaît ici comme le principal véhicule des idées
politiques de son auteur. La forme est secondaire, c’est le message qui importe. À
première vue, ce type d’humour politique apparaît moins présent. Le second axe, sans
doute plus récurent à l’intérieur des manifestations publiques, considère la politique
présente dans le discours humoristique presque par essence. On épousera alors des
perspectives plus larges des phénomènes politiques. En d’autres termes, le caractère
rassembleur de l’humour contribue à pacifier nos rapports, à concilier nos différences. Du
coup, l’humour politique contribuerait à établir des repères identitaires.
4. Considérations méthodologiques
Comme précédemment évoqué, ce document se veut d'abord une réflexion sur les
principales composantes politiques présentes dans le discours humoristique. Mais il
propose tout de même une lecture rigoureuse des quelques dizaines d'exemples,
majoritairement québécois, s'y retrouvant. Il importe toutefois de préciser que ces
exemples ont été choisis de façon aléatoire, sans sélection précise ou considérations
spécifiques, en matière de représentativité des sexes ou de la nationalité des humoristes
cités par exemple. Les cas relatés constituent tout de même un échantillon intéressant
pouvant être représentatif des faits observés. L'observation documentaire et l'analyse de
discours sont les méthodes de cueillettes de l'information privilégiée pour ce travail. Le
croisement de ces outils de recherche permet en effet d'identifier et d’opérationnaliser les
principaux concepts présents à l'intérieur des diverses citations recueillies.
18
Pascal Dewit, Introduction à la science politique, Bruxelles, Éditions de l'Université de Bruxelles, 2013,
p.33.
19
Par dimension politique, on entend les références à des éléments politiques ou à des composantes
politiques. L’usage du terme « dimension » réfère donc à une conception élargie des objets de recherche.
Cela permet de considérer des aspects plus larges des phénomènes politiques, souvent présents dans une
perspective plus sociale de la science politique.
7
Ultimement, cette analyse adopte une perspective sociologique des phénomènes
politiques. C’est-à-dire qu’elle accorde une grande place à la dimension collective de la
politique, notamment à travers ses fonctions unificatrices et conciliatrices.
Ce travail s'inscrit également dans une dynamique particulière. Il vise à mettre à l'épreuve
les bornes méthodologiques tracées par l'auteur pour ses étudiants dans le cadre de son
enseignement. Ces bornes, bien que maintes fois identifiées et expliquées dans la
littérature et présentes dans la plupart des articles de recherche ne se retrouvent pas
toujours de façon explicite dans les différents textes. Ce document vient donc, d'une part,
synthétiser et présenter les principales étapes d'une recherche qualitative en science
politique. D'autre part, il vient appliquer et met à l'épreuve cette méthodologie. Le
bénéfice est double. Il constitue un véritable outil pédagogique tout en proposant un point
de vue éclairant sur un phénomène politique précis à savoir, une compréhension plus
large du lien entre l'humour et la politique.
5. Analyse
Bien que cette section fasse à nouveau mention de certains éléments présents dans la
littérature scientifique, le recours à ce que disent les acteurs de l’humour constitue une
ressource essentielle. L’objectif de cette analyse est donc d’observer l’existence des liens
théoriques précédemment identifiés dans les manifestations concrètes, c’est-à-dire dans
les discours humoristiques.
5.1 Humour et acte politique
Les exemples de discours humoristique que l'on pourrait qualifier d'acte politique sont
sans doute les plus difficiles à identifier de façon claire. Si la portée politique d'un propos
peut être évidente, son caractère intentionnel demeure plus ardu à démontrer. Comme
mentionné précédemment, ce sont les motivations clairement exprimées par un acteur qui
permettent d’attribuer de façon non équivoque une action, un discours humoristique dans
le cas présent, à une volonté d'agir politiquement. Une question s'impose alors, l'auteur du
message où la personne en charge de le livrer avait-elle l'intention de provoquer un
changement ou une réflexion politique ou la priorité était-elle, plus simplement, de faire
rire?
Quelques exemples d'humoristes québécois semblent porteurs de réponses à cette
interrogation. Celui du groupe Les Zapartistes apparaît un incontournable en matière de
discours humoristique pouvant être considéré comme acte politique. En effet, si l'humour
est omniprésent dans le propos des membres du groupe, la volonté de soumettre des
positions et des réflexions politiques est mise de l'avant. Depuis leur création, au début
des années 2000, Les Zapartistes commencent leur spectacle en récitant leur manifeste
dont voici un court extrait :
[…] Les Zapartistes sont indépendantistes, car nous croyons qu’il faut
libérer les canadiens-anglais de l’oppression des politiciens fédéralistes
du Québec qui monopolisent le pouvoir à Ottawa depuis plus de 30 ans,
et qui ont détourné le Canada à leur profit et à celui de leurs amis de
8
Groupaction et compagnie... et compagnie... et compagnies! Vive le
Canada liiiibre!
[...]Les Zapartistes s’opposent à la corruption, à la culture du consensus,
à la langue de bois, à la privatisation de nos ressources, à la débilité
militaire pis à ben d’autres affaires. Mais c’est pas parce qu’on gueule
qu’on va faire la gueule. Parce que si on veut des lendemains qui
chantent, on s’est dit qu’y fallait peut-être commencer par rire dès ce
soir...
Parce que rire est une si jolie façon de montrer les dents 20!
Dans ce cas, les prises de position politique sont manifestes. Les thèmes que l'on compte
aborder sont soumis sans ambages et les opinions sont clairement exprimées. La forme
humoristique est ici au service du fond. Le genre dépasse le discours humoristique, il
devient discours politique, à la limite du militantisme. Ainsi donc, la volonté des
Zapartistes n'est pas seulement de faire réfléchir, mais aussi d'agir dans un sens précis.
Dans cette perspective, l'humour militant prend tout son sens. Ce désir de prendre
position s’est aussi clairement exprimé durant le conflit des étudiants nommé « le
printemps érable » au Québec. Les Zapartistes ont en effet appuyés les revendications
étudiantes, notamment en participant à une manifestation « soulignant la fin de la tournée
de mobilisation de la Coalition large de l'Association pour une solidarité syndicale
étudiante » en août 2012 21 . Plusieurs humoristes ont aussi mis à profit leur talent de
comique pour la cause étudiante cette année-là dont François Bellefeuille, François
Massicote, Geneviève Gagnon, Emmanuel Bilodeau et Daniel Lemire 22 . Bien qu’il
s’agisse d’un événement exceptionnel, cette prestation des humoristes confirme
l'existence au Québec d'un humour politiquement engagé. Cette soirée entre hors de tout
doute dans la catégorie des actes politiques.
5.2 Humour et réflexion politique
C'est cependant moins évident pour un autre humoriste du Québec, Guy Nantel, qui en
dépit de la teneur politique de ses spectacles, n'a pas nécessairement l’intention de se
positionner sur l’échiquier politique, notamment sur l’axe gauche-droite. De son propre
aveu, son objectif est avant tout de susciter la réflexion et de mettre le public en face de
ses contradictions.
Avec ses prises de position, l'humoriste fait réfléchir, dénonce et met en
évidence les contradictions de notre société en s'attaquant aux travers
20
Plusieurs articles de presse et du Web traitent de ce manifeste. Texte intégral voir :
Parti rhinocéros du Canada, Le bulletin occasionnel,
http://www.neorhino.ca/index_joomla.php?option=com_letterman&task=view&Itemid=41&id=28&lan
g=fr, consulté le 8 juillet 2014,
21
Geneviève Bouchard, « Les Zapartistes : comiques en campagne électorale », Le Soleil, 22 août 2012,
http://www.lapresse.ca/le-soleil/arts-et-spectacles/sur-scene/201208/21/01-4567041-les-zapartistescomiques-en-campagne-electorale.php, consulté le 9 juillet 2014.
22
Éric Clément, « Coalition des humoristes indignés : c'était la fête de Charest », La Presse, 18 juin 2012,
http://www.lapresse.ca/arts/spectacles-et-theatre/humour-et-varietes/201206/18/01-4536238-coalition-deshumoristes-indignes-cetait-la-fete-de-charest.php, consulté le 9 juillet 2014.
9
humains. Seul dans son créneau, son côté caustique et sarcastique donne
un style singulier à cet humoriste populaire. Scandales politiques,
financiers, conspiration, collusion, corruption; il dénonce, propose et
s'interroge 23.
De fait, l’humour de Guy Nantel apparaît moins militant, en termes de direction
idéologique en particulier, mais il n’en exprime pas moins une volonté politique claire. À
l’instar des Zapartistes, son discours humoristique vise à provoquer l’action, voire une
prise en charge citoyenne de l’arène politique. D’ailleurs, c’est en ces termes qu’il
terminait l’un de ces spectacles au titre évocateur, « La Réforme Nantel » :
On se défoule sur la tête des politiciens, mais pendant ce temps-là, on ne
fait rien pour faire avancer la société. Bien la « Réforme Nantel », c'est ça
l'idée. Tsé, c'est sûr qu'y' a ben des « jokes » dans ce show là, mais si tout
l'monde décidait d'entreprendre sa propre réflexion personnelle, j'te
garantis qu'on deviendrait pas mal plus mature comme peuple pis que les
politiciens arrêteraient de gagner leurs élections sur des formules creuses
pis insignifiantes hein? Fa que y'est temps qu’on se réveille, parce qui si
l’enfer c'est les autres, oubliez pas que le paradis commence bien souvent
par nous autres. Alors, commençons tout de suite, pour qu'enfin un jour on
soit fier de dire que chez nous, on compose vraiment une société
distincte 24.
À l’évidence, la forme et le fond se rapprochent fortement du discours politique et son
message vise, selon toute vraisemblance, à responsabiliser la population. Sans présumer
du chemin que parcourt son propos dans l’esprit de tout un chacun, on peut reconnaître
que, mettant de l’avant l’individu, ce discours comporte de fortes accointances avec la
pensée libérale. Pour cette raison, entre autres, on pourrait être tenté d’associer les propos
de Nantel à un discours plus à droite. Mais à vrai dire, il serait présomptueux d’affirmer
une telle chose sans équivoque. C’est que l’humoriste ratisse large et son propos demeure
difficile à « étiqueter » de façon formelle. Qui plus est, les « étiquettes » se sont
grandement complexifiées ces dernières années. Cela dit, les propos de Nantel ne peuvent
être isolés de leur contexte. Il faut admettre que la classe politique a été largement
éclaboussée ces dernières années par les allégations de collusion et de corruption,
notamment en matière d’octroi de contrats de construction dans le monde municipal et de
financement des partis politiques 25 . Une période donc propice à l’indignation et au
cynisme qui n’est pas sans rappeler une autre époque souvent considérée comme l’éveil
national des Québécois, les années 1960 et la Révolution tranquille. C’est d’ailleurs dans
ce contexte, rappellent Robert Aird et Lucie Joubert, qu’émerge un autre groupe
d’humoristes mythique au Québec, les Cyniques.
23
GuyNantel.com, Biographie-Dossier de presse, http://www.guynantel.com/biographie, consulté le 8
juillet 2014.
24
Extrait du spectacle de Guy Nantel, « La Réforme Nantel » (2009-2011). Nantel, Guy, La Réforme Nantel,
TVA Films (DVD), 2011, 90 minutes.
25
Rappelons que son spectacle « La Réforme Nantel » a été créé en pleine tourmente de scandale à saveur
politique qui occupe un large espace médiatique au tournant des années 2010. Ces allégations ont donné
lieu à la création, en novembre 2011, de la Commission Charbonneau sur l’octroi et la gestion des contrats
publics dans l’industrie de la construction.
10
Le groupe les Cyniques a marqué l’histoire culturelle du Québec. Pour
bien des Québécois, il a contribué à transformer le visage du Québec en
révolutionnant sa façon de faire l’humour. Dans l’histoire du Québec, les
Cyniques ont leur place parmi les plus grands humoristes et sont
considérés comme des pionniers de la satire irrévérencieuse et iconoclaste.
Pour mieux apprécier et évaluer l’œuvre des Cyniques, il convient de la
situer dans le contexte particulier des années 1960 et de jeter un regard sur
ce qui l’a précédée 26.
Sans vouloir comparer l’humour de Nantel à celui des Cyniques, on peut tout de même y
voir quelques ressemblances ne serait-ce que dans le caractère dénonciateur des excès de
pouvoir (politique et religieux) et critique envers la classe politique québécoise. Aussi, les
Cyniques ne se gênaient pas eux aussi pour souligner les contradictions du public, en se
moquant de la culture populaire diffusée à la télévision par exemple 27. La volonté de
réfléchir sur nos habitudes sociales et politiques demeure alors une constante dans le
discours de Nantel et celui des Cyniques, comme ce fut le cas pour les monologues
d’Yvon Deschamps et plusieurs numéros du groupe humoristique québécois Rock et
Belles Oreilles.
Ces quelques exemples viennent ainsi démontrer deux dimensions de l’humour pouvant
entrer dans la catégorie de l’action politique. On constate en effet dans les deux cas une
volonté manifeste de provoquer la réflexion et même le changement politique. En outre,
l’ensemble du discours humoristique que ce soit celui des Zapartistes ou de Guy Nantel
est monopolisé par des considérations sociales et politiques. On peut tout de même
souligner que du point de vue plus strict, le caractère engagé et clairement orienté
idéologiquement des Zapartistes fait entrer ce groupe d’humoristes dans la catégorie des
militants. Il en va de même pour la Coalition des humoristes indignés qui défendent
clairement une position politique dans un contexte de crise étudiante. Ce qui semble
moins évident dans le cas de Nantel, du moins en ce qui concerne le positionnement
idéologique.
Une chose est claire toutefois, l’humour de Nantel, comme celui de plusieurs de ses
contemporains, réfléchi sur le « nous », sur le vivre ensemble. Il s'agit certainement ici
d'une des dimensions politiques les plus présentes dans le discours humoristique.
6. Humour et intérêts communs
Durant une entrevue accordée à Radio-Canada, l'humoriste Mario Jean répondait en ces
termes à une question de l'animatrice portant sur la volonté de donner un sens sociale et
politique à l'humour :
[…] C'est mon but. En fait je prends l'humour comme un miroir. Moi
j'essaie d'être un miroir pour le monde. Je prends un gros miroir, je le mets
sur scène, je dis aux gens, regardez qui on n'est, regardez comment on n'est
en 2014, là rendue à cette date-ci qui on n'est. Puis, j’essaie de trouver
26
Robert Aird et Lucie Joubert (dir), Les Cyniques : Le rire de la Révolution tranquille, Montréal, Les
Éditions Tryptyque, 2013, P.11.
27
Leur numéro intitulé « Télé-Métropole, votre Canal 10 » demeure une pièce d'anthologie.
11
chez les gens tout ce qu'on fait inconsciemment qu'on prend pas
conscience que ce soit dans l'actualité, dans la politique dans nos valeurs
de tous les jours, etc. Et j'essaie de leur remettre ça en pleine face, puis là
que les gens fassent : C'est bien trop vrai, je suis comme ça 28.
Ce cours extrait d'entrevue résume de façon éloquente tout le paradoxe auquel
l’humoriste et la société sont confrontés. D'un côté, on retrouve le discours humoristique,
souvent imprégné de perspectives personnelles. Il faut reconnaître que la plupart des
spectacles d'humour sont en fait des « one man shows » ou des « one women shows »,
donc présenté par une seule personne. Il faut également souligner que les préoccupations
soumises puisent souvent dans l'expérience de vie de l'humoriste. En ce sens, il s'agit
vraisemblablement d'une réalité individuelle. Mais c'est pourtant dans le partage et la
mise en commun de cette expérience que résonne un discours collectif. C'est sans doute
pour cette raison que Mario Jean termine sa réflexion ainsi en disant « je suis comme ça ».
Si chaque individu se reconnaît ainsi de façon personnelle dans le récit de l'humoriste, on
peut croire qu'il apprécie également le fait que les autres personnes présentes au spectacle
s'y retrouvent sensiblement de la même manière. L'individu est conforté, rassuré, il n'est
pas seul à ressentir ce qu'il ressent, à voir ce qu'il voit, à vivre ce qu'il vit. L'humour
constitue alors de toute évidence un reflet social, mais un repère collectif aussi. Il
participe certainement à la construction du « vivre ensemble » et à l'établissement d'un
contrat social.
6.1 Humour et contrat social
À ce propos, l'humoriste Guy Nantel traite directement de la conciliation des différences
et de l'importance des intérêts communs en affirmant, à la fin de son spectacle intitulé
« La Réforme Nantel » : « Je rêve d'un monde où aucun bonheur individuel n’est possible
sans que l'on agisse vraiment dans l'intérêt de la collectivité. » On pourrait attribuer ce
discours à une posture plutôt rousseauiste du contrat social, c'est-à-dire considérant la
prédominance d'un certain nombre d'intérêts collectifs sur les intérêts individuels. « C'est
ce qu'il y a de commun dans ces différents intérêts qui forme le lien social; et s'il n'y avait
pas quelque point dans lequel tous les intérêts s'accordent, nulle société ne saurait
exister 29. » Il semble que l'on retrouve l'esprit du discours de Nantel dans cette courte
citation de Rousseau.
C'est sans contredit l'une des dimensions politiques les plus présentes dans le discours
humoristique. L’humour, comme toute manifestation culturelle, possède une fonction
fédératrice, c'est-à-dire qu'il constitue d'une certaine façon le vecteur et le conciliateur de
nos différences. D'une part, les thèmes qui sont abordés demeurent souvent universels.
C'est bien connu, les relations hommes femmes, l’amitié, la différence entre les individus,
les travers de la société ou les dérives des personnalités publiques issues de tous les
domaines constituent autant de sujets présents dans la collectivité et exploités par le
comique. D'autre part, la loupe ainsi dirigée sur les multiples traits distinctifs d'une
28
29
Ici Radio-Canada, Émission Médium-Large, 25 juin 2014, 97 minutes.
Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social ou Principes du droit politique, Les classiques des sciences
sociales, http://classiques.uqac.ca/classiques/Rousseau_jj/contrat_social/Contrat_social.pdf, consulté le
4 juillet 2014.
12
société vient forcément concilier les différences, du moins elle contribue à une réflexion
sur l'altérité comme le précise Nelly Quemener.
L’autodérision s’impose alors comme le ferment du groupe; elle recouvre
un contrat implicite passé avec le spectateur, savoir rire de soi, comme
savoir rire des autres. Elle est une manière de mobiliser les membres du
public autour d’une performance collective au sein de laquelle s’expriment
les différences 30.
Et cette fonction conciliatrice de l'humour est également mise de l'avant par d'autres
humoristes, en France tout particulièrement. Par exemple, l'acteur et humoriste d'origine
arabe Jamel Debouze, loin de cacher ses origines, traite fréquemment de son statut en
France et de comment cette coexistence entre minorités et majorité est négociée. Dans
son spectacle de 2004 Jamel : 100 % Debouze, il fait référence aux préjugés entretenus
sur les cités (les banlieues) françaises et de la discrimination dont les résidents sont
victimes à travers la couverture médiatique en particulier.
Et dans cette cité anormalement calme, trois jeunes caïds rôdent. [...] Ils se
dirigent vers une cabine téléphonique. [...] C'est certainement pour appeler
des dangereux dealers, qu'ils leur livreront plusieurs kilos de drogues
islamistes! Faut pas croire tout ce qu'on vous raconte sur TF1 31!
L'effet de ce genre d'humour est double. D'un côté, le fait de rire de certaines
caractéristiques propres à une communauté culturelle encourage certaines personnes
issues de ce groupe à s'éloigner de l’isolement. Dans une certaine mesure, cela peut
faciliter leur intégration. D'un autre côté, la communauté d'accueil s'avère sensibiliser aux
réalités auxquelles ses minorités ethniques sont confrontées. Ainsi, on peut croire que
l'humour en France a un rôle à jouer dans la conciliation des identités. Il contribue
certainement au renforcement du contrat social entre la communauté algérienne et
française par exemple au sein desquelles, des tensions demeurent toujours vives.
6.2 Humour et intégration ethnique
Ce discours humoristique traitant des différences sociales, ethniques et culturelles est
également présent dans d'autres régions du globe, y compris dans les endroits moins
confrontés à l'immigration et à la diversité. Au Québec par exemple, certains humoristes
prennent plaisir à mettre en lumière les clichés reliés aux minorités culturelles. On
constate également une certaine récurrence dans le fait de cibler les communautés arabes.
C'est d'ailleurs en ces mots que l'humoriste Rachid Badouri ouvrait son premier numéro
au Gala Juste pour rire à Montréal en 2005.
Bonsoir, mon nom est Rachid Badouri, je suis un Québécois d’origine
arabe... Ça vous casse un gala ça! Vous serez surpris des stéréotypes et
des clichés qu'on entend lorsqu'on est un Arabe. Ça passe de « les Arabes
tous des terroristes », « les Arabes tous des voilés on dirait des ninjas »,
30
Nelly Quemener, « Stand-up ! L’humour des minorités dans les médias en France », Terrain : Revue
d'ethnologie de l'Europe, no 61, 2013, p.76,
31
Jamel Debouze, Jamel : 100 % Debbouze, Édition Collector (DVD), 2004, 97 minutes.
13
incroyables clichés, après clichés, après clichés. J’en
dernièrement à mes 13 femmes, elles n'en revenaient pas 32!
parlais
Ajoutons que le contexte post 11 septembre 2001 vient en partie justifier les références
constantes à la communauté arabe en l'associant à la sécurité et au terrorisme. On peut
même présumer que ce genre d'humour contribue à diminuer les tensions et vient, à la
limite, rassurer certains individus dans un contexte marqué par l'insécurité. Cette faculté
que possède le discours humoristique de tourner en dérision la crainte de l'autre et cette
peur parfois amplifiée du terrorisme après les attentats de 2001 est aussi soulevée par
Adib Alkhalidey dans sa prestation au Gala Juste pour Rire de 2011 à Montréal.
Je me présente, je m'appelle Adib Alkhalidey, je suis d'origine à moitié
marocaine, moitié irakienne. […] Irakien j’en parle toujours en 2e parce
qu’au début je veux que les gens m’aiment! J’ai rencontré une fille et
quand je luis ai dit que j’étais à moitié irakien et je ne « niaise » pas elle a
fait « irhhh »! Une chance que je lui ai pas dit que j’étais à moitié irakien à
moitié afghan parce qu’elle m’aurait vomi dessus! Comme si j'allais
égorger des bébés dalmatiens devant une classe de maternelle 33!
À nouveau, en regard de ce passage, l'humour devient non seulement un outil
d'autodérision, mais il incite directement et indirectement le public à mettre de côté les
préjugés, à faire preuve d'ouverture et de tolérance. Dans cette optique, le discours
humoristique a certes une vocation conciliatrice, mais aussi d'intégration. En outre, il peut
s'éloigner du terrain culturel et ethnique pour traiter de discrimination au sens large,
envers les femmes par exemple ou les personnes handicapées 34. Dans ce cas, l'humour se
rapporte à une vision disons plus idéaliste du contrat social et plus largement du politique
en se voulant plus transcendant et unificateur des différentes fractions culturelles et
sociales. D'ailleurs, ce discours humoristique que l'on dit plus accessible est souvent
qualifié de « politicily correct ». C'est que, ultimement, c'est le public qui décide s'il
suivra l'humoriste ou pas dans sa démarche. Et qui dit contrat social, dit entente
réciproque. En d'autres termes, si l'humoriste a le pouvoir de rire des travers ou des
particularités de la société, c'est le public qui lui accorde ce pouvoir. D'une certaine façon,
on lui donne le « droit de rire de nous »! Dans certains cas, l'exercice est audacieux, mais
réussi à atteindre la cible sans trop soulever de contestations. Par exemple, les questions
linguistiques et identitaires demeurent des sujets sensibles au Québec. L'humoriste Sugar
Sammy l'a bien compris et se permet quelques blagues sur le sujet sans, selon toute
vraisemblance, trop diviser. Tirées de son spectacle intitulé « En français SVP - You’re
gonna rire! », les deux citations suivantes illustrent bien cette volonté de l'humoriste
d'être à la fois rassembleur et dénonciateur des effets néfastes du nationalisme.
32
Juste pour rire, Extrait du Gala Juste Pour Rire, 2005.
Les propos d'Adib Alkhalidey ont été résumés ici donc, ils ne sont pas intégralement retranscrits à la lettre
dans cette citation cependant, l'esprit du texte apparaît intact. Voir : Juste pour rire, Extrait du Gala
Juste Pour Rire – Bilan Nantel, 2011.
34
On peut penser notamment au fameux numéro de l'humoriste québécois Jean-Marc Parent dans les années
1980 alors qu'il personnifie une personne atteinte de paralysie cérébrale.
33
14
Y’ a deux sortes de Québécois pour moi, les Québécois qui sont éduqués,
cultivés, bien élevés, pis t’as ceux qui ont voté oui! (en référence au
référendum sur la souveraineté du Québec de 1995)
[…] Mon pays c’est meilleur, mon pays c’est le meilleur! Non, ton pays
c’est pas le meilleur, ton pays c'est une fatalité géographique, t’as
absolument rien choisi 35.
6.3 Humour et division
Mais si l'humour peut avoir une fonction fédératrice, il comporte à coup sûr des aspects
plus controversés ne serait-ce que parce que les sujets abordés s'avèrent davantage
polarisant. C'est bien sur le cas des questions identitaires ou religieuses, deux sujets
éminemment délicats. À ce titre, la publication de caricatures de Mahomet dans le journal
satirique Charlie Hebdo en 2005 représente un exemple patent du caractère parfois
« divisif » de l'humour. Les responsables du journal, loin de s'excuser, récidiveront en
2012 et plaideront pour la liberté d'expression.
Nous ne sommes pas allés trop loin. Nous sommes un journal satirique
d'actualité, nous faisons notre métier qui est de parler d'une actualité. […]
On ne reproche pas aux autres journaux de parler du film anti-islam. Notre
façon de l'évoquer, c'est la caricature36.
Sans juger du bien-fondé de la manœuvre, force est de constater que, comme on le
remarque au sein des dynamiques politiques, les positions, disons plus radicales ou à tout
le moins clairement campées sur l'axe idéologique gauche droite ou identitaire par
exemple font moins l'unanimité. Dans une certaine mesure, un discours humoristique peut
contribuer à une rupture du contrat social. Au même titre que n'importe quel acte
politique, l'humour peut aussi diviser. Toujours en France, le cas récent du spectacle de
l'humoriste Dieudonné apparaît également un bon exemple. S'il peut compter sur bon
nombre de partisans et d'admirateurs de son travail, plusieurs jugent ses propos racistes et
antisémites. C'est le cas de l’historien Michel Dreyfus et directeur de recherche au CNRS.
La liberté d’expression est un impératif indiscutable, mais cela ne doit pas
pour autant conduire à un relativisme au nom duquel toutes les opinions
seraient valables. Celles propagées par Dieudonné M’bala M’bala reposent,
répétons-le, sur les propos antisémites les plus éculés. Qu’il s’agisse de la
négation des chambres à gaz et de l’extermination nazie, de la prétendue
défense des Palestiniens et de la remise en cause de l’État d’Israël, un seul
fil conducteur : la haine 37.
35
Propos tirés d'un extrait de spectacle de Sugar Sammy offert au Festival Juste pour Rire en 2009, visionné
à cette adresse : http://www.dailymotion.com/video/xcyy4w_sugar-sammy-les-quebecois_fun, consulté
le 10 juillet 2014.
36
Abdel Mestre et Xavier Ternisien, « "Charlie Hebdo" crée la polémique en caricaturant Mahomet », Le
Monde, 19 septembre 2012, http://www.lemonde.fr/societe/article/2012/09/19/charlie-hebdo-cree-lapolemique-en-caricaturant-mahomet_1762316_3224.html, consulté le 10 juillet 2014.
37
Michel Dreyfus, « L’antisémitisme de Dieudonné ou le négationnisme à l’ère des masses », Le Monde,
10 janvier 2014, http://www.lemonde.fr/idees/article/2014/01/10/l-antisemitisme-de-dieudonne-ou-lenegationnisme-a-l-ere-des-masses_4345899_3232.html, consulté le 10 juillet 2014.
15
On le sait, l'humour peut être un outil de provocation. Et le discours de Dieudonné
dépasse largement le cadre humoristique, il entre dans la catégorie des enjeux et des
débats politiques. Certes, la manière, voire les propos qu'il tient peuvent être matière à
répréhension, mais l'humoriste exprime sa vision du vivre ensemble. Et cette vision tend,
comme la plupart des discours jugés extrêmes, à exacerber les tensions identitaires au lieu
de les modérer. Cela dit, cette rupture du contrat social peut aussi ressortir en dehors des
sujets politiques et lorsque plusieurs personnes ont l'impression que l'humoriste va trop
loin ou qu'il devient moins « politiquement correct ».
Discussion
Bien qu'il s'agisse somme toute d'un document de réflexion, cette brève analyse permet
tout de même de présenter quelques observations pouvant faire office de résultats.
Premièrement, on ne peut douter du caractère politique de plusieurs discours
humoristiques. À vrai dire, on peut affirmer hors de tout doute que la politique continue
d’être un sujet de prédilection en humour. Cette affirmation relève presque de l’évidence,
mais les quelques faits soulevés dans ce texte permettent d’établir de façon formelle ce
constat. Deuxièmement, si l'on se penche de façon plus précise sur nos hypothèses
initiales, il semble également possible d'arriver à certaines conclusions.
Concernant la première hypothèse, voulant que l'on puisse considérer certains discours
humoristiques comme de véritables actes politiques, il semble que les nuances présentées
en début d'article doivent occuper un large espace. En effet, si la volonté de soumettre des
points de vue et de provoquer une réflexion politique est présente dans bien des cas, le
caractère militant et engagé de l'humour demeure un phénomène moins évident à
identifier. C'est qu'il est difficile, à moins que ce soit énoncé clairement, d'affirmer hors
de tout doute que l'intention ou la volonté de l'humoriste ou de l’auteur du message
humoristique est de prendre une position idéologique ou militante claire. En revanche, les
références à des problématiques ou à des enjeux politiques sont nombreuses. On peut
donc convenir que le discours humoristique volontairement politisé s'avère bien présent,
dans le paysage culturel québécois tout particulièrement. En outre, les répercussions d'un
discours humoristique sont tout aussi difficiles à évaluer et il faudrait sans doute effectuer
des études de réception afin d'obtenir des réponses plus substantielles à ce propos.
Ajoutons enfin que l'époque favorise l'émergence d'un certain type de discours
humoristique et que sa portée ne peut aussi être appréciée qu'en fonction d'un certain
nombre de facteurs et d'influences contextuels.
Par ailleurs, il est vrai que les questions entourant le vivre ensemble, les rapports à
l'identité et aux intérêts collectifs sont des thèmes fortement présents dans le discours
humoristique, du moins dans les exemples présentés dans cette analyse. On peut donc
confirmer la seconde hypothèse. Convenons toutefois que l'inverse est également
pensable et que l'humour peut aussi être polarisant et contribuer d'une certaine façon à
fragiliser le tissu social. Certains diraient que le discours, même le plus provocateur, s'il
permet d'établir un débat aura toujours une utilité. C'est possible. Mais un propos à
caractère raciste ou discriminatoire, même dissimulé dans le procédé humoristique,
demeure un discours raciste ou discriminatoire.
16
Ainsi donc, les dimensions politiques présentes dans le discours humoristique sont de
plusieurs ordres. On peut en effet retrouver certaines caractéristiques propres au pouvoir,
mais on peut considérer ce pouvoir comme un objet plus ou moins saisissable. Les
exemples présents dans cet article témoignent peu de la fonction contestataire du pouvoir
de l’humour, mais on peut penser qu’un échantillon plus large et plus ciblé pourrait
apporter des exemples pertinents en la matière. Par ailleurs, le pouvoir s'avère souvent
partagé entre l'humoriste et son public. Cette relation concorde plus avec une conception
interactionniste du pouvoir. Par ailleurs, plusieurs passages évoquent le rapport à la
différence et à la tolérance, notamment en matière de minorités ethniques et culturelles.
On constate ainsi que comme soulevé dans la littérature, l'humour peut s'avérer un outil
additionnel d'intégration des communautés. Enfin, l'importance de susciter la réflexion a
été maintes fois soulignée à travers ce document. Cette observation rejoint aussi le point
de vue d'Amaury Grimand qui résume ainsi de façon éloquente la dimension
transcendante du discours humoristique. « La culture populaire, en effet, a fréquemment
parodié les conceptions dominantes de la société et de l’organisation contemporaines.
Elle contribue ainsi à en développer des lectures alternatives, tout en mettant en débat les
pratiques organisationnelles 38. »
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17
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