VOYAGE MUSICAL D`HIVER : L`ÂME RUSSE Salle Molière, Lyon
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VOYAGE MUSICAL D`HIVER : L`ÂME RUSSE Salle Molière, Lyon
Anaclase.com 16/03/04 23:56 Giovanni Radivo, Bruno Robilliard et Edouard Sapey-Triomphe © anaclase VOYAGE MUSICAL D'HIVER : L'ÂME RUSSE Salle Molière, Lyon du 23 au 25 janvier 2004 En cinq concerts, c'est la musique de chambre de quatre des plus célèbres compositeurs russes que le Voyage Musical d'Hiver a permit d'entendre de façon concentrée, pour le dernier week-end de janvier. La manifestation s'est ouverte le vendredi soir avec la Sonate Op.80 n°1 pour violon et piano de Sergeï Prokofiev, sans doute la plus jouée. David Grimal a offert une sonorité équilibrée, moins capiteuse que celle dont nous abreuvait Vadim Repin l'an dernier, moins aigre que celle Valeria Chiara Pagano et plus nourrie que la lecture de Renaud Capuçon cet été. Dans le premier mouvement, le son est ténu, développant une vocalise immuable, sur un fil, avec une égalité surprenante, pour se libérer dans le second, dans un lyrisme brillant, avec des attaques violentes mais jamais brutales. Les traits de pizz' sont parfaitement réalisés, dans un beau gras. La mélodie finale est donnée dans un climat tout à fait désolé. Au piano Roger Muraro convoquait toutes les couleurs de l'instrument. Rejoint par Anne Gastinel, marraine de ce festival, ils donnaient tous deux la Sonate Op.40 de Dmitri Chostakovitch dans une interprétation fort sensible. La phrase au violoncelle est toujours précise, bien menée, dans une articula-tion claire. Cependant, si le détail est irréprochable, il manque du souffle à l'ensemble. Le Sextuor Op.70 " Souvenir de Florence " écrit par Piotr Tchaïkovski en 1890 n'a pas joui d'une lecture cohérente ; les artistes réunis n'ont pas su donner corps à cette partition difficile. Le lendemain après-midi, nous avons pris beaucoup de plaisir à écouter un récital de mélodies russes qui fera l'objet d'un compte-rendu mis en exergue. Toutefois, il s'achevait par une belle version du Trio Op.67 n°2 pour piano et cordes de Chostakovitch. Le premier mouvement permit de goûter les qualités évidentes du violoncelliste Edouard SapezTriomphe. Le tout début de cette page est particulièrement difficile, déclinant une prière sur des harmoniques comme un funambule dansant lentement sur son fil. Sans épanchement excessif, un lyrisme bienvenu fut présent tout au long de l'Andante. L'Allegro con brio fit particulièrement briller le violon de Giovanni Radivo, bénéficiant d'une sonorité sensuelle autant qu'expressive. Bruno Robilliard offrait une introduction ronde et musclée au troisième mouvement, un Largo d'un tragique lancinant. Enfin, une énigmatique inertie est venue mâtiner la danse finale d'accents aigredoux assez d'à-propos. Contrairement à l'ensemble de la veille, ce trio fut convainquant. N'ayant pu assister au concert du samedi soir, passons directement à ceux du dimanche. Tout d'abord celui, copieux, de 16H, qui commençait avec le Trio Op.9 n°2 de Sergeï Rachmaninov. Bruno Robilliard s'est avéré plutôt discret dans le premier mouvement, peut-être même trop effacé. C'est une tendance que nous avions constatée dans son jeu lors de ses accompagnements des deux jeunes chanteuses, la veille. Nous retrouvions le violoniste et le violoncelliste du trio de Chostakovitch, avec le même bon-heur. La lecture ne s'est jamais montrée complaisante, n'a pas cédé à un sentimentalisme trop appuyé. La chair des pizz' du violoncelle apportait une profondeur suffisante à soutenir un discours lyrique sans avoir nullement besoin de recourir à des artifices vulgaires. Le pianiste s'est réveillé dans le second mouvement, desservi par un instrument relativement capricieux : déjà vendredi soir, le piano s'était peu à peu déréglé, et s'il s'est plutôt bien tenu hier, il accuse aujourd'hui des graves disgracieux et un accord fâcheu-sement mouvant. S'armant d'une fidélité exemplaire à la partition, tant à la lettre qu'à l'esprit, les trois artistes ont offert un troisième mouvement irré- prochable. Dans la Sonate Op.119 pour violoncelle et piano de Prokofiev, Muraro s'est une fois de plus distingué par ses couleurs, mais son jeu fut globalement trop brutal. En revanche, l'interprétation d'Anne Gastinel emportait les suffrages ! Jouissant d'une belle expressivité dans le 1er mouvement, d'une agilité nerveuse et d'un chant large dans le second, http://www.anaclase.com/dacamera/articles/ame-russe-lyon.htm Pagina 1 di 2 Anaclase.com 16/03/04 23:56 et d'un parfait équilibre dans l'ultime, elle aura offert un beau moment de musique au public lyonnais. Enfin, le plus célèbre - à juste titre ! des quatuors de Chostakovitch, le n°8 Op.110, était joué par le Quatuor Debussy : il n'y aurait rien eu à ajouter au 1er mouvement, bien assez pathétique, et au contraire, un brin de dignité ne lui aurait sans doute pas fait de mal... Heureusement, cet excès s'est régulé par la suite vers une interprétation plus sobre et, du coup, plus pertinente. Cependant, un souci d'équilibre a montrer son nez : il semble en effet que Yannick Callier au violoncelle s'accorde assez difficilement à une sonorité d'ensemble, tandis que l'altiste Vincent Deprecq tire souvent la vedette. Le quatuor est un exer-cice extrêmement délicat qui demande une écoute mutuelle minutieuse qui n'est peut-être pas systématiquement au rendes-vous... Dimanche 25 janvier à 19H, le concert de clôture débutait par l'Ouverture sur des thèmes juifs Op.34 écrite par Prokofiev en 1919 pour l'ensemble Zimro. François Sauzeau à la clarinette, Bruno Robilliard au piano et le Quatuor Debussy en donnaient une lecture nuancée, rendue possible par une écoute attentive. L'interprétation du Quatuor n°9 Op.117 de Chostakovitch pas le Debussy révéla un superbe travail de demi-teinte, nourrissant subti-lement le suspens d'une page mystérieuse. La Sonate Op.19 pour violon-celle et piano de Rachmaninov fut moins heureusement réalisée : Gastinel ne fut pas toujours très juste, tandis que Muraro s'est perdu dans une lour-deur malvenue ; de plus, l'écoute fut maltraitée par son pied battant bruyam-ment la mesure sur l'estrade, livrant au public venu pour que la musique opère sa fonction élévatrice une contingence technique dont il n'a que faire et qui l'aura définitivement fixé ici-bas. La fameuse Valse de la Jazz Suite de Chostakovitch est venue séduire, grâce à l'interprétation d'une suavité délicieuse du Quatuor Heavy Fingers. Tous les artistes ayant participé à ce Voyage Musical d'Hiver sont venus saluer sur scène alors que les saxophonistes reprenaient la charmante Valse comme une nostalgique et souriante réminiscence : les spectateurs les remercièrent chaleureusement des quelques heures de musique vécue à la Salle Molière ce week-end. BB http://www.anaclase.com/dacamera/articles/ame-russe-lyon.htm Pagina 2 di 2