Pierre Lefumat - Ecole d`Art Mural de Versailles

Transcription

Pierre Lefumat - Ecole d`Art Mural de Versailles
Pierre Lefumat
Peintre en décor
3
Réalisations de chantier, Entreprise Gérard Trouvé, Issy-les-Moulineaux
I
ssu d’une époque où l’on parlait artisan, métier, humilité, Pierre Lefumat
a tracé tout au long de sa vie un sillon solide et fertile, fait de simplicité
intime et de gratitude pour les anciens. Il sait s’oublier pour mieux
recevoir et donner son art.
Peintre en décor, il a réalisé les faux marbres et faux bois parmi les plus
vivants de notre époque, il est le restaurateur reconnu d’oeuvres historiques
et s’inscrit dans la lignée des anciens auxquels il se rattache dans l’esprit et le
geste. Il parle marbres, il parle humain, il évoque la musique, ses silences, ses
moments fort, puissants, ses rythmes, la douceur et la fureur. Il devine les
hommes, lit les êtres et les pousse vers le meilleur d’eux-mêmes, en alchimiste
de l’intime, il permet à ceux qui l’entourent d’accoucher de leurs dons.
On dit de lui qu’il est un Maître, par reconnaissance de la maîtrise admirable
de son art, mais Pierre Lefumat est avant tout un homme de valeurs, nourri
par l’amour des autres, profondément humain et fidèle à ceux qui l’ont formé
et lui ont donné cette intense fierté d’exercer ce qu’il appelle « son métier ».
Parler de son oeuvre, c’est avant tout parler de lui, de sa personnalité, de sa
singularité.
Visage paisible et joyeux, attentif à ce qui l’entoure.
La Paix profonde qui émane de lui est un cadeau. Il respire la joie de vivre
intense de ceux qui ont réussi, malgré leur réputation, à rester à l’écoute du
coeur et à rester dans le coeur de la vie… Entièrement dédié à son métier,
sa passion, il est en paix avec lui-même et le reste du monde. Son regard
bienveillant et pétillant est l’expression d’une grande sagesse et le signe d’un
accomplissement personnel dans le respect de son prochain.
Ses mots sont à son image, ils parlent de simplicité, de ressenti, de regard,
de fluidité : « Je suis simple, comme j’ai été élevé… Comme je voudrais que
ce soit », en son for intérieur il se dit « amoureux de la simplicité, là où il se
sent bien ».
Son engagement est dans « l’acte de faire » et de transmettre son savoir-faire
» - comme il l’a lui-même reçu, tout jeune, apprenti à 14 ans auprès d’un père
généreux, auquel il voue encore un respect et une reconnaissance palpables –
l’essentiel est « d’apprendre à être humain au travers de l’art ».
Sa vie est la poursuite d’un chemin, dans l’humilité et la recherche du vrai,
du beau et de l’humain, dans le partage et la fidélité.
Son histoire est belle et simple, on pourrait dire que son histoire est fluide,
comme sa perception de la vie.
Élevé pendant la guerre, en Vallée de Chevreuse par sa mère et sa grandmère, il évoque une enfance heureuse, protégée, dans l’attente confiante du
retour du Père, modèle de vie et d’existence. Après cinq années passées en
Allemagne, son père, peintre en décor, lui transmet plus qu’une technique, il
lui transmet la valeur de l’humain et du don de soi.
Cet héritage perdure aujourd’hui encore.
Pour Pierre Lefumat, « Transmettre passe par le courant entre les êtres,
dans l’amour de l’Autre et passe par chemin du concret », « toute technique
s’enracine dans l’humain, dans la sensibilité, la capacité à observer ».
Tout est « à l’intérieur », le geste coule tout seule, c’est un flux qui vient du
dedans, un élan. Il se considère comme un artisan, n’y voit aucune gloire
personnelle, mais ressent et dégage un bonheur profond de transmettre et
d’accomplir son ouvrage. Il a l’humilité des grands hommes qui regardent
leur vie et les autres avec les yeux du coeur.
Après le service militaire, il se met à son compte, en tant que peintre en décor,
spécialisé dans la réalisation d’imitations des marbres et bois. Commence
alors une « Promenade dans la vie » et des rencontres qui vont lui permettre
de bâtir son parcours.
Gérard Trouvé, fondateur de l’entreprise éponyme, lui permettra de
monter peu à peu un rêve commun de bâtisseurs. Cette rencontre décisive
va annoncer sa deuxième moitié de vie, rencontre d’hommes, de vérité,
d’engagement, conjugaison basée sur un désir partagé de révélation d’un
art difficile et de construction d’une histoire de fidélité. Pari de passionnés
simplement animés par le profond désir de transmettre, de partager, se
mettre au service de l’artistique et de l’humain. Une alchimie qui a permis
de donner à l’entreprise un essor très important dans le monde entier au fil
des ans. Passer de 10 à 600 personnes en gardant un lien humain, centrer
une entreprise autour d’un projet artistique à part et conserver un esprit
proche des Académies de la Renaissance dans un projet contemporain. Leur
intelligence fut d’approcher les grands hôtels, palaces réputés et autres lieux
du luxe et sophistiqués qui, tels des mécènes, ont permis de redonner vie et
notoriété à cette tradition aux yeux d’un public de plus en plus large. Des
liens privés et ouverts se créent avec les architectes décorateurs au service
d’une création enthousiaste commune. Un rêve partagé prend forme.
Foisonnement d’échanges autour de projets conçus dans la durée et une
vision patrimoniale et d’esthète.
Puis les bâtiments de France, des restaurations d’oeuvres anciennes, Pierre
Lefumat entre dans les pas des maîtres disparus, il va retrouver leur main,
leur esprit et rendre vie à des chefs d’oeuvres fragilisés par le temps. Amour
de « faire », dans un esprit de famille.
Quelques moments forts émergent de sa mémoire…
I
l parle avec émotion de son tout premier grand chantier, premier émoi,
l’Eglise Saint Roch à Paris, première fierté, d’avoir choisi de faire ce
métier. Sensation de toucher à quelque chose d’important, de pérenne.
Les ailes poussent à l’ombre de l’aigle, du Père et des anciens.
Fierté de l’exigence, du temps que l’on respecte, dans lequel on s’inscrit, fierté
du métier…
Il parle avec pudeur d’un marbre particulier, d’une aventure étrange,
intime, troublante. Une commande à part, la restauration d’un marbre très
ancien, difficile, presque inaccessible, la sensation d’entrer dans une autre
dimension.
En préambule, Pierre évoque la sensibilité très aigüe que l’observation et la
réalisation des marbres entraînent chez lui. On lui avait alors demandé de
reprendre un marbre exceptionnel, d’une très grande beauté, complexe, de le
restaurer, de reprendre la totalité de ce travail, en ne laissant qu’un témoin
de ce qui avait été réalisé un siècle auparavant et de l’amener au même degré
de virtuosité que celle qui était la sienne.
L’enjeu était de retrouver la même « main », la même poésie. La même lecture.
Car tout ce travail est lecture et restitution de « l’essence des choses ».
Un seul chemin possible, observer longuement et « rentrer dans la matière
», retrouver l’esprit dans lequel elle avait été traitée, rentrer en empathie
avec le sujet et celui qui avait fait ce premier travail. Face à ce marbre, Pierre
Lefumat va rentrer dans le silence, dans une observation attentive. Il va
oublier l’acquis, le métier pour entrer en empathie totale avec l’esprit de
l’oeuvre. Il évoque avoir ressenti une facilité de réalisation déconcertante, la
fluidité et la qualité du geste, dues à la sensation prégnante, évidente, aigüe
de la présence à ses côtés de l’ancien Maître qui avait réalisé ce marbre, d’être
guidé par son esprit, par sa main lui permettant de peindre avec une aisance
sereine. Le résultat était à l’identique de l’original, indifférentiable.
Chez Pierre Lefumat, les clefs de la maîtrise sont simples, elles reposent
sur l’observation, la rigueur, elles s’enracinent dans la volonté d’enseigner, de
former et de donner, pour que rien de ce métier ne s’oublie. Pour la mémoire.
Reconnaître chez l’autre au-delà de sa main, son intériorité, sa finesse, sa
musique intérieure. Il évoque la musique, ses silences, ses moments forts,
puissants, ses rythmes, la douceur et la fureur.
recopier avec quelques élèves dont il pressent le potentiel, les marbres
naturels du château, c’est pour lui « la plus belle école du monde ».
Avec ses élèves, il va « traverser la matière » et faire une photographie
intérieure, et graver « là », dans sa tête, la mémoire vivante de ces marbres
magnifiques, de leur histoire et les restituer.
Lorsque l’on interroge Pierre Lefumat sur ses marbres préférés, il évoque les
marbres des Pyrénées, elles sont bouquets de fleurs, feu d’artifice, sculpture,
création, nature, il restitue ce que la nature a créé de plus beau, se l’approprie
et la réinterprète.
Il parle peu de technique, elle est là, présente, mais au service d’une dimension
bien plus intime puissante, de l’ordre du ressenti. La technique aide les
élèves, comme il l’a longuement pratiquée en enseignant à des générations
de peintres à l’Ipedec, ou à Chicago – Nasoda School – elle structure leur
regard et leur geste, mais doit s’oublier, s’intégrer. Au service d’une structure
intérieure ouverte et sensible. Passage nécessaire, à dépasser au plus vite.
Aujourd’hui, à 72 ans, Pierre Lefumat a des projets, beaucoup de projets,
continuer à transmettre, bien sûr, à Versailles et enfin, au Musée du Trompe
l’oeil, où apprentis, amateurs et professionnels peuvent profiter de son
expérience immense et de sa profonde générosité.
C’est aussi dans ce Musée unique, qu’une exposition «rétrospective » sur ses
plus beaux marbres lui est consacrée.
Et continuer à apprendre, car l’apogée dans l’art n’arrive qu’avec la fin
d’une vie… Et celle de Pierre Lefumat, toute la journée vers les autres et ce
merveilleux métier est encore pleine de promesses et de joie.
Découvreur de talents…
L
’écoute de Pierre Lefumat est telle qu’elle lui a permis de pressentir,
révéler et accompagner l’éclosion de talents, de vocations. Le rapport
particulier qu’il a créé avec le Château de Versailles en est un exemple
singulier, à la suite d’une visite privée improvisée, il va créer une école, et
Entretien avec Pierre Lefumat
Edith Herlemont-Lassiat
Château Vallet, Dordogne – Avril 2007
Critique d’art – co-fondatrice d’exporevue
Au cours de sa carrière, Monsieur Pierre Lefumat a enseigné son art dans plusieurs écoles :
• de 1998 à 2005, il enseigna les faux marbres à Institut Supérieur de Peinture Décorative de Paris (IPEDEC)
• en 2001 ce sont les faux marbres et les bois à la North American School of Decorative Art à Chicago (Nasoda).
• en 2004, il donne également des cours de faux marbres et bois pour les ouvriers de l’Atelier de Restauration du château de Versailles.
• en 2006, il transmet également son savoir au Musée Atelier du Trompe l’oeil de Périgueux, où une exposition lui fut, entre autres, consacrée en 2007.
• depuis 2009, Il est Président du Jury d’examen du Titre de Peintre en Décor « Techniques Ancestrales et Contemporaines » et professeur de la
masterclasse Imitation des Marbres à l’Ecole d’Art Mural de Versailles.
• 2009 : publication de « L’Art du Faux Marbre » aux Editions Vial
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