Chœur Novantiqua de Sion, dir. Bernard Héritier, Venise, septembre
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Chœur Novantiqua de Sion, dir. Bernard Héritier, Venise, septembre
Chœur Novantiqua de Sion, dir. Bernard Héritier, Venise, septembre 2012 “Cori spezzati a San Marco: Monteverdi, Gabrieli e Schütz” La mode vénitienne de la polychoralité (16e et 17e siècles) Le programme proposé se construit autour de deux compositeurs ayant vécu à Venise et oeuvré comme maitres de chapelle à la basilique Saint-Marc, Giovanni Gabrieli et Claudio Monteverdi. Ils ont composé les pièces proposées à et pour Saint-Marc, en tenant compte de ses caractéristiques acoustiques (entre autres ses deux tribunes que nous aimerions pouvoir utiliser). Un autre compositeur ayant écrit selon le même principe vénitien des « cori spezzati » (et élève des deux précédents à Venise) complètent le programme : l’Allemand Heinrich Schütz. La polychoralité La polychoralité (voir aussi l’expression italienne « cori spezzati », littéralement « chœurs brisés ») désigne la dispersion dans l’espace des musiciens d’un ou plusieurs chœurs et/ou d’un orchestre. On parle aussi de « chœurs multiples ». Les voix « concertantes » ramènent à la pratique de l’alternance entre plusieurs groupes : l’un composé par les solistes, l’autre par les chanteurs du chœur, euxmêmes pouvant être partagés en deux chœurs. Cette dispersion spatiale met en exergue la polychoralité, c’est-à-dire la multiplication des sources sonores de la polyphonie. Plusieurs blocs sonores autonomes dialoguent, s’opposent, concertent. Si cette conception d’une disposition éclatée dans l’espace est très ancienne (elle était déjà utilisée dans le Temple de Jérusalem et dans le chant antiphonique des premiers chrétiens), son développement artistique ne se produira qu’au XVe siècle. Le compositeur franco flamand Adriaan WILLAERT, qui fut maître de chapelle à la Basilique Saint-Marc de Venise de 1527 à 1562, utilisa la configuration particulière des deux tribunes qui se faisaient face dans la Basilique pour établir durablement la mode des « cori spezzati ». 1 Chœur Novantiqua de Sion, dir. Bernard Héritier, Venise, septembre 2012 Les compositeurs Giovanni GABRIELI Les élèves de Willaert, notamment Giovanni GABRIELI (1557-1612), exploitèrent de façon étonnante les diverses possibilités de cette disposition : dialogues musicaux, groupes de solistes, d’instrumentistes, effets d’écho, opposition soli et tutti, le tout soutenu par un continuo. Gabrieli devint titulaire du deuxième orgue de la basilique Saint-Marc en 1584, son oncle étant titulaire du premier. En 1586, à la mort de son oncle, il lui succéda au premier orgue et reprit également le poste de compositeur principal. San Marco avait une longue tradition d'excellence dans le domaine musical et les œuvres que Gabrieli y créa en firent l'un des compositeurs les plus réputés en Europe. Comme d'autres avant et après lui (Monteverdi), il utilisa la particularité de la disposition de l'église, avec ses deux loges pour les chœurs se faisant face, pour créer de saisissants effets spatiaux. Plusieurs de ses pièces sont ainsi écrites de façon à ce que l'on entende d'abord un chœur sur la gauche avant que le chœur situé à droite ne réponde. Gabrieli était un compositeur très original et est considéré comme une figure importante de la transition entre la musique de la Renaissance et la musique baroque. On trouve dans ses œuvres les débuts de l'utilisation de la basse continue. Claudio MONTEVERDI Willaert et Gabrieli firent de nombreux émules à travers l’Europe. Le grand Claudio MONTEVERDI lui-même, maître de chapelle de la Basilique San Marco de Venise de 1613 à 1643, écrira ses fameuses Vêpres à la Vierge et sa Selva Morale et spirituale dans ce style antiphonique. C’est dans cette dernière œuvre que le chœur Novantiqua puise le répertoire proposé ici. Monteverdi nous lègue avec la Selva morale e spirituale son 2 Chœur Novantiqua de Sion, dir. Bernard Héritier, Venise, septembre 2012 testament artistique. Maître de chapelle de Saint-Marc, et prêtre depuis dix ans lorsqu’il la compose, Monteverdi rassemble dans cette œuvre trente ans de son activité où se mêlent piété, science et génie, où la musique transcende sacré et profane, devenant morale e spirituale... Heinrich SCHÜTZ Heinrich SCHÜTZ (1585-1672) est considéré comme le plus grand musicien allemand antérieur à Jean-Sébastien Bach. Il étudia le droit à Marbourg avant d'aller à Venise où il fut l'élève de Giovanni Gabrieli entre 1609 et 1612, puis de Claudio Monteverdi, vingt ans plus tard. Il fut à partir de 1617, il est maître de chapelle à Dresde, avec des interruptions pendant la guerre de Trente Ans, jusqu'à son décès à l'âge de 87 ans d'une attaque cérébrale. Il travailla également à la cour du roi du Danemark à Copenhague, où il s'était réfugié à cause de la guerre de Trente Ans. Il fut l'un des acteurs majeurs de la musique baroque allemande, écrivant d'ailleurs de nombreuses œuvres sur des textes en langue vernaculaire. Il produisit essentiellement des compositions religieuses et fut l'auteur en 1627 du premier opéra allemand : Dafne (dont la musique est perdue, mais dont le livret dû au poète allemand Martin Opitz subsiste). Sa musique fut profondément influencée par l'Italie dans sa polychoralité. Schütz sut en effet admirablement combiner l'art de la musique italienne (les chœurs multiples de Venise, l'utilisation de groupes d'instruments et de groupes vocaux en écho et, bien sûr, l'opéra) avec la polyphonie allemande de la Renaissance. Il ne semble subsister aucune de ses pièces instrumentales alors que sa réputation d'organiste était grande à son époque. Hors de l’Europe, le monde sud américain reçut également cette influence, avec un compositeur comme Capillas qui composa aussi à la vénitienne, avec doubles chœurs en échos. Ces dialogues en opposition de voix solistes, de chœurs et 3 Chœur Novantiqua de Sion, dir. Bernard Héritier, Venise, septembre 2012 d’instruments aboutiront à la cantate d’église et à d’autres formes de musique religieuse comme l’oratorio. L’orchestration. L’orchestration comprend 10 instruments anciens, historiques : orgue positif, viole de gambe, contrebasse baroque, cornet, 3 sacqueboutes, deux violons et un violon alto. Le programme “Cori spezzati a San Marco: Monteverdi, Gabrieli e Schütz” Giovanni Gabrieli Deus, Deus meus – 10 voix Angelus ad pastores – 12 voix O magnum mysterium – 8 voix Jubilate Deo – 8 voix Heinrich Schütz Lobe den Herren – 8 voix Jauchzet dem Herren – 8 voix Claudio Monteverdi Dixit secondo – 8 voix Beatus primo – 6 voix Laudate Dominum secondo – 8 voix Magnificat – 8 voix Confitebor Laudate pueri secondo 4