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Cancer/Radiothérapie 16 (2012) 215–218
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Communication brève
Réflexion éthique sur la pluridisciplinarité et la confidentialité de l’information
en imagerie médicale via les nouvelles technologies de l’information et la
communication
Ethical reflection on multidisciplinarity and confidentiality of information in medical imaging
through new information and communication technologies
J. Béranger a,∗,b , P. Le Coz c,d
a
UMR 7268, espace éthique méditerranéen, 191, boulevard Baille, 13005 Marseille, France
Département de recherche, Keosys, 1, impasse Augustin-Fresnel, BP 60227, 44815 Saint-Herblain cedex, France
c
Comité consultatif national d’éthique (CCNE), 35, rue Saint-Dominique, 75700 Paris, France
d
Département de sciences humaines, faculté de médecine Timone, 27, boulevard Jean-Moulin, 13385 Marseille cedex 05, France
b
i n f o
a r t i c l e
Historique de l’article :
Reçu le 31 mai 2011
Reçu sous la forme révisée
le 13 octobre 2011
Accepté le 17 octobre 2011
Mots clés :
Imagerie médicale
Numérisation
Éthique
Multidisciplinarité
Confidentialité
r é s u m é
Le progrès technologique en imagerie médicale traduit par l’augmentation exponentielle du nombre
d’images par examen a signé le déclin irréversible du film argentique et imposé l’imagerie numérique. Cette numérisation correspond à un concept dont les niveaux d’élaboration sont multiples,
reflétant la complexité de ce processus de changement technologique. Dans ces conditions, l’utilisation
de l’information médicale via les nouvelles technologies de l’information et la communication se
situe au carrefour de plusieurs approches scientifiques et de plusieurs champs sectoriels (médecine,
éthique, droit, économie, psychologie, etc.) encadrant les systèmes d’information en santé, la relation
médecin–patient et les concepts associés. Chaque jour, ces technologies de l’information et la communication ouvrent des horizons nouveaux et le champ des possibles, développant de manière spectaculaire
l’accès à l’information et à la connaissance. Dans cette perspective d’émergence du numérique impactant l’utilisation multidisciplinaire d’un système d’information en santé, les interrogations éthiques sont
nombreuses, en particulier sur la préservation de la vie privée, de la confidentialité et de la sécurité des
données médicales, ainsi que sur leurs accessibilités et leurs intégrités.
© 2012 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous
droits réservés.
a b s t r a c t
Keywords:
Medical imaging
Digitizing
Ethics
Multidisciplinary
Privacy
Technological advances in medical imaging has resulted in the exponential increase of the number of
images per examination, caused the irreversible decline of the silver film and imposed digital imaging.
This digitization is a concept whose levels of development are multiple, reflecting the complexity of this
process of technological change. Under these conditions, the use of medical information via new information and communication technologies is at the crossroads of several scientific approaches and several
disciplines (medicine, ethics, law, economics, psychology, etc.) surrounding the information systems in
health, doctor–patient relationship and concepts that are associated. Each day, these new information and
communication technologies open up new horizons and the space of possibilities, spectacularly developing access to information and knowledge. In this perspective of digital technology emergence impacting
the multidisciplinary use of health information systems, the ethical questions are numerous, especially
on the preservation of privacy, confidentiality and security of medical data, and their accessibility and
integrity.
© 2012 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All
rights reserved.
∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (J. Béranger).
1278-3218/$ – see front matter © 2012 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.canrad.2011.10.012
216
J. Béranger, P. Le Coz / Cancer/Radiothérapie 16 (2012) 215–218
1. Introduction
Le début des années 2000 a été marqué par l’apparition d’une
rupture technologique dans la transmission et le traitement de
l’information médicale avec le passage du mode analogique au
mode numérique. Une véritable convergence numérique s’impose
désormais dans la plupart des produits « informationnels » de notre
société et plus particulièrement en santé, en tant que norme
technico-économique. L’imagerie médicale correspond probablement à la discipline médicale qui a bénéficié le plus des progrès
de la technologie. Une succession d’interventions a révolutionné le
monde de la médecine avant de devenir le quotidien du radiologue
et des autres praticiens au service du patient [1].
Les métaphores concernant ce phénomène de société sont
multiples, on parle successivement d’une révolution, d’une ère
nouvelle, d’un nouveau territoire, d’une nouvelle société, d’une
nouvelle économie, d’un nouveau espace, d’une nouvelle accessibilité, d’une nouvelle géographie, etc. Ces différents termes associés
à l’adjectif numérique traduisent bien le fait que l’informatique,
le « tout numérique », est devenue le principe constitutif de notre
société. Cette succession d’expressions témoigne de la difficulté de
saisir toute la complexité de cette convergence. Ainsi, cette révolution numérique est une continuation de la révolution industrielle
dans le sens où elle est l’œuvre de processus qui ont commandé
les innovations technologiques. En d’autres termes, la technologie permet à l’Homme, en lui fournissant des outils toujours plus
performants, de construire un univers socio-économique propre et
d’innover par rapport à cette construction. Cela aboutit donc à une
société dans laquelle les technologies de l’information jouent un
rôle majeur et central. Avec la numérisation, la science découvre
l’univers de l’information, de l’intelligence et du cerveau humain.
Dans ces conditions, une telle avancée technologique renforce le
rôle incontournable de l’imagerie médicale dans la recherche du
diagnostic et dans le déploiement de la stratégie thérapeutique
élaborée dans la multidisciplinarité des équipes médicales.
Toutefois, ce progrès technique peut s’exprimer dans des activités immatérielles et générer une « réalité virtuelle » dont les
perspectives de valorisation ne sont pas encore tout à fait bien
perçues : d’où les problématiques éthiques qui en découlent. Cette
numérisation a perturbé « l’avoir », mais « l’être » n’est pas en reste.
La frontière entre le virtuel et le réel est de plus en plus floue
et incertaine. Elle transforme la conception de la distance et,
de manière indissociable, le rapport au temps. Ce processus se
présente alors comme l’axe moteur des structurations qui bouleversent en profondeur l’espace des activités associées au traitement
et à la diffusion de l’information médicale. Il engendre de multiples
possibilités, mais aussi de nombreux problèmes notamment dans
la relation médecin–patient où la consultation du médecin et la
communication des résultats des examens d’imagerie aux patients
ont été impactées par ces modifications de pratique non réellement
maîtrisées [2]. Cela nous amène à avoir une réflexion éthique sur
l’impact d’une telle avancée technologique dans le domaine de la
protection de la vie privée, de la confidentialité et de la sécurité de
l’information médicale.
2. L’information médicale : un champ d’étude
pluridisciplinaire centré autour de l’éthique
Par nature, l’information médicale comporte une connotation
d’ordre universel, transversal et fédératrice en regroupant de nombreux secteurs et acteurs différents impliqués directement ou
indirectement dans l’utilisation des systèmes d’information en
imagerie médicale. Cette notion se retrouve également à travers
l’humain et les liens existant entre le technologique, le psychique,
le social et l’organique. Un tel contexte contribue à rendre une
approche pluridisciplinaire fondamentale dans un souci d’une
meilleure collégialité [3]. On peut illustrer cette vision par la
création, courant 2010, d’un comité sur l’éthique des recherches
en sciences et technologies de l’information et de la communication [4] et depuis mars 2011 d’un département Recherche au
sein de la société Keosys1 dont l’objectif respectif est de développer des réflexions de fond sur l’impact éthique des sciences
et technologies de l’information et de la communication. De telles
instances seraient communes aux organismes de recherche nationaux travaillant dans ce domaine (Centre national de la, recherche
scientifique [CNRS]), Institut de recherche en informatique et en
automatique [Inria], Commissariat à l’énergie atomique [CEA],
Institut Télécom, etc.), aux universités et aux grandes écoles. . .
Elle regrouperait des chercheurs des sciences et technologies de
l’information et de la communication, et des sciences humaines et
sociales (philosophes, juristes, économistes, sociologues, anthropologues, etc.), ainsi que des industriels, et entretiendrait des liens
avec les observatoires des usages des technologies de l’information
et de la communication existants, les comités d’éthique généralistes et la représentation nationale [5]. Selon l’Inria, cette réflexion
interdisciplinaire en amont doit permettre d’élargir le champ de
recherche à l’anticipation des solutions, ou au développement de
technologies capables de s’adapter plus facilement à la réalité des
usages. Cette approche permettrait de prévenir ou de contourner les problèmes pressentis ou rencontrés, lors de l’arrivée de
ces technologies de l’information. Cette diversité de réflexion2
aura un impact sur la sécurisation du patient et de son entourage, sur le développement d’une éthique de responsabilité à
tous les niveaux des soignants, sur la visibilité du rôle et de la
coordination des protagonistes de la relation médecin–patient,
et sur l’interdépendance de chacun dans la prise en charge
du patient. L’exigence éthique impose donc une préoccupation
à prendre en compte durant toutes les phases du développement technologique. Selon le président du Conseil d’éthique et
de déontologie de l’Agence des systèmes d’information partagés de santé (Asip santé), « les valeurs qui constituent l’éthique
sont très largement transculturelles » [6]. Cette réflexion multidisciplinaire constitue alors un facteur d’éveil de questions en
tout genre notamment autour de la confidentialité des données
médicales.
3. Point de vue multidisciplinaire sur la confidentialité des
données médicales via les nouvelles technologies de
l’information et la communication
Globalement, pour la majorité des professionnels et
intellectuels3 , l’utilisation et la diffusion des informations médicales via un système d’information performant constituent un
enjeu majeur du bon fonctionnement des établissements de santé
et à une échelle plus large de notre système de santé. Les évolutions
des pratiques médicales, des nouvelles technologiques viennent
bousculer le principe du secret médical qui se heurte à d’autres
1
Société qui propose des solutions de relectures multicentriques, d’examens
en imagerie médicale, ORTC, diffusion d’information médicale dématérialisée, etc.
(www.keosys.com).
2
De cette confrontation de logiques disciplinaires différentes apparaît une expérience qui peut être transmise vers chacune de ces disciplines. Selon la philosophie
positive d’Auguste Comte, une pensée éthique se révèle totalement dans la confrontation des pensées pluridisciplinaires.
3
Médecins : radiologue et cancérologue, philosophe, politicien, économiste de la
santé, chercheur et enseignant universitaire en éthique, consultant dans une société
de conseil en systèmes d’information, directeur d’un établissement de santé, responsable de la mutualité française, juriste, sociologue, anthropologue, industriel en
systèmes d’information, etc.
J. Béranger, P. Le Coz / Cancer/Radiothérapie 16 (2012) 215–218
intérêts tant individuels4 que collectifs5 . Ce secret médical « se
transforme en confidentialité voire en secret partagé » [7].
Le problème de la confidentialité des données médicales prend
une dimension particulièrement aiguë en cancérologie du fait que
l’évocation d’un cancer est souvent rattachée à la mort. Beaucoup
de malades atteints de cancer ne veulent plus en entendre parler
et évoquent un droit à l’oubli afin de reprendre une vie normale. À
cela, on peut rajouter le fait que l’accessibilité des données informatiques en médecine tant par le patient que les professionnels
de santé ou l’hébergeur de données de santé risque d’engendrer
de réelles difficultés quant à la protection du secret médical. Ainsi,
le bénéfice de l’accès au dossier médical d’un patient peut faire
encourir à ce dernier des risques6 avec son environnement. Le problème de sécurité des données est d’autant plus important que
des sociétés démarchent régulièrement des praticiens afin de les
« informatiser » gratuitement en échange des données de santé de
leur cabinet. Le praticien soucieux d’améliorer sa technologie informatique viole ainsi le secret médical à son propre insu. La menace
de la confidentialité ou du secret médical devient plus grande avec
l’informatisation et l’évolution de la pratique médicale [8]. C’est
pourquoi, d’après le secrétaire général de la Société française de
radiologie (SFR), les industriels de l’imagerie médicale s’interrogent
de plus en plus sur la mutation de leur profession en raison de la
diversité de leurs tâches et les attentes de leurs partenaires notamment en termes de sécurité et protection des données médicales.
Désormais, ces industries sont devenues de « grandes sociétés de
service susceptibles d’intervenir dans toutes les étapes de projets
complexes aussi bien qu’en matière d’analyse de besoin, de réaction
de solutions, d’étude architecturale, d’organisation de département
médicaux, de département de programmes de formation. . . tout
en assurant leurs fonctions essentielles d’installateur et de mainteneur, voire de télémainteneur » [2].
Pour ces professionnels, la réflexion sur la conception et l’usage
des systèmes d’information ne se limitent pas aux seuls aspects
techniques mais aussi sur un niveau stratégique, organisationnel
et relationnel qui entoure la confidentialité des données. Les dispositifs informatiques doivent être planifiés à l’avance, et les outils
nécessaires à la sécurité et à l’amélioration de la confidentialité
doivent être sélectionnés7 sur la base de l’analyse des risques et des
exigences fixées par la législation. Ainsi, les systèmes de téléradiologie doivent satisfaire à des exigences éthiques et réglementaires
[9]. Afin de ne pas altérer la qualité des diagnostics et la confidentialité des données médicales, les radiologues sont souvent amenés
à apporter la plus grande attention à certains facteurs clés de succès
tels que : l’ergonomie du système et à ses performances en termes
de sécurité, de protection, d’intégrité et de temps de transmission
des données médicales, les respects des règles déontologiques et
juridiques, les aspects humains et organisationnels, etc.
Dans ces conditions, ce système d’information doit obéir à des
règles d’éthique, de transparence, d’indépendance, de confidentialité et de qualité qui garantissent la crédibilité et la fiabilité de
la diffusion d’information. Il nécessite également d’être utilisable,
c’est-à-dire s’intégrer dans un programme accessible de résolutions
de problèmes de nature multiple : organisationnelle, stratégique,
humaine, sanitaire ou économique. L’information des usagers
doit être un processus central continu et permanent, capable si
4
Le patient et ses proches.
La santé publique, la recherche scientifique, la gestion des coûts de santé, etc.
6
Par exemple : le risque de la communication à un tiers qui n’en sont pas destinataires, le risque d’être confronté à la demande excessive d’une autorité (employeur,
administration, etc.) qui imposerait la prise de connaissance du dossier médical
de son salarié, le risque exercé par les compagnies d’assurances ou les industries
pharmaceutiques, contournant l’obstacle que leur constitue le secret médical.
7
Par exemple, l’authentification forte, le cryptage des données, les services nonrépudiation et l’audit-logs.
5
217
possible de prévenir et d’anticiper des situations de crises sanitaires. Le système d’information est un vecteur d’uniformalisation
dont l’objectif est de tendre vers une communication universelle
comprise par tous les acteurs. Pour le président de Microsoft France,
il est du devoir des acteurs économiques de prendre leurs responsabilités en ce qui concerne les enjeux de : « protection de la vie
privée, de sécurité des données, d’ouverture et d’interopérabilité »
[10]. La nécessité de garder confidentielles, ou tout simplement
privées, certaines données relève de la liberté de chacun.
Enfin, la valeur d’une information est fonction du besoin qu’on
en a. Elle est liée à sa confidentialité, à son intégrité et à sa disponibilité. La sécurité d’un système d’information repose donc sur
l’utilisation de quelques techniques comme l’authentification des
utilisateurs, le contrôle d’accès aux ressources, la non-répudiation,
l’audit des traces de sécurité, etc. D’après le directeur de Sanoia
(éditeur de systèmes d’information), « l’informatique n’est pas le
problème ; elle n’est que l’automatisation d’un processus existant
et sous-tendu. Elle cristallise et amplifie un problème, tel qu’un
révélateur » [11]. Cela suppose alors de bien définir un processus
et établir une feuille de route prenant en considération les éventuelles déviances de son usage contribuant à mettre en péril la
confidentialité des données médicales. Il faut donc lever toutes
les ambiguïtés en étant plus transparent en décrivant précisément
ce que l’on attend d’un système d’information. Car une mauvaise
pratique éthique s’accompagne généralement d’une mauvaise utilisation.
4. Conclusion
L’information médicale et son éthique prennent donc une place
prépondérante au centre de notre système de santé et notamment
en radiologie. De ce fait cela concerne l’ensemble des acteurs de
ce système en organisant de nouveaux rapports de force entre
les personnes soignées, les soignants et les professionnels de
l’informatique. C’est donc tout le droit et l’éthique de la santé qui est
revisité autour de l’information médicale et de sa confidentialité :
devoirs fondamentaux, politique de santé, organisation professionnelle, gestion hospitalière, responsabilité, etc.
Les craintes que génère l’informatisation de la pratique médicale sur la protection des données sont salutaires car elles nous
rappellent les règles de confidentialité fondamentales que les
médecins doivent se forcer d’observer et les confrontent avec
les négligences qu’ils manifestent souvent involontairement par
ignorance, par nonchalance ou facilité. Toutefois, ces risques de
violation du secret médical ne concernent pas uniquement ces
utilisateurs mais également les concepteurs et les éditeurs qui
élaborent la structure technique des systèmes d’information. Ces
derniers doivent veiller à la protection des données médicales
transmises en réalisant un système d’information performant et
sécurisé.
De plus, le principe de réalité révèle que ces risques peuvent
être intrinsèquement liés à la structure même des systèmes
d’information. Une structure présentant des défaillances organisationnelles ou éthiques graves verra ces risques s’amplifier. Dans
ces conditions, il faut considérer l’informatisation comme étant
plus un moyen de révéler et de souligner les défaillances d’un établissement de santé plutôt qu’un objet causal de défaillance. Le
système d’information représente alors un véhicule d’information
qui améliore plus l’efficacité de la prise en charge des soins que son
efficience.
Par ailleurs, même si cette technologie devient indispensable
dans les échanges d’informations, elle n’entre qu’en partie dans la
réflexion éthique entourant la transmission des données auprès
des patients en oncologie. Elle ne constitue qu’un des éléments
encadrant l’information médicale et aboutissant à une réflexion sur
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J. Béranger, P. Le Coz / Cancer/Radiothérapie 16 (2012) 215–218
son utilisation. À partir de cela, il devient nécessaire d’élargir notre
vision vers d’autres paramètres environnementaux qui touchent les
domaines du stratégique, de la méthodologie, de l’organisationnel,
du réglementaire, du relationnel et du culturel. Face à la complexité
des problèmes posés, une consultation multidisciplinaire devient
alors primordiale, d’autant plus qu’elle appartient au secteur de
l’éthique. Cette réflexion constitue alors les règles de conduite
d’une société face à la révolution scientifique et technique, et
s’alimente d’échange d’opinions pluridisciplinaires et pluriculturelles.
Après la synthèse des différents avis et propos pluridisciplinaires sur le sujet, il semblerait qu’un certain nombre d’exigences
éthiques ont été mises en place. Elles concernent la protection et la
sécurité des données médicales, le secret médical, la confidentialité
et le respect de la vie privée, l’intégrité des informations médicales,
le partage des responsabilités entre les professionnels de santé
et les concepteurs de système d’information, l’accessibilité de
l’information pour tous, le respect et le maintien de l’autonomie
du patient, etc. À partir de ces constats, il nous semble indispensable d’introduire des acteurs extérieurs à la santé afin de
casser cet espace médical clos et apporter une vision extérieure
complémentaire. La vision éthique doit se retrouver tout le long
du cycle de vie d’un système d’information. D’une part, en amont,
avec l’établissement des besoins traduisant l’éthique de la pensée
et des attentes, c’est-à-dire l’aspect abstrait et idéologique. Et
d’autre part, en aval, avec les processus découlant des cahiers
des charges illustrant l’éthique de la pratique, en d’autres termes
l’usage quotidien sur le terrain ainsi que ses déviances concrètes
qui en découlent (accidents, maladresses, éducation, etc.).
Plus généralement, nous abordons ici des questions touchant à la technique comme l’informatique et l’ingénierie du
système d’information, mais aussi à l’information médicale associée à l’interrelation humaine d’un point de vue sociologique et
philosophique : d’où cette mise en avant de l’interdisciplinarité
dans la confidentialité de l’information médicale. À notre sens, la
seule manière pour l’Homme de s’adapter à la puissance des nouvelles technologies de l’information et la communication est « de
modifier en profondeur la vision que nous avons de nous-mêmes »
[12]. Cette réflexion éthique devient alors primordiale pour maintenir la place de la confidentialité, de la confidence et donc de la
confiance au sein d’une relation triangulaire émergente associant
le médecin, son patient et désormais, le système d’information.
Déclaration d’intérêts
J.B. : en thèse dans le domaine de l’éthique médicale ; également
responsable adjoint du département Recherche de la société Keosys
(fournisseur de solutions informatiques en imagerie médicale).
Références
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[2] Kind M. L’image radiologique dans le dossier patient. Bull Cancer
2009;96:1139–41.
[3] Despinoy L. Qu’est-ce qu’accompagner ? [mémoire de mastère Éthique, science,
santé, société]. Marseille: Espace éthique méditerranéen; 2011.
[4] Inria. La création d’un comité d’éthique en sciences et technologies du numérique; 2009.
[5] Testard-Vaillant P. De l’éthique pour les STIC. INSITU. Le journal du CNRS
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[6] Chatiel JF, Masson JP, Hazebroucq V, Silberman B. Téléradiologie : champ
d’action et recommandations. J Radiol Paris 2006;87:1643–50.
[7] Guienne V, Dabouis G. Secret et confidentialité : enjeux éthiques. Journée
d’étude du MSH Ange-Guépin; Réseau Ethis (Éthique et Santé). Nantes; 2010.
[8] Rüedi B. Le secret médical est-il en danger ? Neuchâtel 2003.
[9] Ruotsalainen P. Privacy and security in teleradiology. Eur J Radiol 2010;73:
31–5.
[10] Boustouller E. Communiqué de presse; Issy-les-Moulineaux; 2011.
[11] Servy H. Interview; espace éthique méditerranéen. Marseille; 2010.
[12] Dyens O. La révolution « inhumaine ». Le Monde 2008.