1 Souvenirs du passé
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1 Souvenirs du passé
Souvenirs du passé 1 Souvenirs du passé Note : Ici, Kelly BlackWolf est sous sa forme de loup du début de son passé. Comme l’image est relativement vieille, quelques petits changements ont été apportés depuis. (2011) Nom: BlackWolf (née Pinter) Prénom: Kelly (Complet: Kelly-Rose) Âge: 20 ans Sexe: Féminin Couleur de yeux: Œil droit violet, l'autre bleu Couleur de cheveux: Noir naturel, se teint souvent le devant d'une autre couleur Taille: 1m64 (5'4") Poids: 69 kg (150 lbs) Caractère: Elle est plutôt sauvage, elle n'aime pas du tout se faire marcher sur les pieds (pattes?). Quand on la connait bien, elle peut s'avérer comme une amie loyale. Elle agit souvent comme un loup, son animal totem. Son passé lourd lui a forgé une grosse carapace difficile à percer. Autre: Elle a six piercings à chaque oreille formant les couleurs du drapeau gay et deux à la lèvre du style spiderbite. Elle s'habille souvent comme un garçon, les vêtements de femme ne la mettant pas du tout à l'aise. Couleur préférée: Mauve et Bleu Orientation sexuelle: Homosexuelle 2 Souvenirs du passé Nom: Stevens Prénom: Katrina Sexe: Féminin Couleur de yeux: Violet Couleur de cheveux (naturelle): Châtain clair Taille: 1m72 (5'7") Poids: 54,5 kg (120 lbs) Caractère: Elle est une fille très souriante et voit la vie du bon côté. Elle adore les émotions fortes. Son animal préféré est le papillon. Comme elle n'aime pas sa couleur de cheveux naturelle, elle préfère se teindre. Sa mèche rayée est tout aussi teinte, ce n’est pas une rallonge. Elle ADORE tout ce qui est Hello Kitty. Sa personnalité bouillonnante de bonheur rend les gens heureux quand on la croise. Couleur préférée: Rose Orientation sexuelle: bisexuelle 3 Souvenirs du passé "My Immortal" I'm so tired of being here Suppressed by all my childish fears And if you have to leave I wish that you would just leave 'Cause your presence still lingers here And it won't leave me alone These wounds won't seem to heal this pain is just too real there’s just too much that time cannot erase [Chorus:] When you cried I'd wipe away all of your tears When you'd scream I'd fight away all of your fears And I held your hand through all of these years But you still have All of me You used to captivate me By your resonating light Now I'm bound by the life you left behind Your face it haunts My once pleasant dreams Your voice it chased away All the sanity in me These wounds won't seem to heal This pain is just too real There's just too much that time cannot erase [Chorus] I've tried so hard to tell myself that you're gone But though you're still with me I've been alone all along 4 Souvenirs du passé “My immortal – Version française” Je suis si fatiguée d’être ici Supprimée par mes peurs enfantines Et si tu dois partir Je souhaite que tu ne fasses que partir Car ta présence persiste encore ici Et ne me laissera pas tranquille Ces blessures ne semblent pas guérir Cette douleur n’est que trop réelle Il y a tant de choses que le temps ne peut effacer [Refrain] Quand tu pleurais j’essuyais chacune de tes larmes Quand tu criais je combattais chacune de tes craintes Et je t’ai tenu la main pendant toutes ces années Mais tu gardes encore Tout de moi Tu avais tendance à m’enivrer Par ta lumière éblouissante Maintenant je suis attachée à la vie que tu as laissée Ton visage hante désormais Les rêves les plus plaisants que j’avais Ta voix a fait chasse Toute ma vanité Ces blessures ne semblent pas guérir Cette douleur n’est que trop réelle Il y a tant de choses que le temps ne peut effacer J’essaie si fort de me dire que tu n’es plus là Mais malgré tout tu es avec moi Finalement j’étais seule pendant tout ce temps Paroles traduites en français par moi-même. 5 Souvenirs du passé « Nous sommes réuni aujourd’hui en ce jour funèbre du douze juillet afin de se souvenir quelle femme extraordinaire était Katrina Stevens, décédée le huit de juillet suite à un tragique accident. Mademoiselle Stevens laisse dans le deuil sa ché… son amie Kelly-Rose Pinter, ses parents, ses oncles, tantes, ainsi que de nombreux membres de sa famille et amis…» Le prêtre avait à peine commencé la cérémonie que je suis sortie de cette église où reposait le cercueil silencieux de Katrina presqu’à la hâte, les larmes aux yeux. Je déteste pleurer devant les autres, je ne sais pourquoi… Sans doute parce que je trouve que pleurer est pour les mauviettes ou quelque chose de ce genre. Une fois à l’extérieur, je m’allumai une cigarette tout en regardant ce ciel gris embrouillé par mes larmes. Il allait bientôt pleuvoir, comme à chaque fois un défunt est sur le point d’être camouflé dans un trou de ce sol terreux parmi les bestioles. J’essuyai mes larmes d’un coup de patte en fourrure tout en fumant nerveusement, les lèvres tremblantes de tristesse. Jamais je n’oublierai cette date du huit juillet, là où tout avait chamboulé. J’avais perdu l’être que j’aimais le plus au monde qui était toujours là pour moi quand j’en avais le plus de besoin, et dont j’étais là pour elle lorsqu’elle ne se sentait pas bien. On dit que rien n’arrive pour rien et étrangement, je n’ai jamais compris le sens de cette phrase. Je suis de ceux qui ne voient pas plus loin que le bout de leur museau au lieu de marcher la tête droite et s’apercevoir que la vie défile sur un chemin qui s’étend vers l’infini. Katrina m’avait permis de voir cette lumière au bout du tunnel bien avant que je tombe dans le fin fond de celui de l’oubli. Personne ne m’aimait vraiment… sauf elle. Elle m’avait dit que mon physique lui importait peu, tant que je lui offrais tout mon amour afin qu’elle se sente aimée. Ma cigarette terminée, je 6 Souvenirs du passé l’écrasai contre les marches de ciment de ma patte de loup. Pourquoi des pattes de loup ? Je suis ce que les gens appellent un anthro, ou encore un animal qui se prend pour un humain. Moi, un animal ? Pas du tout. J’ai peut-être beaucoup d’instinct animal, mais je me comporte tout de même comme un humain. Je poussai un long soupire et entrai de nouveau dans l’église avec les regards rivés sur moi, mais je n’y pris aucun soin. Je me tenais debout, la tête droite levée afin de ne pas montrer mon chagrin à tous ces inconnus. Les seules personnes que je connais parmi cette foule de gens étaient les parents de Katrina qui m’avaient si bien accueillie quand celle-ci leur avait dit que j’étais son amoureuse. Amoureuse… je ne pourrai plus l’appeler ainsi désormais pour me vanter aux autres comme quoi je n’étais pas une bête de foire ou quelque chose d’autre dans cette branche de la malformation. Je n’osai toutefois point les rejoindre, effrayée à l’idée qu’ils puissent me rejeter après cet événement. Après tout, selon les autres, je ne suis qu’un animal ; je devrais donc aimer quelqu’un de la même espèce que la mienne. Je ne sais pourquoi j’ai toujours eu cette attirance envers les humains. Perdue dans mes pensées, j’écoutai les dires du curé sans toutefois prêter attention aux mots qu’il utilisait. Une fois la cérémonie terminée, nous nous dirigeâmes vers le cimetière afin de dire au revoir à cette magnifique femme désormais partie rejoindre les anges. Je me tenais à l’écart des autres, silencieuse, regardant tout ces gens caresser le cercueil, lui dire des mots avec une voix si soupirante qu’ils se perdaient dans la légère brise humide de l’après-midi. Et comme de raison, il se mit à pleuvoir ; je sentis les premières gouttes se déposer délicatement sur mon nez violet. J’attendis que les autres fussent partis afin de lui prononcer mes propres mots, ceux que j’aurais voulu lui dire depuis si longtemps déjà mais je n’avais jamais osé. Il a fallu qu’elle parte pour que je puisse tout lui 7 Souvenirs du passé dire ce qui me passait par la tête, apparemment. Les autres trouveraient que je prends trop de temps à lui dire mes sympathies s’ils étaient encore là tant j’en avais à raconter. En plus, ce n’était que le résumé de ce qui s’était passé de toute ma vie, de tout ce que j’avais vécu, de ma naissance jusqu’à… ce jour, où tout a chamboulé, c’est-à-dire cette journée du huit juillet où cette femme fabuleuse est décédée. Je suis passée par tant de choses que j’ai presque oubliées aujourd’hui que ça ne me dérange pas d’en parler aussi ouvertement. C’était il y a bien longtemps ; j’avais neuf ans et mon nom était encore Kelly-Rose Pinter avant de devenir Kelly BlackWolf comme j’ai l’habitude de me nommer ainsi. J’avais un père et une mère, bien que je souhaite mieux ne pas avoir de parents. Ma mère était une alcoolique alors que mon père était un personnage tant occupé par son travail que je n’avais jamais pris la peine de le connaître. Je vivais donc avec cette harpie, cette femme qui me détestait de la pointe des cheveux jusqu’aux orteils et qui m’avait pourtant donné naissance : ma mère. Elle était si cruelle et sadique envers moi. Elle m’a déjà dit des choses qui m’ont plusieurs fois remis en question, des mots qu’une mère normale ne prononcerait jamais à sa progéniture. Je ne sais point pourquoi elle était ainsi et pourquoi elle buvait autant. Elle me disait que c’était pour passer le temps avec une bière ou deux en attendant mon père, mais il y avait une autre raison pour qu’elle passe au travers d’un carton de vingt-quatre bouteilles en une seule journée et qu’en plus, quand venait le temps de se coucher, elle était tellement 8 Souvenirs du passé bourrée qu’elle ne faisait point un seul pas sans se vider sur le sol. Et moi, toute petite, ne savant que faire, je me sentais impuissante. Je voulais tant la voir heureuse ; je l’aimais quand même, malgré ces nombreux défauts de tout mon cœur de jeune fille. En même temps, plus je voulais l’approcher, plus que j’en avais peur. Peur qu’elle me frappe contre le mur comme elle me l’a fait plusieurs fois. C’était un soir, tranquille et surtout morbide. J’entendais ma mère, du haut de mes neuf ans, boire ses bouteilles de poison devant la télévision, chaque gorgée se faisant engloutir dans le plus terrible des bruits ; celui de l’ennui. La maison était silencieuse malgré l’écran noir et blanc qui faisait jouer ses sons enroués par l’âge, le goulot des bouteilles s’entrechoquant après avoir été violemment frappés sur le sol. Le carnage se finissait seulement lorsque cette femme s’endormait sur le canapé, sans doute la tête étourdie, avec une cigarette à la bouche. Habituellement, j’allais toujours la lui enlever pour éviter des accidents. Mais ce soir, j’étais épuisée par ma journée, je me suis endormie assez tôt, les larmes aux yeux. Je voulais tant qu’elle arrête de boire, tout comme dans les rêves merveilleux de petite fille que je faisais. C’était le même soir, il faisait nuit dehors quand je me suis réveillée en sursaut, alertée par un bruit strident ; celui du détecteur. Je me demandais ce qui se passait alors, ma curiosité ayant pris le dessus, je me dirigeai vers le salon. J’aperçus le canapé échapper de la fumée, les tissus émettaient des crépitements comme quand on allumait un feu de foyer. Le feu ! J’essayai de réveiller ma mère du mieux que j’ai pu, sans résultat. Doublant d’efforts, je continuai encore et encore jusqu’au moment où elle mit sa main dans la chaleur du feu. Elle se réveilla en sursaut et gagna la porte pour sortir de la demeure en vitesse, tout en me laissant derrière elle. Je regardai la cigarette rouler jusqu’au sol, puis gagner 9 Souvenirs du passé lentement les bouteilles où le fond encore rempli d’alcool pourrait servir d’explosif. Je me suis donc enfuie de la maison pour aller dans la forêt, le seul moyen que je puisse trouver pour me sentir en sécurité. Quelques jours plus tard, affamée et faible, je me retrouvai face à face avec un loup. Il se tenait assis devant moi, ses yeux canins concentrés sur ma petite personne. Il avait l’air de se tenir derrière quelque chose à manger. Je m’approchai doucement, étant inconsciente du danger qui se trouvait réellement devant moi. J’avais si faim… Je tendis alors la main vers un fruit. Le loup me regardait toujours, sans broncher, haletant calmement. Il semblait gentil, malgré ce que l’on racontait tant aux jeunes enfants à propos des animaux de la forêt dans les livres de conte. Il m’offrit même de le suivre vers une belle partie de la forêt où tout l’état sauvage montrait un éclat toutefois invitant. Je mangeais ma pomme en même temps qu’il me montrait sa tanière, là où, je suppose que, en voyant son regard, j’allais y habiter aussi. Le loup avait un étrange instinct paternel et m’élevait comme si j’étais son enfant. Pourtant, il y avait une grande différence entre lui et moi. La principale étant le fait qu’il soit un animal et moi, qu’un humain. Quelques années passèrent avec ce charmant canin qui, au fil des années, pouvait communiquer de façon télépathique, me transférant tant de choses que j’en ai oublié quelques-unes avec le temps. Une année, à mon anniversaire, il m’avait offert une de ses griffes qui brillait d’un violet sombre et mystérieux. Il n’était attaché que par une corde qu’il avait trouvé je ne sais où. Je m’empressai alors de me le mettre autour du cou. Je me souviens avoir crié de douleur suite à ce cadeau que j’avais d’abord cru empoisonné. Les hurlements terminés, je 10 Souvenirs du passé réalisai avec surprise que j’étais devenue une sorte de créature entre l’humain et le loup. Je n’étais pas un loup-garou pourtant, puisqu’aucune pleine lune n’était dans le ciel. Je vociférai un peu au début, me demandant ce que les autres allaient me lancer comme insulte le lendemain à l’école. Qui plus est, avec le temps, j’ai développé un instinct plus animal qu’humain, alors je suis considérée comme une différente parmi les autres écoliers. Cela ne me déplaisait guère néanmoins ; ça leur faisait un sujet à pointer de leur langue fourchue remplie de mots sur mon sujet dont je ne me suis même plus donnée la peine de comprendre. Les autres me craignaient car ils ne savaient jamais comment j’allais réagir face à une telle situation. Je m’étais tant laissé faire comme une jeune fille innocente, surtout avec ma mère, qu’aujourd’hui, j’ai développé des moyens plus violents pour me faire comprendre. Je n’aimais pas du tout le rôle de vilaine fille alors que je suis quelqu’un avec un tempérament relativement doux la majorité du temps. Ma transformation terminée, je regardai mon reflet au travers d’une bouteille de bière laissée à l’abandon dans la forêt. Mes oreilles étaient maintenant plus hautes sur ma tête tout comme les oreilles d’un canin et mon odorat devint plus développé grâce à mon nez désormais violet. Mes mains et mes pieds étaient beaucoup plus poilus que ceux des humains ; des griffes en sortirent aux extrémités. En me retournant, j’ai pu remarquer qu’une queue de léopard tachetée arc-en-ciel me suivait. Drôle de mélange… Pourtant, c’est une griffe de loup que mon père adoptif m’avait offert, pas une griffe de félin. Je haussai les épaules face à cet étrange phénomène ; si j’allais devenir une louve avec du léopard comme mélange, je n’y voyais aucun inconvénient. Je suis sûre que mon père va m’expliquer ce qui s’est passé dans quelques jours. Le soir étant arrivé, j’admirai le ciel avec le soleil couchant pointer l’horizon tout en sentant la brise se 11 Souvenirs du passé lover doucement entre les poils de mes nouveaux attributs de ma transformation ainsi que dans mes cheveux. Je me dirigeai vers la tanière chaude et douillette en toute hâte, et m’endormis immédiatement sur le sol poussiéreux. Le lendemain matin, alors que j’étais encore endormie, je sursautai en voyant ma nouvelle queue entourée contre moi. Je me calmai tout de suite après lorsque je compris que cette transformation n’était point un rêve. Je me sentis stressée à l’idée d’affronter une nouvelle journée à l’école, sous les regards des autres, bien que je n’aie pas à l’être. C’était moi qui faisais peur aux autres et non le contraire. Ayant vécu dans la forêt pendant trois ans déjà, il était normal que les humains ne m’effrayaient plus puisqu’il y a beaucoup plus de dangers dans le monde sauvage. Je me préparai donc comme à chaque matin avec les moyens que je pus trouver ; ce n’était pas beaucoup, mais cela me suffisait amplement. À la cour d’école, je me rendis dans mon coin favori pour y lire un livre comme à chaque matin. En levant les yeux, plusieurs élèves étaient autour de moi déjà, regardant mes oreilles et tout ce qui avait changé sur mon corps. J’entendis les autres murmurer. Leurs dires pouvaient bien être faibles et pourtant, je les entendais comme s’ils criaient. Je levai donc la tête, insultée, et commençai à leur pousser des injures à mon tour. Les élèves étaient surpris que j’aie tout entendu, eux qui devaient sans doute penser que j’étais sourde. Au contraire, avec ses super oreilles, j’entendais des sons presqu’à des kilomètres de distance. Toutefois, en entendant la cloche annoncer le début des cours, je les trouvai un peu moins utiles ; leur son désaccordant résonnait comme d’énormes cloches dont quelqu’un aurait frappées dessus juste au-dessus de ma tête. Je crois que je 12 Souvenirs du passé vais éviter les bruits trop forts désormais ; c’était la seule chose qui m’effrayait encore. En revenant de l’école, le soir, je rejoignis mon père canin avec quelques questions en tête et un œil blessé. Quelqu’un avait réussi à me frapper alors que j’essayais de me défendre de quelqu’un d’autre. En voyant cela, il se dirigea vers le ruisseau tout en me disant de le suivre, ce que je fis sans dire un mot. Malgré ses pattes de loup, il était tout de même habile pour apporter une herbe guérisseuse avec de l’eau dessus et la presser contre mon œil endolori. Mes oreilles se baissaient avec l’émotion de douleur que j’éprouvais. Le canin fut d’abord surpris que je sois capable de contrôler mes nouveaux attributs directement le lendemain de cette étrange transformation. De mon côté, je trouvais ce geste si naturel que je n’y prêtai pas plus attention qu’il ne le fallait. Il eut d’abord un sourire, puis il dit, toujours dans cette voix mentale, que ce que j’avais gagné n’était que le début et que ma transformation était loin d’être finie. Toutefois, je pouvais décider quand j’étais prête à vouloir me transformer. Pour le reste de la soirée, nous avions mangé et étions allés nous coucher immédiatement après. Quelques mois s’écoulèrent depuis ma transformation. Je m’étais habituée aux circonstances et des conséquences que cela pouvait m’apporter. Le principal élément que je n’aimais pas était toujours cette foutue cloche trop bruyante. Autrement, c’est comme si je me sentais plus forte, avec des super pouvoirs ou quelque chose de ce genre : super odorat, super ouïe, le sens du goût un peu plus développé et plus encore. En plus, depuis quelques temps, je sais contrôler ma queue de léopard en fonction des émotions que je ressens. Ce matin, j’allais 13 Souvenirs du passé toujours à l’école. Je ne sais pourquoi, j’avais l’étrange intuition que quelque chose de différent allait se passer. Je rougis un peu juste à l’idée d’y penser. Voyez-vous, depuis un an j’ai l’œil sur quelqu’un qui va à mon école. Son nom est Katrina. Cheveux blond platine, yeux violets, caractère têtu mais toutefois doux dépendant des amis avec qui elle se tenait. J’avais remarqué qu’elle ne se moquait pas de moi contrairement à tous ces petits égoïstes qui ne pensent qu’à eux et qui se moquent des autres. C’était, selon moi, la fille la plus belle de l’école. Comme vous avez sans doute constaté, je suis celle qui joue pour son équipe ; les hommes ne m’intéressent juste pas. La tête remplie de pensées, je me dirigeai vers l’école. En chemin, je pensais à ce que je pourrais lui dire. Même si les autres me balançaient des insultes, je m’en foutais. Je me nomme Kelly-Rose Pinter et aujourd’hui, j’ai un but, celui d’aller parler à cette jolie et mystérieuse femme. La journée se passa comme habituellement : lecture, insultes, défense, cours. J’irai lui parler après les cours, quand les autres seront partis. Je voudrais l’inviter à venir passer la soirée chez moi, mais… dans la forêt ? Avec un loup comme père ? Je ne pense pas qu’elle aimerait. Elle est une fille de ville, après tout. Sorties shopping avec des amies, télévision, ordinateur, téléphone cellulaire et tous ces gadgets d’aujourd’hui dont je ne connais les noms. Bien, qui ne risque rien n’a rien, alors je tentai tout de même ma chance. Mon cœur battait à tout rompre, comme s’il voulait se libérer de ces cristaux de glace qui l’avait transpercé depuis si longtemps. Heureusement pour moi, elle accepta l’offre. Depuis ce temps, nous avons commencés à nous tenir un peu plus souvent, d’abord très peu pour devenir ensuite de très grandes complices. Bien évidemment, quelques gens étaient mécontents puisque selon eux je suis un monstre, et comme habituellement, je ne me préoccupais point de ce que les 14 Souvenirs du passé autres pouvaient penser. Ils sont juste jaloux, c’est tout. Apparemment, le fait que j’habite dans la forêt ne dérangeait pas du tout Katrina, puisqu’il lui arrivait de venir me rendre visite alors que je m’en attendais le moins, souvent avec un petit repas tout préparé et encore chaud. Je n’ai toujours pas vu ses parents jusqu’à maintenant, et c’est pour le mieux puisque j’ai peur de leur réaction quand celleci lui dira qu’on sort ensemble. Oui j’avoue, je pense toujours à ce moment fabuleux où nos lèvres se chercheront pour ne faire qu’un baiser digne de ce nom. C’était maintenant la fin de semaine au mois de décembre, tout près de Noël. Il faisait énormément froid dehors, mais la tanière était toujours aussi chaude et accueillante, quoiqu’un peu humide. C’est normal puisque c’est l’hiver, après tout. Je venais à peine de me réveiller lorsque j’entendis quelqu’un cogner contre la paroi rocheuse et enneigée de ma petite demeure. Je pointai le nez dehors et y découvrit Katrina, toute grelottante de froid avec son petit manteau d’automne rose et ses bottes de suède beige imbibées d’eau causé par la neige. Après une petite conversation je me préparai en vitesse car elle voulait me montrer quelque chose. Je n’avais que ma veste verte que j’avais modifiée à ma façon ainsi que les vieux vêtements que j’avais pu ramasser par des gens qui les avait perdu lors de séjours de camping et que le vent avait porté loin de leur camping-car. La jeune femme me pris ensuite par le bras, d’un pas décidé et rapide. Elle m’apporta vers la ville parmi cette petite foule grouillante dans les rues, les bras remplis de sacs et boîtes de toute sorte. Étrangement, bien que j’aie pris l’habitude de grogner contre les gens, je ne le fis pas ; je savais que je ne craignais rien avec elle. Elle me tenait toujours la patte et me lâcha lorsque nous arrivâmes vers une maison relativement grosse, presque comme un château. C’est là où elle habite ? Elle me fit signe d’entrer. Je la suivis tout en surveillant 15 Souvenirs du passé mes arrières. Je ne sais pas ce qu’elle manigance, si c’était une embuscade où tout le monde pourrait me battre ou quelque chose dans cette branche. En explorant la pièce des yeux, un feu de foyer était allumé, laissant sa chaleur ensevelir tout le salon garni de divans et fauteuils, ainsi qu’un énorme écran de télévision accroché au mur. J’étais tendue. Je n’avais quitté la forêt que pour aller à l’école. Katrina mit doucement ses mains sur mes épaules tout en étant derrière moi. Je sursautai. Je l’entendis rire puis se mettre face à moi, un sourire accroché aux lèvres. Dieu que j’aimais ce sourire ; il était si charmant… Je souriais donc à mon tour. Nerveusement. Je m’approchai doucement du feu, fascinée par les flammes. Son crépitement était doux pour mes oreilles. Comme des branches séchées qui cassent. Je me concentrai rapidement sur les bûches qui se laissaient tranquillement brûler dans le foyer ainsi que les crépitements secs. J’approchai donc mes pattes qui me servaient de main près du feu, les laissant s’embrasser chaudement par la chaleur ardente de la cheminée. Katrina s’approcha par la suite, regardant le feu à son tour. Je l’admirai du coin de l’œil. Elle vint se coller contre moi doucement. Apparemment, mon odeur de louve des bois ne la dérangeait guère. Je me souvins qu’elle me fixait dans les yeux de son regard violet d’une grande intensité, mon cœur se débattant comme un animal pris au piège. Puis, elle se mit à me caresser les cheveux, et aller plus loin encore. Aux anges, je ne pus rien faire d’autre sauf la laisser faire. Ainsi commençait une longue et belle relation, me disais-je. Et j’avais raison. J’avais amplement connu ses parents qui m’avaient adopté depuis le jour où je les avais rencontrés pour la première fois. Je passais les hivers 16 Souvenirs du passé chez eux afin de ne pas mourir de froid. Je prenais quand même soin de m’occuper de mon père-loup qui devenait plutôt vieux. J’allais le voir à tous les jours. Il était si content que je sorte de la forêt pour que je fasse ma vie dans la ville, loin de tout danger. Selon lui, la forêt était beaucoup plus dangereuse et sauvage que la ville en tant que tel. Il n’avait pas tort, mais n’avait pas raison non plus. On ne peut pas être en sécurité partout. Un jour, alors que je voulais lui rendre visite avec Katrina, je remarquai du sang sur la neige blanche. Il semblait frais. Inquiète, je me dirigeai vers la tanière. Tout avait changé, étrangement. Des empreintes de loup, des traces de sang ainsi que d’autres traces dont j’ignore la provenance menaient jusque ladite tanière. Mon cœur se mit à battre à tout rompre. Qu’est-ce qui s’est passé ? Katrina émanait des ondes dont j’ai pu identifier l’inquiétude. Des empreintes de bottes d’hommes. Ils devaient être deux, à voir les deux pistes une à côté de l’autre se rejoindre à l’entrée du terrier. L’entrée n’était pas aussi belle et accueillante comme à l’habitude. Une atmosphère lourde régnait. Le cœur battant, j’entrai dans la tanière tout en hésitant. Qu’est-il arrivé à mon père ? J’émis un cri de surprise lorsque ma patte toucha du sang frais. Dans l’ombre, je pus voir le vieux loup. Une respiration faible se faisait tout de même entendre dans le grand silence de la grotte. Puis, plus rien. Une larme roula sur ma joue. Je suis donc arrivée trop tard… Mon père est décédé alors que je n’avais pu rien faire. Je ressortis du terrier dans un silence inhabituel, piaillant de tristesse. Katrina compris ce qui se passait. Elle me serra chaudement dans ses bras malgré ses grelottements. Elle m’aida à me relever et me tint la main jusqu’à sa demeure, tout aussi silencieuse. Des larmes continuaient à couler. Je les essuyai au fur et à mesure qu’elles essayaient de s’échapper. C’était la première fois que je pleurais depuis tant d’années. J’ai 17 Souvenirs du passé maintenant quinze ans. La dernière fois était à neuf ans. Une fois rentrées, mon amoureuse m’installa tout près du foyer, mon endroit favori de toute la maisonnée et m’offrit un chocolat chaud que je refusai en hochant négativement la tête. Je n’avais pas du tout envie de boire ou manger. Tout ce que j’arrivais à penser était à mon cher père qui m’avait si bien accueilli depuis toutes ces années. En me regardant me morfondre dans mes pensées et mon silence, Katrina vint tout de même se coller pour me donner du réconfort, tout en buvant le chocolat chaud que j’avais refusé. Elle me mit une main douce et me frotta doucement le dos afin que je me calme. Mes oreilles étaient baissées, ma queue de léopard ne remuait même pas un poil. Puis, elle me fit une tape amicale dans le dos, où je sursautai. Cette femme avait toujours le sourire aux lèvres et n’acceptait pas du tout le fait que je sois si triste. Elle ne comprenait pas ce qu’était de perdre un parent puisqu’elle avait encore les siens. Finalement, elle organisa une panoplie d’activités afin de me tenir la tête occupée par autre chose. À la fin de la journée, j’étais si épuisée que je n’avais pas la force de rester éveillée, je m’endormis donc dans ses bras, la tête remplie de songes à propos de mon père, les souvenirs que nous avions eu de son vivant. Une année s’écoula depuis la mort de mon père adoptif. Je pensais toujours à lui, mais d’une façon beaucoup plus positive. Toutes les choses que nous avions vécues ne sont maintenant que de souvenirs. J’ai su prendre tout le positif de ces idées et enlever le négatif. Tout ce qui m’avait appris de son vivant. Il était comme un sage pour moi ; il me montrait comment était fait le monde animal. Même que, pour me souvenir de lui, j’ai fait changer mon nom pour Kelly BlackWolf. C’était tout aussi le nom de famille que je lui avais donné pour qu’il puisse affirmer qu’il était mon père. Katrina me montrait comment vivre 18 Souvenirs du passé harmonieusement parmi les humains, ce monde que, étant jeune, je croyais qu’il ne m’appartenait pas. C’était l’été. La pluie tombait en grosses gouttes collantes sur le pare-brise de la voiture de Katrina où, à l’intérieur, nous étions bien au chaud. Nous chantions des chansons joyeuses malgré la mauvaise température. La voiture dérapait avec la moindre flaque d’eau mais Katrina conduisait prudemment. Nous nous dirigions vers la nouvelle maison que celle-ci avait achetée. Cette fille était riche, autant côté valeur que monétaire. On était le huit de juillet. La musique avait soudainement changé pour une musique plus triste ; celle de My Immortal chantée par le groupe Evanescence. J’aimais beaucoup cette chanson, mais jamais je n’aurais pensé qu’elle allait y avoir une signification de sitôt. En voulant changer de poste, Katrina avait le regard rivé sur la console au lieu de regarder la route. Droit devant, les lumières annonçant un passage pour le train clignotaient tout en émettant un son d’avertissement. Prise de panique, j’avais voulu dire à Katrina de freiner. Mais puisque je comptais beaucoup plus sur ma propre vie, je sautai hors de la voiture et fit quelques roulés sur l’asphalte juste à côté. Ma chérie, pour sa part, lorsqu’elle aperçu le danger, pris de panique et confondu l’accélérateur pour la pédale de frein et fonça tout droit sur le train. Presque personne n’était sur la route, mise à part les quelques témoins oculaires. Tous alertés, ils composèrent le numéro des services sociaux à la hâte, la voix tremblante. Pour ma part, l’adrénaline ayant pris le dessus, m’approchai de la voiture maintenant dépiécée par ce colosse criard. Le collier que je portais au cou émettait des ondes étranges. La dernière partie de ma transformation afin de ressembler complètement à un animal sur deux pattes venait de s’enclencher. Malgré ma propre douleur, j’essayai de sortir Katrina du piège. Mes efforts furent bref lorsque je remarquai que Katrina ne forçait pas de son côté pour se 19 Souvenirs du passé décoincer. Je voulus crier afin de montrer ma peine à tous ces gens rassemblés autour du lieu de l’accident, mais mon cri se transforma en un piaillement long et à la fin silencieuse. Pas encore, pensai-je. D’abord mon père, tué par des chasseurs et ensuite Katrina, par un accident de train. Toutefois, je ne perdis pas espoir ; j’étais sûre qu’elle ne faisait cela que pour me jouer un vilain tour, bien que c’était un moment drôlement mal choisi pour faire une chose de la sorte. J’essayai de déprendre son bras pour sentir un pouls. Son bras était blême et mou quand je le lâchai. Son visage était tordu en une expression de terreur. Malgré la voiture déchiquetée, cette même musique morbide jouait toujours à la radio, comme si elle était mise à répétition. La voix de la chanteuse était enrouée par le choc. Mon cœur se déchirait en morceaux plus fins au fur et à mesure que le temps passait. Les secouristes arrivèrent sur le lieu de l’accident, se mirent à deux pour déloger ma chérie de ce trou infernal et tentèrent de la ranimer ; sans résultat. Les hommes se dirigèrent ensuite vers moi afin de s’assurer que je n’avais rien, ce qui était le cas, mise à part les quelques blessures mineures comme conséquence pour avoir sauté de la voiture. J’ai été chanceuse qu’il n’y avait aucune voiture à côté de moi en ce moment là, ou j’aurais pu connaître presque le même sort qu’elle, mais en fonçant dans une voiture au lieu d’un train. Pour jouer avec les émotions, le soleil apparût dans le ciel et dispersa ses rayons d’or un peu partout. Après s’être assuré que j’allais bien, les secouristes me lâchèrent et j’ai pu enfin m’enfuir loin de cette place, sous les regards ébahis de ces inconnus, les larmes roulant sur mes joues. Mon cœur battait comme un tambour et n’était pas près d’arrêter sa musique. Je voulais m’enfuir loin de ces étrangers, cet accident, ces problèmes. Je courais sans vraiment savoir où aller. Je me dirigeai vers la forêt la plus près où j’y passai de nombreuses heures ou même 20 Souvenirs du passé des jours sans y ressortir. Je n’avais plus aucune notion du temps. Tout était devenu si lent et morne… sans vie. Nous étions maintenant le douze de juillet ; les funérailles de Katrina avaient lieu. Ainsi était le retour au commencement. Elle n’avait jamais su ce qui s’était réellement passé de ma vie ; elle ne savait même pas que j’avais eu de vrais parents mis à part ce cher loup dont Katrina venait de rejoindre. Tout ce qu’elle savait était le fait que je me faisais insulter à l’école, que j’habitais dans une tanière avec un loup, et c’était tout. Je n’avais jamais voulu lui conter mon passé de peur qu’elle me prenne par pitié et qu’elle ne sorte avec moi car elle croirait que je suis seule au monde. Pourquoi… Pourquoi ce sont toujours les meilleurs qui partent en premier ? La vie était injuste pour ce sombre côté. Dans ma tête, j’entendais cette chanson qui avait joué à la radio de la voiture de Katrina, celle qui avait maintenant une signification : My immortal, Evanescence. 21 par