Thèse du Dr Sylvie MEUNIER Épouse FADEL
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Thèse du Dr Sylvie MEUNIER Épouse FADEL
UNIVERSITE PARIS VAL-DE-MARNE FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL ************************ ANNEE 2009 N° THESE POUR LE DIPLOME D’ETAT DE DOCTEUR EN MEDECINE Discipline : Médecine Générale ------------------- Présentée et soutenue publiquement le : à CRETEIL (PARIS 12) ------------------- Par Mme MEUNIER épouse FADEL Sylvie Née le 06 janvier 1961 à Availles Limouzine (86) Les symptômes médicalement inexpliqués en médecine générale Etude réalisée auprès de 12 médecins généralistes enseignants PRESIDENT DE THESE : DIRECTEUR DE THESE : Monsieur le Professeur Claude Attali LE CONSERVATEUR DE LA BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE: REMERCIEMENTS 2 TABLE DES MATIERES A – INTRODUCTION ……………………………………….. ……….. 7 I – TERMINOLOGIE ………………………………………..……….. 8 ………………………………………..……….. 8 1 .1 - Classification CMI 10 ………………………………..……….. 8 1.2 - Classification DSM IV ………………………………..……….. 8 ……………………………………………….……….. 9 1 - Les troubles somatoformes 2 - La somatisation ………………………………..……….. 10 ………..……….. 10 ………………………………………..……….. 12 ………...……….. 12 ………………………………...……….. 14 ………………………………………...……….. 15 3.1 - Les caractéristiques du patient ………………………………….. 15 3.2 - Les facteurs favorisants ………………………………….. 15 3.2.1 – les facteurs prédisposants ………………………………….. 15 3.2.2 – les facteurs précipitants ………………………………….. 16 3.2.3 – les facteurs de chronicisation ………………………………….. 16 ………………………………………….. 17 3 - Le syndrome somatique fonctionnel 4 - Le symptôme fonctionnel ou médicalement inexpliqué II – EPIDEMIOLOGIE 1 - La prévalence des symptômes médicalement inexpliqués 2 - Les symptômes les plus fréquents 3 - Recherche étiologique B – MATERIEL ET METHODE I – METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE BIBLIOGRAPHIQUE ….……….. 17 II - CARACTERISTIQUES DE L’ETUDE ET JUSTIFICATION …………... 17 1 - Echantillon des patients ………………………………………………….. 18 2 - Echantillon des médecins ………………………………………………….. 18 ………………………………………………………….. 18 ………………………………………………….. 18 ………………………………………………….. 18 3 - Mode de recueil 3.1 - Méthode de recueil 3.1.1 – le questionnaire 3.1.2 – la fiche de renseignements sur le médecin ………………….. 19 3 3.1.3 – la fiche récapitulative des consultations 3.2 - Planification et durée de l’étude III – METHODE D’ANALYSE ………..……….. 19 ……………………….……….. 19 ………………………………..……….. 19 ……………………………………………….……….. 20 1 – Données quantitatives ……………………………………………….……….. 20 1.1 - Caractéristiques des médecins ………………………..……….. 20 1.2 - Caractéristiques des consultations ………………………..……….. 20 1.3 - Caractéristiques des patients ………………………..……….. 21 ………………………..……….. 21 C - RESULTATS 1.3.1 - Caractéristiques générales 1.3.1.1 Age ………………………………………..……….. 21 1.3.1.2 Sexe ………………………………………..……….. 22 1.3.1.3 Situation familiale ………………………...……….. 22 1.3.1.4 Mode de vie ………………………...……….. 23 1.3.1.5 Catégories socioprofessionnelles ………………….. 23 1.3.1.6 Situation professionnelle ………………….. 25 ………………………………….. 25 ………………………………….. 25 1.3.2 - Caractéristiques médicales Antécédents familiaux 1.3.2.2 Antécédents personnels médicaux ………………….. 26 1.3.2.3 Antécédents chirurgicaux ………………….. 27 1.3.2.4 Habitus ………………………………………….. 28 ………………………………….. 28 1.4.1 - Type du symptôme ………………………………………….. 28 1.4.2 - Mode de survenue ………………………………………….. 31 1.4.3 - Mode d’évolution ………………………………………….. 31 1.4.4 – Horaires de survenue ………………………………………….. 31 1.4.5 - Facteurs favorisants ………………………………………….. 32 1.4.6 – Retentissement ………………………………………….. 32 ………………………………….. 32 1.4 1.3.2.1 Caractéristiques du symptôme 1.4.7 – Comportement du patient 1.4.8 – Explorations médicales antérieures du symptôme 2 – Données qualitatives ….……….. 33 ………………………………………………….. 33 ………………….. 33 2.1 - Expression verbale du symptôme par le patient 4 2.2 – Etude des symptômes les plus fréquents ………………….. 33 2.2.1 – La douleur des membres ………………………………….. 33 2.2.2 – Les céphalées ………………………………….. 34 2.2.3 – La fatigue ………………………………….. 35 2.2.4 – Les douleurs abdominales ………………………………….. 35 ………………………………….. 36 ….……….. 36 ………………………………………………….. 36 2.3 - Du point de vue du médecin 2.3.1 - Ce qui lui fait évoquer un symptôme inexpliqué 2.3.2 – Prise en charge 3 – Etude simultanée réalisée auprès de 10 SASPAS de Paris XII D – DISCUSSION ….……….. ……………………………………………….……….. 36 39 I – LES PRINCIPAUX RESULTATS DE NOTRE ETUDE ………………….. 39 II – FORCES ET FAIBLESSES DE NOTRE ETUDE ………………….. 39 1 – Forces de notre étude ………………………………………..……….. 39 1.1 – Le thème abordé ………………………………………..……….. 39 1.2 – le type de l’étude ………………………………………..……….. 40 1.3 – Le choix de l’échantillon des médecins 1.4 – Deux études sur le même sujet 2 – Faiblesses de notre étude ………………...……….. 40 ………………………………….. 40 ………………………………………..……….. 41 ………………………………….. 41 2.1.1 – La taille du questionnaire ………………………………….. 41 2.1.2 – Les échantillons ………………………..……….. 41 2.2 – Déroulement de l’étude ………………………………….. 41 2.2.1 – La période de l’étude ………………………………….. 41 2.2.2 – le jour de recueil ………………………………….. 42 2.1 - Liées à la méthode de recueil III – COMPARAISON AVEC LA LITTERATURE ………………...……….. 42 1 – La prévalence ……………………………………………….……….. 42 2 – Les symptômes ……………………………………………….……….. 42 2.1 – Le type de symptôme ………………………………………..……….. 42 2.2 – le nombre de symptômes 43 ………………………………………….. 5 2.3 – Le mode évolutif des symptômes ………………………………….. 43 3 – Les patients ……………………………………………….……….. 43 4 – Les contextes de vie ……………………………………………….……….. 44 4.1 – Les facteurs favorisants ………………………………………….. 44 4.2 – Le retentissement ………………………………………….. 44 5 – La prise en charge ……………………………………………….……….. 45 E – CONCLUSION ……………………………………………….……….. 47 F – AXES DE TRAVAIL ……………………………………………….……….. 49 G – BIBLIOGRAPHIE ……………………………………………….……….. 50 H – ANNEXES ……………………………………………….……….. 54 Annexe 1 : But et méthode de recueil Annexe 2 : questionnaire ………………………………………….. ……………………………………………….……….. 54 55 Annexe 3 : fiche récapitulative des consultations ………………...……….. 63 Annexe 4 : fiche de renseignements sur le médecin ………………...……….. 65 6 A. INTRODUCTION De nombreux patients consultent pour des symptômes physiques atypiques, répétitifs, rebelles aux traitements médicaux, pouvant évoquer une affection médicale générale. Ces symptômes ne s’expliquent ni par une atteinte organique, ni par un trouble mental. Ce sont des symptômes médicalement inexpliqués ou symptômes fonctionnels. Ces patients posent souvent un problème de prise en charge en terme de : - Diagnostic d’abord. Les symptômes sont souvent assimilés aux troubles somatoformes, à la conversion hystérique, à l’hypochondrie, à la dépression et même à la simulation, alors que les symptômes inexpliqués ne s’intègrent pas toujours dans le cadre d’une pathologie psychiatrique. - Thérapeutique ensuite. Ces symptômes mettent souvent les médecins en échec. Ils prescrivent des examens complémentaires, inutiles et inefficaces générant une insatisfaction du praticien mais aussi du patient. La relation médecin-patient peut se dégrader, ces patients vont être vécus comme difficiles voire exaspérants par le médecin. - De coût élevé lié à la consommation médicale du patient, à l’absentéisme professionnel et à la prise en charge par les assurances … (3) Les plaintes inexpliquées sont fréquentes en médecine générale, elles représentent 20 à 30 % de l’activité des médecins généralistes, d’après la littérature internationale (1) (28). En effet, les médecins généralistes sont souvent les premiers à être confrontés à ces patients et ils ressentent parfois des difficultés dans la gestion de la consultation et de la prise en charge. Or la reconnaissance et la description des symptômes liés à ces plaintes ne font pas partie de la formation initiale des étudiants en médecine générale, ni de la formation médicale continue. Ces symptômes ont été étudiés sous différents points de vue : celui des patients (2) (13) (33), celui des médecins (13) (28) (30) (32) (41), et celui de leur prise en charge (15) (23) (26) (33). Il y a peu d’études sur la nature et la description précise de ces symptômes. Il nous a semblé intéressant d’aborder les plaintes médicalement inexpliquées d’un point de vue essentiellement épidémiologique en réalisant une étude auprès de médecins généralistes enseignants. 7 Au moment où nous cherchions des médecins généralistes enseignants volontaires pour participer à cette étude, nous avons été confronté à une même question : « Qu’est ce exactement une plainte ou un symptôme médicalement inexpliqué ? ». Il nous a donc paru important de faire le point sur les différentes termes et définitions utilisés pour parler de symptômes médicalement inexpliqués ainsi que sur les données épidémiologiques actuelles avant de présenter la méthode et les résultats de notre étude. 1. TERMINOLOGIE Les symptômes médicalement inexpliqués ont été définis, au fils de classifications successives, en tant que troubles somatoformes, somatisation, syndromes somatiques fonctionnels et enfin symptômes médicalement inexpliqués ou symptômes fonctionnels. 1 - Les troubles somatoformes Il s’agit d’un groupe de troubles psychiatriques ayant en commun la présence de symptômes somatiques, sans explication organique ni d’utilisation de substance externe, et un recours aux soins médicaux. 1.1 - Classification CMI 10 Dans la classification CMI 10 (Classification Internationale des Maladies, 10ème édition publiée par l’OMS en 1993) les troubles somatoformes ont pour caractéristique essentielle l’apparition de symptômes physiques associés à une quête médicale insistante, persistant en dépit des bilans négatifs et de déclarations faites par le médecin selon lesquelles les symptômes n’ont aucune base organique. D’autre part s’il existe un trouble physique authentique, ce dernier ne permet pas de rendre compte ni de la nature ou de la gravité des symptômes, ni de la détresse ou des préoccupations du patient. 8 1.2 - Classification DSM IV La classification américaine des DSM IV (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, 4ème édition, parue en 1994) distingue : - Le trouble somatisation . C’est un trouble poly-symptomatique, survenant avant l’âge de 30 ans, persistant plusieurs années et caractérisé par l’association de quatre symptômes douloureux, de 2 symptômes gastro-intestinaux, de 1 symptôme sexuels et 1 symptôme pseudo-neurologiques. - Le trouble somatoforme indifférencié. Il se caractérise par des plaintes somatiques inexpliquées, persistant au moins 6 mois, mais dont le nombre et la durée n’atteignent pas le seuil requis pour établir le diagnostic de trouble somatisation. - Le trouble de conversion. Il comporte des symptômes ou des déficits touchant la motricité volontaire ou les fonctions sensorielles, suggérant une affection neurologique. Des facteurs psychologiques sont associés aux symptômes de déficit. - Le trouble douloureux. La douleur est au centre de la symptomatologie clinique. Les facteurs jouent un rôle important dans le déclenchement, l’intensité, l’aggravation ou la persistance de la douleur. - L’hypochondrie. Elle consiste en une préoccupation centrée sur la crainte ou l’idée d’être atteint d’une maladie grave, fondée sur l’interprétation erronée par le sujet de symptômes physiques ou de manifestations du fonctionnement corporel. Cette classification vise théoriquement à éliminer toute l’interprétation dans l’établissement du diagnostic. Pour y parvenir des critères diagnostiques précis ont étés définis : les caractéristiques descriptives du symptôme, sa fréquence et sa durée, l’âge auquel il est apparu, ainsi que des critères d’exclusion basées sur la présence d’autres diagnostics. Ces critères sont très restrictifs et ne permettent de diagnostiquer que les cas les plus sévères. En médecine générale un grand nombre de patients présente des symptômes engendrant une souffrance et une altération du fonctionnement sans pour autant correspondre aux profils symptomatiques spécifiques ni atteindre les seuils de durée ou de sévérité requis par le DSM IV. A l’opposé, devant l’absence de classification propre aux symptômes inexpliqués de nombreux patients se sont retrouvés avec un diagnostic inapproprié .En 2005, Robert Smith a montré que l’étude de 206 patients souffrant de symptômes médicalement inexpliqués révélait que 85 % de ces patients avaient été diagnostiqué souffrant de troubles somatoformes du fait 9 de l’utilisation d’une nomenclature inadaptée, celle du DSM IV (38). Cette classification est difficilement applicable en médecine générale. De plus le fait que cette classification renvoie à un désordre mental est très mal vécu par les patients, les faisant même douter de la réalité de leurs symptômes. A ce jour le DSM IV est en cours de modification. Certains auteurs (18), (24), (35) et (40) proposent une classification des symptômes plus flexible, compatible avec celle utilisée en médecine générale, faisant participer des psychiatres et d’autres spécialistes (neurologues, endocrinologues …) 2 - La somatisation Le terme somatisation est ambigu. Plusieurs définitions permettent de préciser ce concept : - psychiatrique : c’est l’expression atypique, quoique fréquente, d’une maladie psychiatrique (essentiellement la dépression) - psychosociologique : la somatisation devient la tendance à ressentir et à exprimer des symptômes somatiques dont ne rend pas compte une maladie organique, à les attribuer à une maladie physique et à rechercher une aide médicale. - Enfin certains auteurs ont choisi de définir la somatisation comme une plainte durable de symptômes fonctionnels invalidants en mentionnant que leur étiologie est multifactorielle et que les troubles psychiatriques sont fréquents mais pas toujours présents. Dans ce cas la psychiatrie est plus considérée comme une comorbidité plutôt que comme la cause. 3 - Le syndrome somatique fonctionnel Au contraire des troubles somatoformes développés par des psychiatres, les syndromes somatiques fonctionnels sont des étiquettes médicales descriptives. Ce sont des ensembles de symptômes médicalement inexpliqués et sans explication physiopathologique communément admise dont chaque spécialité à au moins un type (7) : la fibromyalgie pour le rhumatologue, le syndrome de fatigue chronique pour l’interniste et l’infectiologue, le syndrome de l’intestin irritable pour le gastro-entérologue. (cf. tableau 1) 10 Tableau 1 : Syndrome fonctionnel par spécialité Gastroentérologie Cardiologie Rhumatologie Pneumologie Infectiologie Gynécologie Neurologie Orthodontie ORL Syndrome du colon irritable, dyspepsie Douleur thoracique atypique Fibromyalgie Syndrome d’hyperventilation Syndrome de fatigue chronique Syndrome prémenstruel, douleur pelvienne chronique Céphalée de tension Douleur de l’articulation temporomandibulaire Allergies multiples médicamenteuses En réalité ces différents syndromes sont souvent associés entre eux, un patient diagnostiqué pour un syndrome présente souvent les critères pour un autre syndrome (36). Il a été noté aussi que les symptômes appartenant aux différents syndromes ont souvent des facteurs communs et les patients souffrant de ces syndromes ont aussi des caractéristiques communes : le sexe, la dépression ou l’anxiété, des antécédents de maltraitance, la physiopathologie, la réponse relative aux antidépresseurs. Ils sont aussi associés à la détresse psychologique, l’anxiété, voire la dépression des patients. Cette classification ne tient pas compte du contexte psychologique du patient ni du contexte socioculturel (5). Elle privilégie la cause organique alors que les facteurs psychologiques ont un rôle important dans l’expression de la plainte, dans son intensité ou dans sa persistance. Cette classification des symptômes médicalement inexpliqués en syndromes a donc peu d’intérêt en médecine générale car ce découpage parait d’avantage répondre à celui des disciplines médicales plutôt qu’à une cohérence cliniques des syndromes eux-mêmes. 4 - Le symptôme fonctionnel ou médicalement inexpliqués D’après P. Cathébras (9), un symptôme est dit fonctionnel lorsque l’on n’a pas d’explication en terme de lésion tissulaire ni en terme de physiopathologie. Les symptômes fonctionnels s’opposent aux symptômes organiques. Un symptôme fonctionnel est avant tout une plainte subjective adressée à un professionnel de santé. C’est un symptôme « somatique » car il est vécu comme une dysfonction corporelle par le patient, même s’il touche la sphère mentale ou cognitive (troubles de mémoire), par opposition à un symptôme vécu comme psychologique. 11 C’est pourquoi le terme « fonctionnel » est plus neutre et moins offensant pour le patient car il renvoie moins à une étiologie psychologique que le terme « inexpliqué ». Il n’est pas nécessairement anormal. Il devient un problème médical lorsqu’il est source de souffrance voire d’une altération du fonctionnement social, affectif ou professionnel, et de demande de soins répétés. Trois paramètres ont été proposés pour les définir (37) : - la sévérité, faible, moyenne ou sévère - la durée - l’existence de comorbidités. Pour notre étude nous avons choisi une définition large de la plainte médicalement inexpliquée : « On parle de plainte médicalement inexpliquée, lorsqu’au décours d’une (ou des) consultations et de divers examens complémentaires, le médecin n’arrive pas à classer cette plainte dans le cadre d’une maladie répertoriée (CIM) » II - EPIDEMIOLOGIE L’épidémiologie des symptômes médicalement inexpliquée est malaisée à cause de la complexité de ces symptômes mais aussi à cause des différents critères pris en compte pour les définir. Le problème principal est d’affirmer le caractère inexpliqué du symptôme. Quels critères ont étés retenus pour classer ce symptôme comme étant inexpliqué ? Les patients sont ils des patients vus en consultation de ville, en consultations hospitalière, hospitalisés ? Qui a examiné le patient ? Où a été faite l’étude, dans quel pays ? Quels sont les critères d’inclusion des patients? Ce sont autant de paramètres qui peuvent influencer les résultats des différentes études : prévalence variable, type des symptômes… 1 - La prévalence des symptômes médicalement inexpliqués La prévalence des symptômes inexpliqués est variable, selon la population étudiée et selon les critères définissant les symptômes inexpliqués 12 Dans les années passées de nombreuses études ont été faites pour déterminer cette prévalence : - En 1996, Peveler (28) estimait cette prévalence à 19 % chez des patients de médecine générale, âgés de 17 à 81 ans, ayant un symptôme inexpliqué de plus de 3 mois, sans association avec une maladie organique. - En 2004, Arnold I.A (1), dans une étude de patients âgés de 25 à 79 ans ayant des symptômes inexpliqués depuis plus de 6 mois, retrouve une prévalence de 18 % - En 2006, Verhaack et al (39) affirment que 25 à 50 % des motifs de consultation concernent un symptôme inexpliqué. - Enfin, en 1989, Kroenke et Mangelsdorff (19), dans une étude rétrospective sur 3 ans, en médecine générale, de 1000 patients, ont considérés que 84 % des 14 symptômes les plus courants n’avaient pas d’explication organique. De même, si l’on considère les prévalences des symptômes inexpliqués en fonction des spécialités il y a également une grande variabilité selon les études (cf. tableau 2) Tableau 2 : Prévalences des symptômes inexpliqués selon le sexe et par spécialités. Comparaison entre 2 études. Prévalence exprimées en % Etude 1 : patients de 16 à 65 ans et définition des symptômes inexpliqués selon Lipowski (2) Etude 2 : patients de 16 à 65 ans, étude de Nimnuan (25) Dentaire Pneumologie Rhumathologie Cardiologie Gastroentérologie Neurologie Gynaecology Total étude 1 (n= 550) Homme femme 50% 33% 26 % 53% 31% 52% 42% 63% 50% 63% 55% 66% 66% 42% 57% Etude 2 (n=550) Homme Femme 50% 49,1% 51,9% 65,6% 41 ,4% 66,1% 44,2% 67,3% 55% 58,5% 50% 49,1% 57,3% 48% 60,2% Si toutes les spécialités sont concernées dans les 2 études, les prévalences varient. Dans l’étude 1, les plus hautes prévalences correspondent à la neurologie et la gynécologie alors que dans l’étude 2 elles correspondent à la gastroentérologie et la pneumologie. La prévalence des symptômes médicalement inexpliqués est évaluée à environ 20 % des consultations de médecine générale. 13 2 - les symptômes les plus fréquents Les symptômes les plus fréquemment retrouvés parmi les symptômes inexpliqués en médecine générale sont (9): - la fatigue : 77% - les douleurs abdominales : 66 % - les douleurs dans les membres : 64% - les céphalées et la migraine : 62 % - la lombalgie et douleur dorsale : 70 % - les douleurs thoraciques : 62 % D’autres études, effectuées en consultations hospitalière différent légèrement dans la répartition des symptômes retrouvés (16) mais les douleurs restent au premier plan (cf. tableau 3). Tableau 3. Frequency Distribution of Specific Somatic Symptoms Documented in the Charts of a Random Sample of Patients Visiting an Urban Primary Care Clinic During Four 1-Month Periods (N=289) Somatic symptoms N Back pain Lower limb pain Headache Dyspnea Cough (other than upper respiratory infection Pain other Upper respiratory infection symptoms Abdominal pain Chest pain Swelling Dermatologic Dizziness Sleep complaints Fatigue Nasal symptoms Pain in multiple joints Nausea Abnormal sensory symptoms Gastroenteritis symptoms Other symptoms 42 39 26 26 25 25 24 21 19 19 16 13 10 10 9 6 6 5 5 82 Percent of all somatic symptoms ( N=433) 9,7 9,0 6,0 6,0 5,8 5,8 5,5 4,8 4,4 4,4 3,7 3,0 2,3 2,3 2,1 1,4 1,4 1,2 1,2 18,9 14 3 - Recherche étiologique Depuis quelques années il y a de nombreuses études qui ne se contentent pas de décrire et de comptabiliser les symptômes médicalement inexpliqués mais qui se penchent sur les causes possibles de ces symptômes (15) (16) (20). Elles étudient : - les caractéristiques des patients - les facteurs favorisants 3.1 - Les caractéristiques des patients Ces caractéristiques sont : l’âge, le sexe, la situation familiale, le statut marital, la situation sociale et professionnelle, le pays d’origine. (16) (39) Il est important de tenir compte du contexte de vie des patients car souvent là qu’on retrouve les causes possibles des symptômes inexpliqués. Certains critères sont plus souvent retrouvés chez les patients ayant un symptôme inexpliqué (39) : le divorce, le veuvage, l’absence de travail, le fait d’être une femme, un niveau scolaire peu élevé. 3.2 - Les facteurs favorisants Certains facteurs personnels du patient peuvent également orienter vers le diagnostic de symptôme médicalement inexpliqué. Ils ont étés divisés en trois catégories (23) : - les facteurs prédisposants - les facteurs précipitants - les facteurs de chronicisation 3.2.1 les facteurs prédisposants Il s’agit de facteurs liés à la génétique, la personnalité, les expériences diverses vécus par le patient. Le plus important semble être l’éducation ou l’apprentissage à avoir face à un symptôme ou la maladie. Une attention exagérée des parents à la santé de leur enfant semble être un facteur favorisant, de même si l’enfant côtoie un membre de sa famille souffrant d’une maladie grave et qui en tire des bénéfices secondaires . C’est ainsi que pour cet enfant être malade ou 15 exprimer des symptômes inexpliqués signifie recevoir une plus grande attention, éviter des conflits….etc. Les antécédents de maltraitance ou d’abus sexuels peuvent également prédisposer au développement de symptômes médicalement inexpliqués. Certaines particularités de la personnalité comme la dépendance, le sentiment d’infériorité, et le déni des conflits ou certains styles de réponses cognitives, comme la tendance à la globalisation ou au catastrophisme, semblent également être des facteurs de risque. Enfin, l’alexithymie, définie comme une difficulté à exprimer verbalement ses émotions, favoriserait l’expression de ces émotions par des symptômes fonctionnels. 3.2.2 Les facteurs précipitants Les facteurs précipitants comportent les évènements de vie qui provoquent un stress important. Dans les évènements de vie une place particulière est donnée au deuil et à la notion de perte. Il peut s’agir aussi d’infections, traumatismes physiques, de difficultés professionnelles, familiales ou sociales. 3.2.3 Les facteurs d’entretien ou de chronicisation Ils regroupent des facteurs physiologiques (troubles du sommeil, repos prolongé), psychologiques (craintes diverses), sociaux (difficultés professionnelles ou bénéfices secondaires). La prise en charge actuelle de ces patients est aussi un facteur de chronicisation : les consultations répétées, la prescription d’examens complémentaires à la recherche d’une étiologie organique… De même, les tentatives pour alléger les symptômes peuvent paradoxalement les aggraver : par exemple le repos excessif pour réduire une douleur ou la fatigue peut contribuer à une incapacité à plus long terme. Les bénéfices secondaires retirés par le patient peuvent également avoir un rôle : arrêt de travail, pension d’invalidité, attention de la part de l’entourage … A la vue de la littérature, les symptômes inexpliqués sont une réalité et ont une forte prévalence, 20 % des consultations en médecine générale. Ils ne sont pas toujours d’origine psychogène mais relèvent de causes multiples physiologiques, psychologiques, comportementales et sociales. 16 L’existence des symptômes médicalement inexpliqués, leur forte prévalence en médecine générale, leur persistance malgré les progrès techniques médicaux, nécessitent qu’ils soient étudiés puis que les résultats de ces travaux soient ensuite enseignés aux futurs médecins. Notre objectif est de décrire et de répertorier les situations cliniques inexpliquées les plus souvent rencontrées par les médecins généralistes enseignants afin de mettre en évidence une prédominance d’une plainte, voire une similitude dans la présentation d’un même symptôme. Nous avons voulu également faire une recherche étiologique et épidémiologique : Comment les symptômes sont ils présentés par les patients ? Existe-t-il des facteurs déclenchant ou précipitant? Il y a-t-il un contexte social ou familial ? Retrouve t’on des caractéristiques communes à tous les patients ? B – MATERIEL ET METHODE I - METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE BIBLIOGRAPHIQUE Les recherches bibliographiques ont été effectuées à la bibliothèque de l’Université Paris 12. Les mots-clés utilisés pour cette recherche étaient tous en anglais et étaient les suivants : - Medically unexplained symptoms - Somatoform disorders - Somatization - Psychosomatic - Primary care Les principaux moteurs de recherché utilisés étaient Medline et Pubmed. Nous avons recherché uniquement les articles datant des 5 dernières années (de 2002 à 2007). Après les avoir trié nous avons sélectionné un nombre total de 41 articles. II – CARACTERISTIQUES DE L’ETUDE ET JUSTIFICATION Nous avons réalisé une étude épidémiologique, descriptive, qualitative et quantitative, auprès de 12 médecins généralistes enseignants réalisée à l’aide d’un questionnaire à remplir lors de leurs consultations. 17 1 - Echantillon des patients La taille de l’échantillon a été définie avec l’aide d’un médecin épidémiologiste afin de pouvoir recueillir suffisamment de données exploitables. Il fallait un minimum de 45 à 60 questionnaires. Inclusion : les patients sont tous des patients de médecine générale, vus en consultation au cabinet. Ils ont entre 18 et 70 ans. Exclusion : les patients ne parlant et ne comprenant pas le français sans interprète. Aucune exclusion médicale. 2 - Echantillon des médecins L’étude a été réalisée auprès de 15 médecins généralistes exerçant à Paris, région parisienne et dans le Massif Central, enseignants de différentes facultés de Médecine : - 3 médecins de Paris V - 1 médecin de Paris VII - 10 médecins de Paris XII - 1 médecin de Clermont-Ferrand. Dans la littérature, les plaintes inexpliquées représentent 20 % des consultations des médecins généralistes. Nous voulions avoir entre 45 et 60 questionnaires remplis donc si nous estimions que chaque médecin avait entre 15 et 20 consultations par jour, soit 3 à 4 plaintes inexpliquées par jour, il fallait un échantillon comprenant 15 médecins généralistes enseignants. 3 - Mode de recueil 3.1 Méthode de recueil Le recueil se fait par 3.1.1 un questionnaire (annexe 2) Ce questionnaire préétabli est à remplir pour chaque cas de plainte inexpliquée. Ce questionnaire a été réalisé avec l’aide d’un médecin épidémiologiste afin d’éliminer le plus de biais possibles et d’un informaticien pour que les données recueillies puissent être exploitables en informatique. Il a été préalablement testé par 3 médecins généralistes enseignant à paris V. 18 Il comprend : o des questions à réponses codifiées, sous la forme de cases à cocher, qui seront par la suite traitées par le logiciel Excel, pour la partie quantitative de l’étude, o des questions à réponses libres, pour la partie qualitative de l’étude. 3.1.2 une fiche de renseignements sur le médecin (annexe 3) Elle donne des renseignements sur l’âge, le nombre d’années d’exercice, le lieu d’exercice , le secteur d’activité ( I ou II), le type d’exercice ( seul ou en groupe), le type d’enseignement 3.1.3 des fiches récapitulatives des consultations (annexe 4) Ces fiches sont à remplir chaque jour où a lieu l’étude (1 fiche par jour) afin de calculer la fréquence des plaintes inexpliquées. 3.2 Planification et durée Le médecin doit remplir, 1 jour par semaine, 1 fiche récapitulative des consultations et autant de questionnaires que de plaintes inexpliquées vues au cours de ses consultations au cabinet ce jour là. Il a été décidé, avec l’aide d’un médecin épidémiologiste, de réaliser l’étude le premier jour de consultation de la semaine, pour éviter un biais de sélection pendant 3 semaines. Le nombre de questionnaires était insuffisant et l’étude a été prolongée de 6 semaines, soit un recueil sur 9 semaines au total. Elle a été réalisée du 7 janvier au 17 mars 2008 III – METHODE D’ANALYSE Les données quantitatives ont été informatisées à l’aide d’une base de données sur Microsoft Access puis analysées à l’aide du logiciel Excel. Pour comparer la distribution de différentes variables au sein de notre échantillon nous avons utilisé le test de Chi 2 d’indépendance avec p < 0,05 ; lorsque les effectifs étaient inférieurs à 5 nous avons appliqué le test du Chi 2 avec correction de Yates. Pour comparer les 2 groupes de patients nous avons utilisé comme test statistique le test du Chi 2 d’homogénéité ; ce test permet de comparer la distribution d’une variable qualitative entre deux échantillons. Nous avons pris comme degré de signification p < 0,05. 19 C – RESULTATS 1 - Données quantitatives Sur les 15 médecins volontaires, 12 ont rendus la totalité des documents (questionnaires, fiches récapitulatives des consultations et fiche de renseignements sur le médecin), 1 a rendu le dossier incomplet, 2 n’ont rien restitué. 62 questionnaires ont été remplis. 3 patients ont été exclus car ils avaient moins de 18 ans (1) ou plus de 75 ans (2). Au final il y a 59 questionnaires analysables. 1.1 - Caractéristiques des médecins Sur les 12 médecins participant il y a 6 femmes et 6 hommes. Ils ont entre 47 et 65 ans. Il y a 6 médecins de moins de 50 ans, 2 médecins de la tranche d’âge de 50 à 59 ans et 4 médecins de plus de 60 ans. La moyenne d’âge est de 53,4 ans. Ils ont entre 14 et 36 ans de pratique de la Médecine Générale. 3 exercent à Paris, 6 en petite banlieue, 2 en grande banlieue et 1 en Province. 8 sur 12 exercent en groupe. 1 seul travaille en secteur II. Il s’avère qu’ils sont les médecins généralistes traitants de 56 patients (soit dans plus de 96,5% des cas). Le suivi de ces 56 patients va de 0,5 à 30 ans. La moyenne de durée du suivi est de 10,2 années pour les 59 patients et la médiane est de 8 années. 3 patients sont vus pour la première fois. 1.2 - Caractéristiques des consultations Sur 9 semaines de recueil il a été récolté de 1 à 14 questionnaires par médecin généraliste, soit une moyenne de 4,8 plaintes inexpliquées par médecin, correspondant à 2,5 % du nombre de consultations totales vues pendant la durée de l’étude. Le recueil s’effectuant le premier jour de consultations de la semaine, il a été réalisé le matin seul, l’après-midi seul ou la journée entière. Répartition des plaintes dans la journée : 16 en début des consultations, 22 en milieu des consultations et 21 en fin des consultations. 20 1.3 - Caractéristiques des patients 1.3.1 - Caractéristiques générales des patients 1.3.1.1 Age Ils ont de 18 à 70 ans. L’âge moyen est de 46,2 ans La médiane est de 47 ans. La tranche d’âge la plus représentée est celle de 40-59 ans pour les deux sexes. Figure 1 : âge des patients Age des patients nombres 25 20 15 10 5 20 18 40-59 ans >60 ans 15 6 0 < 20ans 20-39 ans tranche d'âge Figure 2 : répartition des patients selon l’âge % des patients répartition des patients selon l'âge 40 30 20 10 34 30,5 40-59 ans > 60 ans 25,5 10 0 <20 ans 20-39 ans tranche d'âge 21 1.3.1.2 Sexe L’échantillon regroupe 36 femmes (soit 61 %) et 23 hommes (soit 39 %) Figure 3 : nombre de patients par tranche d’âge et par sexe nombre de patients par tranche d'age et par sexe 14 nombre de patients 12 11 12 9 10 8 7 8 6 6 5 femmes hommes 4 2 1 0 < 20ans 20-39ans 40-59ans > 60ans tranche d'age 1.3.1.3 Situation familiale des patients 33,9 % des patients sont célibataires, 47,4 % sont mariés, 8,5 % sont divorcés et 8,5 % sont veufs. Il y a 1,7 % de données manquantes (1 patient). 44,1 % des patients ont eu des enfants, 33,9 % n’ont pas eu d’enfants. Il y a 22% de données manquantes (13 patients) 22 Figure 4 : situation familiale des patients situation familiale des patients DM 1,7% Veufs 8,5% Divorcés 8,5% Célibataires 33,9% Mariés 47,4% 1.3.1.4 Mode de vie des patients 59,3 % des patients vivent en couple, 25,4 % vivent seul, 10,2 % vivent chez leur parents. Il y a 5,1% de données manquantes (3 patients). 15 patients vivent avec des enfants, 32 sans enfants et 12 n’ont pas répondu. Figure 5 : mode de vie des patients mode de vie des patients Chez les parents; 10,20% DM; 5,10% Seul; 25,40%; En couple; 59,30% 1.3.1.5 Catégories socioprofessionnelle des patients Il a été utilisé la classification des professions de l’INSEE avec une échelle de 5 classes plus une catégorie pour les patients sans profession - classe 1 : chefs d’entreprise - classe 2 : cadres et professions intellectuelles supérieures - classe 3 : professions intermédiaires 23 - classe 4 : employés - classe 5 : ouvriers - catégorie 6 : autres inactifs. Pour les chômeurs et les retraités nous avons tenu compte de la catégorie socioprofessionnelle de leur dernier emploi. La répartition des patients est la suivante : - classe 1 : 1,7 % (1 patient) - classe 2 : 8,5 % (5 patients) - classe 3 : 23,7 % (14 patients) - classe 4 : 18,6 % (11 patients) - classe 5 : 8,5 % (5 patients) - catégorie 6 : 17 % (10 patients) - données manquantes : 22 % (13 patients tous retraités). Figure 6 : catégories socioprofessionnelles des patients catégories socioprofessionnelles DM 22% classe 1 1,7% classe 2 8,5% classe 3 23,7% inactifs 17% classe 5 8,5% classe 4 18,5% 24 1.3.1.6 Situation professionnelle des patients Au moment de l’étude il y avait : - 52,5 % des patients actifs (dont 2 chômeurs) - 20 % de patients inactifs (dont 5 étudiants) - 25,4 % des patients retraités - 5,1 % de données manquantes. Figure 7 : situation professionnelle des patients situation professionnelle retraités 25% DM 5% inactifs 19% 1.3.2 actifs 51% Caractéristiques médicales des patients Il n’y avait aucun critère médical d’exclusion. Nous avons retenu pour les caractéristiques médicales les antécédents familiaux, les antécédents personnels médicaux, les antécédents personnels chirurgicaux, l’existence d’un traitement médical et les habitus (alcool, tabac et autres addictions) 1.3.2.1 Antécédents familiaux Nous avons recherché les antécédents familiaux de cancers, de pathologies cardiovasculaires, d’accidents (type AVC, IDM…) et de pathologies psychiatriques. 33 patients sur 59 n’avaient aucun antécédent familial recherché. 25 Parmi les 26 patients restants, 15 avaient 1 seul antécédent familial, 7 avaient 2 des antécédents, 1 avait 3 des antécédents et 1 avait les 4 antécédents. Nous avons retrouvé des antécédents familiaux de cancers chez 11 patients, des antécédents familiaux cardiologiques chez 15 patients, des antécédents familiaux d’accidents chez 8 patients et des antécédents familiaux psychiatriques chez 4 patients Les données étaient manquantes pour 2 patients. Tableau 4 : antécédents familiaux : nombre de symptômes, nombre de patients et type d’antécédent. Nombre Nombre de Antécédents Antécédents Antécédents Antécédents d’antécédents patients de cancers cardiologiques d’accidents psychiatriques 0 33 0 0 0 0 1 15 6 5 1 1 2 7 4 8 5 1 3 1 0 1 1 1 4 1 1 1 1 1 DM 2 DM DM DM DM 59 11 15 8 4 familiaux 2.3.2.2 Antécédents personnels médicaux 15 patients (25,4%) n’avaient aucun antécédent médical personnel. Dans les 44 patients restant, 19 avaient 1 seul antécédent, 12 avaient 2 antécédents, 7 avaient 3 antécédents, 3 avaient 4 antécédents et 3 avaient 5 antécédents. 11 patients ont des antécédents psychiatriques parmi lesquels 6 ont un syndrome dépressif. La prédominance des antécédents cardiologiques est certainement liée à l’âge des patients. 26 Tableau 5 : Répartition chronique/aigu selon le type d’antécédent chez les patients (n=59) antécédent aigu chronique Cardiologique 12 3 Pneumologique 2 3 Rhumatologique 5 6 Gastroentérologique 5 9 Neurologique 5 0 Psychiatrique 7 4 Endocrinien 5 0 Infectieux 0 9 Hématologique 1 1 Gynécologique 0 3 autres 6 5 Total 48 43 1.3.2.3 Antécédents chirurgicaux 27 patients n’avaient aucun antécédent chirurgical soit 45,8 %. 14 patients avaient 1 antécédent 8 patients avaient 2 antécédents Répartition du type d’antécédent chirurgical : - cardiologiques : 6,2 % - pneumologiques : 3,1 % - rhumatologiques : 18,8 % - gastroentérologique : 18,8 % - urologiques : 3,1 % - neurologiques : 3,1 % - gynécologiques : 25 % - obstétriques : 3,1 % - autres : 18,8 % 27 1.3.2.4 Habitus Alcool : 16 patients, soit 27,1 %, affirment consommer de l’alcool. Cette consommation varie de 1 verre par semaine à 66 verres par semaine. Tabac : 11 patients consomment du tabac, soit 18,5 % Autres addictions : aucune autre addiction n’a été retrouvée. Traitement médicamenteux : 25 patients (42,4%) n’ont aucun traitement médical. Parmi les 34 autres, 15 ont un traitement cardiologique, 9 ont un traitement antidépresseur, 3 prennent des antalgiques et 2 des traitements antimigraineux. 1.4 - Caractéristiques du symptôme 1.4.1 Type du symptôme Le nombre total de plaintes inexpliquées est de 147 pour 59 patients La douleur est le motif de consultation le plus fréquent, 33 patients (56 %) consultent pour une douleur. C’est aussi le symptôme le plus présent puisque il est retrouvé chez 78% des patients bien qu’ils n’avaient pas tous exprimé ce symptôme dans le motif initial de consultation. Les symptômes les plus fréquents (cf. tableau 6) pour l’ensemble de l’échantillon sont : les douleurs des membres (25,4%), les céphalées (20,3%), la fatigue (20,3%), les vertiges (15,2%) et les douleurs abdominales (13,5%) 28 Tableau 6 : Nombre de symptômes par sexe et pourcentage sur l’échantillon total (n=59) nombre % dans l’échantillon Malaise 6 10,2 Vertiges 9 15,2 Céphalée 12 20,3 Fatigue 12 20,3 Troubles du sommeil 7 11,9 Palpitations/tachycardie 1 1,7 Dyspnée 7 11,9 Thoraciques 7 11,9 Abdominales 8 13,5 Dorsolombaires 2 3,4 Faciale 3 5,1 Musculaires 5 8,5 Articulaires 6 10,2 Membres 15 25,4 Dyspepsie/dysphagie 5 8,5 Ballonnements 5 8,5 Nausée 4 6,8 Constipation 1 1,7 Diarrhée 4 6,8 Pesanteur pelvienne 1 1,7 Troubles visuels 5 8,5 Acouphènes 3 5,1 Troubles ORL 3 5,1 autres 16 27,1 Symptômes Douleurs : Troubles digestifs 29 Les autres symptômes, non répertoriés dans notre liste étaient : - prurit (n=2) - sueurs profuses (n=3) - hypoesthésie et troubles sensitifs de la cuisse et du mollet (n=1) - hypoesthésie du membre supérieur droit (n=1) - paresthésie des mains (n=1) - hallucinations (n=1) - rectorragies (n=1) - amaigrissement (n=1) - fièvre et frissons (n=1) - troubles de l’équilibre (n=2) - sensation de faiblesse musculaire (n=1) - tremblements (n=1) - douleur cervicale (n=1) Par contre si on regarde la distribution de ces symptômes selon la tranche d’âge cette répartition change (cf. tableau 7). En effet, pour les moins de 20 ans le symptôme prédominant est la migraine, pour les 20-39 ans c’est la douleur des membres, pour les 40-59 ans c’est la fatigue et pour les plus de 60 ans c’est les vertiges et les douleurs thoraciques. Tableau 7 : Répartition des symptômes selon la tranche d’âge < 20 ans 20-39 ans 40-59 ans > 60 ans (n=6) (n=15) (n=20) (n=18) nbre % nbre % nbre % nbre % Douleur des membres 1 16,7 5 33,4 6 30 3 16,7 fatigue 1 16,7 3 20 7 35 1 5,6 migraine 3 50 4 26,7 2 10 3 16,7 vertige 2 33,4 3 20 0 0 4 22,2 Douleur thoracique 1 16,7 1 6,7 1 5 4 22,2 Douleur abdominale 1 16,7 3 20 2 10 3 16,7 30 21 patients présentent 1 seul symptôme 38 patients sont multi symptomatiques : 15 patients ont 2 symptômes, 7 patients 3 symptômes, 7 patients 4 symptômes, 3 patients 5 symptômes, 5 patients 5 symptômes et 1 patient à 9 symptômes. 1.4.2 Mode de survenue du symptôme L’épisode est isolé pour 27 patients (45,8%) et récidivants pour 32 patients (54,2%) Tableau 8 : Durée de l’évolution du symptôme avant la consultation Durée de la gêne Episode isolé Episode récidivant < 1 semaine 9 3 1 semaine ≤ apparition du gène > 1 mois 9 3 1 mois ≤ apparition du gène > 6 mois 5 5 6 mois ≤ apparition du gène > 1 an 2 5 ≥ 1 an 2 4 1.4.3 Mode d’évolution Permanent : 17 patients (28,8%) Intermittent : 43 patients (72,9%) Avec paroxysmes : 28 patients (47,5 %) Sans paroxysmes : 20 patients (33,9 %) Aigu : 3 patients (5,1 %) Terminé : 3 patients (5,1%) DM : 1 patient 1.4.4 Horaires de survenue Diurne : 29 patients (49,1%) Nocturne : 2 patients (3,4 %) Les deux : 25 patients (42,4 %) DM : 4 patients 31 1.4.5 Facteurs favorisants Nous avons recherché si le patient avait eu récemment des problèmes familiaux, conjugaux, professionnels, relationnels ou un décès qui l’avait particulièrement touché. Ces évènements de vie peuvent parfois provoquer un stress qui peut jouer un rôle dans l’apparition des symptômes inexpliqués. Aucun facteur favorisant pour 30 patients Pour les 29 autres patients on retrouve : - des problèmes professionnels : 15 patients (51,7%) - des problèmes familiaux : 17 patients (58,6%) - des problèmes conjugaux : 9 patients (31%) - d’autres problèmes (financier, relationnel) : 10 patients (34,4%) - un décès qui a marqué le patient : 8 patients (27,9%) 1.4.6 Retentissement De même nous avons recherché si depuis l’apparition du (ou des) symptômes inexpliqués, le patient avait noté un retentissement sur sa vie quotidienne (professionnelle, conjugale, familiale et relationnelle). Aucun retentissement pour 21 patients Pour les 38 autres patients il y a un (ou des) retentissement : - sur la vie professionnelle : 18 patients (47,4%) - sur la vie conjugale : 13 patients (34,2%) - sur la vie familiale : 10 patients (26,3%) - sur la vie amicale, relationnelle, loisirs : 28 patients (73,7%) 1.4.7 Comportement du patient au cours de la consultation Sans particularité : 27 patients (45,8%) Tendu, mal à l’aise : 13 patients Agitation nerveuse : 6 patients Agressif : 4 patients Parait fatigué : 14 patients 32 1.4.8 Exploration médicale antérieure du symptôme Le symptôme a déjà été exploré par des examens complémentaires pour 36 patients. Ils sont normaux dans 94,6% des cas. Il s’agit surtout d’examens d’imagerie médicale (40 ,4 %) et d’examens biologiques (39 ?4%). Les autres examens, tels l’ECG, EFR, EMG, représentent 20,2 % des prescriptions d’examens complémentaires. 29 patients (49,1%) ont consulté, pour le symptôme actuel, un (ou des) spécialiste. 2 - Données qualitatives 2.1 - Expression verbale du symptôme par le patient Dans plus de la moitié des cas le patient exprime clairement, simplement son symptôme. Par exemple il dit qu’il a une douleur, qu’il localise ou qu’il a eu un malaise … D’autres (environ 15%) parlent de sensation, de gène. Dans 15 % des cas, les patients utilisent des « images » pour expliquer leur symptôme : « je marche sur des œufs », « ça me mange sur le dos », « la tête dans un étau », « en coup de fusil » … 1 seul patient demande clairement un diagnostic et un bilan pour arriver à ce diagnostic. 2 patients évoquent un diagnostic. Peu de patients (4) expriment le désagrément provoqué par leur symptôme : « c’est pénible », « ça ne va pas du tout », j’en ai assez », « ça m’empêche de … ». 2.2 - Etude qualitative des symptômes les plus fréquents 2.2.1 - Douleur des membres (n=15) C’est l’unique motif de la consultation pour 12 patients. Le patient présente toujours sa douleur avec les mêmes mots : « j’ai mal », « je suis gêné » et en précisant l’emplacement de cette douleur (la jambe, le pied …) Les douleurs des membres sont rarement le seul symptôme. Quand le patient donne le motif de la consultation il dit d’abord qu’il a mal (jambe, pied ou bras) mais il exprime aussi des 33 douleurs associées (dos, abdomen, main) ou des signes accompagnateurs (gonflement, boiterie, nausée, gène à la marche…). Parfois même il dit qu’il a mal partout. L’examen clinique est normal pour la majorité des patients (n=13) , la douleur n’est retrouvée à la palpation que pour 3 patients. Les seules anomalies retrouvées sont : « l’impossibilité de marcher sur la pointe des pieds ou sur les talons » et « une ataxie du MIG ». Ce symptôme est plus fréquent chez les femmes (n=10) d’âge moyen de 46,1 ans, actives, plus souvent mariées et vivant en couple. Les hommes sont plus jeunes, d’âge moyen de 37,6 ans, actifs et vivant le plus souvent en couple. Pour les 15 patients il est retrouvé des antécédents psychiatriques pour 5 d’entre eux, majoritairement chez les femmes (n=4). C’est plus fréquent que pour l’échantillon total mais cette différence n’est pas significative (p = 0,0907) On retrouve des facteurs favorisants pour 7 patients, dont 5 femmes, surtout familiaux et professionnels. Le symptôme est plus souvent isolé que récidivant, intermittent, avec paroxysmes, sans horaires particuliers, de durée d’évolution de plus de 1 an. Des examens complémentaires antérieurs ont été réalisés chez 11 patients, surtout radiologiques. 2.2.2 - Céphalées (n=12) C’est le motif de consultation pour 9 patients, exprimé seul pour 4 patients et avec d’autres symptômes pour 5 patients. Le patient parle de « céphalées », de « maux de tête », de « douleur » localisée ou imagée tel que « en coup de fusil », « la tête dans un étau ». Il n’y a aucune évocation d’éventuel retentissement s sur sa vie quotidienne. C’est l’unique symptôme pour 2 patients. Pour les autres la céphalée est associée à des troubles digestifs (nausée, dyspepsie, ballonnements), à d’autres douleurs (surtout abdominales), à la fatigue et à des troubles du sommeil. L’examen clinique est normal pour 6 patients. Les médecins décrivent cette céphalée comme diffuse et de localisation variable ( n=5) ou comme céphalée « en barre à type de brulure intermittente » (n=1) Pour les autres patients, compte tenu du fait que la migraine n’était pas le motif de la consultation , mais plutôt un symptôme accompagnateur, elle n’a pas été décrite. Par contre ils signalent un terrain anxieux ou dépressif pour 5 patients. 34 On retrouve 1 seul patient avec des antécédents psychiatriques Ce symptôme est plus fréquent chez les femmes d’âge moyen de 35,3 ans (n=7). Il est plus souvent récidivant, intermittent, sans horaire de survenue particulier. On retrouve peu de facteurs précipitant (n=4) uniquement chez des femmes. 2.2.3 - La fatigue (n=12) Elle n’est le motif de consultation que pour 3 des patients : « je suis fatiguée », « j’ai l’impression d’être épuisée » et « je me réveille fatiguée ». Du fait que la fatigue est évoquée dans un contexte multi symptomatique, l’examen clinique est peu contributif. 5 patients ont des antécédents psychiatriques On retrouve des facteurs favorisants chez 8 patients, dont 7 femmes. La fatigue touche surtout les femmes (n=8) de 42,3 ans d’âge moyen, actives, vivant avec des enfants. Elle est plus souvent récidivante, intermittente, avec paroxysme, à la fois diurne et nocturne. 2.2.4 - La douleur abdominale (n=8) Elle touche autant les femmes que les hommes d’âge moyen de 46,7 ans. C’est le motif de consultation pour 8 patients. C’est le seul motif de consultation pour 2 patients. Pour les 6 autres ils s’y associent des troubles digestifs (dyspepsie, dysphagie, nausée, ballonnement, diarrhée…) Les patients parlent le plus souvent de « mal de ventre », mais aussi de « douleur de l’estomac », « douleur au coté », « barre sous les seins », « coup de froid dans le ventre » en décrivant les signes accompagnateurs quand ils existent. Ce symptôme n’a pas de spécificité si ce n’est qu’il est plus souvent intermittent. Après l’examen clinique cette douleur est localisée de façon très variable : « flanc droit », « diffuse », « douleur intercostale atypique », « douleur d’origine colique », ou encore « brulure épigastrique ». 2 patients ont des antécédents psychiatriques. On note un terrain anxieux pour 3 patients. Il n’y a pas de facteurs favorisants, ni de retentissement sur la vie quotidienne. 35 2.3 – Du point de vue des médecins 2.3.1 - Ce qui lui fait évoquer un symptôme inexpliqué Les médecins n’évoquent pas le diagnostic de symptôme inexpliqué pour 14 patients. Ils évoquent ce diagnostic quand : - le patient vit dans un contexte de difficultés professionnelles, familiales (17 patients), - l’examen clinique est normal (15 patients), - devant l’anxiété (11 patients) ou l’agressivité (3 patients) du patient, - la localisation du symptôme est atypique ou il y a inadéquation entre la plainte et la clinique (7 patients), - le patient est connu pour consulter pour plaintes multiples (4 patients), - l’absence de terrain particulier (antécédents, facteurs de risque) (3 patients) - l’amélioration spontanée (3 patients) 2.3.2 Prise en charge A la fin de la consultation, les médecins : - prescrivent un traitement médical à 22 patients : traitement symptomatique (n=15) et traitement anxiolytiques (n=7). - rassurent, expliquent pour 19 patients, évoquent une aide psychothérapeutique (n=4) - ne font rien pour 12 patients - prescrivent des examens complémentaires pour 7 patients - demandent l’avis d’un spécialiste pour 5 patients - proposent de revoir le patient pour 3 patients. 3 – Etude simultanée réalisée auprès de 10 SASPAS de Paris XII Parallèlement à notre étude, une étudiante de Paris XII, a effectué cette même étude auprès de 10 étudiants de Paris XII, qui effectuaient leur stage en cabinet de ville (SASPAS) ou au cours de leur remplacement. Le mode de recueil et le questionnaire étaient semblables. Cette étude a été réalisée du 3 décembre 2007 au 21 mars 2008. L’échantillon était de 63 patients. Cette double étude nous à permis de faire une analyse comparative. 36 La première grande différence, qui était volontaire, est l’âge et le statut. Certains sont encore étudiants de moyenne d’âge de 28 ans, d’autres sont médecins généralistes enseignants d’âge moyen de 53,4 ans. Parmi les SASPAS il y a 8 femmes et 2 hommes, parmi les médecins il y a 6 femmes et 6 hommes. Il existe une différence au niveau de l’âge des patients : la moyenne d’âge de l’échantillon de l’étude « SASPAS » est de 39 ans, contre 46,2 ans pour l’échantillon de l’étude « Médecins » Il existe de nombreuses autres différences entre les deux groupes (cf. tableau 9) mais peu sont significatives. Les différences significatives entre les deux études sont : le nombre de femmes (p=0,044), le nombre d’hommes (p=0,044), le nombre de patients mariés (p=0,019), le nombre de patients actifs (p=0,0014), le nombre de retraités (p=0,009), l’existence de facteurs favorisants (p=0,019) et au niveau de la prise en charge, la prescription d’un traitement médical (p=0,043) et la prescription d’examens complémentaires (p=0,035). Nous retrouvons une différence aussi dans les symptômes les plus fréquents pour chaque groupe : pour l’étude « SASPAS » il s’agit de douleurs des membres (19%), de douleurs thoraciques (16%), de fatigue (16%), de douleurs abdominales (11%) et de douleurs articulaires (11%) , pour l’étude « Médecins » il s’agit de douleurs des membres (25,4%), de migraine/céphalées (20 ?3%), de fatigue (20,3%), de vertiges (15,2%) et de douleurs abdominales (13,5%) Par ailleurs nous avons noté deux points-clé de la prise en charge cités par les médecins généralistes enseignants mais qui n’ont jamais été évoqués par les étudiants : - proposer au patient une aide psychologique de type psychothérapie de soutien - expliquer au patient qu’il s’agit de « troubles somatoformes » c’est-à-dire admettre qu’il s’agit de symptômes médicalement inexpliqués. 37 Tableau 9 : Tableau comparatif des 2 études, auprès des médecins et auprès des SASPAS Etude SASPAS (n=63) Etude médecins (n=59) PATIENT Femmes 49 78% 36 61% Hommes 14 22% 23 39% Age moyen 39 46,2 Marié Célibataire Divorcé Veuf 44 12 2 2 70% 19% 3% 3% 28 20 5 5 47,4% 33,9% 8,5% 8,5% En couple Seul Chez les parents 38 9 5 60% 14% 8% 35 15 6 59,3% 25,4% 10,20% Actif Inactif Retraité 43 11 5 69% 18% 8% 31 10 15 51% 19% 25% Tabac Alcool 14 7 22% 11% 11 16 18,5% 27 ,1% Atcd psychiatriques SYMPTOME Isolé Récidivant 9 14% 11 18,6% 33 30 52% 48% 27 32 45,8% 54,2% Permanent Intermittent 21 37 33% 59% 17 43 28,8% 72,9% Diurne Nocturne Les deux 22 5 30 35% 8% 48% 29 2 25 49,1% 3,4% 42,4% < 1 semaine 1 sem ≤ gène > 1 mois 1 mois ≤ gène > 6 mois 6 mois ≤ gène > 1 an > 1 an 19 12 15 5 12 30% 19% 24% 8% 19% 12 12 10 7 6 20,3% 20,3% 16,9% 11,9% 10,2% Facteur favorisant 18 28% 29 49,1% Retentissement 34 54% 38 64 ,4% Prise en charge : -traitement médical -exam complémentaires -avis spécialiste 35 17 10 56% 27% 16% 22 7 5 37,3% 11,9% 8,5% 38 C – DISCUSSION I – LES PRINCIPAUX RESULTATS DE NOTRE ETUDE Nous avons pu estimer la prévalence des symptômes médicalement inexpliqués à 2,5 % pour l’ensemble des médecins participant à l’étude (allant de 0,29 % à 5,88%) Notre travail a permis de déterminer les symptômes médicalement inexpliqués le plus souvent rencontrés par les médecins généralistes au cours de leur consultation. Il s’agit des douleurs des membres, des céphalées, de la fatigue, des vertiges et des douleurs abdominales. Cela nous a permis aussi de dresser un portrait « type » du patient souffrant de symptômes inexpliqués : il s’agit d’une femme, d’âge moyen de 46,2 ans, mariée, vivant en couple, ayant eu des enfants qui ne vivent plus au foyer, active, sans antécédent particulier ni facteur de risque retrouvés, chez qui on retrouve des facteurs favorisants et dont les symptômes ont un fort retentissement sur sa vie quotidienne. La comparaison des deux études « SASPAS » « médecins généralistes enseignants » a permis de mettre en évidence des différences significatives au niveau du type de patients, de la répartition des symptômes médicalement inexpliqués et de la prise en charge des patients. 1I – FORCES ET FAIBLESSES DE NOTRE ETUDE 1 – Forces de notre étude 1.1 – Le thème abordé La prévalence des symptômes inexpliquée est estimée à 20 % en médecine générale. C’est donc une situation fréquente. Pourtant les médecins généralistes se sentent souvent démunis face aux patients qui présentent des plaintes inexpliquées. En effet, l’étude de ces symptômes ne fait pas partie du programme d’enseignement des futurs médecins généralistes alors qu’ils sont les premiers confrontés à ces patients et à une situation souvent problématique. C’est pourquoi il est important de multiplier les travaux afin de recueillir des données qui pourront être intégrer au programme d’enseignement de médecine générale pour que les 39 médecins puissent poser le diagnostic de plainte médicalement inexpliquée de manière positive et non plus par exclusion. De même une meilleure connaissance et compréhension de ces plaintes peut avoir des répercussions positives dans plusieurs domaines : le vécu de ces plaintes par le médecin qui ne vivra plus cela comme un échec, le vécu de ces plaintes par le patient qui aura l’impression qu’on prend soin de lui par une meilleure prise en charge, même si on ne le guérit pas, et donc une amélioration des rapports patient-médecins , le retentissement sur le cout engendré par ces plaintes . 1.2 - Le type d’étude Une étude épidémiologique descriptive des symptômes médicalement inexpliqués permet d’envisager de répertorier les symptômes inexpliqués les plus souvent rencontrés en médecine générale, de les décrire le plus précisément possible et de calculer leur prévalence. Grace aux questions relatives à la « biographie » du patient nous pouvons également envisager des hypothèses quant à l’étiologie de ces symptômes et peut être mettre en évidence des facteurs de risque pour un même symptôme. 1.3 – Choix de l’échantillon des médecins enseignants Nous avons choisi de réaliser cette étude auprès de médecins généralistes car ils sont souvent les premiers à être confrontés aux symptômes inexpliqués. En France peu d’études ont été réalisée s auprès des médecins généralistes et il s’agissait le plus souvent d’études relatives au vécu du médecin ou à l’attente des patients. Le choix de médecins enseignants a été motivé par le fait qu’ils participent volontiers aux études. De plus, ils appartiennent à 5 facultés de Médecine différentes et n’ont peut-être pas le même intérêt ni la même approche du sujet. Le lieu d’exercice des médecins est assez diversifié : 3 médecins exercent à Paris intra muros, 6 en proche banlieue, 2 en grande banlieue et 1 en province. L’activité est citadine et semi rurale. 1.4 - Deux études sur le même sujet Deux études ont été réalisées en parallèle selon le même protocole mais l’une auprès de médecins généralistes enseignants, l’autre auprès d’ étudiants (SASPAS) Le but de cette double étude était de faire une étude comparative entre les étudiants et les médecins en partant du postulat qu’il existait peut-être des différences : sur le type de patients, sur le type des symptômes, sur la prise en charge … 40 2 - Faiblesses de notre étude 2.1 - Liées à la méthode de recueil 2.1.1 - La taille du questionnaire Nous voulions recueillir un maximum d’informations sur le patient, sur le symptôme et sur ce que pensaient les médecins ainsi que sur la prise en charge afin que cette étude épidémiologique soit la plus complète possible. De ce fait le questionnaire comptait 8 pages parmi lesquelles il y avait 4 questions à réponse libre. Les médecins devaient remplir le questionnaire au cours ou après la consultation pour chaque cas de plainte inexpliquée. C’était difficilement gérable s’il y avait beaucoup de consultations « habituelles » dans la journée ou s’il y avait plusieurs plaintes inexpliquées dans une même journée. C’est pourquoi certaines questions à réponses libres ont été peu ou pas remplies, rendant ainsi l’analyse qualitative incomplète. 2.1.2 – Les échantillons - Les médecins Presque tous les médecins exerçaient en région parisienne et même si leur lieu d’exercice était varié l’échantillon n’est pas représentatif de la population générale. Ils étaient tous enseignants et n’ont donc pas la même motivation que les médecins généralistes non enseignants. - Les patients Il existe un biais de sélection car celle-ci se fait sur la subjectivité du médecin. La taille réduite de l’échantillon et la multiplicité des symptômes font que l’analyse qualitative et statistique de notre étude ne peut pas s’appliquer à la population générale. 2.2 – Déroulement de l’étude 2.2.1 – Période de l’étude Elle a été réalisée en période hivernale, de janvier à mars 2008. En cette période les consultations sont plus fréquentes à causes des viroses respiratoires et digestives saisonnières faussant ainsi le calcul de prévalence des symptômes inexpliqués. 41 2.2.2 - Jour de recueil Il avait été décidé de faire l’étude le premier jour de consultation de la semaine pour tous les médecins afin d’être le plus exhaustif possible et d’éviter le choix du jour par convenance. Mais il y a eu des aménagements dus aux périodes de congés. Certains médecins faisaient le recueil 2 fois dans la même semaine pour compenser l’absence liée aux congés, ou décalaient d’une semaine. Tous ont effectués 9 jours de recueil mais sur une période allant du 7 janvier au 17 mars. Plusieurs médecins se plaignaient du fait que le recueil se fasse uniquement le premier jour de la semaine et que parfois ils n’avaient pas de plainte inexpliquée ce jour là alors qu’ils en avaient plusieurs les autres jours de la semaine. Pour être plus représentatif de la réalité il aurait peut-être fallu faire l’étude sur tous les jours de la semaine pendant une durée définie. III – COMPARAISON AVEC LA LITTERATURE 1 – La prévalence Dans notre étude elle n’est que de 2,52 % alors que dans la littérature elle varie de 20 à 30 % (1) (28) (39). Cette différence est en partie due aux viroses respiratoires et digestives hivernales qui ont majoré le nombre de consultations totales et en partie à la taille de notre questionnaire qui a fait que les médecins n’ont peut être pas eu le temps de remplir un questionnaire à chaque cas de plaintes inexpliquées. Mais il parait évident que si les médecins admettent l’existence de ces plaintes inexpliquées ils n’assument pas encore vraiment le fait de les diagnostiquer d’emblée de peur d’une erreur de diagnostic ou d’être considéré comme un « mauvais médecin » 2 – Les symptômes 1.1 – Le type de symptôme Le symptôme le plus fréquemment cité dans notre étude est la douleur, ce qui est similaire à ce qui est décrit dans la littérature (14) (15) (16) La répartition, en termes de fréquence, est également similaire à certaines études (10) (14) (13) (26). Il s’agit des douleurs des membres, des céphalées, de la fatigue, des vertiges et des douleurs abdominales. Par contre elle est légèrement différente de celle de l’étude faite par 42 les étudiants : douleurs des membres, douleurs thoraciques, fatigue, douleurs abdominales et douleurs articulaires. Ceci pourrait corréler l’idée que la prévalence des symptômes est différente selon l’âge du patient (1) (33) étant donné que les patients de l’étude faite par les étudiants sont plus jeunes. 1.2 – le nombre de symptômes Plus de la moitié des patients présentent plusieurs symptômes. Ceci a était également décrit dans plusieurs études (10) (13)(14)(16) 26) La multiplicité de ces symptômes, leur grande diversité, l’expression variable par les patients au niveau d’un échantillon réduit font que l’analyse qualitative de ces symptômes a été incomplète. Pour cela il faudrait se concentrer sur l’étude d’un symptôme à la fois dans un échantillon de patients plus grand. 1.3 – Mode évolutif du symptôme Nous n’avons pas mis en évidence de caractéristique dominante quant au mode de survenue, la durée, l’horaire ou l’évolution des symptômes Dans la littérature ces symptômes sont décrits comme ayant une évolution chronique (10) (14). Il n’y a aucune corrélation entre la durée d’évolution du symptôme et le sexe (p> 0,05), alors que la plupart des auteurs affirment que les symptômes durent plus longtemps chez les femmes (6). Il n’y a aucune corrélation non plus avec le mode de vie, seul ou pas seul (p>0,05) ni avec la situation professionnelle actuelle, actif / inactif (p> 0,05). 2 - Les patients L’âge moyen des patients est de 46,4 ans, ce qui est semblable à ce qui a été trouvé dans différentes études, où l’âge moyen varie de 40 à 55 ans (14) (16) (26) (28). L’échantillon des médecins est plus âgé que celui des étudiants, d’âge moyen de 39 ans. Peut être est-ce du à l’âge des médecins qui ont une patientèle plus âgée. Certains suivent leurs patients depuis 30 ans. Peut être est-ce également du au mode de recrutement des patients par les étudiants, qui considèrent le jeune âge comme un critère qui oriente vers un symptôme inexpliqué. Il y a une majorité de femmes qui présentent des symptômes inexpliqués, ainsi que dans différentes études (6) (13) (16) (38) .Il y a une différence significative (p=0,04) du nombre de 43 femmes entre l’étude des médecins et celle des étudiants. Les femmes sont plus nombreuses dans l’étude faite par les étudiants. Nous avons trouvé plusieurs autres différences significatives entre les deux études : notre échantillon comptent plus de retraités (p= 0,009) et moins d’actifs (p=0,0014) ceci est du à la différence d’âge des patients, les nôtres étant plus âgés( il y a 18 patients de plus de 60 ans dans l’étude des médecins contre 6 pour l’étude des étudiants). Ces patients sont souvent mariés, vivent en couple ou en famille. Par contre, si la moitié des patients a eu des enfants très peu vivent actuellement avec leurs enfants, cela est du à l’âge des patients. Nous n’avons pas mis en évidence de prédominance d’antécédents familiaux, personnels médicaux ou chirurgicaux, ni de facteurs de risque. Il y avait 11 patients qui avaient des antécédents psychiatriques mais il n’a pas été trouvé de corrélation entre la présence d’un antécédent psychiatrique et la durée du symptôme ou le nombre de symptômes. 3 - Les contextes de vie 3.1 – Les facteurs favorisants La moitié des patients signalent un facteur favorisant. Certains auteurs (5) (9) (41) affirment que ces facteurs pourraient jouer un rôle important dans l’apparition d’un symptôme inexpliqué en fragilisant le patient et également provoquer une anxiété chez le patient. Les patients sont souvent conscients du rapport possible entre ces facteurs de stress et l’apparition du symptôme mais ils l’évoquent rarement de façon spontanée (2) Il existe une différence significative sur le nombre de facteurs favorisants entre l’étude des médecins et celle des étudiants (p=0,019). Il y a moins de facteurs favorisants rapportés chez les patients des étudiants. Soit cette différence est liée au plus jeune âge des patients, soit au fait que souvent les étudiants voient ces patients pour la première fois alors que les médecins sont presque tous les médecins traitants de leurs patients. Les médecins les connaissent mieux et les patients leur livrent plus facilement des éléments personnels. 3.2 – Le retentissement L’absence de gravité apparente pour le médecin contraste avec l’importance du retentissement sur la vie quotidienne (familiale, sociale, professionnelle). 64 % des patients de notre étude évoquent un retentissement sur la vie quotidienne. 44 5 - La prise en charge des patients Les attentes des patients sont différentes selon les auteurs. Pour certains (23) (33) le patient veut d’abord être réassuré et avoir des explications plutôt que des prescriptions de médicaments ou d’examens complémentaires. Pour d’autres (26), le patient ne demande jamais à être réassuré et c’est leur médecin qui propose cette prise en charge. Le patient préfère une écoute, un soutien psychologique (26) (33). Dans un travail de thèse (2) , Céline Arsac, a montré que les attentes des patients étaient avant tout que le médecin se sente concerné afin de lui apporter un soutien, d’être réassuré même si cette réassurance est souvent insuffisante voire aggravante d’un état anxieux (23),d’avoir des explications claires pour comprendre leur symptôme, d’avoir en dernier lieu une prescription médicamenteuse ou d’examens complémentaires. Ils demandent rarement l’avis d’un spécialiste. Dans notre étude, les médecins prescrivent un traitement médical pour 22 patients. Il s’agit d’un traitement symptomatique pour 15 patients afin de faire comprendre au patient que même si le médecin ne sait pas ce qu’il a il est conscient de la réalité du symptôme et de la gène qu’il entraine. Pour 7 patients il a été prescrit un traitement anxiolytique à faible dose. Il est conseillé de prescrire des anxiolytiques quand le patient a une anxiété provoquée par les facteurs favorisants ou quand il supporte mal le retentissement sur sa vie quotidienne (23) Les médecins prescrivent peu d’examens complémentaires. Ils voient rarement ces patients pour la première fois et ont parfois déjà fait un bilan (normal le plus souvent) Un tiers des médecins prend le temps de parler, d’expliquer et de rassurer les patients. C’est ce que ces derniers désirent le plus souvent (26) (33). Mais peu de médecins envisagent clairement un suivi psychothérapeutique. Les médecins adressent peu de patients à un spécialiste. A l’analyse comparative des deux études médecins-étudiants il apparaît des différences significatives en ce qui concerne la prise en charge des patients. Les étudiants prescrivent plus souvent des médicaments et des examens complémentaires. La formation médicale, majoritairement hospitalière, engendre ce genre de comportement. En effet, à l’hôpital, on fait toujours des bilans et on prescrit presque toujours un traitement médical « pour guérir » le patient et surtout on n’est pas seul face au patient. 45 Le fait d’être confronté à un symptôme inexpliqué peut être vécu comme un manque de connaissance par l’étudiant et la peur de passer à coté de quelque chose de grave fait qu’ils prescrivent des examens complémentaires dans un but diagnostique mais aussi pour se rassurer. L’incertitude est difficile à accepter. De même, les étudiants pensent, souvent à tort, que les patients sont demandeurs de médicaments et d’examens complémentaires et terminent leur consultation par des prescriptions pensant ainsi satisfaire le patient qui a ainsi l’impression qu’on «s’occupe de lui ». Les étudiants voient ces patients souvent pour la première fois, à l’inverse des médecins généralistes qui connaissent leurs patients depuis plus longtemps et chez lesquels des bilans ont déjà été effectués. Parfois les médecins prescrivent des examens complémentaires, surtout biologiques, pour de nouveaux patients, même si intuitivement ils savent que c’est une plainte inexpliquée afin d’avoir une confirmation par un examen négatif. 46 E - CONCLUSION Notre travail nous a permis de faire une approche épidémiologique des symptômes inexpliqués en médecine générale. Outre le fait d’avoir dressé un portrait type du patient souffrant de symptômes inexpliqués, ce travail a fait ressortir l’importance du contexte de vie, des facteurs favorisants et surtout le grand retentissement sur la vie quotidienne des patients. Par contre l’étude qualitative a été insuffisamment productive du fait de la taille réduite de notre échantillon et de la multiplicité, de la diversité, de la variabilité d’expression des symptômes. Il serait intéressant de faire des études, ciblées sur chaque symptôme inexpliqué, les plus fréquents, afin de les décrire très précisément et de rechercher des facteurs communs à chacun des symptômes. De même la faible prévalence ne correspond probablement pas à la véritable proportion des plaintes inexpliquées vues en médecine générale en France. Si cela est du à une erreur de méthodologie (taille trop importante du questionnaire) il serait intéressant de faire un simple décompte du nombre de plaintes inexpliquées rencontrées par les médecins généralistes parmi toutes leurs consultations, chaque jour, sur une période donnée. La double étude a permis de mettre en évidence quelques différences entre les résultats des étudiants et ceux des médecins. Cela conforte notre postulat qu’il peut exister des différences selon la population médicale qui réalise l’étude, soit par différence d’expérience ou de confiance en soi, soit par différence de subjectivité au moment du choix des patients. Nous pouvons donc également envisager qu’il existe des différences selon le lieu d’exercice, géographique (Nord/sud), selon le type de population (rurale/citadine), voire même culturelle (la perception de la maladie étant différente selon les cultures). La double étude a également mis en évidence des différences liées à l’âge des patients, c'est-àdire que les prévalences des symptômes et les caractéristiques des patients varient avec la tranche d’âge à laquelle ils appartiennent. Il serait intéressant de faire des études par tranche d’âge afin de déterminer le patient type pour chaque tranche d’âge. Notre travail a aussi mis en évidence le retentissement important des symptômes inexpliqués sur la vie quotidienne des patients sans en évaluer l’ampleur, la souffrance et le vécu par les patients ni leur état psychologique. Faire des focus groupes avec des patients souffrant de 47 symptômes inexpliqués sélectionnés par des médecins permettrait de mieux estimer ce retentissement. Il ressort de notre travail que la prise en charge des patients souffrant de symptômes inexpliqués ne peut être que globale. C'est-à-dire une prise en charge, centrée sur le patient, qui intègre les caractéristiques biomédicales du symptôme, l’histoire du patient, son contexte socio-familial et culturel, la personnalité du patient, ses caractéristiques émotionnelles et sa capacité à évoluer dans le temps. Pour aider les étudiants certains programmes font déjà partie de leur formation : - la communication, pour permettre aux étudiants de questionner le patient avec « tact » sur des questions personnelles relatives à sa vie quotidienne, et de préserver une bonne relation médecin/patient. Il s’avère que la première critique des patients est le manque d’écoute, le manque d’explications, le manque de temps… - l’enseignement de cette prise en charge globale à travers les travaux de M. Balint, et F. Laplantine, pour former les étudiants à la relation médecin-patient et pour leur fournir des éléments nécessaires à la compréhension du comportement de la personne confronté à la maladie. Notre travail a surtout montré que les médecins généralistes enseignants restent mal à l’aise avec le diagnostic et la prise en charge des symptômes médicalement inexpliqués. Afin que les futurs médecins et les médecins puissent poser le diagnostic de symptômes inexpliqués de façon positive et non plus par exclusion il serait donc nécessaire : - d’inclure l’enseignement des symptômes inexpliqués, tiré des différents travaux qui auront été réalisés, au le programme des études médicales - d’intégrer l’étude des symptômes inexpliqués au programme de la formation médicale continue - de faire participer les médecins à des groupes de discussion type « Balint » pour partager leurs expériences et ainsi améliorer la prise en charge des patients souffrant de symptômes inexpliqués. 48 F – AXES DE TRAVAIL - Etude ciblée sur un des symptômes médicalement inexpliqués les plus fréquents afin de les décrire le plus précisément possible et de rechercher des facteurs communs à chacun des symptômes. - Etudes comparatives sur les symptômes médicalement inexpliquées selon différents critères : le lieu géographique (Nord/Sud), le type de population (rurale/ citadine) afin de déterminer s’il existe des différences dans le nombre et le type des symptômes mais aussi dans le type des patients souffrant de ces symptômes - Etude des symptômes inexpliqués selon différentes tranches d’âge. - Etude centrée sur les facteurs favorisants faite chez des patients souffrants de symptômes médicalement inexpliqués sélectionnés par les médecins. - Focus groupes de patients souffrant de symptômes inexpliqués sélectionnés par des médecins afin d’évaluer le réel retentissement sur la vie quotidienne. - Focus groupes de médecins généralistes volontaires afin de déterminer leur réelle position et leur difficultés face aux symptômes inexpliqués pouvant expliquer une aussi faible prévalence dans notre étude. - Etude purement quantitative du nombre de symptômes médicalement inexpliqués rencontrés en consultation par les médecins généralistes. Ils noteraient tous les jours combien ils ont eu de symptômes inexpliqués parmi toutes leurs consultations pendant une période donnée. Cela permettrait, peut-être, d’avoir une prévalence plus proche de la réalité. 49 F - BIBLIOGRAPHIE 1. Arnold I.A, Speckens A.E.M and Van Hemert A.M. Medically unexplained physical Symptoms. The feasibility of group cognitive-behavioural therapy in primary care (article en anglais). J Psychosom Res, December 2004, 57 (6), 517-520. 2. Arsac-Chevalier Céline. Les représentations et les attentes des patients souffrant de symptômes bio médicalement inexpliqués en médecine générale. 87 f. Thèse d’exercice Médecine. Médecine générale. Paris V.2006. 3. Balestrat Rémy, Filloux Yves et Jonquille Claude. Troubles somatoformes. Quelle attitude adopter ? (article en français). La Revue du Praticien- Médecine Générale, Octobre 2004, 18, 664-665 4. 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Verhaak P, Meijer Susan A, Visser Adriaan P and Wolters Gerrit. Persistent presentation of medically unexplained symptoms in general practice. Fam Pract, 2006, 23(4), 414-420. 39. Wileman Lindsey May Carl and Chew-Graham Carolyn A. Medically unexplained symptoms and the problem of power in the primary care consultation: a qualitative study (article en anglais). Fam Pract, 2002, 19 (2), 178-182. 40. Wise Thomas N and Birket-Smith Morten. The somatoform disorders for DSM.V: the need for changes in process and content (article en anglais). Psychosomatics, Novemberdecember 2002, 43 (6), 437-440. 41. Woivalin Tora, Krantz Gunilla, Mäntyranta Taina and Ringsberg Karin C. Medically unexplained symptoms: perceptions of physicians in primary health care (article en anglais). Fam Pract, 21 (2), 199-203. 53 G – ANNEXES Annexe 1 LES PLAINTES MEDICALEMENT INEXPLIQUEES Présentation de l’étude et mode de recueil des données But Répertorier et décrire finement les plaintes médicalement inexpliquées les plus souvent rencontrées en Médecine Générale. On parle de plainte médicalement inexpliquée lorsqu’au décours de la consultation et de divers examens complémentaires, le médecin n’arrive pas à classer le malade porteur de cette plainte dans le cadre d’une maladie répertoriée dans la nosographie classique (classification internationale des maladies CIM). Méthode Réalisation d’une étude épidémiologique descriptive observationnelle, transversale auprès de médecins généralistes enseignants à l’aide d’un questionnaire permettant de recueillir des informations sur le type de symptômes inexpliqués rencontrés lors de leurs consultations. Inclusion des patients - patients de Médecine Générale de 18 à 70 ans. - Patients parlant et comprenant le français sans l’aide d’un interprète. Mode de recueil des données - Uniquement au cours des consultations au cabinet médical. - Le premier jour de consultation de la semaine. - Pendant 3 semaines consécutives. - Répertorier toutes les consultations, au fur et à mesure, sur la fiche de consultation de la journée entière en précisant si il y a un diagnostic ou si la plainte vous parait médicalement inexpliquée. Préciser le motif de la consultation uniquement pour les plaintes inexpliquées. - Ne remplir le questionnaire relatif aux plaintes médicalement inexpliquées que s’il n’y a pas de diagnostic posé. - Compléter 1 questionnaire par cas de plainte médicalement inexpliquée. - Remplir également la fiche de renseignements sur le médecin généraliste. 54 Annexe 2 QUESTIONNAIRE Les plaintes médicalement inexpliquées Nom du médecin : Date de la consultation : Heure de la consultation : Nombre de patients déjà consultés dans la journée : Médecin traitant du patient : Depuis combien de temps suivez vous ce patient ? Nom (les 2 premières lettres du nom et du prénom) Sexe: Date de naissance : Plainte exprimée par le patient (avec les mots du patient) : 55 Renseignements concernant le patient Situation familiale Célibataire Marié Divorcé Veuf Avec enfant Sans enfant Mode de vie Seul En couple Avec enfant Chez les parents Profession : Situation professionnelle actuelle : En activité Au chômage A la retraite Antécédents - Familiaux : Pas en activité Oui Non Cancers Pathologie cardiovasculaire Accidents (.IDM, AVC…) Pathologie psychiatrique - Personnels médicaux : si oui cocher la spécialité et préciser Aigus Chroniques Cardiologie Pneumologie Rhumatologie Gastro-entérologie Neurologie Psychiatrie 56 Endocrinologie Infectieux Hématologie Gynécologie Autres (ORL, OPH …) - Chirurgicaux. Préciser la nature de l’intervention (ou des interventions) chirurgicale Cardiologie Pneumologie Rhumatologie Gastro-entérologie Uro-néphrologie Neurologie Gynécologie Obstétricaux Autres - Habitus : Non Oui Alcool nombre de verres / semaine : Tabac nombre de cigarettes/jour : Autres addictions préciser : Médicaments lesquels : 57 Renseignements sur la plainte Nature du ou des symptômes (plusieurs cases peuvent être cochées) Malaise / syncope /sensation syncopale Vertige Migraine / céphalée Fatigue Trouble du sommeil Palpitations, Tachycardie Dyspnée, sensation d’étouffement Douleur Thoracique Abdominale Dorso-lombaire Faciale Musculaire Articulaire Membres inférieurs / supérieurs Troubles digestifs Dyspepsie / dysphagie Ballonnements digestifs Nausée Vomissements Constipation Diarrhée Problèmes urinaires Dysurie Brûlures urinaires Pollakiurie Problèmes sphère génitale Pesanteur pelvienne Brûlures vaginales Brûlures urétrales Troubles sexuels Troubles visuels Flou visuel, Vision brouillée Diplopie 58 Éclairs / myosédopsies Troubles auditifs Acouphènes, Tintement d’oreille Perception de bruits anormaux Baisse de l’audition Troubles ORL Odynophagie Dysphagie Otalgie Autres troubles : préciser Comportement lors de l’entretien (plusieurs cases peuvent être cochées) Sans particularité, à l’aise, détendu Tendu, mal à l’aise, faciès tendu Agitation nerveuse Agressif Parait fatigué L’épisode actuel est Isolé (unique épisode) si non passez à récidivant Depuis quand le patient est-il gêné ? < 1 semaine 1 semaine ≤ apparition de la gène > 1 mois 1 mois ≤ apparition de la gène > 6 mois 6 mois ≤ apparition de la gène > 1 an ≥ 1 an Mode d’évolution Permanent Intermittent Avec paroxysmes Sans paroxysmes Aigu Terminé Horaires Diurne Nocturne Les deux 59 Récidivant (date de l’apparition du premier épisode) < 1 semaine 1 semaine ≤ premier épisode > 1 mois 1 mois ≤ premier épisodes > 6 mois 6 mois ≤ premier épisode > 1 an ≥ 1 an Mode d’évolution Horaires Permanent Intermittent Avec paroxysmes Sans paroxysmes Aigu Terminé Diurne Nocturne Les deux Le patient a t’il eu récemment : Oui Non Problème professionnel Problème familial Problème conjugal Autre problème (financier, relationnel) Un décès qui l’a particulièrement touché Depuis que le patient a ces troubles est-ce que cela retentit sur : Oui Non Vie professionnelle Vie conjugale Vie familiale Vie amicale/ relationnelle/loisirs/activités personnelles 60 Examens complémentaires déjà effectués en rapport avec le symptôme (type, date, résultat) type date résultat normal biologie imagerie Autres examens ECG, EEG,, holter … Médecins ou soignants déjà consultés pour ce problème Spécialité Avis résumé Spécialité Avis résumé Spécialité Avis résumé 61 anormal Au terme de l’entretien et de l’examen clinique décrire et localiser le plus précisément possible le ou les symptômes (description sémiologique fine) Avis personnel du médecin généraliste vis-à-vis de cette plainte (qu’est ce qui l’a orienté d’emblée vers une plainte médicalement inexpliquée ….) Qu’allez vous faire maintenant ? 62 Annexe 3 PLAINTES MEDICALEMENT INEXPLIQUEES (PMI) FICHE DES CONSULTATIONS DE LA JOURNEE ( à remplir au fur et à mesure des consultations) Nom du médecin : Date : Patient (mettre les 2 premières lettres du nom et du prénom) 1 _ _ / _ _ 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 heure Motif de consultation (uniquement pour les plaintes inexpliquées) Plaintes médicalement inexpliquées oui non 63 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 Nombre total de patients Nombre total Nombre total 64 Annexe 4 PLAINTES MEDICALEMENT INEXPLIQUEES Renseignements sur le médecin Nom : Prénom : Sexe : Age : Nombre d’années d’exercice (ou année d’études) : Lieu d’enseignement (faculté) : Type d’enseignement : Adresse du cabinet (ou lieu d’exercice) : Exercice en groupe Secteur conventionnel oui 1 non 2 65 RESUME Les symptômes médicalement inexpliqués sont fréquents en médecine générale. Cette étude épidémiologique réalisée auprès de médecins généralistes enseignants au cours de leur consultation ,a permis de déterminer les symptômes les plus fréquents et de mettre en évidence l’importance de la prise en charge globale des patients ayant des symptômes inexpliqués. Cette étude a en effet montré l’existence de facteurs favorisants, tel le sexe, la situation familiale, des évènements de vie traumatisants qui influenceraient l’apparition des symptômes inexpliqués mais aussi que le retentissement de ces symptômes inexpliqués sur la vie quotidienne était souvent sous- estimé. La mauvaise connaissance de ces symptômes entraine un diagnostic par exclusion et une prise en charge souvent inadaptée (prescriptions excessives d’actes médicaux et paramédicaux) plus par les étudiants que par les médecins. Il semble évident que l’enseignement des symptômes médicalement inexpliqués soit intégrer au programme des études médicales ainsi que celui de la prise en charge globale des patients. 66