La géochimie est actuellement une des plus - Lapadu

Transcription

La géochimie est actuellement une des plus - Lapadu
-1-
INTRODUCTION
________________
La géochimie est actuellement une des plus actives parmi les disciplines de la
géologie. Mais cette actualité, incontestable, n'empêche pas qu'il y a fort longtemps
que les géologues se sont préoccupés de géochimie. En effet, la première fois que ce
terme est apparu, officiellement, c'était en 1838, soit plus de 120 ans avant ce jour.
C'est Christian SCHOEBEIN qui en fut l'inventeur.
Il est vrai que sous ce terme, Ch. SCHOEBEIN recouvrait bien plus que la géochimie
de ce jour puisqu'il avait le désir - et l'ambition - de grouper dans cette discipline, outre
notre actuelle géochimie, la pétrographie et la minéralogie descriptive, et même la
stratigraphie.
Assez vite la géochimie a restreint son horizon assez démesuré, il faut l'avouer, à des
proportions plus modestes. Déjà, à la fin du XIXe Siècle, des savants comme J.
BERZELIUS, G. BISCHOF, J. ROTH, ramènent la géochimie vers ses buts présents.
Mais il faudra attendre le début du XXe Siècle pour que les géochimistes, au sens
strict du terme, fassent réellement apparition. Citons J. M. VOGT, W. C. BROGGER,
V. M. GOLDSCHMIDT, H.S. WASHIGTON et F. W. CLARKE. Ces deux derniers
pouvant être considérés comme les fondateurs en Amérique de cette science.
En Russie, également, V. V. VERNADSKY et A. E. FERSMAN devaient être les chefs
de file d'une école géochimique importante dont les travaux actuels font autorité.
-2-
C'est en 1935 que V, M. GOLDSCHMIDT a pu donner de la géochimie une définition
vraiment moderne et depuis lors, les buts de cette discipline n'ont guère évolués.
Pour cet auteur, la géochimie avait pour but essentiel, d'abord des mesures de
distribution des différents éléments chimiques dans les différentes zones de la terre,
dans ce qu'il a défini fort judicieusement comme les “différentes sphères
géochimiques”,
C'est
là
un
premier
travail
de
recherches
analytiques
et
d'accumulation d'archives, Travail fait à partir des matériaux naturels roches, minerais,
minéraux, recueillis à ces différents niveaux, donc dans ces “sphères géochimiques”.
Ensuite, la géochimie se propose d'établir des parentés possibles sur le plan de leurs
fréquences relatives dans la terre.
Enfin, et c'est là son but ultime, la géochimie se proposait d'énoncer les lois régissant
les proportions, fréquence et distribution de ces éléments.
Nous pouvons tout de suite dire que si le premier point de ce programme est, à
l'heure actuelle, en bonne voie de réalisation, et qu'ainsi on peut affirmer que nous
disposons d'archives qui commencent à être largement fournies, il n'en est pas de
même pour les deux points suivants, surtout pour ce qui e st des lois à dégager, Nous
sommes encore bien loin de savoir exactement, ou même généralement, à quelles
lois générales peuvent obéir les principes de la géochimie. Nous aurons l'occasion de
revenir largement sur ce point, dans ce qui va suivre.
-3-
METHODES DE LA GEOCHIMIE
_____________________________
Dans ce terme géochimie, il y a le préfixe géo qui indique les objets sur lesquels vont
s'exercer les études et recherches, et le mot chimie qui indique que l'on aura recours
à cette discipline pour ces mêmes recherches. Un géochimiste est donc à la fois un
géologue et un chimiste.
Les méthodes utilisées seront celles de ces deux disciplines. Méthodes géologiques,
surtout pétrographiques, pour l'examen des échantillons, leur détermination et leur
localisation, leurs conditions de gisement, le cadre tant stratigraphique que tectonique
dans lequel ils se trouvent; tout ceci nous rappelle que la géochimie s'exerce sur ces
matériaux de la terre et de ses différentes enveloppes. Avec plus ou moins de
bonheur car si certaines enveloppes sont facilement accessibles, d'autres le sont bien
moins et, en fait, il n'y a de géochimie un peu sûre que sur les enveloppes de notre
habitat, lithosphère ou écorce, hydrosphère, basse atmosphère, biosphère. Les autres
zones sont d'un accès bien plus malaisé, et leur connaissance, de ce chef, est bien
moins poussée. Pour certaines même, on est davantage sur le plan des hypothèses
que sur celui des certitudes.
Les méthodes chimiques seront celles qui présideront à l'étude des matériaux
recueillis et repérés. Et l'on peut dire que les méthodes de la géochimie étant c'elles
de la chimie, celle-ci a fait, dans ce domaine, les mêmes progrès que la chimie,
spécialement de la chimie analytique dont elle est une des modalités d'application.
C'est vers 1880 que la chimie analytique a commencé à fournir des résultats à peu
près constants, donc sûrs et utilisables, et c'est, en conséquence, à partir de cette
époque, que la géochimie a commencé à pouvoir disposer également d'analyses
utilisables.
-4Les méthodes ont d'abord été les méthodes classiques de la séparation analytique,
par voie humide principalement et celles-ci sont encore très largement utilisées. Il faut
ajouter que ces méthodes qui font amplement appel aux réactions par voie humide,
par ions entre autres, sont compliquées en géochimie par le fait qu'on s'adresse à des
matériaux qui sont, comme nous le verrons, largement silicatés ; les édifices silicatés
sont très énergiquement liés, Les disjoindre nécessite la mise en œuvre d'énergie
élevée et les attaques utilisées - fusion, alcali, mélange d'acides violents, etc. - font
appel à des moyens d'une grande énergie.
Mais d'autres méthodes analytiques ont vu le jour qui ont permis à la chimie
analytique d'atteindre à la fois plus de précision et une fidélité plus grande, Nous
allons très rapidement citer les plus importantes parmi celles -ci.
A/ La spectrophotométrie d'émission
Mise en évidence par BUNZEN à la fin du XIXe Siècle, cette méthode, sans cesse
perfectionnée, a connu un grand essor, Elle consiste essentiellement à mesurer
l'intensité d'une raie émise par un élément donné qui est excité par une haute
température, Dans ce cas, les éléments émettent une lumière complexe composée
par un certain nombre de radiations lumineuses qui s'échelonnent dans le visible ou
les domaines marginaux (infrarouge et ultra-violet surtout).
Cette méthode a d'abord une incontestable valeur dans une recherche qualitative et
bon nombre des éléments chimiques actuellement connus ont été ainsi décelés, mais
on a pu ensuite, en photométrant telle ou telle raie judicieusement choisie et en
comparant cette mesure à une mesure antérieurement faite sur des étalons, doser les
quantités de cet élément contenues dans un produit à analyser,
Cette
cas
méthode
des
a
roches
l'avantage
ou
d'une
minéraux
très
haute
principalement
sensibilité,
silicatés,
mais
dans
le
la fidélité est
médiocre car on est obligé d'effectuer des évaporations dans un arc électrique
avec électrodes de charbon - les silicates sont de très mauvais conducteurs ce qui multiplie les possibilités de variabilité dans les conditions expérimentales.
-5Par contre, certains éléments comme les alcalins et certains alcalino-terreux,
facilement excitables, émettent à température relativement basse, On peut utiliser un
dispositif d'aérosol dans une flamme à partir d'une solution, ce qui donne une garantie
bien plus grande de reproductibilité.
B/ La spectrométrie par absorption atomique
Bien plus récente, est promise à un fort brillant avenir, Dans la méthode précédente,
on photométrait les radiations émises par les atomes excités de l'élément considéré,
Ici, on mesure l'effet d'écran que les atomes de cet élément exercent sur une
émission stable calculée à l'avance, (Phénomène dit du renversement des raies). Or,
ce dernier effet, effet d'écran, est fonction des atomes non excités, Ces derniers
existent dans une proportion bien plus élevée, 9 fois plus que les atomes excités,
souvent davantage, L'effet mesuré est donc bien plus sensible, et est ainsi bien plus
fidèle. Dans le cas d'une analyse de silicates, on peut en effet passer par
l'intermédiaire d'une flamme de chalumeau dans laquelle la roche à analyser a été
pulvérisée sous forme d'aérosol Ce qui simplifie énormément les conditions
expérimentales.
C/ La photométrie par absorption colorée
Est très utilisée, Les éléments sont susceptibles de constituer des combinaisons
colorées, soit des anions ou cations, soit les combinaisons complexes minérales ou
organiques, L'intensité de la coloration est fonction de la concentration de la
combinaison colorée dans le milieu.
Il suffira donc de photométrer, à la longueur d'onde correspondante, une solution
inconnue et de la comparer avec des solutions étalons connues, photométrées dans
les mêmes conditions.
Cette méthode est peut-être un peu moins sensible que la précédente, mais elle est
remarquablement fidèle et son champ d'application, très vaste, en fait un procédé très
largement utilisé à l'heure présente.
-6D/ Méthodes diverses
Différentes méthodes peuvent être signalées qui font appel à certaines propriétés
particulières des ions ou des atomes, La méthode par magnétométrie mesure les
caractéristiques magnétiques de certains ions métalliques (Fe++ et Fe+++, Mn++,
Cr+++, Ni++, CO++, etc.).
Les méthodes polarographiques mesurent les potentiels électriques de certains ions.
Toutes ces propriétés qui varient avec la concentration du milieu sont susceptibles
d'être des méthodes d'analyses, Ce sont surtout des méthodes d'analyse de routine
pour un élément donné (métaux dans les alliages, métaux dans les minerais, etc.) que
des
méthodes
d'analyses
générales.
Mais
elles
donnent
des
résultats
remarquablement constants.
Certains atomes sont spontanément désintégrés, Ce sont les atomes à noyaux très
gros et très complexes, par là peu stables, et à forte masse atomique. Les produits
émis (rayonnements α, β et γ) peuvent être mesurés et par là, mesurée la quantité
d'atomes, donc de matière correspondante, On peut étendre la méthode à des noyaux
normalement stables en les irradiant eux-mêmes. C'est le cas du béryllium qui sous
l'action du cobalt radioactif émet à son tour, et c'est là une des méthodes utilisées
pour doser cet élément.
Le rayonnement X peut aussi être mis en œuvre. On utilise en fait le rayonnement
secondaire émis par tels éléments soumis à un rayonnement primaire, Dans ce cas,
ces éléments réémettent un rayonnement secondaire X, de plus grande longueur
d'onde, dont l'intensité est fonction de la quantité d'éléments intervenants, d'où une
mesure possible.
Un des dosages classiques de l'aluminium est réalisé selon ce procédé dit de
fluorescence X, car ce transfert de radiation est du même type que la fluorescence
lumineuse classique, transformant une émission ultra-violette, donc invisible, en une
émission secondaire, de longueur d'onde plus grande, donc visible.
-7On peut ajouter ici, dans ce relevé des méthodes possibles, la spectrométrie de
masse. Un spectromètre de masse mesure les masses séparées et recueillies sur une
cible disposée à l'avance et par là mesure la quantité correspondant aux masses
atomiques considérées, pour un produit donné. En fait, ce procédé très fin et très
sensible, est surtout utilisé en analyse isotopique c'est à dire, en analyse des
différents isotopes qui rentrent dans la constitution d'un élément chimique donné.
On doit enfin dire un mot d'une méthode, encore assez peu au point, sur le plan des
applications, mais dont le champ d'application peut paraître a priori immense ; il s'agit
de la résonance nucléaire magnétique.
Le principe, fort simple, est basé sur le fait que chaque noyau possède des
caractéristiques intrinsèques bien définies en particulier que soumis à un champ
magnétique de définition donnée, il peut rentrer en résonnance et par là, amplifier
l'intensité de ce champ à la manière d'une caisse de résonnance d'un instrument à
corde par exemple.
La mesure de ces pics d'amplitude dus à cet effet, pics dont la valeur est fonction du
nombre de noyaux qui entrent en jeu, donc quantitative, permet une mesure de la
quantité de matière existante. D'où une mesure possible.
Procédé d'une grande élégance et d'une perfection théorique tout à fait séduisante,
mais dont il faut dire qu'il se heurte actuellement à une mise au point très délicate.
Mais il est fort possible. sinon probable, que cette méthode une fois mise au point,
pourra être une des plus classiques et des plus parfaites parmi celles que la théorie
moderne met à la disposition des analystes chimistes.
-8-
VALEUR ET SIGNIFICATION DE L'ANALYSE EN GEOCHIMIE
________________________________________________________
Par ces méthodes, le chimiste, en analyse, peut atteindre une précision considérable.
Et par là, le géochimiste. On parle actuellement du ppm ou partie pour 1 million. Cette
unité utilisée très couramment en géochimie représente 1 g sur une tonne de prise
totale. 1 microgramme ou 1 γ pour 1 g de prise. On parle ainsi souvent, de façon un
peu abusive de γ pour exprimer des teneurs ; on sous-entend alors qu'il s'agit d'une
prise de 1 g à l'origine si bien que dans ce cas γ et ppm ont la même signification.
La précision est sans doute très importante, mais la fidélité des résultats l'est encore
plus car elle est la garantie d'une bonne reproductibilité, et par là permet ensuite au
pétrographe de faire d'utiles comparaisons en utilisant une série d'analyses. Il va sans
dire que pour que ces comparaisons aient une valeur, il est nécessaire que l'on ait
des résultats qui, dans chacune d'entre elles, soient comparables. C'est là la condition
première pour une recherche des lois et des règles qui règnent en géochimie.
La recherche d'une précision très aigue est souvent faite au prix d'un travail important,
donc coûteux et long. Elle est, en certains cas, fort utile, sans doute, mais il est aussi
d'autres cas où il est souhaitable plutôt que d'avoir un résultat très fouillé sur un cas
pétrographique d'en avoir toute une série, moins fouillés, sur un ensemble plus vaste,
ce qui permettra l'amorce de comparaisons fort intéressantes. Un laboratoire
d'analyses de roches ou de minerais doit être sans arrêt mené en tenant compte à la
fois de ces impératifs de précision et de rendement, qui sont souvent inconciliables les
uns avec les autres.
-9ELEMENTS MAJEURS ET ELEMENTS TRACES
____________________________________________
On dispose ainsi depuis plus de 75 ans d'analyses de roches. Quels sont les résultats
qui peuvent être tirés de ces analyses ?
On doit tout d'abord remarquer que l'on peut, au moins théoriquement, retrouver dans
les échantillons analysés les 92 éléments que la chimie traditionnelle nous enseigne
comme étant les constituants “élémentaires” de la terre sur laquelle nous vivons.
Mais une remarque s'impose : leur répartition est très inégale. Certains sont
largement représentés, d'autres le sont à l'état de traces. On a ainsi les éléments
majeurs et les éléments traces, ou encore oligoéléments.
Mais il ne faut pas oublier que cette répartition si inégale entre les 92 éléments
correspond en fait à l'ensemble des matériaux qui nous sont directement accessibles,
c'est à dire aux matériaux constitutifs de ce que nous appellerons dorénavant :
l'écorce terrestre.
Faute d'une meilleure définition, nous nous contenterons pour cette écorce terrestre
de la définition suivante : la partie la plus superficielle de notre planète, celle qui nous
est pratiquement directement accessible. Elle correspond en fait au 25.000 m.
comptés à partir de la cote moyenne de nos continents, soit qu'ils soient atteints de
façon active par nos travaux, tels les tranchées, les mines, les sondages . . ., soit que
les agents de la dynamique externe ou interne aient mis à jour des zones
correspondant à des niveaux normalement plus profonds. Si l'on veut bien se souvenir
que le rayon terrestre est de l'ordre de 6.400 km. - la valeur du grand axe de
l'ellipsoïde de référence étant 6378,38 m. - on voit que l'investigation sûre permise à
nos moyens classiques est de :
25
------------6400
ce qui est très faible.
1
=
--------------256
- 10 Le relevé des roches ou minerais de différentes natures ainsi rassemblés dans cette
zone corticale a permis d'établir une moyenne de composition de celle-ci. Voici les
résultats obtenus, en 1916 par F. W. CLARKE, en 1926 par W. M. GOLDSCHMlDT.
Les deux résultats sont, en fait, fort voisins.
I - (CLARKE)
II - (GOLDSCHMIDT)
____________
___________________
O
47,5
46,6
Si
28,8
27,7
Al
8,0
8,1
Fe
4,6
5,0
Ca
3, 5
3,6
Na
2,4
2,8
K
2,5
2,7
Mg
2,2
2,1
On a fait figurer ici que les éléments représentés à des teneurs supérieures à 1 %. En
effet, tous les éléments autres que les 8 ici représentés ne figurent dans cette
répartition à des teneurs supérieures à 1 %,. Ce sont les oligoéléments ou éléments
traces. Ces 8 éléments étant, en revanche, appelés les éléments majeurs.
On peut ainsi constater que près de 100 %, de la matière de l'écorce terrestre est
constituée à partir de 8 éléments chimiques sur 92 existants, et que trois d'entre eux :
0, Si, Al, constituent à eux seuls près de 84% de celle-ci ! D'une façon très brève,
mais non inexacte, on peut enfin définir l'écorce terrestre comme constituée par un
silico-aluminate.
La part de l'oxygène, en masse, est considérable. Elle est près de 50 %, de
l'ensemble. On doit constater, ce qui est très surprenant, a priori, qu'il y a davantage
d'oxygène dans la terre que nous foulons que dans l'atmosphère que nous respirons.
Cette dernière, en effet, n'en contient en moyenne que 20 %, en masse,
approximativement.
A côté de ces éléments, dits majeurs, existent les autres éléments à des teneurs
moyennes inférieures à 1 % : ce sont les éléments traces, ou oligo-éléments.
- 11 Trois éléments : Ti, P et Mn ont des teneurs comprises entre 1 et 0,1 %.
Une dizaine S, C, Cl, Rb, Sr, Ba, Zr, Cr, V, et Zn, entre 0, 1 et 0,01 % soit 1. 000 et
100 ppm.
Trois éléments Ni, Cu et Li, ont leur teneur moyenne comprise entre 100 et 50 ppm, 9
entre 50 et 10, soit dans l'ordre décroissant : Ce, N, Sn, Nd, Cb, Co, La, P, et Ga.
Ceci nous amène au total de 25 éléments traces dont la valeur moyenne des teneurs
varie entre 0,001 et 1,0 %.
Il reste finalement 59 éléments pour lesquels la représentation moyenne dans l'écorce
terrestre est inférieure à 0,001 %, soit 10 gr par tonne de Matériau considéré . . .
Signalons au passage les teneurs moyennes calculées respectivement pour l'or (Au)
et l'argent (Ag) :
Au = 0,005
soit 0, 005 gr par tonne
Ag = 0,10
soit 1/10 de gr par tonne.
Les métaux qui font l'essentiel de notre actuelle civilisation, autres que le fer et
l'aluminium, tels le cuivre, le zinc, le plomb, le nickel, le chrome, l'argent, etc. sont, on
le voit, à des teneurs moyennes très basses. Il est hors de doute que si des
circonstances tant physiques que chimiques particulières n'étaient pas intervenues
pour fabriquer ces roches tout à fait exceptionnelles, en fait, des monstres, que sont
les minerais constituant, les éléments pétrographiques des gîtes métallifères, il nous
aurait été bien difficile de nous les procurer de façon aussi courante que nous le
faisons maintenant. Cette constatation devrait être toujours présente à l'esprit, toutes
les fois que l'on traite de géologie appliquée aux mines.
- 12 -
DISTRIBUTION DES ELEMENTS DANS L'ENSEMBLE DE LA TERRE
_______________________________________________________________
En fait, cette composition moyenne est celle de l'écorce terrestre, mais non
nécessairement celle de l'ensemble de la terre. Et nous avons toutes sortes de
raisons indirectes de penser que la constitution de l'ensemble des différentes zones
du globe terrestre doit varier, soit sur le plan de l'état physique, soit dans le domaine
des constituants chimiques, soit même sur l'un ou l'autre de ces deux plans.
Une première constatation s'impose à nous. Nous connaissons bien, grâce à la
géodésie, le volume du globe terrestre, nous savons, grâce aux considérations liées à
différentes conditions d'attraction auxquelles est assujettie la terre, la masse de notre
planète. Pour ces deux éléments on trouve en effet :
V
= 1,083.1027 cm3
M
= 5,977.1027 g.
On trouve donc comme masse spécifique moyenne de la terre, soit
M
---- = 5,517 g/cm3
V
Or, la masse spécifique moyenne des différentes roches rencontrées sur l'écorce
terrestre correspond à 2,705 g/cm3.
Il s'ensuit que l'on est obligé d'admettre une différence de nature soit physique, soit
chimique, dans les matériaux internes.
Nous reviendrons sur ce point fort important en traitant, ci-après, des hypothèses qui
ont pu être faites sur la nature et la composition des différentes enveloppes qui
constituent l'ensemble de notre globe terrestre.
- 13 -
LES ENVELOPPES DU GLOBE TERRESTRE
_________________________________________
La géophysique, science qui traite de tous les phénomènes physiques qui ont pour
siège le globe terrestre en tant que tels, vient nous apporter des renseignements fort
intéressants sur cette question. Sans entrer dans les détails de ceux-ci, nous nous
contenterons de noter les faits suivants :
Les séismes qui sont des phénomènes quasi constants au sein de la terre sont
générateurs d'ondes qui se propagent soit superficiellement, soit en traversant la
sphère terrestre. Elles peuvent ainsi être reçues, enregistrées et analysées en
différentes stations du globe équipées à cet effet, ce qui a pour premier but, par
recoupement, de localiser le lieu d'où ce séisme est parti. Mais d'autre part, ces ondes
renseignent fort bien sur l'état, sur le plan mécanique, du milieu traversé, soit un
secteur plus ou moins important du globe selon l'éloignement respectif du point de
naissance du séisme et du point où se trouve située la station d'observation. Les
conditions de propagation, vitesse, etc. étant liées à l'état physique du milieu traversé.
Or, on montre ainsi que la terre est découpée en couronnes sphériques concentriques
séparées par des surfaces de discontinuité très nettes. Classiquement, on peut
imaginer, dans son ensemble, les enveloppes concentriques successives.
Une zone corticale, l'écorce terrestre, très pelliculaire, dont l'épaisseur totale serait de
60 km. Elle-même se découpant en deux parties, une externe de 20 km, une interne
de 40 km.
Une zone médiane, le manteau, d'une puissance comprise entre 2.500 et 3.000 km.
- 14 Une zone interne, le noyau, de 3.400 à 3. 500 km de puissance.
A ces trois grandes enveloppes internes de la terre, on doit ajouter une enveloppe
extérieure, l'atmosphère. Celle-ci qui commence à être spécialement bien connue
peut elle-même se subdiviser en parties suivantes :
La partie basse ou Troposphère, en contact avec l'écorce terrestre. Sa puissance,
variable selon la latitude, oscille de 6 (pôles) à 17 km. (Equateur). Rappelons que la
constitution de cette Troposphère est la suivante :
- N : 18 % - O : 21 % - A : 0,9 %
- Gaz rares (Ne, He, Xe, Kr) et CO2, H20, H, à l'état de traces 0,1 %
La Stratosphère lui succède qui s'étend jusqu'à 50 km.
Au-delà de 50 km, on entre dans la Mésosphère qui s'étend jusqu'à 85 km.
Ces trois zones où se trouvent associés à des teneurs absolues décroissantes, mais
relatives constantes, N et O, groupées sous le nom d'Homosphère.
Au-delà s'étend l'Hétérosphère, subdivisée en Thermosphère où, contrairement à
l'Homosphère, la température est très élevée (1000°), et une Exosphère, mal connue,
ou déjà les caractéristiques de l'espace interstellaire se manifestent.
Au contact de cette atmosphère s. l. gazeuse et de l'écorce terrestre, solide, s'étend
une couche mince et discontinue, riche en eau, dont les océans sont les
représentants les plus typiques. C'est l'Hydrosphère. Cette hydrosphère est le siège
actif des actions de la dynamique interne étudiées en géologie, et où se manifestent
les phénomènes dits actuels, érosion, transport, sédimentation. Elle est aussi le
support nécessaire de la matière vivante, en masse négligeable, mais dont l'activité,
même sur le plan géochimique, peut être considérable. Aussi a-t-on souvent parlé
d'une Biosphère, terme qui sera conservé plus tard, car dans l'étude des cycles
géochimiques des éléments, cette biosphère a son rôle à jouer, rôle souvent
important.
- 15 Tel est, finalement, le schéma qui est proposé pour une tentative d'explication de la
constitution de l'écorce terrestre. D'autres variantes ont pu être proposées. Elles sont,
soit très voisines de celle-ci, soit basées sur des conceptions totalement différentes
qui sont loin d'être universellement admises, telles celles avancées par W. KUHN et
A. RITTMANN en 1941, conceptions selon lesquelles le centre de la terre serait
composé d'un matériel du type solaire indifférencié.
Pour ce qui est de la nature réelle des zones internes du globe terrestre (manteau et
noyau), aucune indication directe ne peut être donnée, mais on peut, indirectement,
sien faire une image, ceci grâce aux renseignements apportés par les météorites.
Les météorites sont, rappelons-le ici, des corps extra terrestres qui sont attirés sur la
terre lorsqu'elles se trouvent placées dans son aire d'attraction. En fait, bien peu de
ces corps atteignent la surface de notre globe car ils ont à traverser toute
l'atmosphère. Or, en raison de leur vitesse de chute, le frottement sur les éléments
gazeux de cette atmosphère les porte très vite à une température élevée, si bien que
peu d'entre eux atteignent le sol. Mais au moins sous forme de poussière, cette chute
de matière n'est pas négligeable, il s'en faut, et sur ces corps planétaires appauvris en
atmosphère ou même privés de celle-ci, les chutes incessantes constituent un
phénomène géomorphologique important, et tel est le cas de la lune.
On classe les météorites en 3 types selon leur constitution :
A/
Les Sidérites, à peu près exclusivement métalliques, avec environ 98 %
de Fe lié à Ni et Co.
B/
Les Lithosidérites, où l'on rencontre une constitution qui rappelle celle de
nos péridots, tels les olivines, de formule :
(Si O4) (Fe. Mg)2
C/
Les
Aérolithes,
encore
appelées
météorites
pierreuses,
dont
la
constitution et la masse spécifique rappelle de façon très remarquable
celle des silicates classiques de l'écorce terrestre.
- 16 -
S'il est admis, comme il semble légitime de le faire, que l'origine de ces corps extra
terrestres serait due aux restes d'une ancienne planète satellite du soleil et proche de
la terre, ou plus généralement, serait le modèle de la constitution matérielle d'une
planète, on voit que les aérolithes proviendraient d'une zone corticale, les
lithosidérites, d'une zone analogue au manteau, et les sidérites d'une zone nucléaire.
De là, l'assimilation du manteau et du noyau à des zones de constitution de
péridotites et d'alliages métalliques. Les masses spécifiques correspondantes, soit,
sensiblement, 3,6 d'une part, et 8 à 10 d'autre part, rendraient également facilement
compte de la différence observée entra la masse moyenne 5,52 et celle calculée pour
l'écorce terrestre, soit 2,70.
On a également une confirmation possible de cette hypothèse dans le fait suivant.
Certains basaltes, dans les coulées observées, contiennent des enclaves constituées
par une roche en péridot-olivine. Ce sont les basaltes à nodules d'olivine. On explique
ce fait de la manière suivante les basaltes, d'origine très profonde, de la base de
l'écorce terrestre, auraient arraché et entrainé lors de leur ascension vers la surface,
des éléments de la zone du manteau avec lequel ils auraient été en contact. Ainsi ces
nodules d'olivine seraient bien les témoins de ce manteau véhiculés au jour par le fait
de l'éruption de ces magmas basaltiques.
L'écorce terrestre elle-même, soit les premiers km, serait séparée en deux couches,
une couche superficielle de 20 km de puissance où le type moyen des roches
représentées correspondrait au granite, une couche profonde de 40 km, à
composition basaltique.
- 17 LA TERRE DANS L'ENSEMBLE DES CORPS CELESTES
____________________________________________________
On sait maintenant que la terre appartient, avec 8 autres corps, au système des
planètes satellites du soleil. Les diamètres, d, et distance au soleil, l, de celles-ci sont
données dans le tableau suivant, en se rappelant que l'on a pris pour unité soit 1, le
propre diamètre de la terre, soit 12.742 km et la distance de la terre au soleil
149.675.000 km, ou 150 millions de km, plus généralement,
d
l
______
_____
Mercure
0,39
0,39
Vénus
0,97
0,72
Terre
1,00
1,00
Mars
0,53
1,50
Jupiter
10,97
5,00
Saturne
9,03
9,45
Uranus
4,00
19,5
Neptune
3,50
30
Pluton
1,0
39,5
Les planètes peuvent posséder elles-mêmes des satellites, telle la lune, satellite de la
terre, isolés ou groupés en amas (anneau de saturne),
Enfin, circule également dans une zone donnée, une poussière de petites planètes et
des débris de toutes tailles dont la chute due à l'attraction des grandes planètes,
comme c'est le cas de la terre, provoque ce phénomène des météorites.
Or, si les planètes ont à peu près à coup sûr une constitution qui est, sinon identique,
du moins comparable à celle de la terre, il n'en est pas du tout de même pour l'astre
- 18 dont dépend tout cet ensemble, le soleil.
Ce dernier est une étoile, c'est à dire une masse composée beaucoup plus
simplement que les planètes, sauf dans le cas d'étoiles ayant subi une évolution très
poussée, donc d'un âge déjà avancé. Le Soleil, étoile jeune, est formé de 90 % de H,
8 %, de He, 1 % de C, N, O, et 1 % de métaux tel Fe, etc. C'est une constitution tout à
fait différente de celle des planètes.
Une étoile comme le soleil est le siège d'un cycle de réaction nucléaire de fusion
déterminé par R, ALKlNSON et F. HOUTERMANS et codifié par H. BETHE. Sous une
température supérieure à 3.000.000° et en présence de traces d'éléments légers tels
C. N. O., H se fusionne en donnant de l'hélium et en perdant une certaine masse,
cette perte de masse se transformant en énergie selon l'équation classique E = mc2 .
La température extérieure du soleil est de 6.000° environ, mais croît très vite dès que
l'on atteint les zones internes. On doit arriver vers l'intérieur aux alentours de
20,000.000°. Cette température qui témoigne d'un très haut niveau d'énergie est
indispensable pour maintenir la stabilité du soleil qui sans cela s'écroulerait sous son
propre champ de pesanteur, et est responsable des émissions de radiations émises
par cet astre, infrarouges, lumière visible, ultra-violets, rayons X mous, puis durs,
rayons γ, rayons cosmiques ?
Heureusement pour nous, l'atmosphère terrestre arrête tout ce qui est de plus courte
longueur d'onde que le très proche ultra-violet, si bien que l'effet hautement nocif de
ces derniers est pratiquement aboli sur la terre.
Il peut arriver que le niveau d'énergie de l'intérieur de l'étoile augmente, l'astre
alors se dilatera, géante rouge et super-géante, il peut diminuer (super-géante
écroulée). L'écroulement d'une super-géante par baisse occasionnelle du niveau
d'énergie interne entraîne des condensations de matière souvent considérables
qui relèvent alors spectaculairement la température. Ce nouvel état fait repartir
de
nouvelles
réactions
de
fusion
qui,
elles,
aboutissent
à
des
noyaux
correspondant à des éléments chimiques moyens ou lourds, précisément ceux
trouvés dans les planètes et sur la terre (naine blanche, novae et supernovae).
C'est sans doute à partir de processus de ce genre, se terminant quelquefois
par un événement catastrophique explosif, que se sont élaborées les matières dont
- 19 les planètes sont constituées. Certains auteurs, tel Fd. HOYLE, vont jusqu'à imaginer
que le cortège planétaire du soleil serait le résidu d'un ancien compagnon du soleil étoile double, à l'origine, dans cette hypothèse - dont l'évolution aurait été ultraaccélérée et qui, dans un stade catastrophique final de supernovae, aurait terminé sa
carrière dans une gigantesque explosion.
Les géophysiciens, comme les géologues, admettent que la terre a un âge voisin de
4,5 milliards d'années. Si l'on considère, ce qui semble logique, que les autres corps
planétaires ont pu naître au même moment, on peut placer cette explosion, dans ce
cas, à cette période.
Ainsi, les planètes ont un schéma de constitution chimique fondamentalement
différent de celui des systèmes d'étoiles, et beaucoup plus complet; schéma de
constitution exceptionnelle et, si l'on considère la masse relative des planètes - du
système solaire ou des autres systèmes dans l'ensemble céleste - et des étoiles,
d'importance nulle ou très négligeable-. La grande masse du monde, c'est de
l'hydrogène, et de l'hélium, en fait.
Sur le plan physique, l'état de la matière, au niveau des planètes est également tout à
fait spécial. Les trois états de la nature - fluides (gazeux et liquides) et solides - sont
très peu répandus. Hors des planètes, c'est un état très particulier - à nos yeux - mais
très général en l'absolu, qui semble la règle, l'état plasmatique ; association d'atomes
- ou d'ions - portée à une très haute température et par là susceptible de réactions
tout à fait inhabituelles sur la terre - des réactions de fusion au niveau des noyaux
d'éléments très légers.
Pour nous, humains, la terre nous parait tout à fait normale et familière, mais dans le
cadre du monde, c'est un milieu tout à fait exceptionnel.
- 20 -
LES ELEMENTS DE L'ECORCE TERRESTRE - DISTRIBUTION ET AFFINITES
_______________________________________________________________________
L'écorce terrestre est donc constituée par 8 éléments majeurs dont la teneur se trouve
présente à plus de 1 % dans une constitution moyenne, et dont les 84 autres sont
présents à des teneurs inférieures à 1 %, et qui s'échelonnent pratiquement entre
1.000 et 0,01 ppm. Mais par ailleurs, ce que nous savons des teneurs de l'atmosphère
en les différents éléments chimiques, ce que nous pouvons supposer assez
indirectement des éléments constitutifs du manteau ou du noyau, montre que la
répartition des éléments chimiques est assez différente selon l'enveloppe terrestre à
laquelle on s'adresse, et peut même varier au sein de celle-ci.
La haute stratosphère doit être assez différente de notre troposphère et la partie
profonde de l'écorce terrestre, à affinité basaltique, est probablement assez différente
de la partie superficielle, à tendance granitique.
Si bien que l'on doit admettre que les éléments chimiques se trouvent groupés dans
les différentes zones en groupes chimiques assez bien caractérisés, témoignant ainsi
une certaine spécificité de ces groupes d'affinité chimique,
Un classement géochimique
des éléments
a
été
tenté
et
en
1937,
V.
M. GOLDSCHMIDT a mis sur pied une classification, considérée comme l'une des
plus classiques, et la plus généralement admise en géologie ou géochi.ie. C'est cette
classification que l'on adoptera, compte tenu des retouches ou plutôt des
compléments qui ont pu y être apportés ultérieurement.
Selon cet auteur, trois classes étaient établies, soit les éléments dits sidérophiles,
chalcophiles et lithophiles. A ces trois classes ont été adjointes deux autres classes
- 21 -
groupant les éléments biophiles et ammophiles. Soit au total 5 classes pour les
éléments constitutifs de l'écorce terrestre, extensibles sans doute à l'ensemble du
globe.
L'examen des éléments qui rentrent dans ces cinq classes montre que certains de
ceux-ci sont typiques de la classe à laquelle ils appartiennent et dont ils sont ainsi tout
à fait caractéristiques. Mais d'autres sont moins nettement cantonnés et peuvent
participer, surtout par leur cycle d'évolution à plusieurs classes. Ils sont donc
beaucoup moins caractéristiques.
A/ Les éléments sidérophiles
Ces éléments sont d'abord des métaux à affinité moyenne ou faible pour l'oxygène, et
peu marquée pour le soufre ou ses compagnons. Ce seront donc fer, cobalt, nickel,
platine et métaux voisins dits de la mine du platine. Or, molybdène, étain et wolfram
sont aussi, au moins en grande partie, des éléments sidérophiles. Le phosphore et le
carbone sont enfin, à leur origine, fondamentalement sidérophiles. Ces éléments
seraient, pour certains d'entre eux, les éléments du noyau de l'écorce terrestre.
B/ Les éléments chalcophiles
Un élément chalcophile est caractérisé par son affinité pour le soufre et les éléments
voisins, arsenic, antimoine, bismuth, sélénium et tellure. Ces éléments sont donc, par
essence même, chalcophiles,
Les métaux tels le cuivre, le zinc, l'argent, le plomb, le mercure, le cadmium, sont les
principaux parmi les représentants de ce groupe. Le manganèse également semble-til.
Mais à côté de ceux-ci, qui sont les vrais représentants, on peut signaler comme
pouvant également montrer quelques affinités pour ce groupe, le fer et le molybdène
qui sont pourtant des sidérophiles typiques par ailleurs.
- 22 C/ Les éléments lithophiles
Ce sont aussi les éléments oxyphiles, en raison de leur forte affinité pour l'oxygène
qui naturellement, sera lui aussi, de son côté, l'élément le plus caractéristique de ce
groupe.
On y notera, à côté du silicium et de l'aluminium, les métaux alcalins, les métaux
alcalino-terreux et les terres rares. Comme autres éléments on doit signaler
l'ensemble des halogènes.
A titre d'éléments appartenant plus particulièrement à d'autres groupes, Mais dont
l'importance dans ce groupe peut être assez notable, on doit remarquer le wolfram et
l'étain, ainsi également que le Manganèse.
Le titane et le zirconium, ainsi que le chrome, sont placés le plus souvent dans ce
groupe, encore que pour ce dernier élément on puisse se poser la question d'un
groupement avec les éléments sidérophiles, aux réactions classiques desquels il
participe volontiers.
Enfin, on classe maintenant dans la zone corticale, donc avec les éléments lithophiles,
l'uranium et le thorium ainsi qu'une partie de leur descendance naturelle.
D/ Les éléments biophiles
.
Ce sont les éléments constitutifs de la matière vivante ou participant activement ou
passivement au cycle de cette dernière. Ainsi donc, seront représentés azote,
carbone, oxygène et hydrogène, associés au phosphore et au soufre. Le chlore joue
aussi un rôle notable. Parmi les métaux, sodium, potassium et calcium sont
prépondérants. Fer et magnésium jouent aussi un rôle notable.
E/ Les éléments atmophiles
Ce sont les éléments de l'enveloppe gazeuse qui entoure la terre. Soit finalement
azote, oxygène, gaz rares, hydrogène et carbone.
- 23 Les tableaux joints par ailleurs rassemblent l'ensemble des données acquises sur les
éléments géochimiques et leurs classements divers.
Cette classification, mise au point par V. M. GOLDSCHMIDT, a pu être établie à la
suite de l'observation des phénomènes pratiquement réalisés lors du traitement
métallurgique du minerais extrait du gîte de Mansfield, dans le Harz, en Allemagne.
C'est un gros gisement, typiquement de cuivre, à tonnage notable puisque ses
réserves sont évaluées à 50.000.000 T. de minerais, dont 1 à 2.000.000 de T. sont à
teneurs actuellement intéressantes, soit 2 à 3% de Cu.
Le gîte, sédimentaire, appartient au Permien Supérieur qui forme la couverture du
massif hercynien du Harz sur son rebord sud-est. La coupe de ce Permien Supérieur
ou Zechstein est la suivante :
Sup. Dépôts salifères - sel gemme, sel de potasse, anhydrite,
emballés dans 500 m. d'argiles.
Moy. Schistes (40 m.) avec bancs discontinus d'anhydrite et de
sel gemme.
lnf.
Grès dit du Weissliegende - 1m.
Kupferschieffer - 0,4 à1 m.
Calcaire de base - 5 m.
Les Kupferschieffer ou niveaux à cuivre sont des schistes riches en débris organiques
animaux ou végétaux, témoignant d'un faciès très littoral Les minéraux sont
principalement la bornite et la chalcosine. On trouve les éléments suivants : Cu, Ag, et
Fe, et plus accessoirement : Ni, Co, Se, Mo et V. On a beaucoup discuté de l'origine
(métasomatique ou purement sédimentaire ?) de ce gîte. Une première opération,
effectuée à partir du minerais préalablement enrichi par voie purement mécanique,
donne deux fractions nettement distinctes un laitier d'une part, et un concentré
métallique d'autre part.
Le concentré métallique est repris à son tour et une deuxième opération
métallurgique aboutit à scinder celui-ci en deux éléments : d'une part une fonte,
- 24 d'autre part une matte cuprifère, Par deux opérations successives se sont ainsi
individualisées 3 fractions :
Dans le laitier est concentré l'ensemble des éléments suivants issus
principalement de la gangue, soit : Si, Al, Ca, Mg, en combinaisons fortement
oxygénées, donc avec O.
La matte cuprifère recueille le Cu, le S. les traces d'Ag, de Pb et de Zn,
contenues par ailleurs et une petite fraction de Fe entrainée avec le Cu.
La fonte recueille la quasi totalité du Fe et, avec lui, les traces de Mo, Ni, et Co
qui sont liées. Un peu de C est aussi associé.
Voir une telle répartition ainsi réalisée expérimentalement dans cet exemple appliqué
est un bon modèle d'une répartition plus générale des éléments, répartition qu'il est
plausible d'admettre dans les diverses profondeurs à partir de l'écorce terrestre.
- 25 -
CAUSES DES REPARTITIONS GEOCHIMIQUES
_____________________________________________
Cette répartition est-elle purement fortuite ? Il ne le semble pas et un certain nombre
de schémas explicatifs ont été avancés pour tenter d'expliquer les raisons de cette
répartition.
Très vite a été admis le fait que les masses atomiques des éléments devaient
intervenir. Les éléments chalcophiles et a fortiori sidérophiles devant correspondre
aux éléments à masse atomique élevée. Les éléments lithophiles et atmophiles (et
naturellement biophiles), aux éléments à faible masse atomique.
En fait, cette première proposition, sans être totalement inexacte était loin d'être
parfaitement satisfaisante. On sait maintenant qu'un classement périodique des
éléments en fonction de leur numéro atomique est possible. En utilisant un tel tableau,
dérivant toujours plus ou moins directement des principes de classification proposés
par D. MENDELEEV, il peut être possible de voir un peu mieux comment
géochimiquement les éléments chimiques se classaient.
Un tel tableau, où ont été soulignés les plus marquants parmi les éléments
chalcophiles ou sidérophiles, montre que les éléments lithophiles, au sens large du
terme, ont à la fois une masse atomique faible, mais en même temps un groupement
dans les périodes proches du groupe des éléments dits gaz neutres ou rares.
Les sidérophiles sont, au contraire, groupés au sein des colonnes extrêmes du
tableau, les chalcophiles se placent en position intermédiaire.
- 26 Ainsi peuvent être mises en évidence d'étroites relations entre les propriétés
chimiques fondamentales des éléments - que reflètent leur groupement en colonnes
dans une classification périodique, et leurs affinités réciproques sur le plan
géochimique - qui se traduit par les différentes classes définies par GOLDSCHMIDT
et ses successeurs.
Dans le domaine géochimique, la classification périodique de MENDELEEV est
précieuse, autant qu'en chimie traditionnelle. Et c'est la raison pour laquelle c'est sur
la base de cette classification que nous allons nous référer pour l'étude des éléments
sur le plan géochimique.
Mais si les caractéristiques chimiques sont importantes, elles n'excluent pas pour
autant l'importance d'autres facteurs. Et ceux-ci vont également intervenir, à divers
titres, pour expliquer les affinités géochimiques des éléments.
Dans ce cas va intervenir plus précisément le facteur dimensionnel. Les dimensions
propres des atomes, surtout des ions dérivant de ces atomes, ont ainsi une
importance capitale. Géochimiquement parlant, au moins dans le domaine de l'écorce
terrestre dont nous connaissons assez bien les caractéristiques physiques, les
éléments chimiques sont groupés, associés et combinés. Nous avons le plus
généralement affaire à des composés chimiques, avec des liaisons entre les différents
éléments les constituant.
Il convient donc maintenant, avant d'expliquer comment peuvent naître ces affinités
géochimiques, d'examiner très rapidement quels sont les principaux types de liaisons
qui peuvent se présenter dans les différents composés chimiques.
- 27 APERCU SUR LES LIAISONS DANS LES COMPOSES CHIMIQUES
_____________________________________________________________
Une combinaison chimique, plus généralement les espèces chimiques définies sont,
autant qu'une formule chimique, un édifice.
Les atomes des différents éléments qui la constituent sont associés les uns aux
autres plus ou moins solidement, selon certaines règles qui régissent les dispositions
spatiales réciproques. On les représente volontiers comme occupant une place
donnée, situés à des distances relatives assez strictement définis par rapport à leurs
voisins. De là les modèles figuratifs des différents types d'espèces chimiques et
minéralogiques qui ont été proposés et établis.
Si bien que la question se pose de la nature des forces de liaison qui peuvent exister
entre ces différents éléments, forces de liaison qui donnent à cet édifice sa structure
et sa stabilité.
Quatre modes de liaison possibles des atomes dans un édifice de ce type ont pu être
mis en évidence. En fait, le premier mode est de beaucoup le plus répandu et c'est
celui que nous rencontrerons pratiquement lorsque, en géochimie, on considérera,
dans le domaine de l'écorce terrestre, les roches, les minerais; en fait les minéraux
qui les constituent. Aussi nous étendrons-nous surtout sur cette première force de
liaison et passerons-nous beaucoup plus rapidement sur les suivantes.
Ces types de liaison sont :
La liaison ionique ou hétéropolaire
La liaison homopolaire
La liaison métallique
La liaison de Van der Waals.
- 28 A/ La liaison ionique ou hétéropolaire
Chaque atome, selon le modèle classique, est constitué par un noyau, de structure
plus ou moins complexe, et où se trouve concentrée la majeure partie de la masse de
cet atome, et de particules périphériques disposées en couches périphériques, les
électrons. Ces derniers sont chargés négativement. Leur nombre, variable pour
chaque atome, correspond à la charge excédentaire positive du noyau, très
solidement uni - en principe tout au moins - Ce nombre correspond au numéro
atomique, précisément, et le classement de MENDELEEV est justement établi sur la
succession des éléments selon ce numéro atomique.
Ainsi, l'atome Na possède 11 électrons périphériques, en 3 couches de 2 + 8 + 1
électrons concentriques ; Mg possède 12 électrons, soit 2 + 8 + 2; le chlore (Cl), 17,
soit 2 + 8 + 7 ; l'oxygène (O), 8, soit 2 + 6, etc.
Ces atomes peuvent perdre ou acquérir des électrons supplémentaires, généralement
de façon à réaliser des couches complètes; pour ce qui est des quatre éléments cidessus, Na va en perdre 1 et avoir ainsi 2 + 8 ; Mg va en perdre 2 pour donner
également 1 + 8 ; Cl en acquérir 1 pour arriver à 2 + 8 + 8 ; O, 2, et donner ainsi 2 + 8.
Mais les charges totales, sur le plan électrique, seront différentes. Perdre des
électrons, c'est acquérir des charges positives qui ne sont plus équilibrées C'est le cas
de Na qui devient (Na)+, Mg qui devient (Mg)++. Acquérir des électrons, c'est se
charger négativement ; cas de Cl qui devient (CI)-, de O qui devient (O)-(NA)+, (Mg)++, (Cl)-, (O)-- sont des ions positifs ou négatifs selon le cas.
De tels ions chargés électriquement vont pouvoir s'attirer ou se repousser selon l'état
de leur charge. Les ions de charge opposée, de signes contraires, vont s'associer,
obéissant aux lois d'attraction propres à leurs caractéristiques électrostatiques, mais
cette attirance a une limite.
- 29 En effet, arrivés à une certaine distance, les nuages électroniques négatifs qui les
entourent vont avoir un effet, sur le plan local, supérieur à l'effet de la charge globale.
Et lorsque ces deux effets, attraction globale et répulsion locale s'équilibreront, les 2
ions se stabiliseront autour d'une position relative moyenne stable. Ainsi l'action
réciproque de ces deux effets pourra définir une distance moyenne, minimum pour
deux types donnés d'ions associés. Ceci est important, et nous allons voir que de
cette disposition va pouvoir découler la notion, très importante en géochimie - et
ailleurs aussi - de dimension ionique.
On appelle cette liaison, liaison ionique ou hétéropolaire parce qu'elle s'effectue par le
jeu d'ions de nature nécessairement différente. C'est dans les composés banaux de la
chimie minérale, le mode de liaison le plus habituel. En particulier c'est celui qui régit
l'édifice de ces entités minéralogiques, les minéraux, éléments fondamentaux des
roches et des minerais, donc de l'écorce terrestre.
B/ La liaison homopolaire
C'est un mode de liaison qui régit toute une catégorie de corps, en particulier
beaucoup de complexes. Les composés de la chimie organique relèvent en particulier
de ce type de liaison.
Dans ce mode de liaison, les atomes de même nature, par exemple C, qui ont une
couche externe non saturée, mettent en orbite commune les électrons de cette
dernière couche si bien qu'ils tendent à réaliser des couches saturées par mise en
commun de leurs électrons périphériques. Ainsi le diamant est un édifice où chaque
atome de C s'associe à ses quatre voisins pour lui emprunter - et lui faire partager
réciproquement un électron et ainsi, l'équipement électrique de C, qui est de 2 + 4,
devient 2 + (4 + 4) = 2 + 8 et se complète ainsi.
Ce mode de liaison est moins énergique que le précédent et les corps résistent mal,
en général, à l'agitation thermique qui perturbe cet édifice assez laborieusement
établi. Le domaine de stabilité des complexes - des composés organiques en
particulier - est habituellement vite dépassé lorsque la température augmente.
- 30 C/ La liaison métallique
C'est celle que l'on trouve dans les métaux à l'état de pureté ou en alliage. Dans ce
type de liaison, on est en présence d'atomes dont la dernière couche électronique,
non saturée, est dispersée, l'atome étant ainsi épluché de son équipement
périphérique et se trouvant de ce fait assez fortement chargé, positivement. Mais les
électrons ainsi libérés constituent un nuage de charges négatives, le gaz électronique
qui stabilise et cimente des atomes électropositifs. Les “ions” métalliques positifs
s'agencent entre eux pour constituer un assemblage par empilement, généralement
très compact, qui explique les qualités mécaniques souvent remarquables des métaux
et des alliages. En outre, le gaz électronique est très favorable aux échanges
thermiques et aux transferts de charges électriques, d'où les propriétés conductrices
que l'on connait bien chez ces corps et que l'on utilise largement sur le plan pratique.
D/ La liaison de Van der Waals
Ce sont les liaisons de ce genre qui unissent entre elles de grosses moléculaires
généralement dipolaires. Ces molécules de grande taille sont naturellement
équilibrées sur le plan des charges lorsque l'on considère leur totalité, mais les
différentes zones qui les constituent peuvent localement présenter des déficits ou des
excédents. Si bien que chaque molécule se comporte en définitive tel un petit aimant,
et des forces de liaison peuvent ainsi être réalisés, qui aboutissent à des chaînes, des
anneaux, etc.
On montre que ces forces de liaison sont en général faibles par rapport aux forces
hétéro ou même homo polaires. Et c'est surtout dans les chaînes que constituent
certaines macromolécules complexes que de telles forces se manifestent. (C'est la
force classique qui intervient lors des polymérisations par exemple). En chimie
minérale, leur importance est toujours très faible, sinon nulle.
En définitive, en géochimie, spécialement dans le domaine de l'écorce terrestre où
sont représentés fondamentalement les édifices cristallins que sont les espèces
minérales, ce sont les forces de liaisons hétéropolaires ou ioniques qui sont la règle.
Et ce sont à celles -ci que pratiquement nous aurons affaire.
-31RAYONS ATOMIQUES ET RAYONS IONIQUES
____________________________________________
Dans le cadre, peut-être effectivement conforme à la réalité, peut-être simplement
figuratif, du modèle qui nous a servi à représenter l'atome, avec son cortège
d'électrons, nous devons nécessairement admettre que tout ceci a une certaine
dimension.
Certaines considérations nous permettent effectivement de calculer les dimensions
qui correspondraient à de tels modèles pour les différents éléments chimiques. L'unité
de mesure adoptée étant très classiquement l'angström - cette unité de longueur
équivaut à 10-7mm; soit le 1/10.000.000 du mm - C'est l'unité habituelle des
minéralogistes lorsqu'ils établissent les coordonnées spatiales des édifices cristallins.
Je rappellerai à titre de comparaison, que les longueurs du spectre visibles
s'échelonnent entre 3.900 angströms (en abréviation Å) pour la limite du violet visible
et 8.000 Å pour le rouge. Les rayons X ont une longueur d'onde comprise entre 0,2 et
15 à 20 Å.
Les atomes se transforment en ions lorsqu'ils perdent (ions positifs) ou acquièrent
(ions négatifs) des électrons qui complètent leur couche extérieure électronique. Dans
ce cas ils ont une “zone d'influence” en quelque sorte différente de celle qui
correspondrait à leur dimension à l'état d'atome. On définit un rayon ionique, en
général, de valeur plus petite lorsqu'il s'agit d'ions positifs, plus élevée lorsqu'il s'agit
d'ions négatifs. Ainsi :
O
a pour rayon atomique
0,60 Å
(O)2-
a pour rayon ionique
1,32 Å
Mg
a pour rayon atomique
1,60 Å
(Mg)2+
a pour rayon ionique
0,78 Å
- 32 Certains éléments peuvent perdre (ou acquérir) un ou plusieurs électrons et donnent
ainsi des ions de charges variables, qui correspondent en chimie à des ions
d'électrovalences variables.
A chaque état ionique différent correspond un rayon ionique différent et, en général,
plus la charge positive est élevée, plus le rayon est faible, pour un même élément.
Ainsi Fe qui a un rayon atomique égal à 1,25 Å nous donne pour (Fe)2+ : 0,83, et pour
(Fe)3+ : 0, 67.
Ces deux états correspondent aux combinaisons où le fer se trouve respectivement à
l'état de bivalence et de trivalence.
Dans le tableau général de classement des éléments qui est donné par ailleurs,
chaque élément est accompagné de son numéro atomique, régulièrement croissant
de 1 à 92, et de sa masse atomique, qui croît, sauf quelques inversion de 1,0080 pour
H à 238,07 pour U. Sous cette valeur a été représenté enfin le rayon ionique usuel de
ces éléments, correspondant à leur électrovalence normale.
Pour certains corps, les gaz dits rares, colonne 0, c'est le rayon atomique qui a été
représenté, puisque ces corps sont en principe non introduits dans des combinaisons
chimiques.
Pour les corps à valences multiples, différentes valeurs on pu être données. 2 le plus
général (par exemple (Fe)2+ et (Fe)3+ dans l'ordre des électro valences croissantes.
Pour Mn, on a figuré 3 valeurs qui correspondent, dans l'ordre de décroissance de ces
valeurs, à (Mn)2+, (Mn)3+, et (Mn)4+.
Les éléments 57 à 71 ont été groupés sous une seule case, indiquée T. R., ce sont
les terres dites rares. Les deux valeurs 1,22 - 0,99 correspondent aux deux valeurs
extrêmes des rayons ioniques trouvés chez ces éléments chimiques.
- 33 La notion de rayon ionique est très importante et permet de donner une explication
très satisfaisante de certains faits relatifs à la composition et la structure des
composés ioniques, donc des espèces minérales naturelles que l'on rencontre en
géochimie, puisque ce sont ces minéraux qui sont les constituants des roches et des
minerais rencontrés et étudiés au niveau de l'écorce terrestre.
Un minéral naturel est en fait autant un édifice qu'un composé chimique défini.
Pour prendre un exemple plus concret, un péridot est un édifice silicaté, constitué à
partir de tétraèdres (Si O4) isolés et répondant à la formule (Si O4) R2. Dans cette
formule, R représente un élément bivalent.
Mais quels seront les éléments chimiques susceptibles de représenter ce symbole
général R. Ce seront des éléments dont la taille de l'ion sera de l'ordre de 0,60 à
0,90 Å.
(Fe)2+, (Mg)2+,
répondent à cette condition, et le péridot le plus banal, l'olivine, répondra à la formule :
(Si O4) (Fe Mg)2
formule dans laquelle pratiquement Fe et Mg sont représentés en toute proportion
réciproque.
Sur le plan théorique, on devra donc considérer que l'on aura une série continue entre
le type à 100 % de Fe, soit :
(Si O4) Fe2, appelé fayalite,
et le type à 100 %de Mg, soit
(Si O4) Mg2, appelé forstérite.
Entre ces deux types extrêmes, tous les intermédiaires peuvent être rencontrés.
- 34 L'analyse précise d'un péridot montre que R2 dans la formule est représenté par
Fe + Mg, sans doute, mais aussi, à l'état de trace par d'autres métaux divalents
comme Zn, Ni, Co, Mn, éventuellement Cu. Mais Ca, Ba, Sr, Pb seront exclus. Leur
rayon ionique respectif est en effet trop élevé pour entrer dans l'édifice d'un péridot.
La règle de remplacement possible au sein d'un édifice minéralogique est telle que la
condition de rayon ionique est plus impérative que celle d'électrovalence. En d'autres
termes, on voit deux ions de même taille se remplacer assez aisément, même si la
charge de ceux-ci n'est pas équivalente, alors que l'on voit deux ions de même
charge, mais de taille différente, incapables de se remplacer.
C'est ainsi que les 4 ions suivants, à savoir :
(Na)+, (K)+, alcalins, (Ca)++ et (Ba)++, alcalino-terreux
ne remplacent pas, ou mal, les uns les autres au sein de leur même famille chimique,
mais par contre, on voit la substitution :
(Na)+ <=> (Ca)++
et
(K)+ <=> (Ba)++
se faire très aisément. Le critère de dimension ionique l'emporte sur celui de la charge
électrique.
Des types de substitutions peuvent ainsi être prévus et observés et selon
K. RANKAMA et Th. G. SAHAMA, auxquels le tableau suivant est emprunté, nous
pouvons reconnaître les types de substitutions ci-dessous :
- 35 a) A charge électrique constante
(K)+
(Rb)+
(Cs)+
(Tl)+
(Mg)2+
(Fe)2+
(Mn)2+
(Co)2+
(Ni)2+
(Zn)2+
(Ca)2+
(Sr) 2+
(Mn)2+
(Ba)2+
(Sr) 2+
(Pb)2+
(Al)3+
(Ga)3+
(Mn)3+
(Cr)3+
(Fe)3+
(V)3+
(Si)4+
(Ge)4+
(Ti)4+
(Zr)4+
(Hf)4+
(Th)4+
(P)5+
(V)5+
(As)5+
b) A charges croissantes ou décroissantes
(OH)-
(F)-
(O)2_
(K)+
(Ba)2+
(Sr)2+
(Pb)2+
(Na)+
(Ca)2+
(Li) +
(Mg)2+
(Mg)2+
(Al)3+
(Fe)3+
(Cr)3+
(Zn)2+
(Ga)3+
(In)3+
(Al)3+
(B)3+
(Si)4+
(Si)4+
(P)5+
(Ti)4+
(Cb)5+
(C)4+
(N)5+
(Ta)5+
(V)3+
- 36 Ces changements, à charges électriques variables se font souvent en associant des
couples c'est ainsi que l'on a souvent le couple :
Si4+ Na+
<=>
Al3+ Ca2+
(cas des feldspaths plogioclases) qui représente une double substitution de ce type.
On a aussi le cas de :
2 (Fe. Mg)2+
<=>
que l'on retrouve dans le groupe des pyroxènes.
(Al)3+ (Li)+
- 37 -
POSITION DES OLIGOELEMENTS DANS LES ROCHES ET LES MINERAUX
______________________________________________________________________
La possibilité d'une substitution liée à des dimensions ioniques comparables permet
donc l'introduction d'éléments-traces ou oligoéléments dans les roches de l'écorce
terrestre.
On peut grouper ces éléments en deux catégories fondamentales.
Dans un premier groupe, on trouvera d'une part les éléments qui se trouvent sous
forme de minéraux spécifiques, ceux-ci étant alors des minéraux accessoires de la
roche ou du minerai. Comme exemples, nous pouvons citer le soufre, dans les
sulfures, le fluor, dans les fluorines et apatites le zirconium dans les zircons, le
phosphore dans l'apatite, le plomb dans les galènes, etc.
Dans un second groupe, l'oligoélément se trouve sous forme de constituant
accessoire dans un minéral plus banal, dans lequel il peut être présent à des
concentrations plus ou moins anormales. Tel le baryum dans certains feldspaths
orthoclases, le vanadium dans les apatites, le germanium associé à l'étain dans les
cassitérites, etc. Certains éléments comme le béryllium sont tout spécialement
représentés sous cette forme, et cette circonstance entraîne pratiquement de grandes
difficultés sur le plan de l'existence ou de l'exploitation de ces éléments en tant que
gîtes minéraux. Les éléments en espèces spécifiques se montrent en effet infiniment
plus favorables que les autres, car ils peuvent réaliser des concentrations bien mieux
définies et surtout plus élevées.
V. M. GOLDSCHMIDT a défini trois types de dispositions des oligoéléments lorsqu'ils
sont dispersés dans d'autres minéraux.
- 38 a) Le camouflage (Tarnung)
Dans ce cas l'oligoélément prend dans un édifice cristallin la place d'un élément
majeur banal de même valence ; telle germanium prenant la place du silicium dans un
silicate. Le nickel, celle du magnésium dans certains ferromagnésiens, etc.
b) La capture (Abfangen)
Ici, l'oligoélément prend la place d'un élément majeur de valence plus faible, tel le cas
du plomb ou du baryum à la place du potassium dans un feldspath par exemple. Il
s'ensuit que sur le plan énergétique, la nouvelle structure est plus stable que la
précédente. D'où le nom de capture qui est proposé pour ce type.
c) L'admission
C'est le cas inverse du précédent, l'élément en trace étant de valence plus faible que
l'élément majeur dont il occupe la place. C'est le cas du lithium remplaçant le
magnésium dans des phosphates ou des silicates. Et, à l'inverse du cas précédent,
l'édifice est moins énergiquement lié qu'auparavant.
- 39 -
LE CYCLE GEOCHIMIQUE
_________________________
Un élément chimique se présente à des teneurs variables selon qu'il est recherché et
analysé dans telle ou telle partie de l'écorce terrestre.
Ceci découle de deux processus différents. C'est d'une part le fait que cet élément
possède une localisation d'origine privilégiée, ce qui se traduit par le fait qu'il est
qualifié d'atmophile, ou sidérophile, etc., c'est, d'autre part, les conséquences des
dispersions ou concentrations ultérieures qui peuvent résulter de la transformation du
milieu, c'est à dire de la roche ou du minerais, et ceci, selon que ce milieu subit
l'action de divers agents, soit liés à la dynamique interne (cristallisation,
pneumatolyse, hydrothermalisme, etc.) ou à la dynamique externe, (atmosphère,
règne animal ou végétal, etc.).
Ceci est valable pour chacun des éléments chimiques. On peut généraliser cette
notion, et pour l'ensemble des matériaux constituant l'écorce terrestre, peut se définir
un cycle géochimique général. Dans ce cycle sera représenté l'ensemble des
modifications et transformations que ces matériaux subissent, au cours de leur
genèse dans les zones profondes de cette écorce, - ou même plus bas - et au cours
de leurs transferts dans les différentes zones qui forment cette écorce jusqu'à son
contact avec l'atmosphère. Le tableau joint par ailleurs résume un de ceux qui parait
être le plus généralement admis par la grande majorité des géologues, pétrographes
et géochimistes.
Dans ce tableau sont impliqués un certain nombre de postulats. Ils sont plus ou moins
justifiés, sinon plausibles. Les hypothèses qu'ils résument sont, elles aussi, plus ou
moins bien vérifiées. Signalons-en quelques unes au passage.
- 40 Ce tableau représente un cycle ouvert. Il communique à la base avec les zones
profondes sous-jacentes à la croûte terrestre, c'est à dire la zone corticale du
manteau, Un cycle entièrement clos pourrait également être imaginé, cycle établi à
partir d'un magma de base qui serait isolé, donc autonome. Certains faits, comme la
présence d'enclaves de roche ultra basiques au sein de certains basaltes, l'existence
de roches éclogitiques, etc. semblent, en toute impartialité, en faveur d'une
communication probable, entre écorce et manteau. Inversement il peut exister des
phénomènes d'érosion du magma, à sa base, par le manteau et par là, des retours de
matière au sein de ce dernier.
Dans ce cycle, on a également admis l'origine des roches dites ignées ou
magmatiques à partir de la cristallisation de magmas, Ceci aussi bien pour les roches
plutoniques que pour les roches volcaniques. Ce postulat semble maintenant - mais il
n'en a pas été toujours ainsi bien admis par un très grand nombre de géologues, mais
non par tous ; car l'hypothèse d'une origine de ces roches, au moins les plutoniques,
par voie dite “métasomatique” compte encore quelques partisans. Il a été tenu compte
de cette hypothèse par la voie dite “métasomatisme” qui fait passer les roches
métamorphiques aux roches ignées sans utiliser l'intermédiaire d'un magma.
Dans l'étude qui va suivre maintenant, nous allons nous efforcer de donner une idée
de ces cycles pour les éléments chimiques.
Essayer de comprendre le cycle appliqué à chacun des éléments chimiques est un
des buts majeurs de la géochimie. Il faut donc, pour chaque élément chimique, tenter
de décrire ses comportements divers selon les différents milieux où il est recherché,
selon les différentes enveloppes thermodynamiques considérées, ceci grâce à
l'analyse des constituants géologiques qui caractériseront ces enveloppes dans le cas
de l'écorce terrestre, selon les différents types de roches.
Et ainsi, en définitive, pour chaque élément, pourra être tracé son cycle géochimique,
résumant ce que nous savons sur les teneurs et le comportement de l'élément au
niveau de ces différents stades. Le cycle pourra être plus ou moins complet selon
l'état des données que nous possédons sur cet élément, et ce sera, comme nous le
verrons, très variable.
- 41 Pour ceci, le classement de base sera celui qui est établi par les différentes colonnes
de la classification périodique selon MENDELEEV.
En effet, les caractéristiques chimiques de chaque élément vont intervenir, au moins
pour une certaine part, dans la constitution du cycle. En suivant l'ordre ainsi établi par
cette classification, nous aurons l'avantage de réunir les éléments qui ont, à l'origine,
de part leur place dans ce tableau, des caractères communs. Mais il reste entendu
que ces mêmes caractères peuvent être plus ou moins masqués par les propriétés
plus originales de tel ou tel élément au sein de son groupe. Ceci se traduira par le fait
que des variations plus ou moins importantes pourront se révéler pour ce qui est du
comportement géochimique d'éléments appartenant, par ailleurs, à la même colonne
dans le tableau de classification périodique.

Documents pareils