STONES IN HER MOUTH - Festival de Marseille

Transcription

STONES IN HER MOUTH - Festival de Marseille
Festival de Marseille – danse et arts multiples
SAMEDI
09
JUILLET
20:30
24 juin › 19 juillet 2016
STONES IN HER
MOUTH
Lemi Ponifa sio
DIMANCHE
10
JUILLET
20:30
DURÉE
Samoa | Création 2013
COMPAGNIE
90’
Théâtre national
de Marseille
Grand Théâtre
TA R I F S
Catégorie 1 :
31 / 20 / 10 / 5 €
Catégorie 2 :
25 / 15 / 10 / 5 €
Pass journée :
35 €
Abonnement :
spectacle A
CONCEPTION, DIRECTION ARTISTIQUE,
CHORÉGRAPHIE ET MISE EN SCÈNE
Todd
LA CRIÉE
MAU
DANSE ET CHANT
Compagnie MAU
Lemi Ponifasio
Compagnie MAU
LUMIÈRE
Helen
COMPOSITION POI
COMPOSITION MÔTEATEA
Ria Te Uira Paki,
Te Ara Vakaafi, Rangipo Wallace-Ihakara, Mere Boynton
COMPOSITION WHAIKORERO, TEXTE
Rosie TeRauawhea Belvie
Sam Hamilton, Lemi Ponifasio
VIDÉO
TECHNIQUE
Helen Todd
TRADUCTION FRANÇAISE
Helen Todd
DIRECTION EXÉCUTIVE
SON
DIRECTION
Susana Lei’ataua
Hélène Caruyer
À l’origine de la pièce, des poèmes écrits par
les performeuses maories du spectacle. Des
textes d’aujourd’hui s’inspirant de la puissance civilisationnelle des môteatea, chants
de la tradition orale pacifique, fascinants vecteurs de la mémoire des hommes et d’une
certaine conscience cosmique de l’histoire.
première
De ce répertoire ancestral et sacré, le choré-
en france
danse
graphe samoan basé à Auckland, marqué par
l’esthétique minutieuse du rituel et le corps
musique
sacrificiel, compose une ode archaïque et
hypnotique. Une expérience visuelle et sensuelle, un spectacle-cérémonie à l’élégance
ciselée mariant danse, poésie et musique, d’où
émerge la puissance lumineuse de femmes
vêtues du noir contemporain.
PRODUCTION
MAU ( Nouvelle-Zélande )
culturel Tjibaou ( Nouméa, NC )
COPRODUCTION
Concertgebouw Brugge ( Bruges, BE ) ; Carriageworks ( Sydney ) ; Centre
Festival de Marseille – danse et arts multiples
24 juin › 19 juillet 2016
Stones In Her Mouth
Lemi Ponifasio
parcours
Lemi Ponifasio
Lemi Ponifasio est un metteur en scène et chorégraphe samoan. Il fonde en 1995 la compagnie MAU
à Auckland, en Nouvelle-Zélande ; elle rassemble
des représentants de la communauté et des artistes
essentiellement originaires de Nouvelle-Zélande et
des îles du Pacifique. En samoan, MAU signifie à la
fois « affirmation solennelle de la vérité d’un sujet »
et « révolution », dans le sens d’un effort de transformation.
L’univers artistique de Lemi Ponifasio est marqué par
une esthétique épurée au rythme décéléré et s’appuie sur la force des images, le mouvement et les
interactions dynamiques de l’ombre et de la lumière.
Artiste pionnier, à la frontière entre la danse et l’art
dramatique, sa conception de l’art transcende les
barrières entre les genres et les cultures.
Lemi Ponifasio collabore avec des gens de tous horizons, dans les écoles, universités, îles du Pacifique,
usines, villages, opéra, châteaux, galeries, stades…
Son travail a été notamment présenté au Festival
d’Avignon, à la Brooklyn Academy of Music (BAM)
de New York, à la Ruhrtriennale, au Lincoln Center
de New York, au Festival international d’Édimbourg,
au Théâtre de la Ville à Paris, au Centre culturel
Onassis à Athènes, au Southbank Centre à Londres,
au Holland Festival à Amsterdam, au Santiago a Mil
Festival, au Chili, au Festival de Vienne, au Berliner
Festspiele ou encore à la Biennale de Venise.
Il crée en 2008 Tempest: Without a Body, qui traite
de notre paralysie collective face à la vérité, symbolisée par le renforcement illégitime du pouvoir de
l’État après le 11-Septembre. Sa création 2010, Birds
With Skymirrors, est une réponse à la disparition
progressive des îles du Pacifique, terre natale de
la plupart de ses danseurs, dévastée par les changements climatiques. Sa création 2011, Le Savali:
Berlin, confronte la ville impériale de Berlin à ses
propres communautés, la jeune génération de
familles immigrées en quête d’appartenance et
freinée par la menace d’expulsion. En 2012, Lemi
Ponifasio met en scène Prometheus, l’opéra épique
de Carl Orff, pour la Ruhrtriennale, puis il crée en
2014 I AM, à l’occasion du centième anniversaire
de la Première Guerre mondiale. Il crée en 2015
Lagimoana pour la 56e Biennale de Venise et, la
même année, Apocalypsis, pièce pour 1 000 interprètes, avec la musique de R. Murray Schafer et dont
la première a lieu au Luminato Festival de Toronto.
Il est invité par l’Unesco à prononcer le message de
la Journée internationale de la danse, dont la cérémonie se déroule le 29 avril 2016 au Théâtre de la
Villette, à Paris.
rencontre avec Lemi ponifasio
Dans quelle mesure peut-on dire que Stones In Her
Mouth est un projet exceptionnel, dans votre parcours ?
Lemi Ponifasio : Stones In Her Mouth se penche sur la conception maorie de la femme comme wahinē. Wahinē ne désigne
pas la femme dans son acception européenne, occidentale ou
orientale ; le terme ne concorde pas non plus avec la conception occidentale dualiste entre la femme et l’homme. Cela se
pose à un autre endroit, c’est une autre réalité, une autre intuition qui partage et prend part à la vie sur Terre. C’est être dans
la dimension consciente des relations interpersonnelles : « wa
» fait référence à la notion de temps et d’espace, et « hine » est
lié à la nature féminine intrinsèque. Wahinē souligne les multiples dimensions de la femme maorie. Stones In Her Mouth et
la compagnie MAU Wahinē sont un engagement envers l’entrelacement complexe qui relie le monde de la femme maorie
aux mondes humains et non humains. Stones In Her Mouth
est peut-être exceptionnel parce qu’il n’y a que des femmes
sur le plateau, mais l’orientation du travail reste la même
dans son invitation à la transformation. Donc on reste dans
l’univers du travail de MAU. L’arrivée en Nouvelle-Zélande de
l’éducation à l’occidentale et de modes de fonctionnement
occidentaux a affaibli le rôle visible des wahinē, ou de la voix
qui est la leur. Traditionnellement, les Maories composaient
des poésies et des chants à visée artistique ou contestataire.
C’étaient les outils avec lesquels les Maories pouvaient s’exprimer et ainsi jouer un rôle actif et décisionnaire au sein de
leur communauté. La structure européenne patriarcale a
diminué la position des femmes en tant que compositrices et
enseignantes et a dissout jusqu’à la langue même du langage,
effaçant ainsi leur rôle décisionnaire visible au sein de la communauté. Il y a quatre ans, j’ai décidé d’inviter des femmes à
composer des môteatea, à rechercher et à écrire au sein de la
communauté, et ce sont ces môteatea qui ont ensuite composé la performance Stones In Her Mouth. Leur travail s’appelle MAU Wahine, ou perspective wahinē.
Festival de Marseille – danse et arts multiples
24 juin › 19 juillet 2016
Stones In Her Mouth
Lemi Ponifasio
Était-ce différent de travailler avec un groupe principalement composé de femmes ?
L.P : Non.
Plus qu’un groupe d’interprètes spécifiques, la
compagnie MAU semble soudée autour d’une certaine vision du monde et de la vie, et du rôle que les
artistes et les danseurs devraient y jouer. Pourriezvous expliquer ceci ?
L.P : C’est une question liée à notre existence même. Qu’est
ce que cela signifie, exister ? Le but de l’art, pour moi, est de
transformer l’expérience humaine de la vie. D’améliorer la
manière dont nous ressentons, voyons et entendons la vie.
Cela implique d’aller au-delà des satisfactions émotionnelles
et physiques. Le but est d’aller au-delà de l’art et du théâtre.
L’art est le catalyseur qui permet d’aller dans ce sens. Donc
nous ne sommes pas ici pour servir seulement l’art, mais pour
questionner la conscience de cet espace partagé que nous
appelons la vie. En fin de compte, ce qui est important, c’est le
potentiel de ce que nous pourrions devenir, et c’est peut-être
ce qui donne au travail artistique une dimension politique.
Ce travail, ce n’est pas de nous mettre à crier des slogans politiques au public, mais d’abattre des pans de réalité et de faire
de la place pour ce qui est en train de se passer à l’intérieur
de chacune des personnes dans le public. Les interprètes sont
ainsi au service de cet espace de cérémonie que nous appelons le théâtre. Le rôle de l’interprète n’est pas de s’exprimer
lui-même ou de représenter quelque chose, mais bien d’activer l’espace et d’accompagner le public vers une concentration qui lui permet d’aller vers une conscience cosmique, ou
une écoute empathique. C’est cela, le rôle de l’artiste : permettre de relier le monde temporel au divin qui est en nous.
pour aller + loin...
Pour les Maoris, le premier être humain était une femme :
Hineahuone. Les femmes sont « te whare tangata », la maison
de l’humanité, et respectées pour leur capacité à donner la vie.
Dans Stones In Her Mouth , toutes les mélopées, chants, discours et appels sont écrits et composés par les artistes qui
les interprètent. C’est un projet conçu pour développer les qualités de leader de jeunes femmes se déplaçant et travaillant
au sein de la communauté, dans les marae (lieux de réunion
sacrés), les écoles et les régions rurales en Nouvelle-Zélande.
Dans Stones In Her Mouth , la difficulté d’être femme s’exprime
par la langue maorie, la généalogie, le corps, la spiritualité,
les cérémonies, la famille et la nature. Les femmes se définissent elles-mêmes par le biais d’une figure mythologique et
témoignent de leurs capacités d’adaptation, de leur résilience
et de leur rage à l’égard de l’appareil du pouvoir, de l’oppression
et même du féminisme à l’occidentale
Le titre Stones In Her Mouth vient du recueil de poèmes
éponyme de la poétesse, dramaturge et critique maorie
Roma Potiki (née en 1958), publié en 1992. Artiste engagée,
son œuvre interroge la place des femmes dans la société,
l’identité maorie et la dimension politique des dialectes
traditionnels au sein d’une Nouvelle-Zélande moderne.
La compagnie MAU explique que le choix de ce titre est lié à une
volonté de reconnaître le rôle important des créatrices, poètes
et compositrices maories pour faire écho au soulèvement
des Maories et pour tendre un miroir aux bouleversements
sociaux, économiques, religieux, culturels et politiques à travers le monde. Ce sont les femmes elles-mêmes qui, courageusement et au grand jour, exposent ce qu’est être une femme
aujourd’hui.
Est-ce particulier, pour vous, de venir à Marseille ?
Quelle place occupe cette ville dans votre imaginaire ?
L.P : C’est la première fois que je présente mon travail à
Marseille, même si j’ai déjà visité la ville, à la fin des années
1980. Marseille est fascinante par son histoire et par sa capacité à intégrer des cultures et des personnes très différentes.
MAU est une compagnie principalement composée d’immigrants et je suis moi-même un émigré des îles Samoa, je me
suis installé et je développe mon travail en Nouvelle-Zélande,
qui est un pays où la majeure partie des immigrants sont européens. L’immigration est un des grands défis auxquels notre
monde fait face, actuellement. Donc je reviens à Marseille
dans un moment sombre, marqué par les énormes déplacements de populations et par la terrible crise humanitaire
qui frappe aujourd’hui l’Europe. Je suis sûr qu’il y a bien des
façons d’imaginer Marseille, mais la crise des réfugiés actuelle
et les ténèbres de la terreur nous ramènent à l’urgence de penser l’espace partagé qui nous lie dans l’existence.
propos recueillis par le Festival de Marseille
autour du spectacle
VOIX D’AILLEURS ET D’ICI
...
Rencontre - Jeu. 7 juillet
QG du Festival / Théâtre Joliette-Minoterie
en tournée
4, 5 juil. - Amsterdam / Festival Julidans
Festival de Marseille – danse et arts multiples
24 juin › 19 juillet 2016
Stones In Her Mouth
Lemi Ponifasio
quelques textes du spectacle
ENVERS NOUS, LES INVISIBLES
Tau ana
Tau ana
Taku ira tangata
Tākina ki te ao
Ko wai au
Taka mai au i te ira
Atua i a Hineahuone
Tū ka riri
Kaitangata
Taku whakatamarahi
Mana Māori motuhake
Ko au
Ko au
Kōkoia e ara
Taku mana wahine
Kia ita
Kia mau e...i
Rangipo Wallace-Ihakara
SANS VISAGE
E rere taku manu ki runga
I tōku maunga whakahī
Ki reira rērere haere ai
Kia purea ai e ngā hau maiangi...i
Kōrihi ana taku manu,
E aku totara haemata
E aku toka tū moana
Kei hea rā he taunga moku ?
Raumaewa taku manu
E tiu e topa
Hāro ki runga
Tiripou ki raro
Kimihia rangahaua he aha rā ?
Te Taura here tāngata
here whenua
here wairua,
Tēnei te taura e here nei i ahau
ki aku mātua tupuna e....
Hōkio ngā ira
nō tuawhakarere
tītia rawatia
Puritia kia mau
Mā te kahukura ka mauritau
E taku manu ...uuu...e...i !
Te Ara Vakaafi
Traduction
Me voici
C’est moi
Telle est mon identité
À la face du monde
La personne que je suis
Là d’où je tire mes origines
De Hineahuone
Telle est mon existence
Ma culture maorie
C’est moi
C’est moi
Ma place
De femme
Préserve-la,
Pour l’éternité
Rangipo Wallace-Ihakara
Envole-toi, mon oiseau,
élève-toi au-dessus de la haute montagne,
et purifie-toi
aux vents légers.
Mon oiseau crie
à ceux qui sont forts et vigoureux,
à ceux dont la force
résiste aux eaux déchaînées,
et demande Où puis-je me reposer ?
Mon oiseau erre sans but,
voletant, virevoltant,
il tournoie dans les airs,
fond tout à coup vers le sol,
sonde, à la recherche de l’inconnu.
Lié au peuple,
à la terre,
à la spiritualité,
ces connexions
me rattachent à mes ancêtres,
Désormais drapée de sagesse,
ces traditions
sont ancrées en moi,
où je les retiendrai à jamais.
Mon oiseau, tu peux reposer en paix.
Te Ara Vakaafi