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EXTRAITS DE PRESSE
Le Cantique de frère soleil François d’Assise réconcilié, Jacques
Dalarun
Presse écrite
Études, n°4212 Janvier 2015
Voici un très bel ouvrage – doté d’une iconographie pertinente et splendide - consacré au dernier
poème chanté par François d’Assise. Après avoir donné le texte intégral dans une version
bilingue, avec le texte ombrien original (Il cantico di frate Sole), et un portrait de François d’Assise
aussi bref que bien informé, l’auteur consacre unchapitre très éclairant sur la tradition du Cantique,
ce qui permet de mieux en cerner la genèse et les circonstances de composition. Vient ensuite une
analyse des trois grands actes du poème et une réflexion bien menée sur la force de la joie. Une
joie qui s’exprime malgré tout, une vera laetitia au sein des maladies et des heures sombres, dans la
proximité de la mort. L’auteur met très bien en relief ce sens aigu de l’harmonie finale perçue au
cœur de toutes les discordances les plus douloureuses. Réflexion qui vient à point nommé lorsque
certaines critiques, y compris épiscopales, émettent des « réserves »vis-à-vis de François et
trahissent leur incompréhension de la fraternité universelle célébrée par ce chant ultime. Ce
poème n’est en rien l’expression d’une naïveté de la part de François qui ignorerait la vérité de la
nature corrompue et déchue suivant Paul de Tarse. C’est tout le contraire dont il s’agit. C’est une
joie qui s’exprime du sein même de la violence des éléments, celle que tous les pauvres
connaissent mieux que quiconque donnant des leçons de réalisme, exposés qu’ils sont sans cesse
aux ardeurs du soleil, à la pluie, au vent ou à la terre nue sur laquelle ils reposent, à la violence des
animaux (la morsure des rats), de la guerre civile, de la maladie et de la mort ; elle n’est appelée «
sœur notre mort corporelle » que si et seulement si elle n’est pas une mort spirituelle. L’auteur
exprime très bien ce sens aigu de la réconciliation universelle qui anime librement François à la
fin de son existence.
Bernard Forthomme
Le Figaro littéraire, 27 novembre 2014
Pour ceux qui voudraient entrer plus avant dans l’univers de François D’Assise, l’historien
Jacques Dalarun publie Le Cantique de frère soleil, une très bonne étude du grand poème du
Poverello qui était au programme de l’agrégation externe d’italien en 2014.
Astrid de Larminat
La Croix, 3 juillet 2014
Ce poème marque l'aboutissement d'une aventure spirituelle hors du commun
La louange des créatures du pauvre d'Assise
« Laudate si,' mi ' Signore, cum tutte le Tue creature, spezialmente messor lo frate Sole » (« Loué sois-Tu,
Seigneur, par toutes Tes créatures, spécialement messire le frère Soleil ») Jacques Dalarun, dans
son ouvrage consacré au Cantique de frère Soleil que saint François composa au couchant de sa vie,
insiste : il fut, en cette première partie du XIIIe siècle un véritable « coup d'éclat ». Une lumière
inaugurale de la littérature italienne, qui préfigurait le « vulgaire illustre » de Dante.
Outre son importance esthétique, l'historien nous fait découvrir la genèse et la composition d'un
chant qui fut l'aboutissement d'une aventure spirituelle hors du commun. Si le « troubadour de
Dieu », tout à sa louange du Créateur, célèbre, mais aussi fraternise avec, les astres, les éléments l'eau, le vent, le feu - ou la Terre « qui nous sustente et nous gouverne », Jacques Dalarun nous met en
garde sur de fausses interprétations possibles Non, saint François n'est pas un doux rêveur perdu
dans les nuages ou un béat devant les créatures. L'homme, « qui entonne le Cantique de frère Soleil n’est
pas un admirateur extasié de la nature », mais un « quasi aveugle fouaillé par la douleur » sur son grabat de
Saint-Damien a Assise. « Avant d être un chant affirme-t-il, le poème ombrien est un drame ». Celui du
passage des ténèbres a la lumière du poverello, d'un parcours christique dont le sublime
accomplissement se fera dans la paix du cœur, l’esprit de fraternité et de réconciliation.
Cette grande fraternité franciscaine, toute contenue dans un poème et non un traité théologique,
ne peut se comprendre « dans la seule horizontalité de la fratrie » souligne Jacques Dalarun. « Elle
postule que tous les êtres crées sont frères et sœurs parce qu'enfants engendres par un seul et même Père ». À une
vision immanente, saint François oppose donc une vision transcendante, « ou toutes les créatures
contribuent à la louange de Dieu ». Le poème de saint François n’est pas « écologique » au sens restrictif,
mais affirme la beauté et la bonté de la création. Le monde d'ici bas n'est plus « mauvais » mais
bien béni de Dieu.
CLAUDE COLOMBO
L’écologiste, juillet 2014
Le cantique de Frère soleil, la célèbre hymne à la Création et au Créateur écrite par saint François
d'Assise (1181- 1226) est analyse Jacques Dalarun, directeur de recherches au CNRS. Le
fondateur des franciscains et saint patron des écologistes a composé ce célèbre cantique à la fin
de vie. L'ouvrage est illustré de reproductions d'enluminures médiévales évoquant la « Création ».
Le Figaro Littéraire, 22 mai 2014
Le Moyen Âge incarné
Pour compléter cette plongée dans le Moyen Âge, ne ratons pas le livre tout de finesse savante et
richement illustré de Jacques Dalarun sur Le Cantique de frère Soleil, ode cosmique, chefd’œuvre poétique de saint François d'Assise.
Jean-Marc Bastière
Les Collections de l’Histoire, mai 2014
Frère Soleil et frère Vent
Altissimu, onnipotente, bon Signore (« Très-Haut, tout puissant, bon Seigneur »). On croyait tout
savoir de cette ode cosmique, de cette louange où la nature semble reine, ou le créateur, le Dieu
chrétien, est loué par le frère Soleil, par sœur Lune et frère Vent. Et pourtant le grand médiéviste
Jacques Dalarun, qui vient d'être élu a l'Académie des inscriptions et belles lettres, reprend à neuf
la question. Et de façon originale. Par l'écriture, ou l'érudition se fait légère mais le propos
profond.
Par l'image ensuite, avec la reproduction fine de manuscrits médiévaux. II faut souligner combien
la genèse du Cantique de frère Soleil, fait pour être chanté, est bien retracée, dans la confrontation
de divers témoignages. Quand François d'Assise le compose un an avant sa mort (qui survient en
1226), il est presque aveugle, « incapable de percevoir la lumière du soleil ou la lueur du feu ». Ce poème a
une forte connotation autobiographique et « le chant est la thérapie du drame ». Jacques Dalarun
interroge aussi le rapport complexe entre la nature, la création divine et l’homme (le grand absent
du poème, avec les animaux…). II montre combien François inscrit la question de la paix sociale
en perspective de l'harmonie du monde (car le Cantique est aussi une tentative de réconciliation
entre le podestat et l’évêque d'Assise…). Ce poème, qui inaugure la littérature italienne, est un
« puits de sens dont on n'atteint jamais le fond ». Mais Jacques Dalarun sait explorer les significations de
cette louange qui « naît d'une angoisse que sa propre musique exorcise ».
Les affiches de Normandie, 7 mai 2014
En revanche, on se jettera sans tarder sur Le cantique de frère Soleil. François d'Assise réconcilié de
Jacques Dalarun, membre de l'Institut, directeur de recherche au CNRS, l'un de nos meilleurs
médiévistes et le spécialiste incontesté, en France, du Poverello dont il a publié les œuvres. Cet
ouvrage est somptueux. Par son illustration, à l'évidence, mais surtout par la richesse conceptuelle
d'un commentaire qui nous promène jusqu'au cœur de cette ode cosmique chantée par celui qui
se disait un idiota - un illettré. Ce petit livre, au vrai, nous ouvre un monde très opaque en dépit
des apparences. Si le texte de ce chef-d’œuvre poétique est connu de tous, on est loin d en avoir
cerné les sens multiples.
Jacques Dalarun nous en découvre les arcanes, se faisant paléographe pour éclairer la genèse de la
composition dans des textes fondateurs de la littérature italienne, pour déceler, dans le manuscrit
338, les trois lignes où auraient dû figurer les neumes, support du chant, ou le L rubriqué, sans
doute de la main du frère Léon, indice minuscule d'un basculement vers l'angoisse, durement
apaisée. Le plus important est sans doute ailleurs, lorsque l'historien invite à tendre l’« oreille du
cœur ». François chante ce poème alors qu'il est aveugle, bientôt à l'agonie. L'intelligence
profonde d'un texte aux multiples ressauts passe par ces constatations-là. Et, d'abord, par une
question de fond. Le Poverello n'a nullement été un écologiste avant l'heure. Il est même assez
probable qu'il n'appréciait guère la nature. Ce qu'il célèbre, c'est la création. Et il le fait au prix
d'un renversement radical des valeurs que l'auteur avait déjà esquissé dans un ouvrage précédent
dont on a parlé ici. Un petit livre magnifique, profond, inévitable.
Pierre Aubé
Télérama, 19 avril 2014
Le Pape François
Ce qu’il va changer
Le pape avance. Et parfois il déroute, jusque dans la curie. C'est qu’il a choisi d'être « le pape de la
périphérie », considère Jacques Dalarun, médiéviste et auteur d'un superbe essai sur le Cantique de
frère Soleil, composé par François d’Assise au soir de sa vie. « La périphérie, ce sont tous ceux qui se
tiennent ou sont tenus à l’écart du « système », au premier rang desquels les pauvres, les marginaux, les exclus. »
François répète qu’il veut « une église pauvre pour les pauvres » : comment ne pas penser au
Poverello ? « À peine converti, le "petit pauvre" est parti servir dans une léproserie, rappelle Dalarun. Il s’est
dépouillé de tout, a adopté le mode de vie d'un vagabond, s’est installé à la périphérie des villes. Il n'a pas choisi la
solitude cistercienne, mais les lieux de passage des "sans domicile fixe" – pèlerins, vagabonds, migrants et
mendiants. C'est la qu'il voulait exercer son service social inspiré par l’Évangile. » […]
Une église pauvre pour les pauvres, donc. Mais en élargissant le sens de « pauvreté ». Le Poverello
dont s'inspire Francois, ce n'est pas seulement celui qui avait choisi de « suivre nu le Christ nu »,
c'est aussi le chantre de la Création, qui prêchait sans relâche la sobriété et le respect de la nature :
« Le Cantique de frère Soleil est généralement considéré comme l'acte fondateur de la poésie italienne, explique
Jacques Dalarun, et sa beauté littéraire est indéniable. Mais il peut aussi être lu comme un programme théologique,
économique, social et politique. La terre, rappelait François d'Assise, nous sustente et nous gouverne. Toutes les
créatures sont interdépendantes, chacune à son utilité - si on tue la planète, on se tue. François prêchait
l’antidomination dans notre rapport au monde et un mode de gouvernement au service des autres, dans la sobriété
partagée. Il plaçait l'homme au centre du système crée à son intention. Mais il ne cédait pas à la tentation de
présenter un univers dominé par l'entreprise humaine : il offrait à la contemplation un monde apprivoisé, disponible
pour un usage simple et réciproque qui bannit toute forme d'appropriation. »
François - le pape - marche dans ses pas quand il dénonce le gaspillage et l'argent qui détruit tout.
Par petites phrases ou dans ses prêches, il livre un « programme » spirituel, social et écologique pour
l'Église, plus cohérent qu'il n'y parait. « Il sait ou il va. Et, jusqu'ici, je trouve qu'il a fait un sans-faute,
témoigne Jacques Dalarun. Ce n'est pas un rêveur Mais un homme d'action. On a l'impression qu'il coche les
missions accomplies, révélant au passage une efficacité 'managériale' qu'on loue souvent dans la culture jésuite ».
Entre ici, Loyola ! La façon dont l’évêque de Rome a mis en place son « G8 » (les huit cardinaux
qu'il a nommés pour l'aider a réformer le gouvernement de l'église) ou la commission sur les abus
sexuels (qui comprend quatre femmes, plus de laïcs que de clercs, une pédopsychiatre…) a frappé
les esprits : « C'est tout le contraire d'une commission chargée de noyer le poisson, reconnaît Dalarun. Pour la
première fois, un nettoyage radical de ce qui a terriblement entaché la réputation de l'Église depuis vingt ans peut
être envisagé. »
Sa position de juge et partie oblige pourtant François à une prudence à laquelle le saint d'Assise,
lui, n'était pas soumis : « Jorge Bergoglio n'est pas le "petit pauvre" charismatique accueilli par le pape - c'est le
pape lui-même ! D'un côte, il exprime sans faillir son envie que ça change, de l'autre, il incarne la stabilité et la
continuité de l'Église, dans une fidélité absolue à cette dernière. Il est bien assis dans la chaise de saint Pierre. Mais
s'il se décalait trop, s'il se mettait, à titre personnel à condamner ouvertement l'institution, sa position deviendrait
illico délicate. II a d'ailleurs eu la grande intelligence de lancer toutes ses formules chocs en tant qu'évêque de Rome.
Son défi est d'incarner à la fois le charisme et l'institution. »
Le monde tourne. Un changement de civilisation – une seconde « Renaissance », disent certains
devant les bouleversements de la science - s'opère. Ce phénomène d'accélération n'est pas sans
rappeler ce qui s'est passé au XIIIe siècle.
Au temps de saint François - et ce dernier, d’ailleurs, l’a bien compris -, « le monde change à une
vitesse phénoménale, en particulier les communications, raconte Jacques Dalarun. On découvre les vertus des
échanges rapides, y compris avec des contrées lointaines. C'est l'époque ou émergent les places publiques comme lieux
de partage d’informations, lieux ou l’on prend la parole. Saint François d’Assise s'y rend pour prêcher. Et c'est
dans ce nouvel espace - mondialisé par les nouvelles technologies que le pape François, aujourd'hui, partage son
message ».
Le parallèle s'arrête là. Car le XIIIe siècle « sortait de la peur alors que le XXIe semble y entrer. Il y a huit
siècles, le mieux-être matériel, l'afflux de connaissances on conjuré les angoisses. Peut-on en dire autant
aujourd'hui ? L'avalanche d'informations disponibles augmente plutôt nos inquiétudes, parce que nous ne la
maîtrisons pas et parce que nous ne savons qu’en faire. »
Au visage triste d'un Benoît XVI accable par la tâche a succédé, il y a un an, le sourire radieux
d’un pape heureux. Face aux récifs, Francois a misé sur la joie plutôt que sur la crainte et la
résignation. Comme le Poverello. Réussira-t-il dans sa mission ? Pour répondre, il faudrait sonder
les cœurs.
Olivier-Pascal Mousselard
Livres Hebdo, 14 mars 2014
Le Très-Bas
Jacques Dalarun relit et commente le Cantique de François d'Assise.
L’histoire de ce fils de marchand d'Assise qui se rêvait chevalier et choisit de tout abandonner
pour vivre auprès des plus démunis continues de surprendre. Lui-même d'ailleurs fut stupéfait
par cette chute qui le rapprochait du Très Haut. C’est ce qu’explique avec clarté Jacques Dalarun
dans cet essai tire d'un cours pour les agrégatifs d'italien. En trois grandes parties, cet historien,
qui a dirigé le monumental François d'Assise : Écrits. Vies. Témoignages (Cerf 2010) donne toutes les
clés pour comprendre celui qui demeure le saint le plus populaire de l'Église catholique et un
grand écrivain.
Le médiéviste, auteur de Gouverner c’est servir (Alma, 2012), a découpé le Cantique de Frère Soleil, ce
« coup d'éclat qui inaugure la littérature italienne », en trois actes. Car c’est bien d'un drame qu'il
s'agit. Il nous le présente dans une version bilingue et nous propose de le relire à la lumière des
dernières recherches.
Et qu’y trouve-t-on ? D'abord une œuvre transgressive qui délivre au XIIIe siècle son message de
paix et de fraternité dans la langue vulgaire. « La révolution franciscaine n'est pas simple inversion de rôles,
roue de la fortune, revanche du destin. Elle a valeur de programme, en mode mineur. La terre ne domine pas : en
bonne mère, elle « nous sustente et gouverne ». Dans l'italien des campagnes, « gouverner » les enfants, les
animaux, les plantes veut encore dire « en prendre soin ».
Voila pourquoi le Poverello n'est pas un écologiste. « François ne vénère pas la nature ; il célèbre la
création ». Il est comme un horloger qui s'intéresserait moins au mécanisme qu'au temps lui-même.
Enfin, il y a le dénouement. Le fondateur de l'ordre des Frères désignés comme « mineurs » pour
bien affirmer leur humilité est quasi aveugle et brûle par la douleur lorsqu'il entonne ce chant qui
vise a exorciser son angoisse face à la mort. Avec ce vademecum franciscain, magnifiquement
illustré, Jacques Dalarun permet aussi de mieux comprendre la spiritualité de celui qui a pris le
Poverello pour modèle : le pape François.
Laurent Lemire
Internet
La République des Livres.com, 8 juin 2014
François d’Assise, écrivain visionnaire
Une belle parution dans le domaine de l'édition : la publication de Cantique de frère Soleil par
François d'Assise. Pourquoi être enthousiaste de cette parution en France ? Tout d'abord, elle
rentre dans l'actualité universitaire puisque ce texte est au programme de l'agrégation d'italien ;
mais surtout c'est un texte fondateur de la littérature italienne, bien au-delà de son mystique. Il a
été composé à une époque où le latin était encore langue officielle (1225). Or il est écrit en
dialecte d'Ombrie, une des sources de la langue italienne moderne, d'où sa lisibilité aujourd'hui. À
cet intérêt linguistique, s'ajoute une vision du cosmos, révélatrice du moyen-âge occidental : Dieu
créateur est à l'origine de tous les éléments.
Comme l'écrit en commentaire Jacques Dalarun, historien, directeur de recherche au CNRS, ce
texte est la révélation d'un aspect oublié de Saint François d'Assise : l'écrivain visionnaire avant
Dante. L'image la plus répandue, devenue mythique, est celle du mystique qui parle aux animaux,
tout particulièrement aux loups et aux oiseaux. Le peintre Giotto l'a représenté dans le cadre
bucolique d'une Ombrie idyllique. La postérité a occulté la dimension transgressive du message
de François. Les mouvements hippies des années 1960 et les premiers écologistes avaient
redécouvert, à leur façon, cet aspect de la morale franciscaine. Dans cette perspective, on a
souvent oublié le contexte politique violent dans lequel s'est exprimé ce message, d'où sa
transgression. François, lui-même, avait été, dans sa jeunesse, un chevalier fougueux dont l'idéal
était de tuer. Jacques Dalarun, spécialiste de la vie monastique à l'époque médiévale, rappelle
combien François s'est engagé pour la paix, au péril de sa vie ; plusieurs fois, il fut arrêté pour être
exécuté. Alors que les croisades faisaient rage, il s'est rendu à Jérusalem pour rencontrer le neveu
du Sultan d'Égypte, Malik al Kamil, qui s'entourait de savants et de philosophes disciples
d'Averroès. Leur rencontre inattendue fut sous le signe du dialogue car chacun était animé d'une
grande ouverture aux valeurs culturelles et spirituelles de son interlocuteur. Ce qui déchaîna la
colère des chefs religieux du côté des chrétiens et des musulmans.
De retour en Italie en 1220, François renonce à la direction de l'ordre qu'il a fondé ; il se retire
dans le couvent de Saint-Damien. Il commence à avoir des problèmes de santé aux yeux. Il
s'enferme dans une cellule obscure, assaillie par les souris ; son entourage y voit une
manifestation du diable. Dans ce contexte de désolation physique et humaine, François écrit Le
cantique de frère Soleil alors qu'il ne voit plus ni la lumière ni le feu qu'il va glorifier dans son
cantique. C'est une louange au créateur qui est à l'origine des grands éléments : le soleil, la lune, le
vent, l'eau, le feu, la terre. Ils sont tous qualifiés de ‘ frère' et de ‘sœur' comme faisant partie d'une
famille terrestre qui doit son existence au Créateur. Les dernières strophes sont une louange au
Seigneur, au-delà de la maladie et de la mort.
C'est un cri de courage et de foi de la part du saint, étant donné les conditions douloureuses dans
lesquelles il a attendu la mort, survenue un an plus tard, en 1226. Ce texte lumineux et poétique, à
découvrir en français, est accompagné d'illustrations de grande qualité : ce sont, à une exception
près, de magnifiques reproductions de manuscrits médiévaux. La plupart provient des fonds de
bibliothèques municipales et universitaires françaises, trésors trop souvent ignorés. À ce titre,
cette publication des éditions d’Alma Édition est une double découverte à ne pas manquer.
PHILIPPE GODOY
Radio
France Culture, 8 mai 2014
" Devenu presque aveugle, retiré dans l'un de ses ermitages, François d'Assise (1181/1182-1226)
compose son Cantique de frère Soleil vers la fin de sa vie. Il le chante haut et fort au pire de ses
maladies et jusqu'à sa mort. Évoquant le soleil, la lune et toutes choses créées, François
bouleverse la poésie tout comme son idéal de vie a bouleversé le christianisme.
Ce chant qui compte parmi les textes fondateurs de la littérature italienne a une histoire
passionnante et méconnue. En suivant sa genèse et les circonstances de sa composition, Jacques
Dalarun fait revivre l'aventure spirituelle d'un homme formé dans la culture courtoise et
chevaleresque des élites du XIIIe siècle qui décida brusquement de « suivre nu le Christ nu ». On
redécouvre ici le « petit pauvre » et sa fraîcheur révolutionnaire mais aussi tous les paradoxes,
étonnamment contemporains, d'un renversement des valeurs par la seule force de la faiblesse et
de la joie." Présentation de l'éditeur

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