Au secours! Quel prix pour mes œuvres

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Au secours! Quel prix pour mes œuvres
Au secours! Quel prix pour mes œuvres ?
Il y a quelques mois, un de mes amis peintres a mis ses nouvelles toiles sur les réseaux sociaux. Peu de temps
après, une personne qui le connaissait via Facebook lui a demandé si ses œuvres photographiées étaient à vendre.
Elle voulait en acheter une qui était en cours de finition et qu’elle aimait particulièrement.
En fait, elle n’était pas seulement intéressée par l’achat de cette œuvre, non encore terminée, mais elle en voulait
une deuxième pour en faire un diptyque.
Juste en mettant ses œuvres sur Facebook, il avait un acheteur non pas pour un, mais pour deux tableaux! C’était
super !
Le seul problème qu’il a alors rencontré, c’était de donner un prix à ces deux tableaux (qui en fait n’allaient en
faire qu’un).
Oups !
Je suis convaincu que mettre un prix sur une œuvre est la chose la plus difficile à faire pour un artiste. Comment
faire pour décider d’une valeur ? Donner un prix semble être un grand trou noir avec pas mal de stress. Le prix
est trop élevé, ils s’en iront, le prix est trop bas vous vous dévalorisez et avez en quelque sorte un manque à
gagner.
Ayant discuté avec mon ami peintre de cette opportunité Facebook, nous étions déterminés à réfléchir encore
une fois à une structure de prix plutôt que simplement prendre un montant au hasard pour chaque nouvelle
œuvre.
Voici quelques-unes des règles que je vous propose de suivre, et quelques conseils qui, je l’espère, vous aideront
à définir les prix de vos œuvres en toute confiance.
Les règles de base pour chiffrer les œuvres des peintres
1) Rappelez-vous que vos prix évolueront.
Si comme mon ami, vous avez un client à qui vous devez donner un prix, sachez qu’en même temps que votre
notoriété sera en hausse vous aurez la possibilité d’augmenter vos prix. Vous pourrez même revoir à la hausse
vos prix dès la prochaine commande.
En d’autres termes, ce que vous facturez à ce client n’a rien de définitif pour vos futures œuvres. Alors, ne
stressez pas trop à ce sujet. Gardez à l’esprit qu’il vaut toujours mieux aller en augmentant vos prix plutôt qu’en
les baissant. Laissez-vous une marge de croissance. Ne partez pas trop haut dès le début.
2) Ne sous-évaluez jamais vos prix.
Ceci dit, ne pas prévoir les futures augmentations de prix n’est généralement pas le souci numéro un de la
plupart des artistes. Nombreux sont ceux qui ont plutôt tendance à ne pas facturer assez.
Il est même surprenant de voir parfois des artistes vendre leurs œuvres moins cher que leurs coûts de production
ou même moins cher que les frais d’encadrement ! Autant dire que c’est absurde.
Assurez-vous, pour chaque œuvre que vos prix couvrent au moins les coûts réels (toile, peinture, encadrement,
frais d’expédition – s’ils sont compris).
Vous devez aussi prendre en considération le temps que vous avez passé pour la création de votre œuvre. Les
artistes qui débutent ne peuvent souvent pas demander des prix assez élevés pour payer correctement leur travail
et le temps qu’ils y ont passé, mais c’est certainement l’objectif à long terme !
Si vous avez la chance de travailler rapidement, vous pouvez vous en sortir en affichant des prix plus bas, car
chaque œuvre prend moins de temps à produire.
Toutefois, si vous êtes très soucieux des détails et méticuleux, ce qu’un autre artiste pourrait vendre à 500 euros
ne représenterait pour vous que quelques centimes par heure travaillée. Ce qui n’est pas tenable dans le temps.
Vous n’avez alors d’autre choix que de demander un peu plus ou de comprendre comment arriver à produire un
travail moins coûteux (des originaux plus petits, des reproductions, des lithographies, etc.)
Prenez donc en compte vos temps de production dans vos prix.
Vous n’êtes pas sûr de ne pas sous-estimer vos prix ? Un système à toute épreuve : le ressenti.
Si vous ressentez la possibilité d’une belle vente pour une de vos dernières œuvres, il y a fort à parier que vous
devez augmenter le prix.
Cette opportunité par rapport au ressenti peut être sur la qualité de l’œuvre achevée, mais aussi sur
l’environnement de la vente (thème d’une exposition, effet de mode, enchères, etc.)
D’autre part, si vous n’avez pas le ressenti que vos prix sont un peu trop élevés, ce qui met parfois malalaise,
c’est probablement que vous sous-estimez vos tarifs !
Commencez par observer si vous avez tendance à sous-estimer ou surestimer le prix de votre travail et ajustez-le
en conséquence.
3) Soyez clair et cohérent.
Bien sûr, votre objectif est d’être payé correctement pour le temps que vous avez passé à créer vos œuvres, mais
ce qui est vrai aussi, c’est que certaines pièces prennent beaucoup plus de temps que d’autres.
Vous savez combien de temps vous avez passé sur chaque œuvre, mais les clients ne le savent pas (et ne s’en
soucient généralement pas). Combien de temps vous avez mis pour créer le tableau qui leur plaît ? Il est très
probable qu’ils ne vous poseront jamais cette question.
Facturer à l’heure peut entraîner beaucoup de confusion pour des clients potentiels qui regardent deux œuvres de
mêmes dimensions et se demandent pourquoi les prix sont si différents.
Les clients qui sont dans le doute n’achètent pas, c’est pourquoi il faut être clair et cohérent.
Les prix basés sur les dimensions.
Si vous êtes peintre, une autre façon de s’assurer que vous êtes clair et cohérent est de mettre en place des prix
en rapport avec les dimensions des œuvres. Ce peut être soit par dimensions en cm (h x l) soit par point (réf.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Châssis_(peinture) )
Ceci rend vos prix plus compréhensibles pour vos clients potentiels, et cela empêche de facturer trop cher des
pièces que vous aimez particulièrement. Ce qui pourrait laisser penser que vos prix sont aléatoires et déroutants
(et souvenez-vous… les clients qui sont dans le doute n’achètent pas).
Avec la tarification basée sur les dimensions, il vous suffit de déterminer votre multiplicateur (le prix de base
multiplié par la dimension du tableau). Vous saurez alors quel prix vous pouvez donner à votre œuvre.
Différents prix pour différents médias ?
Bien entendu, le média que vous utilisez pour vos œuvres à une influence sur les prix calculés. Si vous ne
peignez que des aquarelles ou seulement des huiles, il n’y a pas de problème. Mais si vous peignez à la fois sur
toile et sur papier, ça devient un peu plus difficile pour fixer les prix.
Pour diverses raisons, la peinture sur papier a tendance à se vendre moins cher que la peinture sur toile, même si
elle nécessite un encadrement, ce qui est une dépense supplémentaire. S’il faut payer pour un encadrement,
l’œuvre sur papier revient souvent plus chère qu’un tableau peint sur toile !
Alors que doit faire l’artiste !
Je n’ai pas de réponse définitive à cette question, si ce n’est de vous reporter à la rubrique suivante…
4) Faites vos recherches.
Il peut-être utile de regarder autour de vous ce que les autres artistes font payer pour leur travail. Les artistes de
votre région et particulièrement les artistes qui en sont au même stade que vous de leur carrière.
Combien les autres artistes facturent-ils pour leurs œuvres, sur papier, encadrées ? Ou pour des œuvres non
encadrées, sur papier ? Pour leur travail sur toile ?
Le défi est, avec cette idée de comparaison des prix, que ce que les autres font payer risque d’être, à la longue,
pareil pour tous.
Quand vous faites vos recherches, assurez-vous que vous prenez en considération votre positionnement
marketing:
-
voulez-vous que vos œuvres soient accessibles par tous ?
Voulez-vous que votre marque soit positionnée dans le haut de gamme, un artiste dont le prix des
œuvres est élevé ?
C’est un choix de positionnement à faire.
Pour décider des prix de leurs œuvres, certains artistes lors d’une petite étude sur leur marché régional
s’aperçoivent que les prix bas de gamme et haut de gamme sont souvent les plus saturés. Le milieu de gamme a
probablement moins de concurrence. A vous de voir ce qui se fait dans votre région.
5) Indiquez vos prix puis attendez.
Le mois dernier, avec un ami sculpteur, nous avons eu le plaisir de recevoir un couple qui avait fait plus de 200
km pour venir commander une sculpture pour leur anniversaire de mariage.
Le sculpteur leur avait déjà donné sa gamme de prix qui était de 500 à 3.000 euros (première erreur, ne jamais
donner de fourchette haute !) et quand ils nous ont dit ce qu’ils attendaient de l’artiste nous avons réalisé que
c’était une des pièces les plus importantes jamais réalisées.
En d’autres termes, il s’agissait du prix le plus haut pour une œuvre proposée par le sculpteur.
Le problème est qu’il n’avait encore jamais mis en vente une œuvre de 8.000 euros et il avait peur de demander
un tel montant qui lui semblait très important. Il avait peur de les effrayer et de perdre la commande.
Alors quand le moment est venu de leur donner une estimation du prix de l’œuvre à réaliser, il a bafouillé et dit
“eh bien, ce que vous me demandez se trouve en haut de ma gamme de prix”.
Puis au lieu de se taire et de voir quelle est leur réaction, il leur a dit sans réfléchir “… mais si vous trouvez que
8.000 euros c’est trop pour votre budget, je peux réduire la taille afin de la rendre moins chère”.
Oups !
Le mari a dit “6.000, 7.000 ou 8.000 euros, c’est la même chose pour moi. Ce que je veux c’est qu’elle soit
comme nous venons de voir ensemble. Mais pour partager la poire en deux, comme vous me le proposez
gentiment je suis d’accord pour les 7.000 euros”.
Eh voilà ! Simplement parce qu’il ne pouvait pas donner un prix et attendre, il a perdu 1.000 euros en quelques
instants. (et revenir sur ce que l’on a dit ne fonctionne jamais. Le client perd confiance). Une leçon à retenir.
Celle-là est importante, alors je me répète: Donner votre prix puis taisez-vous ! Ne vous justifiez pas, ne vous
excusez pas.
Dans mon expérience passée, je l’ai souvent fait. Ne soyez pas sur la défensive par rapport à vos prix. Sinon
vous entrez dans des discussions interminables. Dans la vente de votre art, vous n’êtes pas sur un déballage de
brocante ou de vide-grenier. Si le client aime votre travail, il paiera le prix demandé… Ou alors c’est qu’il ne
peut pas se l’offrir.
De même, si vous envoyez un email à un client potentiel, “ indiquez votre prix et rien d’autre, ne vous justifiez
pas. Cela peut prendre cette forme:
“Pour ce tableau, le prix est de XXX € (plus les frais d’expédition, si vous facturez séparément ces frais)”
Ou
“ Je facture X € par point et ce tableau est de 12 points le prix est donc de XXX € (X € x 12 points)”
Puis :
“Si vous voulez l’acheter, confirmez-le-moi simplement et je vous enverrai un lien pour une page de paiement
où vous pourrez payer avec une carte de crédit ou votre compte PayPal (ou autres modes de paiement que vous
acceptés). Une fois le paiement de l’œuvre reçu, ainsi que l’adresse de livraison, je vous expédierai le tableau
par (la société que vous utilisez pour l’envoi de vos œuvres)”.
(Assurez-vous que vous indiquez la date d’envoi après paiement – un jour ? Une semaine ? L’œuvre a-t-elle
besoin de sécher un peu plus, d’être vernie ?)
En conclusion
Le plus grand challenge concernant les prix c’est qu’il n’y a pas de règles absolues. Tout dépend de vous, votre
travail, d’où vous vivez, d’où vous en êtes dans votre carrière. Il y a tant de variables que cela peut nous
désorienter !
Les conseils que nous partageons ici peuvent vous mettre un peu plus en confiance pour décider de vos prix. Je
ne vous mentirai pas, donner un prix à une œuvre reste un exercice très difficile. Mais j’espère que ces quelques
règles de base vous aideront dans la négociation de vos œuvres.
N’hésitez pas à me donner votre avis ou à me dire comment vous procédez pour donner un prix à vos œuvres.