Les apports de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites

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Les apports de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites
ACTUALITÉ
SYNDICAT
EXPRESSION
DOSSIER
SOCIÉTÉ
➔
retraite
Les apports de la loi
du 21 août 2003 portant
réforme des retraites
Pourquoi la CFE-CGC
est favorable à la loi
La CFE-CGC participe depuis plus de
cinquante ans à la gestion des régimes
de retraites de base et complémentaires.
Aujourd’hui, compte tenu des mutations
sociologiques et économiques passées
et futures, il est indispensable de faire
évoluer ces régimes.
Pour la CFE-CGC, ces changements doivent faire progresser les régimes de
retraite vers davantage de justice et de
solidarité. Avec beaucoup de ténacité et de
créativité, la CFE-CGC est restée acteur
d’une réforme attendue et nécessaire. À
ce titre, elle a participé à de nombreuses
rencontres avec les partenaires sociaux
et le gouvernement afin que la réforme
en gestation intègre les particularités des
salariés de l’encadrement. La CFE-CGC
a porté avec détermination ses revendications jusqu’au bout du processus de
négociation avec le gouvernement. La
forte mobilisation du 13 mai dernier lui a
permis d’obtenir les résultats suivants :
• La répartition est confortée : la solidarité intergénérationnelle entre actifs et
retraités demeure le socle de notre système. Le principe de la répartition est
au cœur du pacte social qui unit les
générations.
• Le principe de contributivité des droits
à retraite est renforcé : tout retraité a
le droit de percevoir une allocation de
retraite en rapport avec les revenus qu’il
a tirés de son activité.
• L’amélioration des droits à la retraite
pour ceux qui choisissent de continuer
à travailler alors qu’ils pourraient bénéficier d’une retraite à taux plein.
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• Des contreparties à l’harmonisation
public/privé sont offertes aux fonctionnaires (création d’une caisse complémentaire pour prendre en compte
les primes).
• La possibilité de racheter des années
d’études.
• Le recul de l’âge de la mise à la retraite
d’office par l’employeur.
• Des possibilités de départ avant 60 ans
sont ouvertes pour les salariés ayant
commencé à travailler tôt.
Désormais, nous devons faire preuve de
force de persuasion et de pédagogie pour
expliquer, notre accompagnement de la
réforme d’une part et les apports de la
loi Fillon, d’autre part. La CFE-CGC
approuve la réforme parce que sa philosophie générale correspond à la sienne.
Progressivité de la réforme :
une revendication CFE-CGC
La réforme des retraites instaure une évolution progressive des régimes existants.
Il ne s’agit aucunement d’une révolution
faisant table rase du passé. Au contraire.
La réforme anticipe en douceur le problème du papy-boom afin de ne pas agir
une fois de plus le dos au mur ou dans
la précipitation. Ainsi, certaines mesu-
res entrent en vigueur à compter du
1er janvier 2004, notamment les départs
anticipés pour les salariés ayant commencé à travailler tôt ou le rachat des
années d’études, alors que d’autres ne
sont prévues qu’à partir de 2008, telles
que l’allongement éventuel de la durée
de cotisation pour tous les salariés.
Responsabilisation
La réforme répond à une préoccupation majeure de la CFE-CGC : responsabiliser les salariés face à l’avenir de
leurs retraites. Il est grand temps de
leur expliquer que, puisqu’ils vivront
plus longtemps et que, par conséquent,
ils percevront leur pension de retraite
pendant une durée plus longue, la
retraite va donc coûter de plus en plus
cher. Cette évolution sociale, démographique et économique est positive.
Elle est en même temps renforcée par
le rétrécissement de la durée de l’activité professionnelle (entrée tardive sur
le marché du travail et sortie précoce).
Par conséquent, afin de conserver un
niveau de vie satisfaisant pour les
retraités, la CFE-CGC souscrit à l’allongement de la durée de cotisation dès
lors que le marché du travail le permettrait. Ceci dit, la réforme forme un
tout et la limiter au seul allongement
de la durée de cotisation s’avère très
réducteur, même si nous avons considéré comme légitime de traiter de façon
égalitaire les salariés du public et du
privé. En effet, la CFE-CGC a condi-
tionné son adhésion à l’obtention de
contreparties importantes telles que le
rachat des années d’études, les possibilités de cumul emploi retraite. La
CFE-CGC se réjouit d’avoir réussi à
dépasser le dogme du seul allongement
de la durée de cotisations pour financer
la réforme.
Pragmatisme
La CFE-CGC a toujours dit que l’allongement de la durée
d’assurance n’a de sens que si la durée d’activité est réellement
prolongée. La loi comporte des dispositions qu’elle réclame
depuis longtemps pour inciter les seniors à rester en activité
et à décourager les entreprises à s’en séparer. Il s’agit notamment de la mise à la retraite d’office par les employeurs, du
cumul emploi retraite ; en fait, du choix laissé à chacun et
non imposé.
La CFE-CGC relève également avec satisfaction que la
réforme est pragmatique : des clauses de revoyure sont prévues en 2008, 2012 et 2016. Le COR rendra un rapport qui étudiera les paramètres de financement des régimes de retraite afin
de déterminer si une augmentation de la durée d’assurance
s’avère possible. Ce mécanisme permet de continuer à faire
évoluer les régimes compte tenu des développements économiques, démographiques et sociaux.
Une liberté de choix
La loi a notamment pour objet d’accroître la liberté de choix, en particulier
au moment du départ à la retraite, de
l’ensemble des salariés. La réforme
donne la possibilité aux assurés de travailler plus longtemps. En parallèle,
elle renforce le droit à l’information et
crée de nouvelles obligations à la
charge des régimes de retraite afin que
chacun connaisse le montant futur de sa
retraite (information individuelle périodique, pré-calcul de la retraite à partir
d’un certain âge). La réforme devrait
permettre de choisir, en toute connaissance de cause, de prendre sa retraite
ou bien de continuer à travailler pour
augmenter le montant de la pension
future.
Réflexion sur la pénibilité au travail
La loi du 21 août 2003 invite les organisations professionnelles et syndicales représentatives au niveau national à engager
d’ici à trois ans une négociation interprofessionnelle puis, dans
les branches, sur la définition et la prise en compte de la pénibilité. Cette négociation interprofessionnelle devra s’appuyer
sur le travail préalable accompli dans les branches sur l’identification des métiers les plus pénibles en tenant compte de
leurs évolutions. La pénibilité des années 50 n’est pas celle
d’aujourd’hui. La CFE-CGC tient à souligner que de nombreux
pays ont lancé le débat sur ce sujet sans jamais aboutir.
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S’il est important de définir la notion de pénibilité au travail,
la CFE-CGC tient à rappeler qu’il est primordial de déterminer le moment où elle sera prise en compte dans la carrière du
salarié. Il n’est pas inéluctable d’avoir un métier pénible tout
au long de la vie.
Un dispositif préventif de bonne gestion des carrières serait
plus adapté pour réduire la durée de la pénibilité à laquelle
serait exposé un salarié.
Actuellement, la CFE-CGC se mobilise en faveur d’une bonne
application de la réforme. Elle invite le gouvernement à faire
paraître les décrets le plus tôt possible pour sortir les salariés
de l’incertitude et éviter la pratique des économies de bouts
de chandelles. Un certain nombre de dispositions contenues
dans la loi nécessitent des décrets d’application. Nous serons
particulièrement attentifs à la parution des textes traitant des
points suivants :
• Le rachat d’années d’études. Applicable dès le 1er janvier
2004, selon une volonté de la CFE-CGC, les modalités seront
fixées par décret.
• Création d’un régime de retraite additionnel. À compter du
1er janvier 2005, la fonction publique bénéficiera d’un régime
additionnel obligatoire, par répartition et par points, un
décret précisera les modalités d’application.
• Préretraites. Pour décourager le recours aux préretraites d’entreprise, les allocations seront assujetties à une contribution
spécifique acquittée par l’entreprise. Un décret précisera les
possibilités de cotiser à un taux moindre.
• Majoration de pension pour les personnes travaillant, à partir du 1er janvier 2004 au-delà de 60 ans et remplissant déjà
la condition de durée d’assurance pour avoir le taux plein. Le
taux de majoration est fixé par décret.
• Le départ anticipé des travailleurs handicapés ayant accompli une période de travail significative pourront partir avant
60 ans. Un décret fixera l’âge, la durée d’assurance nécessaire
et le taux d’incapacité.
• Le départ anticipé pour les carrières longues : le décret fixant
les conditions d’âge, de début d’activité et de durée de cotisations est attendu avec impatience car le départ anticipé
devrait être effectif le plus tôt possible.
• Le cumul emploi retraite : la loi prévoit d’assouplir les conditions d’application. À compter du 1er janvier 2004, un retraité
pourra exercer une activité professionnelle lui procurant des
revenus qui, ajoutés aux pensions de retraite, seront inférieurs au dernier revenu d’activité. En cas de dépassement de
revenus, l’intéressé doit en informer sa caisse et le service de
la pension sera suspendu. Un décret en précisera les modalités d’application.
La reprise d’activité pourra désormais s’effectuer chez le
dernier employeur six mois après la liquidation de la pension
de retraite.
• Le droit à l’information des actifs : sa périodicité et l’âge à
partir duquel elle doit être délivrée feront l’objet d’une
réflexion.
L’augmentation progressive de la durée d’assurance
Des repères : la réforme Balladur de
1993 a augmenté progressivement la
durée d’assurance requise pour obtenir
la retraite à taux plein à 60 ans de 150
à 160 trimestres (passage de 37,5 ans à
40 ans de cotisation). Un trimestre supplémentaire a été ajouté chaque année
entre 1993 et 2003.
La loi du 21 août 2003 ne touche pas à
la durée de cotisation du secteur privé
jusqu’au 31/12/2008. Par contre, à
compter du 1er janvier 2004 et jusqu’au
31 décembre 2008, la durée de cotisation de la fonction publique passe progressivement de 37,5 ans à 40 ans. Il
sera exigé des fonctionnaires 152 trimestres en 2004, 154 en 2005, 156 en
2006, 158 en 2007 et 160 en 2008.
Outre l’alignement de la durée d’assu-
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rance, la loi modifie en profondeur les
éléments constitutifs du dispositif de
retraite de la fonction publique. Ce dernier abandonne deux de ses références :
la durée de service accompli et sa
semestrialisation pour adopter deux
notions propres au secteur privé, à
savoir la durée d’assurance et la trimestrialisation de la durée de cotisation. Comme pour le privé, la revalorisation des pensions et du minimum
garanti se fera, chaque année et par
décret, sur l’évolution de l’indice des prix
et non plus sur la base de l’augmentation
du point d’indice.
La durée d’assurance requise pour l’obtention d’une pension à taux plein sera
donc harmonisée entre le régime général et les régimes de la fonction publique
d’ici à la fin 2008. À partir de 2009, la
durée de cotisation augmentera pour
tous les assurés d’un trimestre par an
pour atteindre 41 annuités en 2012 (164
trimestres) si les conditions économiques le permettent.
La loi pose le principe de l’égalité de
traitement des assurés ayant cotisé dans
un seul régime (unipensionnés) et de
ceux ayant relevé de différents régimes
(pluripensionnés). Désormais, le calcul
des 25 meilleures années, pour les personnes ayant cotisé à plusieurs régimes
de retraite, sera proratisé en fonction de
la durée de cotisation dans chaque
régime, ce qui ne pénalisera plus les
personnes à carrière multiple qui
devaient justifier d’une durée d’activité
dans chaque régime.
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