Concurrences - Kobel - Avocat - Attorney-at-law
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Concurrences Revue des droits de la concurrence | Competition Law Review Jurisprudences européennes et étrangères Chroniques l Concurrences N° 4-2015 l pp. 223-231 Pierre Kobel [email protected] Avocat, De Weck Zoells Kobel, Genève Silvia Pietrini [email protected] Maître de conférences, Université de Lille (Lille II), Centre Réné Demogue-CRDP Jean-Christophe Roda [email protected] Professeur, Université de Toulon Chroniques Retrouvez les textes et décisions commentés sur Concurrences + Pierre Kobel 1. Europe Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. Jurisprudences européennes et étrangères 1.1. Italie Pratique concertée – Parallélisme de comportements : Le Conseil d’État Italien précise la charge de la preuve qui pèse sur l’Autorité de concurrence en présence d’un parallélisme de comportements (CE it., 14 avril 2015, publié le 4 sept. 2015, affaire du “ferry cher”) [email protected] Avocat, De Weck Zoells Kobel, Genève Silvia Pietrini [email protected] Maître de conférences, Université de Lille (Lille II), Centre Réné Demogue-CRDP Jean-Christophe Roda [email protected] Professeur, Université de Toulon 1. Europe 2. Etats-Unis 223 Le Conseil d’État Italien précise 228 La Cour d’appel du neuvième circuit rejette des allégations de collusion à propos du marché des guitares électriques et donne des indications sur la manière d’appréhender une entente en “étoile” US Court of Appeal, 9th Circuit, 25 août 2015, In re Musical Instruments and Equipments Antitrust Litigation, 2015 WL 5010644 C.A.9 (Cal.) la charge de la preuve qui pèse sur l’Autorité de concurrence en présence d’un parallélisme de comportements CE it., 14 avril 2015, publié le 4 sept. 2015, affaire du “ferry cher” 225 The Swiss Competition Commission adopts a new Communication regarding the assessment of vertical arrangements in the motor vehicle sector COMCO, 29 June 2015, Communication regarding the assessment of vertical arrangements in the motor vehicle sector Par un arrêt du 14 avril 2015, publié le 4 septembre, le Conseil d’État a rejeté le recours présenté par l’Autorité garante de la concurrence et du marché (ci-après “AGCM”) contre la décision du Tribunal administratif du Latium (ci-après “TAR Latium”) qui, en 2014, avait annulé la décision rendue dans l’affaire du “ferry cher”. Pour mémoire, l’AGCM avait sanctionné quatre compagnies maritimes pour s’être concertées sur les prix, en s’appuyant essentiellement sur l’augmentation significative des prix de transport constatée sur certains trajets touristiques. Le TAR Latium avait par la suite annulé la décision, estimant que l’AGCM n’avait pas démontré que ces augmentations tarifaires étaient le résultat d’une pratique concertée (à ce sujet, voir notre commentaire, “Le Tribunal administratif du Latium annule la décision de l’Autorité garante de la concurrence et du marché dans l’affaire du ‘ferry cher’”, Concurrences n° 3-2014, pp. 215-216). Le Conseil d’État confirme la décision du juge administratif en revenant sur la charge de la preuve qui pèse sur l’Autorité de concurrence en présence d’un parallélisme de comportements. La preuve d’une pratique concertée peut être établie en présence d’un faisceau d’indices graves, précis et concordants De façon classique, le Conseil d’État a rappelé la différence entre l’accord qui implique une manifestation de la volonté commune des entreprises d’avoir un comportement déterminé sur le marché et la pratique concertée qui correspond à une forme de coordination entre les entreprises qui, sans prendre la forme d’un véritable accord, substitue, sciemment, une coopération expresse entre les entreprises à l’aléa de la concurrence, en renonçant dès lors à déterminer de façon autonome leur conduite sur le marché. S’il est possible de “réagir intelligemment au comportement connu ou présumé des concurrents”, il est, en revanche, exclu tout contact “direct ou indirect ayant pour objet ou pour effet de créer des conditions de concurrence qui ne correspondent pas aux conditions normales du marché”. Par conséquent, l’entente restrictive de concurrence par le biais d’une pratique concertée exige des “comportements entre plusieurs entreprises, uniformes et parallèles, qui constituent le fruit d’une concertation, et non d’initiatives unilatérales”. Compte tenu de la rareté des preuves documentaires, il est possible de s’appuyer sur des indices, à conditions que ces derniers soient à la fois graves, précis et concordants. En pratique, l’autorité pourra retenir à titre d’exemple : 1) la durée, l’uniformité et le parallélisme de comportements ; 2) l’existence de réunions entre les entreprises ; 3) les engagements, même lorsqu’ils sont génériques et apparemment non ambigus, à élaborer des stratégies et des politiques communes ; 4) les informations réciproques ; 5) le succès pratique des comportements qui ne pourrait pas découler d’initiatives unilatérales mais seulement de pratiques concertées… Concurrences N° 4-2015 I Chroniques I Jurisprudence européenne et étrangère 223 Au regard du parallélisme de comportements, le Conseil d’État adopte une démarche pédagogique, en évoquant la distinction faite tant au niveau européen qu’au niveau national, entre “le parallélisme naturel et le parallélisme artificiellement induit par des ententes anticoncurrentielles” qui devra être démontré à partir d’éléments probatoires internes – le caractère irrationnel de la conduite par rapport au comportement que l’entreprise aurait adopté si le jeu de la concurrence n’avait pas été altéré – et d’éléments probatoires externes au comportement adopté par chaque entreprise. Cette distinction a des conséquences notamment sur l’identification de celui sur lequel pèse la charge de la preuve : l’existence d’une conduite irrationnelle par rapport au jeu normal de la concurrence pèse sur l’Autorité de concurrence alors que la charge des preuves extérieures à la mise en œuvre d’une entente illicite pèse sur l’entreprise présumée contrevenante. Il faut alors distinguer deux hypothèses. Si l’Autorité de la concurrence a constaté un simple parallélisme de comportements sur le marché et que son raisonnement se fonde uniquement sur le postulat que les conduites contestées ne peuvent être expliquées que par l’existence d’une concertation entre les entreprises, ces dernières n’auront qu’à apporter des preuves qui démontrent des “circonstances plausibles” pouvant mettre “sous une lumière différente les faits établis par l’Autorité”, permettant ainsi une explication différente de celle retenue par l’Autorité. En revanche, si la preuve d’une concertation ne s’appuie pas sur la simple constatation d’un parallélisme de comportements mais aussi sur des indices qui montrent l’existence d’une concertation et un échange concret d’informations entre les entreprises, cette fois-ci, chaque entreprise devra démontrer que la conduite et les contacts ne constituaient pas la manifestation d’une entente anticoncurrentielle. Or, au cas d’espèce, le Conseil d’État a reproché à l’Autorité de la concurrence de s’être appuyée exclusivement sur la constatation d’un parallélisme de comportements pour retenir l’existence d’une pratique anticoncurrentielle, alors que ce même parallélisme de comportements avait donné lieu à une augmentation non homogène des prix pratiqués par les différentes compagnies maritimes. Selon la Haute Juridiction, l’AGCM avait fondé son analyse sur des données relatives aux recettes moyennes unitaires par passager sans procéder à une analyse concrète et précise des prix réels pratiqués par les différents opérateurs maritimes. En outre, les accords commerciaux et les contacts entre les entreprises étaient en principe licites, aucune preuve n’ayant été apportée quant à l’échange d’informations sensibles ou à la concertation des prix pour la période visée. Enfin, l’explication du parallélisme de comportements fondée sur l’existence d’une concertation n’était pas la seule explication plausible. On retiendra les trois motifs du Conseil d’État. D’une part, l’AGCM n’a pas réussi à expliquer pourquoi deux entreprises présentes sur le marché en cause n’ont pas été sanctionnées alors qu’elles ont adopté le même 224 Concurrences N° 4-2015 I Chroniques I Jurisprudence européenne et étrangère comportement, en augmentant de façon significative leurs tarifs. En deuxième lieu, l’augmentation des prix peut constituer la réponse rationnelle aux augmentations sensibles de la matière première pour la période concernée par la pratique. Plus généralement, le juge administratif a considéré que le pourcentage d’augmentation a trouvé “une explication autonome et plausible dans un ensemble de plusieurs facteurs économiques négatifs ayant une incidence sur les entreprises qui opèrent dans le secteur de la navigation maritime”. En troisième lieu, la coïncidence chronologique de l’augmentation tarifaire opérée par les firmes en question peut être considérée comme “une conséquence directe de la grande transparence du marché en cause, caractérisée par la circonstance, intrinsèque à la nature des services offerts, que les prix appliqués par les différents opérateurs peuvent être connus par tous en temps réel, en permettant ainsi un monitorage constant des prix”. En effet, chaque entreprise est libre de modifier comme elle le souhaite ses prix et, à cette fin, elle peut tenir compte du comportement adopté par ses concurrents, comportement qui est largement prévisible dans un marché caractérisé par un degré élevé de transparence. Pour le Conseil d’État, en présence d’un marché à la fois oligopolistique et transparent, comme le marché en question, aucune entreprise n’adoptera des actes de concurrence sans avoir préalablement analysé les réactions probables de ses concurrents. Dans ce contexte, lorsqu’un opérateur procède à une augmentation des prix, les autres opérateurs tendent naturellement à mettre en œuvre des politiques tarifaires analogues, en particulier dans un contexte global caractérisé à la fois par une augmentation généralisée des différents facteurs de coût et par une détérioration de la rentabilité. À la lumière de ces considérations, le Conseil d’État a considéré que la création d’une situation d’équilibre oligopolistique fondée sur des ajustements progressifs des comportements des entreprises, concomitamment à une série de facteurs qui rendent les décisions unilatérales de chaque entreprise reconductibles à des impératifs économiques de caractère objectif, n’est pas, en soi, qualifiable de pratique concertée. Au cas d’espèce, l’explication du parallélisme de comportements fondée sur la concertation n’était pas par conséquent la seule explication plausible puisque l’analyse économique avancée par les défendeurs et les caractéristiques du marché permettaient d’exclure une concertation visant à échapper aux risques de concurrence. Cette décision est particulièrement importante au regard des droits de la défense des entreprises, car jusqu’à présent, une fois constaté le parallélisme de comportements, la caractérisation de la pratique anticoncurrentielle était établie si des contacts avaient eu lieu entre les entreprises, sans que l’Autorité de la concurrence soit obligée de démontrer le caractère anticoncurrentiel de ces contacts. Dorénavant, en présence d’un simple parallélisme de comportements, elle devra réunir des indices graves, précis et concordants pouvant surmonter les explications alternatives fournies par les entreprises présumées contrevenantes. S. P. n Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. La preuve du parallélisme de comportement créé artificiellement par l’entente anticoncurrentielle pèse sur l’Autorité de concurrence COMCO – Communication – Vertical arrangements : The Swiss Competition Commission adopts a new Communication regarding the assessment of vertical arrangements in the motor vehicle sector (COMCO, 29 June 2015, Communication regarding the assessment of vertical arrangements in the motor vehicle sector) On 29 June 2015, the Swiss Competition Commission (hereafter “COMCO”) adopted a Communication regarding the assessment of vertical arrangements in the motor vehicle sector (hereafter “CommAuto”) and a related Explanatory note (hereafter “the CommAuto Explanatory Note”) (https://www.news.admin.ch/message/ index.html?lang=fr&msg-id=58117). This CommAuto is aimed at replacing, as from the 1st of January 2016, the COMCO’s previous Communication regarding vertical agreements in the motor vehicle sector (hereafter “the 2002 Communication”) (DPC 2002/4 p. 778). Undertakings have now one year to adapt to the CommAuto, during which compliance with the 2002 Communication will be tolerated. Despite the fact that all cars sold in Switzerland are imported, the COMCO chose not to strictly adhere to the EU regulatory framework. The reason lies in the alleged but not demonstrated specificity of the Swiss motor vehicle market. This being said, restraints to imports remain an issue in Switzerland as evidenced by the not yet final condemnation of BMW on 7 May 2012, to pay a CHF 156 million fine for restricting parallel imports into Switzerland (DPC 2013/3 p. 540; Pierre Kobel, “The Swiss Competition Commission fines car manufacturer for preventing parallel imports by prohibiting its authorised dealers within the EEA from selling new cars to customers located in Switzerland (BMW)”, Bulletin e-Competitions N°49633, 7 May 2012,). Despite a substantial drop in the prices of new cars in Switzerland in the course of the last two years, a price differential still prevails. Legal Regime So Far: Defining the proper set of rules to regulate the motor vehicle sector within the context of the EU block exemption regulations has always been a challenge for the Swiss competition authorities. Initially, the COMCO proposed that car importers and distributors apply either a set of recommendations it had issued in 1996 after a sector inquiry in the car industry, or the EC Regulation 1475/95 (DPC 1997/1 p. 55. Actually, the COMCO decided after the entry into force of the Cartel Act (Loi sur les cartels et autres restrictions à la concurrence (LCart) du 6 octobre 1995, RS 251 (hereafter “CartA”), to first confirm the said recommendations adopted one year before by the Cartel Commission and, in the wake of the policy adopted by the Swiss Federal Council (the Swiss Federal Government) after the refusal of the European Economic Area Treaty, to propose either adherence to its recommendations or to EC Regulation 1475/95). Then, following an inquiry launched in 1998 against Citroën regarding its new “agency” and “concession” agreements (Completed in 2001, DPC 2002/3 p. 455), the COMCO issued the 2002 Communication, its first Communication regarding vertical agreements in the motor vehicle sector. The 2002 Communication, although maintained, was completed by two Explanatory Notes in 2004 on 2010 (DPC 2004/3 p. 971 and DPC 2010/3 p. 628). The 2002 Communication is now to be replaced by the CommAuto. In substance, the 2002 Communication was pledged on the R 1400/2002 (Commission Regulation (EC) No 1400/2002 of 31 July 2002 on the application of article 81(3) of the Treaty to categories of vertical agreements and concerted practices in the motor vehicle sector, OJ L 203/30, 1.8.2002 (hereafter the “R 1400/2002”)), with differences of course. However, with the 2002 Communication, car importers and distributors lost the ability to choose between compliance with the Swiss or the EC competition law framework. Only the Swiss framework remained (paradoxically) applicable. Finally, when the Commission adopted Regulation (EU) No 461/2010 (Commission Regulation (EU) No 461/2010 of 27 May 2010 on the application of article 101(3) of the Treaty on the Functioning of the European Union to categories of vertical agreements and concerted practices in the motor vehicle sector, OJ L 129/52, 28.5.2010 (hereafter the “R 461/2010”)) repealing the application of the R 1400/2002 in the aftermarket, the COMCO decided to maintain its 2002 Communication (DPC 2010/3 p. 628 ; this was confirmed in the second Explanatory Note regarding the said 2002 Communication in which the COMCO provided additional explanation on some of the concepts contained in the 2002 Communication in light of its practice and the new European framework). Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. 1.2. Suisse Thus, for the past years, issues in relation to vertical agreements in the motor vehicle sector were governed by article 5, para 1 and 4 of the Swiss Cartel Act (Federal Act on Cartels and other Restraints on Competition of 6 October 1995 (hereafter “CartA”). Article 5 para 4 CartA was introduced only after the 2002 Communication and entered into force on April 1, 2004. That provision presumes that vertical agreements suppressing efficient competition are illicit), the 2002 Communication and two Explanatory Notes. Not a simple legal framework for an import market only. The CommAuto Overall Purposes and Issues The CommAuto covers both the sale of new vehicles and the aftermarkets (article 12 CommAuto). Its purpose is to stimulate inter- and intra-brand competition on the distribution of new cars and spare parts, and on repair and maintenance services. Although not so clearly expressed in article 13 (article 13 says that the CommAuto prevails over the CommVert), Concurrences N° 4-2015 I Chroniques I Jurisprudence européenne et étrangère 225 In other words, the regime applicable to the distribution of motor vehicles in Switzerland appears to be more restrictive than in the EU. The same conclusion applies to the aftermarkets which are subject to more extensive provisions. Unlike the situation in the EU, one of the main remaining issues is the lack of clarity as to the applicable standard for deciding when certain territorial restrictions are illicit. In principle, a vertical territorial restriction is deemed to be illicit and subject to administrative sanctions, when it qualitatively and quantitatively significantly restricts competition (under article 5 CartA, only restrictions falling under the paragraphs 3 and 4 are subject to administrative sanctions. In relation to vertical restraints, this includes resale price maintenance and market or territorial partitioning. All other restrictions may be held illicit under article 5, paragraph 1, but are not subject to administrative sanctions). This means that legally, the finding that a territorial restriction is significant implies some level of concrete analysis (the standard will always be short of a full effect analysis). However, two years ago, the Federal Administrative Tribunal adopted a radical interpretation of article 5, para 4 CartA in the GABA case, deciding that qualitatively serious restrictions were enough to justify a conclusion that competition is significantly restricted and illicit. A decision by the Swiss Supreme Court in this case is still awaited which hopefully will shed more light on what that standard should be (the Federal Administrative Court decision is published in DPC 2013/4 p. 750. On the Federal Administrative Court decision, see J. Xoudis, Parallel trade: The Swiss Federal Administrative Court confirms the fines imposed by the Competition Authority to a Swiss toothpaste manufacturer and its Austrian licensor due to anticompetitive agreement on parallel trade (Gaba International, Gebro Pharma), mai 2014, Revue Concurrences n° 2-2014, Art. n° 66052, pp. 215-218. D. Guex, “The Swiss Federal Administrative Court upholds fines imposed by the Competition Commission to a Swiss toothpaste manufacturer and licensor and its Austrian distributor and licensee for 226 Concurrences N° 4-2015 I Chroniques I Jurisprudence européenne et étrangère prohibiting parallel imports from Austria to Switzerland (Gaba International)”, Bulletin e-Competitions, Art. N° 6420019, December 2013,) and the extent to which a concrete analysis is required. Considering this uncertainty, the CommAuto cleverly stipulates that the listed restrictions are to be considered as qualitatively serious (the 2002 Communication considered more bluntly and to the opinion of most, more improperly, that all restrictions listed were illicit and could find no economic justifications). Should the Swiss Supreme Court affirm the judgment of the Federal Administrative Tribunal, the territorial restrictions listed in the CommAuto will become practically per se illegal and subject to sanctions. If it does not, then any such restriction will require some level of concrete analysis in addition to the finding that the restriction is qualitatively serious, the scope of which is still unclear. Currently, one should assume that if and when the COMCO examines territorial restrictions falling under the provisions of the CommAuto, it is quite likely to find them illegal without much further concrete assessment (para 4 of the Explanatory Note repeats that the restrictions contained in art. 15 to 19 of the CommAuto may be held illicit and may lead to sanctions under art. 49a CartA). Specific terms Most of the definitions contained in the CommAuto match the contents of the R 461/2010, and when they do not, such as the definitions of motor vehicles (matching the content of the 2002 Communication and art. 1, para 1 lit. n) R 1400/2002), original spare parts (which in substance reproduces the content of Art. 1 para (1) lit. (t) of R 1400/2002), spare parts of matching quality (corresponding to art. 1, para. (1) lit. (u) of R 1400/2002), independent operators (corresponding to art. 5, para 2 sub 4 R 1400/2002) and members of a distribution network, they usually correspond to the R 1400/2002. Thus overall, in particular to our EU colleagues, the CommAuto and the Explanatory Note may look like a jumbled mix of past and current EU competition law concepts and terminology regarding the motor vehicle sector. In addition to the restrictions listed under the CommVert, the CommAuto considers as qualitatively serious, – Single branding obligations on the sale of new cars, spare parts or repair and maintenance services (art. 18 CommAuto. The Explanatory Note CommAuto recommends that certain qualitative obligations such as separate legal entities for each brand, separate show rooms or specific sales force for each brand, specific customer desk for each brand where exiguity would make multibranding excessively difficult, high requirements on the size of the dedicated showroom, be modified or abandoned (para 44)). – Specific territorial restraints on the sale of new cars, such as remuneration schemes of the distributor depending on the geographic location Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. the idea is that the communication applicable to vertical agreements in general, i.e. the Communication on Vertical agreements (hereafter “the CommVert”), (Communication concernant l’appréciation des accords verticaux du 28 juin 2010 (CommVert), http://www.weko. admin.ch/dokumentation/01007/index.html?lang=fr) will continue to apply in parallel to the CommAuto. Thus, akin to the EU regulatory framework, a double regulatory layer applies in Switzerland to all motor vehicle markets. In addition to the general provisions on restraints to vertical agreements, the CommAuto singles out specific restrictions which are not directly or specifically covered in the CommVert. Nevertheless, the provisions of the CommAuto are not subject to market thresholds/ceilings. In particular, the “de minimis” threshold contained in the CommVert under which restrictions are not considered to be significantly affecting the market when none of the parties’ market shares are higher than 15%, is not applicable (paragraph 13 of the CommVert and paragraph X. of its preamble). – Restrictions regarding services on vehicles under warranty, such as restraints placed on authorised repairers to provide services on cars under warranty; restraints on authorised distributors or authorised repairers forcing them to provide services under legal or extended guarantee only if the end user takes all other services from authorised repairers or if only original spare parts are used in relation to these other services (art. 15, para 2 and 3 CommAuto). To avoid partitioning of the Swiss market, the Explanatory Note specifies that authorised repairers must repair and service all vehicles of a given trademark, independently from the place of purchase in or outside of Switzerland or from an independent or an authorised distributor (para 11 of the Explanatory Note CommAuto). – Restraints on the aftermarket, such as (i) obliging an authorised repairer to offer repair services only if it distributes spare parts or new vehicles (art. 16 lit a CommAuto), (ii) allowing authorised distributors to distribute new cars only if they commit to providing repair and maintenance services or distributing spare parts (art. 16 lit b CommAuto. An authorised distributor and authorised repairer must remain free to carry out at its own choice either or both of sale and repair/maintenance activities (para 36 Explanatory Note CommAuto)), (iii) the right of authorised distributors to sub-contract repair and maintenance services to an authorised repairer (art. 16 lit. c CommAuto), (iv) forcing an authorised spare parts’ distributor to provide repair and maintenance services (art. 16 lit d CommAuto. Authorised distributors belonging to a selective distribution network of spare parts cannot provide repair and maintenance services (para 33 Explanatory Note CommAuto)), (v) preventing an authorised distributor to service competing motor vehicles (art. 16 lit e CommAuto), (vi) any restriction on members of a selective distribution network to supply independent repairers with spare parts (art. 16 lit. f CommAuto), (vii) restrictions on the freedom of spare parts manufacturers or repair equipment manufacturers to supply members of a distribution network, independent operators or final users (art. 16 lit. g CommAuto), (viii) restrictions on the freedom of members of a distribution network to cater for original spare parts or equipment, spare parts of matching quality of their own choice and to use such equipment for repair or maintenance services (art. 16 lit. h CommAuto). Any repairer meeting the qualitative criteria set forth in a selective distribution network must be able to become an authorised repairer (para 22 Explanatory Note CommAuto). In principle the number of authorised repairers cannot be quantitatively limited as it is the case for authorised distributors, unless the supplier can demonstrate that repair and maintenance services would otherwise be impaired (para 25 and 26 Explanatory Note CommAuto). Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. of the final users or destination of the vehicle, incentive schemes of the distributor depending on the destination of the vehicle or any other discriminatory supply requirement (art. 15, para 1 CommAuto). However, a supplier of motor vehicles may prohibit authorised distributors from selling to independent distributors (para 21 Explanatory Note CommAuto. The objective is not to protect independent distributors). –Agreements between car manufacturers and members of a distribution network restraining the access for independent operators to technical information, diagnostic equipment and other tools including software or specific instructions necessary to the repair and maintenance or to implementation of environmental measures (art. 17 CommAuto), – Notice periods shorter than, 6 months in relation to five year contracts or longer (art. 19, para 1 CommAuto), 2 years in relation to contracts concluded for an indefinite period (art. 19, para 2 CommAuto), 1 year in relation to contracts concluded for an indefinite period. The indefinite contracts can only be terminated upon written notice given one year or more in advance and provided the supplier pays an appropriate indemnification or terminates as a result of the need to re-organise the distribution network (art. 19 para 3 CommAuto). Conclusions One can only regret the choice for a “Swissfinish” which here means complicated legislative policy. Whilst the partition of the Swiss market from the EU remains an issue, it is not certain that the economics of the motor vehicle sector in Switzerland are so different from the rest of the EU to justify different rules. Still, in a more positive tone, whilst EU competition law aims at creating a common market within the European Union, the CommAuto contributes to creating a common market between Switzerland and the European Union. P. K. n Concurrences N° 4-2015 I Chroniques I Jurisprudence européenne et étrangère 227 Private enforcement – Entente en «étoile» – Class Action : La Cour d’appel du neuvième circuit rejette des allégations de collusion à propos du marché des guitares électriques et donne des indications sur la manière d’appréhender une entente en “étoile” (US Court of Appeal, 9th Circuit, 25 août 2015, In re Musical Instruments and Equipments Antitrust Litigation, 2015 WL 5010644 C.A.9 (Cal.)) Pour certains puristes, l’esprit du rock’n’roll américain serait mort avec la disparition d’Elvis Presley et le décès accidentel de Jimi Hendrix. Un arrêt de la Cour d’appel du 9ème Circuit, en date du 25 août 2015, montre que, en tout cas, dans le petit monde des instruments de musiques pour rockers, l’esprit du marché est lui, bel et bien vivant (In re Musical Instruments and Equipments Antitrust Litigation, 2015 WL 5010644 C.A.9 (Cal.)). Ayant pour cadre des allégations d’ententes dans le secteur de la guitare électrique, l’affaire est surtout l’occasion de revenir sur une problématique récurrente du private enforcement aux États-Unis : depuis presque dix ans, la jurisprudence cherche à disqualifier les actions les moins fondées très en amont du procès ; si cela peut se comprendre au plan conceptuel, en pratique, les exigences concernant le niveau de preuve requis lors de la phase préparatoire de la procédure posent de sérieuses difficultés aux plaignants qui échouent quasi-systématiquement. En l’espèce, une plainte avait été déposée contre plusieurs entreprises du marché de la guitare électriques et de leurs accessoires. Les plaignants, une classe en cours de constitution réunissant des acheteurs de guitares et d’amplificateurs, estimaient avoir été victimes d’une entente réunissant le plus gros détaillant de guitares et cinq des principaux fabricants américains. Plus précisément, les demandeurs alléguaient l’existence d’une stratégie anticoncurrentielle par laquelle le plus important revendeur de guitares des États-Unis, Guitar Center, se serait entendu avec les fabricants de ces instruments, les entreprises Fender, Gibson, Yamaha, Hoshino et Kaman, afin d’appliquer une politique d’annonce de prix de revente minimum. Le prix des guitares et des amplificateurs mis en vente aurait été fixé à partir d’un minimum déterminé avec les revendeurs et fabricants, dans le but de tirer les prix vers le haut. Entre 2004 et 2009, une telle politique de prix planchers aurait ainsi été suivie d’effets, créant un surenchérissement artificiel de ces instruments sur le marché américain et violant ainsi les dispositions du Sherman Act. L’entente serait à la fois verticale et horizontale : la stratégie aurait été initiée par Guitar Center, le revendeur détenant une position dominante, tandis que les fabricants se seraient accordés entre eux, afin de garantir que chacun appliquerait le schéma ainsi décidé. Les discussions auraient eu lieu dans le cadre d’une association de professionnels, la National Association of Music Merchants. 228 Concurrences N° 4-2015 I Chroniques I Jurisprudence européenne et étrangère Les origines de l’affaire À l’origine de cette plainte, il y avait une enquête menée par la Federal Trade Commission sur le marché des instruments de musiques. L’autorité soupçonnait en effet que la National Association of Music Merchants soit le cadre de collusions illicites et que des stratégies de fixation de prix illégales, entre 2005 et 2007 aient été décidées à cette occasion. L’association d’entreprises aurait ainsi servi de prétexte pour les membres de cette industrie qui se seraient échangés des informations de manière illicite, afin de manipuler les prix du marché. Face à la menace d’une action des autorités fédérales, la National Association of Music Merchants accepta de transiger et un consent decree fut émis par la Federal Trade Commission : en échange d’un abandon des poursuites, la National Association of Music Merchants acceptait de cesser ses pratiques et de modifier celles-ci à l’avenir, dans un esprit de plus grande transparence (In re National Association of Music Merchants, Inc., No. C-4255). La procédure d’émission d’un consent decree n’a rien d’un acte occulte : une fois qu’ils sont négociés, les consent decrees doivent être approuvés sur le fondement de l’intérêt public par une Cour fédérale. L’intervention du juge fait de ces actes des contrats judiciaires. La transaction doit être publiée 60 jours avant sa prise d’effet. Les tiers peuvent ainsi formuler des observations. Dans la présente affaire, c’est la publication de la décision à la fin de l’année 2009 qui a attiré l’attention des plaignants. Mais ces derniers n’ont pas pu s’appuyer formellement sur la procédure préalablement menée par la Federal Trade Commission. Comme en matière d’engagements en Europe, la conclusion de consent decrees aux États-Unis ne peut être assimilée à une reconnaissance de culpabilité de la part des auteurs de la pratique suspecte. Ni les autorités, ni le juge ne se prononcent officiellement sur le caractère illicite des pratiques : il n’y a donc pas de “prima facie effect” que pourraient faire valoir les plaignants afin de faciliter leurs poursuites civiles à l’encontre des auteurs de la pratique suspectée. Pour dire les choses autrement et de manière un peu imagée, les demandeurs devaient reprendre cette affaire à zéro, et convaincre le juge saisi de l’existence d’une entente anticoncurrentielle entre les différents acteurs précédemment ciblés par les autorités fédérales. En première instance, les plaignants furent déboutés de leurs demandes, la Cour de District estimant que les preuves fournies étaient insuffisantes. Se fondant sur sa désormais fameuse jurisprudence Twombly qui restreint considérablement la marge de manœuvre des plaignants (Bell Atlantic v. Twombly, 550 U.S. 544, 557, 127 S.Ct. 1955, 167L.Ed.2d 929, 2007), le juge a en effet considéré que la plainte ne déterminait pas avec une précision suffisante le fonctionnement de l’entente. En particulier, le rôle de chaque acteur n’était pas établi avec clarté. Bien qu’une procédure de discovery plus étendue ait été autorisée, rien de véritablement concret aux yeux de la Cour de District ne vint étayer la plainte. Un appel fut interjeté devant la Cour du 9ème Circuit qui, par une décision du 25 août 2015, confirma le rejet de la requête des plaignants. Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. 2. États-Unis La méthodologie pour appréhender une entente “en étoile” S’agissant d’abord de la question de l’entente dite hub-and-spoke conspiracy (que l’on pourrait traduire par entente en “étoile” ou entente en “roue de vélo”, hub désignant le moyeu et spoke, le rayon de la roue !), la Cour d’appel procède de manière méthodique et pédagogique. De manière inédite dans ce Circuit, la Cour est amenée à clarifier la façon d’appréhender une telle pratique, en commençant par qualifier celle-ci. Selon elle, il s’agit d’une entente qui mêle à la fois les aspects d’une entente horizontale et les aspects d’une entente verticale (pour des précédents, v. Howard Hess Dental Labs. v. Dentsply Int’l, Inc., 602 F.3d 237, 255 (3d Cir.2010), expliquant la configuration particulière de ce type d’entente ; pour la façon dont les autorités fédérales traitent cette pratique, v. égal. Toys ‘R’ Us, v. FTC, 221 F.3d 928, 934, 7th Cir.2000). Au centre du schéma, il y a un leader qui impulse la stratégie des prix, en l’occurrence, ici, l’entreprise Guitar Center. Lorsqu’un fabricant accepte d’appliquer cette stratégie, l’on est dans le schéma d’une tente verticale classique. Pour que la stratégie soit efficace, il faut que les différents fabricants acceptent à leur tour d’appliquer le plan : la concertation entre ces concurrents donne la tournure horizontale à la pratique. Comment apprécier une telle entente ? La Cour d’appel rappelle que la jurisprudence n’a pas la même approche en ce qui concerne les deux formes d’accords. Traditionnellement, les juges se montrent relativement cléments lorsque la pratique est verticale : celle-ci est analysée sous l’angle de la règle de raison. En revanche, les ententes horizontales de fixation des prix sont appréciées beaucoup plus sévèrement (sur cette distinction classique, v. United States v. Socony–Vacuum Oil Co., 310 U.S. 150, 223–24, 60 S.Ct. 811, 84 L.Ed. 1129, 1940). Pour une entente en forme d’étoile, la Cour indique alors la méthodologie à suivre : il suffit de décomposer la pratique qui “est une collection d’accords verticaux et horizontaux”. Une fois que la pratique est ainsi décomposée, on applique à chaque accord les standards habituels. Ainsi, en ce qui concerne les relations entre Guitar Center et les fabricants, la règle de raison doit guider l’analyse. La Cour ne s’attarde pas sur ce point, estimant que les accords clefs sont ceux reliant les fabricants entre eux. Si les allégations des plaignants sont exactes, il s’agit d’ententes de fixation des prix qui doivent être interdites per se. La démonstration de leur existence emporte la condamnation, sans justification possible. Encore faut-il rapporter la preuve de tels accords. La preuve de l’entente Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. La décision commentée est intéressante à plusieurs égards. D’abord, sur le fond, elle donne l’occasion à la Cour d’appel du 9ème Circuit de clarifier sa position et sa manière d’appréhender ce que les praticiens angloaméricains nomment une hub-and-spoke conspiracy, c’est-à-dire une entente complexe “en étoile”. Ensuite, au plan procédural, la Cour revient sur les éléments probatoires qu’il convient d’établir en l’absence de preuve directe de l’infraction S’agissant ensuite de la question de la preuve de l’entente, la Cour d’appel du 9ème Circuit rappelle que la Cour suprême a, dans son arrêt Twombly, décidé que les plaignants devaient convaincre le juge que la thèse présentée est “plausible” et non pas simplement possible. À défaut, la requête des demandeurs doit être rejetée. En l’absence de la preuve d’un accord entre les fabricants pour appliquer la politique de prix minimum, les plaignants avaient décidé de se fonder sur l’observation du comportement de ces derniers sur le marché : chaque fabricant appliquait globalement la même politique de prix, initiée par Guitar Center. Or, pour les juges, le simple constat de l’existence d’un parallélisme des comportements des entreprises n’est pas suffisant pour franchir l’obstacle probatoire dressé par la Cour suprême. Pour cela, il faut “quelque chose de plus” indique la Cour d’appel. Les plaignants ont bien essayé d’ajouter des “plus factors” au constat d’un alignement des prix des fabricants, mais la présentation de ceux-ci n’a pas convaincu la Cour. Ainsi, ni le fait que les fabricants avaient un intérêt commun à s’entendre, ni le fait qu’ils aient agi contre leur propre intérêt individuel qui aurait consisté à baisser les prix ou ni le fait qu’ils aient participé aux rencontres de la National Association of Music Merchants, ne sont des éléments jugés suffisamment convaincants. En somme, la méthode est celle du faisceau d’indices. Dans la présente affaire, ça n’est pas l’accumulation de ces derniers qui paraît déterminante, mais bien leur qualité intrinsèque. La Cour suprême n’ayant jamais fixée de directive précise en la matière, c’est une question d’appréciation qui peut toutefois varier selon les juges et les juridictions saisies. En témoigne ainsi l’opinion dissidente du juge Pregerson qui, au regard du contexte général de l’affaire, considère que les éléments probatoires complémentaires présentés par les plaignants sont suffisants pour rendre “plausible” leurs allégations au sens de la jurisprudence Twombly. Ainsi, le fait que le prix des guitares soient fixés à la hausse de manière constante, alors que la demande diminuait fortement, aurait dû inciter la majorité à soupçonner que quelque chose d’anormal se jouait. En principe, dans un tel cas, les entreprises sont incitées à diminuer leurs prix. Or, les cinq principaux fabricants de guitare ont continué à augmenter leurs prix dans des proportions quasisimilaires. En soit, cela n’est bien évidemment une preuve suffisante de l’existence d’une entente. Mais cela aurait dû conduire la Cour à juger “plausible” l’existence d’une collusion, permettant ainsi aux plaignants de poursuivre la procédure. L’affaire résume encore une fois parfaitement la difficulté pour les plaignants d’agir, lorsqu’ils ne peuvent s’appuyer sur le travail accompli préalablement par les autorités fédérales. Depuis que la Cour suprême a relevé le standard de preuve requis en matière d’ententes anticoncurrentielles, rares sont les actions qui prospèrent (sur ce point, v. nos obs. in Concurrences n° 1-2012, p. 216 et s.; adde, G. A. MacDonald, S. C. Sunshine, S. Goldfein, US Supreme Court defines minimum pleading standard in antitrust class action, 27 mai 2007, Bulletin Concurrences N° 4-2015 I Chroniques I Jurisprudence européenne et étrangère 229 J.-C. R. n À noter Private enforcement – Class action – Propriété intellectuelle : La Cour d’appel du neuvième Circuit se prononce sur les règles de d’une association sportive concernant le contrôle du nom, de l’image et de la notoriété de ses athlètes (US Court of Appeal, 9th Circuit, 30 sept. 2015, Edward C. O’Bannon, Jr. et al., v. NCAA, 2015 WL 5712106 (C.A.9 (Cal.)) Les questions de sport alimentent toujours et encore le contentieux du droit antitrust aux États-Unis (v. par ex. nos obs. in Concurrences n° 3-2012, p. 240 et s.). Un arrêt rendu le 30 septembre 2015 par la Cour d’appel du neuvième Circuit s’est ainsi prononcé sur une plainte émanant d’une class action formée par d’anciens et actuels joueurs de football américain et de basketball, contre la National Collegiate Athletic Association, organisme qui régit le sport universitaire (Edward C. O’Bannon, Jr. et al., v. NCAA, 2015 WL 5712106 (C.A.9 (Cal.), 30 sept. 2015). Ce dernier est un secteur très populaire aux ÉtatsUnis, qui génère des centaines de millions de dollars et qui est souvent, pour les meilleurs joueurs, l’antichambre du sport professionnel. En échange du versement d’une bourse prenant en charge leurs frais de scolarité dans leurs universités respectives, les athlètes s’engagent à respecter un certain nombre de règles imposées par la National Collegiate Athletic Association et destinées à garantir la spécificité du sport amateur universitaire. Ce dernier est en effet un “service” très prisé des amateurs de sport et téléspectateurs, peut-être sans doute plus que le sport professionnel, car il est censé incarner le “vrai esprit sport”, où chaque athlète se bat pour défendre les couleurs de son université, et non celui de tel ou tel sponsor. La réalité est beaucoup plus nuancée, tant le secteur, par certains aspects, est très largement en phase de professionnalisation. Le modèle est d’ailleurs attaqué. Si la Cour suprême a jadis jugé que les règles élaborées par la National Collegiate Athletic Association devaient être analysée sous l’angle de la règle de raison et que celles-ci étaient généralement pro-concurrentielles (NCAA v. Board of Regents of the University of Oklahoma, 468 U.S. 85, 104 S.Ct. 2948, 82 L.Ed.2d 70, 1984), depuis quelques 230 Concurrences N° 4-2015 I Chroniques I Jurisprudence européenne et étrangère années, les contentieux se multiplient et les juridictions ont de plus en plus souvent considéré le secteur du sport amateur comme un marché comme les autres (P. Areeda et H. Hovenkamp, Antitrust Law: An Analysis of Antitrust Principles and Their Application, 4ème éd., 2013, para. 260b). Dans l’espèce rapportée, les plaignants estimaient que l’association avait violé le Sherman Act en imposant à ses membres un contrôle de leur nom, image et traits (politique “NIL” pour names, images, and likenesses). Il s’agit d’une règle interdisant aux sportifs d’être rémunérés par d’autres entreprises pour l’utilisation de leur notoriété. En particulier, les compagnies de jeux vidéo, soucieuses de reproduire le plus exactement possibles l’apparence des joueurs de la ligue, accordent une très grande importance à la possibilité d’acquérir ces droits. Or, les règles de l’association interdisent aux joueurs de négocier et de licencier eux-mêmes ces droits. Seule la National Collegiate Athletic Association négocie avec les fabricants de jeux vidéo. L’organisme sportif considère que la pratique n’a rien d’illégitime dans la mesure où les sommes récoltées profitent indirectement aux athlètes par l’octroi d’une “règle de compensation”. Les revenus générés sont reversés de manière plus ou moins égalitaire pour que l’égalité sportive soit maintenue et que, au final, la compétition entre les universités soient toujours intenses. Plusieurs étudiants-athlètes, mécontents de ne pas pouvoir négocier eux-mêmes avec les compagnies de jeux vidéo ont donc décidé d’attaquer cette politique dite “NIL policy”. En première instance, le tribunal fédéral du District nord de Californie a considéré que la plainte était fondée et recevable. La National Collegiate Athletic Association a alors interjeté appel, mais la Cour du neuvième Circuit, dans une décision du 30 septembre 2015, a considéré que les plaignants étaient bien victimes d’une pratique anticoncurrentielles leur ayant causé un préjudice. Si les règles imposées par la National Collegiate Athletic Association sont souvent analysées avec faveur, telle n’est pas le cas de celle interdisant aux joueurs de négocier leur nom et image. Selon la Cour, une telle pratique n’est pas réellement justifiée et prive les athlètes d’accéder au marché des NIL pour les jeux vidéo. La juridiction d’appel atténue immédiatement la portée de sa décision en insistant sur le fait que cette dernière ne remet pas en cause la tendance générale consistant à analyser sous le prisme de la règle de raison les pratique de l’association. En règles générales, celles-ci sont parfaitement valables. Cela étant, à force d’assortir le principe d’exceptions, le modèle de la National Collegiate Athletic Association semble de plus en plus menacé. J.-C. R. n Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. e-Competitions Burden of proof, Concurrences, Art. n° 46291). Sans preuve de contacts illicites, les preuves indirectes ambiguës ne suffisent pas. Et même lorsque les éléments complémentaires paraissent révéler des anomalies de marché, cela ne semble pas encore suffisant. En clair, les allégations qui, même si elles sont cohérentes avec une hypothèse de collusion illégale, sont rejetées. La “ligne de partage entre le possible et le plausible”, pour reprendre les termes de la Cour suprême, semble de plus en plus difficile à franchir. Les entreprises s’en réjouiront. Certainement pas les consommateurs. 2nd Circuit, 30 juin 2015, United States v. Apple, n° 13‑3741, 2d Cir.) La Cour d’appel du deuxième Circuit a, dans une décision du 30 juin 2015, confirmé que l’entreprise Apple avait violé le Sherman Act en organisant une entente entre elle et plusieurs éditeurs, afin notamment de contrer la montée en puissance d’un autre géant, la firme Amazon (United States v. Apple, n° 13-3741, 2d Cir., 30 juin 2015). Il s’agit de la suite de la fameuse affaire des e-books (v. nos obs. in Concurrences n° 3-2012, p. 236 et s. ; adde, dossier Tendances : E-Books and the boundaries of antitrust, Concurrences n° 3-2012, p. 12 s.). L’entente concernait plus particulièrement le secteur des livres électroniques et avait pour but de contrer la politique de prix d’Amazon offrant des bestsellers aux prix de 9.99 dollars pour ses liseuses électroniques. L’entreprise Apple, désirant contrer l’émergence d’Amazon, sur le marché des tablettes s’était donc explicitement entendue avec les éditeurs. Dans cette entente en étoile («hub and spoke conspiracy»), la firme à la pomme jouait un rôle de leader, incitant les éditeurs à se coordonner. La Cour insiste sur les effets nocifs de plusieurs clauses contractuelles négociées avec les éditeurs, notamment l’insertion de clauses dites de la Nation la plus favorisée : l’impact de telles stipulation sur le marché est analysé avec soin, en particulier leur rôle pour permettre aux éditeurs de présenter un “front uni” face à Amazon. Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. Entente – Clause de la nation la plus favorisée : La Cour d’appel du deuxième circuit confirme le caractère anticoncurrentiel de l’entente élaborée dans l’affaire des e-books (US Court of Appeal, J.-C. R. n Concurrences N° 4-2015 I Chroniques I Jurisprudence européenne et étrangère 231 Concurrences Concurrences est une revue trimestrielle couvrant l’ensemble des questions de droits de l’Union européenne et interne de la concurrence. Les analyses de fond sont effectuées sous forme d’articles doctrinaux, de notes de synthèse ou de tableaux jurisprudentiels. L’actualité jurisprudentielle et législative est couverte par onze chroniques thématiques. Editoriaux Jacques Attali, Elie Cohen, Laurent Cohen‑Tanugi, Claus‑Dieter Ehlermann, Ian Forrester, Thierry Fossier, Eleanor Fox, Laurence Idot, Frédéric Jenny, Jean-Pierre Jouyet, Hubert Legal, Claude Lucas de Leyssac, Mario Monti, Christine Varney, Bo Vesterdorf, Louis Vogel, Denis Waelbroeck, Marc van der Woude... Interviews Sir Christopher Bellamy, Thierry Dahan, John Fingleton, François Hollande, Frédéric Jenny, William Kovacic, Neelie Kroes, Christine Lagarde, Ségolène Royal, Nicolas Sarkozy, Sheridan Scott, Christine Varney... Dossier Jacques Barrot, Jean-François Bellis, Murielle Chagny, Claire Chambolle, Luc Chatel, John Connor, Dominique de Gramont, Damien Géradin, Christophe Lemaire, Ioannis Lianos, Pierre Moscovici, Jorge Padilla, Emil Paulis, Joëlle Simon, Richard Whish... 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