Aspects cliniquesetradiographiques de l`arthrose des genoux à

Transcription

Aspects cliniquesetradiographiques de l`arthrose des genoux à
ARTICLE ORIGINAL
Aspects cliniquesetradiographiques de l’arthrose des genoux à Douala (Cameroun).
Marie Doualla- Bija1,2, Madeleine Ngandeu1, IbrahimaFarikou1,2, Henry Namme Luma1,2,
EuniceTafamGueleko2,Elvis Temfack2, Fernando Kemta Lekpa2, Jean Bahebeck1(Douala, YaoundéCameroun)
1
2
Faculté de Médecine et Sciences Biomédicales; Yaoundé
Hôpital Général de Douala.
RESUME
But : Décrire les aspects radiographiques de l’arthrose du genou et déterminer l’association entre les signes
cliniques et le stade radiologique observé.
Patients et Méthode : De juillet à décembre 2012, nous avons inclus de façon prospective tout patient adulte, venu
consulter pour douleurs de l’articulation du genou évoluant depuis trois mois au moins et remplissant les critères de
définition de l’ACR de l’arthrose. Les radiographies des genoux étaient réalisées en incidence postéro antérieure de
face en charge, de profil et incidence fémoro patellaire puisétaient évaluées en utilisant la classification de
Kellgren-Lawrence (KL) de l’arthrose.
Résultats : Sur les 1496 patients vus en consultation externe de Rhumatologie à Douala(864 à l’Hôpital Général et
632 à l’Hôpital Laquintinie),148(9,89%)patients avaient une gonarthrose.L’âge moyen était de 57 ± 10,6ans. 111
(75%) étaient des femmes.Soixante dix huit (52,70%) patients avaient une douleur d’intensité modérée. L’indice
algo fonctionnel de Lequesne moyen était de 8,5 ± 2,9.L’arthrose touchait les deux genoux dans 104(70,2%) de
cas ; 53 (35,8%) de patients présentaient une atteinte radiologique sévère correspondant aux grade III et IV de KL.
Les lésions radiologiques étaient plus fréquentes dans les compartiments fémoro-tibial interne (123 ; 83,1%) et
fémoro-patellaire (106 ; 71,6%). Il existait une association significative entre l’intensité de la douleur et le handicap
fonctionnel (p<0,01), mais pas entre l’intensité de la douleur et le stade radiographique (p > 0.05).
Conclusion : L’arthrose du genou prédomine dans les compartimentsfémoro-tibial interne et fémoro-patellaire
faisant évoquer un phénotype propre au Cameroun, avec les lésions radiologiques sévères chez un tiers des patients
à la première consultation spécialisée. Un diagnostic et une prise en charge précoces permettraient d’éviter
l’évolution vers un traitement chirurgical, encore peu accessible au Cameroun.
Mots clés : gonarthrose ; radio clinique ; radiographies
Correspondance et tiré à part
Dr Doualla Bija Marie ; Hôpital Général de Douala.
Po Box 4856 Douala; Cameroun. Téléphone: (237) 7793 4648.
Email: [email protected]
M Doualla- Bijaet al
ABSTRACT:
Purpose: Todescribe the radiological presentation of knee arthrosis in Douala andthe association between clinical
and radiological findings.
J Afr Imag Méd 2014; 6 (3):41-49
Patients and Method: From July to December 2012, we consecutively included all adult patients who consulted for
knee joint pain of at least three months duration fulfilling ACR criteria for definition and reporting knee OA.
Weight bearing posterior-anterior as well as lateralfemoro-patellar X-ray studies were carried out and staging was
done usingKellgren-Lawrence (KL)classification.
Results:Of the 1496 patients consulted at two Rheumatology units in Douala (864 at the Douala General Hospital
and 632 at the Laquintinie Hospital), 148 (9.89%) had knee osteoarthritis. Mean age was 57 ± 10.6years and 111
(75%) were female. Among patients with knee osteoarthritis, 78 (52.7%) had pain of moderate intensity. The mean
Lequesne’s disability index (LDI) was 8.5±2.9. Symptoms were found in of both knees in 104 (70.2%) of patients;
53 (35.5) had severe radiological findings at first consultation with grade III and IV on KL classification. Lesions
from medial tibio-femoral compartment were predominant (123; 83,1%), followed byfemoro-patellar (106;
71.6%).Pain intensity did not correlate with radiological findings whereas there was a positive association between
pain and LDI. Pain intensity did not correlate with radiological findings (p>0.05)whereas there was a positive
correlation between pain and LDI (p<0.01)
Conclusion: Knee osteoarthritis predominates in the medial femorotibial and femoropatellar compartments with
severe radiological lesions found in patients at first specialist visit. Early diagnosis as well as adequate management
would prevent an evolution warranting surgical treatment, which till date is not very accessible in Cameroon.
(Conflit d’intérêt: Rien à déclarer)
INTRODUCTION :
L’arthrose est la résultante de phénomènes
mécaniques et biologiques qui déstabilisent
l’équilibre entre la synthèse et la dégradation du
cartilage et de l’os sous-chondral[1]. Ce
déséquilibre peut être initié par des facteurs
génétiques,
métabolique
et
traumatique.
L’arthrose touche tous les tissus de l’articulation
et se manifeste par des modifications
morphologiques, biochimiques, moléculaires et
biomoléculaires des cellules et de la matrice
cartilagineuse conduisant à un ramollissement,
une fissuration, une ulcération et une perte de
l’épaisseur du cartilage articulaire, une sclérose
de l’os sous-chondral avec production de
d’ostéophytes et de géodes[2]. Cette perte de
congruence articulaire est source de douleur, de
raideur, de déformation et d’épanchement
articulaire. Elle est définie radiologiquement par
l’amincissement de l’interligne articulaire
associé à une ostéophytose marginale et à une
ostéosclérose sous- chondrale [3]. L’arthrose est
la deuxième cause d’invalidité après les maladies
cardiovasculaires [1]. (OMS). L’arthrose du
genou ou gonarthrose est la plus fréquente des
arthroses (trois fois plus fréquente que la
coxarthrose) et est mise en cause dans la plupart
des douleurs du genou [1]. Celle ci peut toucher
les différents compartiments du genou : fémoro
patellaire, fémoro tibial externe, fémoro tibial
interne. Ces différentes localisations parfois
combinées réalisent ainsi des atteintes uni, bi ou
tricompartimentale. La douleur est le maître
symptôme associé à une limitation progressive
du périmètre de marche. Une étude cohorte aux
Etats Unis en 2003 a montré que seules 40% des
gonarthroses modérées radiologiques sont
symptomatiques et 60% des arthroses sévères
radiologiques ont des douleurs [4]. En Afrique,
l’arthrose du genou représente environ 8 à 25%
des consultations de rhumatologie [5, 6, 7, 8].
Selon une étude récente, la prévalence et les
caractéristiques de la gonarthrose radiographique
et symptomatique telle que décrites en Europe et
aux Etats unis pourraient ne pas être directement
extrapolées dans les régions sous développées
[9].Les caractéristiques radiographiques de
l’arthrose du genou sont peu connues dans notre
pays. Le but de ce travail était de décrire les
aspects radiographiques et cliniques de la
gonarthrose, et de rechercher une association
éventuelle entre les signes cliniques et le stade
radiologique observé dans un contexte où l’accès
au traitement curatif par remplacement
prothétique est peu accessible.
M Doualla- Bijaet al
radiographies des deux genoux. L’évaluation du
retentissement fonctionnel était fait à l’aide du
questionnaire de Lequesne administré au patient
par l’investigateur principal (IP) en français, en
DouallaBijaet
anglais ou traduite en langue M
locale
à l’aide
d’unal
membre de la famille.L’indice de masse
corporelle (IMC) était calculé à partir du
poids/taille2, puis classé en cinq stades [10].
PATIENTS ET METHODES
SETTING : Après avoir obtenu la clairance
éthique auprès du Comité National d’Ethique du
Cameroun, nous avons réalisé une étude
transversale descriptive sur une population de
patients vus en consultation externe dans deux
services de Rhumatologie des hôpitaux de la
ville de Douala. L’étude s’est déroulée à
l’Hôpital Général (Hôpital de référence de
première catégorie de 370 lits) et Laquintinie
(Hôpital deréférence de deuxième catégorie de
620 lits), sites choisis en raison de l’existence en
leur sein d’Unités spécialisées de Rhumatologie
et de Services d’Imagerie permettant la
réalisation de radiographies des genoux selon les
standards validés.
PATIENTS : Nous avons inclus de façon
prospective de juillet à décembre 2012 tout
patient adulte, venu consulter pour douleurs de
l’articulation du genou évoluant depuis trois
mois au moins, acceptant de participer à l’étude.
La douleur décrite par le patient devait être
d’horaire mécanique, présente la plupart des
jours pendant le mois associée ou non à une
tuméfaction.L’intensité de la douleur était
évaluée à l’aide d’une échelle visuelle
analogique (EVA) sur une règle graduée de 0 à
100 millimètres ; celle ci prenait en compte la
douleur moyenne au cours de la semaine
précédant la consultation d’inclusion. Pour
chaque malade étaient recueillis : l’âge ; le sexe ;
la date des premiers symptômes (douleurs,
craquement
articulaire,
tuméfaction,
déformations) ;les caractéristiques de la douleur
(localisation, horaire, intensité cotée par
l’EVA) ;
les antécédents médicaux et
chirurgicaux contributifs ; les données de
l’examen clinique général (taille en centimètres,
poids en kilogrammes, tension artérielle en
millimètres de mercure) et plus spécifiquement
rhumatologique; les données de l’analyse des
Etait définie comme arthrose du genou tout
patient remplissant les critères de définition de
l’ACR [11].
Etait exclus de l’étude, tout patient souffrant
d’un rhumatisme inflammatoire chronique, d’une
arthrite infectieuse ou d’une pathologie post
traumatique du genou.
METHODES : Les patients étaient inclus lors de
la première consultation de rhumatologie pour
douleurs du genou selon les caractéristiques
définies par l’étude. L’interrogatoire, l’examen
clinique, l’analyse des radiographies étaient
assurés par l’IP. Les radiographies des genoux
étaient réalisées en incidence postéro antérieure
de face en charge, de profil et incidence fémoro
patellaire. Les radiographies étaient évaluées par
l’IP en utilisant la méthode de KellgrenLawrence [12].sur la base du degré de formation
des ostéophytes, le pincement articulaire, la
sclérose, et la déformation articulaire (0 : pas
d’arthrose ; 1 : douteux ; 2 : minime ; 3 :
modéré ; 4 : sévère). Les données recueillies
étaient consignées dans une fiche préétablie.
ANALYSE STATISTIQUE : Les résultats étaient
exprimés sous forme de moyennes ± écart-types
pour les variables continues et nombres absolus
et pourcentages pour les valeurs discrètes. Les
variables quantitatives étaient comparées à l’aide
du test de Wilcoxon-Mann-Whitney et les
qualitatives à l’aide du test exact de Fisher. Le
seuil de significativité était établi pour un
p<0,05.
RESULTATS :
Durant la période d’étude, 1496 patients ont été
vus en consultation externe de Rhumatologie,
respectivement 864 à l’Hôpital Général et 632 à
l’Hôpital Laquintinie de Douala.Cent cinquante
M Doualla- Bijaet al
et sept patients avaientdes douleurs mécaniques
du genou,parmi lesquels 148 patients
remplissaient les critères de l’ACR définissantla
gonarthrose, donnant ainsi une fréquence de
9,89% en milieu hospitalier à Douala.
Caractéristiques générale de la population
(Tableau 1) :La moyenne d’âge était de 57 ±
10,6ans (33-84). 111 (75%) étaient des femmes
et 76 d’entre elles étaient ménopausées. Nos
patients résidaient dans 76% des cas en zone
urbaine. La durée d’évolution moyenne des
symptômes était de 2,4 ± 2,6 ans (0-15). L’IMC
moyen était de 30,8 ± 5,6.Le siège de la douleur
était mal défini dans 67,57% des cas et
antérieure chez 21,63% des patients. Soixante
dix huit (52,70%) patients avaient une douleur
d’intensité modérée représentée par une E V A
compris entre 5 et 7. L’indicealgo fonctionnel de
Lequesne moyen était de 8,5 ± 2,9. Il existait une
corrélation entre l’intensité de la douleur et le
handicap fonctionnel (p<0,01).La statique du
genou était normale chez 50 (33,8%), la
déviation en valgus était retrouvée chez 52
(35,1%) de patients, en varum chez 46
(31,1%).Caractéristiques
radiologiques:L’arthrose touchait les deux
genoux dans 104(70,2%) de cas ; unilatérale
dans 44 (29,8%) cas et26 d’entre eux concernait
le genou droit. Les lésions radiologiques
observées isolément ou associées comportaient :
un pincement articulaire(signe le plus
retrouvé)chez
145
(97,9%)
patients,des
M Doualla- Bijaet131
al
ostéophytes
chez
(88,5%),uneostéocondensation chez 43,2% et
des géodeschez 4(2,70%) patients. L’atteinte
était unicompartimentale chez 37 (25%) patients,
bicompartimentale chez 72 (48,6%) et
tricompartimentale chez 39 (26,4%). (Tableau
2).Des 37 patients avec une atteinte
unicompartimentalel’arthrose était fémorotibiale
interne dans 23 cas, fémoropatellaire dans neuf
cas et femorotibiale externe dans cinq.Dans les
72
cas
d’atteinte
bicompartimentale,
l’association FTI et FP était décrite chez 47
patients (Tableau 3)53 (35,8%) de patients
présentaient
une
atteinte
radiologique
correspondant aux grades III et IV de KellgrenLaurence.
Association
radio-clinique(Tableau 4) : Parmi les 12 patients
ayant un grade 4 radiologique, 2 (1,3%)patients
avaient une douleur sévère, EVA comprise entre
8 et 10. Nous n’avons pas retrouvé de
corrélation entre l’intensité de la douleur
ressentie par le patient et le stade radiographique
(p > 0.05). Cependant le retentissement
fonctionnel était plus sévère chez les patients aux
lésions radiologiques avancées (p=0,001). Plus la
durée d’évolution de l’arthrose était longue, plus
le stade radiographique était élevé (p=0.01).
Table 1: Caractéristiques de la population d’étude
Caractéristiques
Items
Fréquence(%)
Age (ans, %)
18-40
5(3.4)
40-49
32(21.6)
50-59
56(37.8)
60-69
32(21.6)
70-79
18(12.2)
>80
5(3.4)
F/M
111/37
Sexe
Durée d’évolution (années, écart type)
2,4± 2,6
IMC, n (%)
23 (15.6)
< 25
J Afr Imag Méd 2014; 6 (3):41-49
Symptômes*, n (%)
Signes cliniques*, n (%)
EVA douleurs, n (%)
Indice de Lequesne
25 – 29
48 (32.4)
30 – 34
44 (29.7)
35 – 39
22 (14.9)
> 40
11 (7.4)
Douleurs
148 (100)
Boiterie
49 (33.1)
tuméfaction
44 (29.7)
Craquements articulaires
64 (43.2)
Déformation†
98 (66,21)
Rabot femoropatellaire
97 (65.4)
Tuméfaction
72 (48.6)
Flessum
71 (48)
Faible (0-4)
53 (35.8)
Modérée (5-7)
78 (52.7)
Sévère (8-10)
17 (11.5)
0-4
10 (6.8)
5-7
47 (31.9)
8-10
59 (40.2)
11-13
25 (17.0)
> 14
7 (4.1)
* durée des symptômes et signesen rapport avec la gonarthrose
†genuvarum, genuvalgum
Tableau 2: Caractéristiques radiologiques
Lesions radiologiques du genou
Fréquence n(%)
AtteinteUnicompartimentale
37 (25)
AtteinteBicompartimentale
72 (48.6)
AtteinteTricompartimentale
39 (26.3)
CompartimentFémorotibial interne(FTI)
123 (83.1)
CompartimentFémorotibialexterne(FTE
69 (46.6)
CompartimentFémoropatellaire(FP)
106 (71.6)
Tableau 3 : Répartition des sites d’arthrose en fonction des compartiments
Unicompartimentale
Compartiment
nombre
pourcentage
FTI
23
15,5
J Afr Imag Méd 2014; 6 (3):41-49
M Doualla- Bijaet al
M Doualla- Bijaet al
N=37
FP
09
6,1
FTE
05
3,4
Bicompartimentale
FTI et FP
47
31,77
N=72
FTI et FTE
14
9,46
FTE et FP
11
7,43
FTI, FTE et FP
39
26,4
Tricompartimentale
N=39
Table 4: CorrelationStaderadiographique, intensité de ladouleuret Handicap
Stade de KellgrenLaurence
Indice de
0-4
Lequesne
5-7
I
II
III
IV
1
7
2
0
6
31
9
1
8-10
5
34
18
2
11-13
2
9
10
4
>14
0
0
1
5
TOTAL
14
81
41
12
0-49
6
32
12
3
50-79
6
42
23
7
80-100
2
7
6
2
TOTAL
14
81
41
12
EVA de la
douleur
(mm)
Durée des
symptômes
(ans)
0 -1
5
38
8
1
1-4,9
6
28
26
9
5- 10
3
11
5
1
>10
0
4
2
1
81
41
12
TOTAL 14
p
0,001
>0,05
0,001
M Doualla- Bijaet al
J Afr Imag Méd 2014; 6 (3):41-49
B
A
Fig 1 A et B : Arthrose fémoro-patelaire
DISCUSSION
L’arthrose du genou est fréquente en milieu
hospitalier à Douala avec une prévalence estimée
à 9,89% dans notre étude. Notre étude confirme
le fait que la prévalence de l’arthrose du genou
est étroitement corrélée àl’âge supérieur à 50
ans, le sexe féminin, l’obésité et les déviations
axiales. Cette augmentation de prévalence avec
l’âge lui confère un caractère invalidant et
morbide [3]. Le tableau clinique est dominé par
la douleur qui évolue depuis en moyenne deux
ans et demid’intensité modérée chez la moitié de
nos patients, associée chez 40% à un
retentissement fonctionnel important dès la
première visite chez le rhumatologue. Une étude
au sein d’une population rurale Chinoise a
montré que la prévalence de la gonarthrose
symptomatique clinique était de 1,9% et celle de
la
gonarthrose
asymptomatique
et
radiologiquement sévère était de 2,5% [13]
Environ 3,4 millions de personnes souffrent
d’arthrose du genou chaque année en France
parmi lesquels 70% sont symptomatiques
[14].Les études africaines publiées ont pour la
plupart un recrutement hospitalier comme la
notre,la douleur constituant le motif de
consultation, il est donc difficile d’évaluer la
proportion
de
patients
arthrosiques
asymptomatiques. D’où la limite des études
hospitalières ; Il serait utile de réaliser des études
de cohorte pour ainsi détecter la proportion de
patients asymptomatiques. L’accessibilité à une
imagerie standart pour un patient qui souffre de
douleurs de genoux dans notre contexte n’est pas
aisée, la grande majorité de centres de santé ne
disposant pas d’appareil de radiographies ; ce qui
pose le problème de l’applicabilité des critères
validés dans les pays developpés de diagnostic
de la gonarthrose [11]. Les caractéristiques
J Afr Imag Méd 2014; 6 (3):41-49
M Doualla- Bijaet al
radiologiques fréquemment retrouvées dans
diverses études font état par ordre de fréquence,
de l’atteinte du compartiment fémoro tibial
interne, puis fémoro tibial externe et en dernier
fémoro patellaire [5 ,6 , 7, 8, 15, 16 ]. L’atteinte
prépondérante du compartiment fémoro tibial
interne est aussi retrouvée dans notre étude.
Cependant la différence concerne l’atteinte du
compartiment fémoro patellaire qui occupe le
second rang, témoignant de la fréquence élevée
de son corollaire clinique, le signe du rabot
rotulien, mais très peu retrouvée dans les
études[3, 17].La présence de signes cliniques ne
correspond pas toujours au stade radiologique
[18 ,19]. Nous n’avons pas retrouvé de
corrélation entre l’intensité de la douleur
ressentie par le patient et le stade radiographique.
Dennison et al dans une étude cohorte aux Etats
Unis en 2003 a montré que seules 40% des
gonarthroses modérées radiologiques sont
symptomatiques et 60% des arthroses sévères
radiologiques ont des douleurs[4]. Il existe
cependant une association entre la durée des
symptômes, l’importance du handicap et la
sévérité des lésions radiologiques dans notre
étude. Ce qui soulève la problématique du délai
de consultation après le début des symptômes du
patient arthrosique et l’absence du suivi de
cohortes permettant d’identifier les signes
cliniques d’une arthrose débutante dans notre
milieu.
Le
retard
de
consultation
médicalespécialisée limite aussi les possibilités
d’agir sur les facteurs de progression permettant
de ralentir l’évolution vers les stades sévères de
la maladie arthrosique. La gonarthrose représente
une charge pour la collectivité de l’ordre de 1,8
milliard d’Euros en France [14] et environ 1% du
produit national brut [1] aux Etats Unis. Le coût
élevé de la prise en charge de cette pathologie
ainsi que son retentissement sur le plan socioéconomique seraient dans notre contexte encore
plus important en raison des difficultés
d’accessibilité aux diagnostics précoces et aux
traitements adéquats.La prise en charge
curativede la gonarthrose implique un
remplacement prothétique du genou ; dans un
environnement africain où celui ci est peu ou pas
accessible.
CONCLUSIONL’arthrose du genou occupe un
dixième des consultations de rhumatologie, et
touche surtout la femme obèse d’environ
cinquante ans. Les lésions radiologiques sont
sévères chez un tiers des patients à la première
consultation spécialisée et prédominent dans les
compartimentsfémorotibialinterne
et
fémoropatellaire.La sévérité de l’atteinte
radiologique ne correspond pas à l’intensité de la
douleur exprimée par le patient, mais au degré de
handicap et à la durée d’évolution clinique. Un
diagnostic et une prise en charge précoce
permettraient d’éviter l’évolution vers un
traitement chirurgical, encore peu accessible au
Cameroun. Une étude prospective sur un
recrutement extra hospitalier permettrait d’établir
la proportion réelle de patients souffrant
d’arthrose du genou et déterminer les facteurs
modifiables de progression radiographiques.
REFERENCES
[1] Sharma L, Kapoor D, Issa S.Epidemiology of
osteoarthritis: an update. CurrOpinRheumatol
2006;18(2):147-56.
[2] Felson DT. An update on the pathogenesis and
epidemiology of osteoarthritis.RadiolClin North Am
2004;42(1):1-9.
[3] Srikanth VK, Fryer JL, Zhai G, Winzenberg
TM, Hosmer D, Jones G. Ameta-analysis of sex
differences prevalence, incidence and severity of
osteoarthritis.OsteoarthritisCartilage 2005;13(9):76981.
[4] Lawrence RC, Felson DT, Helmick CG, Arnold
LM, Choi H, Deyo RA, Gabriel S et al.National
Arthritis Data Workgroup. Estimates of the prevalence
of arthritis and other rheumatic conditions in the
United States. Part II.Arthritis Rheum 2008;58(1):2635.
J Afr Imag Méd 2014; 6 (3):41-49
M Doualla- Bijaet al
[5] Oniankitan O, Fianyo E, Mijiyawa M.
Osteoarthritis of the knee in hospital outpatients in
Lomé (Togo). Mali Med 2009; 24(2):4-6.
[12] Kellgren JH, Lawrence JS.Radiological
assessment of osteoarthrosis.Ann Rheum Dis 1957;
16:494-502.
[6] Ouédraogo DD, Séogo H, Cissé R, Tiéno
H,Ouédraogo T, NacoulmaIS,etal.Risk factors
associated with osteoarthritis of the knee in a
rheumatology outpatient clinic in Ouagadougou,
Burkina Faso. Med Trop 2008; 68(6):597-9.
[13] Kang X, Fransen M, Zhang Y, Li H, Ke Y, Lu
M, et al.The High prevalence of knee osteoarthritis in
a Chinese population: The Wuchuan osteoarthritis
study. Arthritis Rheum 2009; 61(5): 641-47.
[7] Eti E, Kouakou H B, Dabioko J C, Ouali B,
Ouattara B, Gabla K A, et al.Aspect
épidémiologique, clinique et radiologique de la
gonarthrose en Côte d’Ivoire. Rev Rhum1998; 65(12):
890-94.
[8] Akinpelu AO, Alonge TO, Adekanla BA, Odole
AC.Prevalence and pattern of symptomatic knee
osteoarthritis in Nigeria: A community based study.
The Internal Journal of Allied Health Sciences and
Practice 2009; 7 (3): 1540-80.
[9] March L, Amatya B, Osborne RH, Brand
C.Developping a minimum standart of care for
treating people with osteoarthritis of the hip and knee.
Best Practice & Research Clinical Rheumatology
2010 ; 24 : 141-5.
[10] Charles MA, Eschwège E, Basdevant A.
Monitoring the obesity epidemic in
France: the Obepi surveys 1997-2006.
Obesity
(Silver
M DouallaBijaet
al
Spring) 2008;16(9):2182-6
[11] Altman R, Asch E, Bloch D, Bole G,
Borenstein D, Brandt K, et al. Development of
criteria for the classification and reporting of
osteoarthritis. Classification of osteoarthritis of the
knee: Diagnostic and Therapeutic Criteria Committee
of the American Rheumatism Association. Arthritis
Rheum 1986; 29:1039-49.
[14] Le Pen C, Reygrobellet C, Gérentes I. Financial
cost of osteoarthritis in France. The "COART" France
study.Joint BoneSpine2005;72(6):567-70.
[15] Emche M C.Gonarthrose en Consultation
hospitalière de rhumatologie à Yaoundé. Thèse
Faculté de médecine et de Sciences Biomédicales de
Yaoundé 2005.
[16] Ndongo S, Ka MM, Leye A, Diallo S, Niang
EH, Sy MH, et al.Epidemiological and clinical
features of the knee osteoarthritis. Dakar Med 2003;
48:171-5.
[17] Neogi T, Nevitt MC, Yang M, Curtis JR,
Torner J, Felson DT.Consistency of knee pain:
correlates and association with function. Osteoarthritis
Cartilage 2010; 18:1250-5.
[18] Jordan JM, Helmick CG, Renner JB, Luta G,
Dragomier AD, Woodard J, et al.Prevalence of knee
symptoms and radiographic and symptomatic knee
osteoarthritis in africanamericans and Caucasians: the
Johnson County Osteoarthritis Project. J Rheumatol
2007; 34(1): 172-80.
[19] Guillemin F, Rat AC, Roux CH, Fautrel B,
Mazieres B, Chevalier X, et al.The KHOALA cohort
of knee and hip osteoarthritis in France. Joint Bone
Spine 2012; 79:597-603.
J Afr Imag Méd 2014;6 (3):41-49

Documents pareils