carnets de note et journal de guerre

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carnets de note et journal de guerre
Campagne d’Italie 1859
Les notes de Mathieu Rodier
Mathieu Rodier, né le 20 mai 1835 à Lorigné, était le fils de Pierre Rodier (1800-1860),
journalier à Bouligné, commune de Lorigné, et de Magdeleine Naffrichoux (1798- ?). Mathieu a
épousé à Lorigné, le 6 octobre 1862, Justine Gagnadoux née en 1841 à Saint-Saviol (Vienne). Les
époux n’ont pas eu d’enfant, du moins nés à Lorigné. Ils ont quitté cette commune à une date
inconnue car il n’y sont pas décédés selon les registres de l’état civil. Mathieu exerçait le métier de
perruquier, coiffeur itinérant donc. En 1864, selon ses annotations, il comptait des clients à Jouhé,
Londigny, Montjean, Bannière, La Forêt-de-Tessé.
Mathieu Rodier fut convoqué à Niort en 1856 pour faire son service militaire. C’est un long
périple, et des milliers de kilomètres le plus souvent à pied, qui le conduiront jusqu’en Italie en
1859. Il participera à la guerre contre l’Autriche. Au retour, probablement, il annotera ses mémoires
sur un petit carnet qui lui servira plus tard de livre de comptes.
Mémoire de Mathieu Rodier de Lorigné
84e de ligne, 1er bataillon, 1ère compagnie
Mémoire des étapes de 1856
Je suis parti de Lorigné le 3 avril 1856 comme jeune soldat pour me présenter à midi à Niort 1.
J’ai resté le 3 et le 4 à Niort. Le 5, parti de Niort pour aller rejoindre mon régiment à Nantes, le 84e
de ligne.
Le 5, à Fontenay (Fontenay-le-Comte en Vendée).
Le 6, Chantonnay.
Le 7, Saint-Fulgent.
Le 8, Montaigu.
Le 9, à Nantes, caserne aux grands quartiers, en
face la place Louis XVI.
Mémoire des étapes de 1857
Parti de Nantes le 10 octobre 1857 pour aller tenir
garnison à Paris.
Le 10, Ancenis.
Le 11, Ingrandes
Le 12, Angers.
Le 13, séjour à Angers.
Le 14, Seiches.
Le 15, La Flèche.
Le 16, Foulletourte.
Le 17, au Mans.
Le 18, séjour au Mans.
Le 19, Conneré.
Le 20, La Ferté-Bernard.
Le 21, Nogent-le-Rotrou.
Le 22, Courville.
Le 23, séjour à Courville.
Le 24, Chartres.
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50 km à parcourir à pied à la vitesse de 6 km/h. Quelle santé ! La moyenne journalière s’établira sur le reste du
parcours à d’environ 30 kilomètres.
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Le 25, Saint-Arnaud.
Le 26, Arpajon.
Le 27, Paris, caserné au fort d’Apry (Ivry sans doute) près de Paris.
Le 16 décembre 1857, rentré dans Paris à la caserne de la Pépinière.
Mémoire des étapes de 1858
Le 28 juin 1858, parti de la caserne de la Pépinière pour aller à la caserne Reuilly.
Le 27 juillet 1858, parti de la caserne Reuilly pour aller au fort Rosny près de Paris.
Le 29 décembre 1858, parti du fort Rosny pour rentre dans Paris à la caserne Napoléon.
Mémoire de la campagne d’Italie en 1859
Parti de Paris le 23 avril 1859, pour l’Italie à 11 heures du soir par la voie rapide.
Le 24, Lyon où nous sommes restés 4 heures.
Le 25, Toulon.
Le 26, séjour à Toulon.
Le 27, embarqué à Toulon à bord du vaisseau le Napoléon, nous avons resté trente-six heures
de temps sur l’eau.
Le 28, débarqué à Gènes en Italie.
Le 29, séjour à Gènes.
Le 30, San Bartholome.
Le 1er mai, séjour à San Bartholome.
Le 2, Ponte Decimo.
Le 3, Gavis, il a fallu graver le col de la Borghetta, fraction des monts Apennins.
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Le 4, 5 et 6, séjour à Gavis.
Le 7, Cassasso Spinela.
Le 8, 9, 10, 11, 12, 13, séjour à Cassasso Spinela.
Le 14, Tortone.
Le 15, séjour à Tortone.
Le 16, Voghera.
Le 17, 18 et 19, séjour à Voghera.
La bataille de Montebello.
Le 20, combat de Montebello.
Le 21, séjour à Voghera.
Le 22, Casthegio.
Le 23, 24, 25, 26 et 27, séjour à Casthegio. Et nous avons fait des tranchées, nous croyons être
attaqués sur cette hauteur. Mais pas du tout, l’ennemi a filé plus loin.
Le 28, Ponte Turone.
Le 29, séjour à Ponte Turone.
Le 30, Valengio.
Le 1er juin, Verceilly.
Le 2, Pagliate près Novare.
Le 3, séjour à Pagliate.
Le 4, Olengo.
Le 5, sur la route de Magenta.
Le 6, Bufflora, campé sur le terrain où s’est livré la bataille de Magenta.
Le 7, Paglione.
Le 8, passé à Milan, et le combat de Marignan, le soir, le plus triste combat de tout.
Le 9, 10, séjour à Marignan.
Le 11, San Félix.
Le 12, Melzio.
Le 13, passage de l’Adda et campé sur le bord du chemin de fer près de Treviglio.
Le 14, Mozzanica, première fois que l’Empereur a passé près de notre camp.
Le 15, séjour.
Le 16, Urago d’Oglio.
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Le 17, Maclodio.
Le 18, Saint Enfemia près de Brescia.
Le 19, 20, séjour.
Le 21, Rio de Dotto.
Le 22, séjour.
Le 23, Exento.
Le 24, passé à Castiglione, à 4 heures du matin a commencé les grandes batailles de Solferino.
Le 25, Pozzolengo.
Le 26, Monzambano, campé devant le Mincio.
Le 27, 28, 29, 30, séjour à Monzambano.
1er juillet, passage du Mincio pour se rendre à Olliari.
Le 2, San Giorgio, le même jour mouvement rétrogradé à 11 heures du soir sur Alzario.
Le 3, Palazo.
Le 4, 5, 6, 7, 8, 9, séjour à Palazo. Nous avons fait des tranchées sur cette hauteur, nous
croyons être attaqué. Mais pas du tout, l’ennemi a voulu se rendre puisqu’il (ne) pouvait
jamais gagner.
Le 7 juillet, armistice conclue entre l’Empereur d’Autriche et l’Empereur des Français.
Le 10, Jona.
Le 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, séjour à Jona.
Retour en France
Parti de Jona le 18 juillet 1859 pour rentrer en France
Le 18, Monzanbano.
Le 19, Rivoltella.
Le 20, Ponté Suto Marco.
Le 21, Brecia.
Le 22, Ospitalitto.
Le 23, Chiari.
Le 24, séjour à Chiari.
Le 25, Isso.
Le 26, Triviglio.
Le 27, Gorgonzola.
Le 28, séjour à Gorgonzola.
Le 29, Milan qu est une très belle ville.
Le 30, séjour à Milan.
Le 1er (août 1859), séjour à Milan.
Le 2, parti de Milan par le chemin de fer pour Suze. Nous nous sommes arrêtés quatre heures
à Turin qui est une très belle ville aussi.
Le 3, Suze, séjour.
Le 4, nous avons gravi le Mont-Cenis, il y avait de la neige sur les montagnes et le soir on (a)
pris casernement à l’hôpital de Mont-Cenis.
Le 5, Tremignon (Termignon)
Le 6, Modane.
Le 7, Saint-Jean-de-Maurienne.
Le 8, parti de Saint-Jean-de-Maurienne par le chemin de fer à 3 heures du matin pour Paris.
Le 9, Paris. Campé plaine Saint-Maur.
Le 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17 18, 19, séjour au camp de Saint-Maur.
Le 14 du courant (août), nous avons passé la revue de l’Empereur et nous avons défilé dans
Paris au pied de la colonne Vendôme où était placé l’Empereur et toute son escorte.
Le 20 du courant, parti du camp de Saint-Maur pour Maubeuge (Nord).
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Le 20, Louvres.
Le 21, Senlis.
Le 22, Compiègne.
Le 23, séjour à Compiègne.
Le 24, Noyon, très bien reçus par les habitants.
Le 25, Ham.
Le 26, Saint-Quentin.
Le 27, Le Cateau.
Le 28, Le Quesnoy.
Le 29, séjour (au Quesnoy).
Le 30, Maubeuge (Nord).
De Maubeuge à Tours
Le 9 octobre 1859, parti de Maubeuge pour Tours
Le 9, Avesnes.
Le 10, Vervins.
Le 11, Laon.
Le 12, Soissons.
Le 13, séjour à Soissons.
Le 14, Villers-Cotterêts.
Le 15, Nanteuil.
Le 16, Dammartin.
Le 17, Saint-Denis.
Le 18, séjour (à Saint-Denis).
Le 19, Longjumeau.
Le 20, Etampes.
Le 21, Angerville.
Le 22, Artenay.
Le 23, séjour à Artenay.
Le 24, Orléans.
Le 25, Beaugency.
Le 26, Blois.
Le 27, séjour à Blois.
Le 28, Amboise.
Le 29, Tours2 à la caserne des Récollets.
Le 84e de ligne (84e RI)
Le 84e de ligne, ancien régiment du Quercy (1684-1791), aux côtés du 74e de ligne et du 17e
Bataillon de chasseurs, faisait partie de la 1ère brigade (Général Beurey) de la 1ère division
d’Infanterie (Général Forey) au sein du 1er Corps d’Armée (Général Baraguey d’Hilliers). Le 1er
Corps d’Armée comptait 21.200 hommes et 2.500 chevaux. Le 20 mai 1859, la bataille de
Montebello à laquelle participait Mathieu Rodier, fut remportée sur les Autrichiens par le général
Forey. A Solferino, le corps d'armée du général Baraguey d'Hilliers a perdu plus de 4.000 hommes
sur les trois divisions qu’il comptait.
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Les notes se terminent ici, nous ne connaîtrons donc pas la date exacte du retour à Lorigné.
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La guerre d’Italie de mai à juillet en 1859
Dès 1815, dans les provinces de la péninsule italienne, naît un puissant mouvement populaire
désirant l’unification du pays. Cette idée, défendue par le roi de Sardaigne, Victor-Emmanuel II, fut
combattue par le pape Pie IX et les Autrichiens qui occupaient la Lombardie et la Vénétie. En
Europe, cette cause n’était soutenue que par Napoléon III. Au début de 1859 naissent des rumeurs
de guerre. Napoléon III veut aller au secours du roi de Sardaigne en butte à l'empereur François
Joseph qui s'oppose à la formation de l'unité italienne. Le 28 janvier 1859, Napoléon III s’engage
par le traité de Turin à apporter l’aide et le soutien de la France. Mais suite à une série de
provocations, le Piémont est envahi, le 26 avril 1859, par 100.000 soldats autrichiens. Le 3 mai
1859, l’Empereur annonce, du Palais des Tuileries, la guerre à l'Autriche. L'armée d'Italie qui
compte 125 000 hommes, 13.500 chevaux et 450 pièces d'artillerie va se diviser en deux. Une
partie, le IIIe Corps (Canrobert) et le IVe Corps (Niel), passe par le Mont Cenis et le col du
Mongenèvre (itinéraire suivi par Pierre Quintard du 86e RI) ; l'autre partie, le 1er Corps (Baraguay
d'Hilliers) le IIe Corps (Mac-Mahon), ainsi que l'Empereur et la garde Impériale, passe par la mer
via Toulon et Gènes (ce dernier itinéraire fut celui de Mathieu Rodier).
La guerre d'Italie sera courte, trois mois de campagne, 8.000 morts et 40.000 blessés, deux
grandes victoires : Magenta, le 4 juin, et Solferino le 24 juin 1859.
20 mai, bataille de Montebello ; 4 juin, bataille de Magenta ; 24 juin, bataille de Solferino (un
carnage qui fit 40.000 morts, et poussa Henri Dunant à fonder la Croix-Rouge) ; 7 juillet, l'armistice
est signée à Villafranca ; 11 juillet : préliminaires de la paix de Villafranca ; 12 juillet, brusquement,
Napoléon III offre la paix à l'empereur d'Autriche, François-Joseph, à Villafranca ; 10 novembre, la
paix sera ratifiée en traité définitif à Zurich ; 11 novembre : Paix de Zurich.
Les unités engagées en Italie
Ier Corps d'armée : les 17e et 10e Bataillons de Chasseurs à pied, les 74e, 84 e (Mathieu
Rodier), 91e, 98e, 15e, 21e, 61e, 100e, 33e, 34e, 37e et 75e Régiments d'infanterie, le 1er Régiment
de Zouaves et en cavalerie : les 1er, 2e et 3e Chasseurs d'Afrique et le 5e Hussards.
IIe Corps d'armée : un régiment de marche des Tirailleurs Algériens, les 45e, 65e, 70e, 71e et
72e Régiments d'Infanterie, le 11e Bataillons de Chasseurs à pied, le 2e Zouaves, les 1er et 2e
régiments Étrangers et en cavalerie : les 4e et 7e Chasseurs à cheval.
IIIe Corps d'armée : les 8e, 19e, 18e Bataillons de Chasseurs à pied, les 23e, 90e, 56e, 41e,
43e, 44e, 64e, 88e, 11e, 14e, 46e et 56e RI et en cavalerie : les 2e, 7e, 6e et 8e Hussards.
IVe Corps d'armée : les 5e et 6e Bataillons de Chasseurs à pied, les 30e, 49e, 6e, 8e, 52e, 73e,
85e, 86e (Pierre Quintard), 2e, 53e, 55e et 75e Régiments d'infanterie et en cavalerie les 2e et 10e
Chasseurs à cheval.
Ve Corps d'armée : le 3e Zouaves, le 14e Bataillon de Chasseurs à pied, les 75e, 89e, 93e,
99e, 18e, 26e, 80e, 82e Régiments d'infanterie et en cavalerie : les 6e et 8e Hussards.
Avec toutes les batteries d'artillerie divisionnaires, le Train, le Service de Santé, le Génie, etc.
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Une médaille pour chaque combattant
Pour récompenser tous les participants et garder le souvenir de cette campagne, la médaille de
la campagne d’Italie fut créée le 11 août 1859 par décret impérial. Environ 120 000 ont été
décernées. La médaille était remise avec un diplôme et décernée par l’Empereur Napoléon III, sur
proposition des ministres de la Guerre et de la Marine. Elle fut attribuée à tous les militaires ayant
pris part aux batailles de Montebello, Palestro, Turbigo, Magenta, Marignan, Solferino. Il en fut
ainsi pour Pierre Quintard de Theil-Rabier.
Le 86e de ligne (86e RI)
Pierre Quintard était « tambour » au 86e de ligne, ancien régiment de Courten (1689-1791)
qui, aux côtés du 85e de ligne, faisait partie de la 2e brigade (Général de la Charrière) de la 2e
division d’Infanterie (Général Vinoy) cette dernière du IVe Corps d’Armée (Général Niel). Le IVe
Corps d’Armée comptait 19.900 hommes et 720 chevaux.
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