Le traité établissant une constitution pour l`Europe
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Le traité établissant une constitution pour l`Europe
Le traité établissant une constitution pour l’Europe : changement qualitatif ou simple consolidation1 ? par Vlad Constantinesco Professeur à l’Université Robert Schuman de Strasbourg. L’actualité oblige souvent à la myopie et à la caricature. Le traité constitutionnel n’y échappe pas, et fait l’objet d’appréciations contrastées et contradictoires. La logique binaire de la question posée par voie de référendum conduit d’ailleurs inévitablement à la dramatisation, au manichéisme, et à l’accentuation des caractéristiques négatives ou positives du texte, selon les positions nationales d’où l’on parle, et selon les stratégies politiques nationales que l’on entend mener, le regard fixé vers d’autres échéances que ce prochain référendum. Enjeu de vingt-cinq batailles politiques nationales, le traité constitutionnel ne mérite probablement pas ni l’excès d’indignité qui le proclame symbole d’une Europe livrée au seul jeu du marché et de la concurrence2, ni l’excès d’honneur, qui lui attribue une importance comparable à la constitution qui gouverne, depuis plus de deux cents ans, les États-Unis d’Amérique ! Il faut en effet considérer ce texte comme un jalon de plus, comme une étape supplémentaire, sur la route ouverte en 1950 par la déclaration Schuman. Plus de cinquante ans de paix et de prospérité, la plus longue période sans guerres qu’aient connue les États de l’Europe occidentale, viennent attester des bienfaits de la voie choisie. Ses bénéfices sont tellement grands, qu’ils en deviennent, pour les plus jeunes, presque 1. Parmi les déjà nombreuses présentations du traité constitutionnel, on renverra à celle de Fr. Dehousse, « Le traité constitutionnel de 2004 : socle d’une nouvelle Europe ? », Journal des Tribunaux, 2005, p. 105. On citera également la présentation ramassée de Ph. Tronquoy et M-C. Vallet, Le petit guide de la Constitution européenne, Paris : La Documentation française, 2005, ainsi que L. Burgorgue-Larsen, A. Levade et F. Picod, La Constitution européenne expliquée au citoyen, Paris : Hachette, coll. PlurielLittératures, 2005. Voir aussi J-L. Sauron, La Constitution européenne expliquée, Paris : Gualino éditeur, 2005, L. S. Rossi (sous la direction de), Vers une nouvelle architecture de l’Union européenne. Le projet de traité-constitution, Bruxelles : Bruylant, 2004. 2. La référence à l’absence de concurrence, ou une référence à une concurrence déréglée et déloyale auraient-elles mieux valu ? 6 Vlad Constantinesco invisibles : la paix, le développement économique, la libre circulation des biens et des hommes, ne sont plus des buts à atteindre, mais des habitudes acquises. Ils ne relèvent plus du construit, mais du donné, et vont presque de soi dans leur quotidienne banalité. Il faut se déplacer vers les marges de l’Union européenne ou sur d’autres continents pour voir encore à quoi peut ressembler une frontière ! Si la mémoire politique est courte, le risque d’hypostasier le traité constitutionnel en ne voyant que lui, sans le replacer dans l’évolution qui y a mené, serait considérable. Le traité constitutionnel n’est donc ni une fin en soi ni la fin de l’histoire européenne, il correspond à un moment historique particulier : le retour des pays d’Europe centrale et orientale, après les vicissitudes que l’on sait, dans la famille européenne. Ces retrouvailles, il faut le dire, n’ont pas été célébrées comme elles auraient dû l’être : les peurs réciproques, les fantasmes et leurs risques de désillusions ont pris le pas sur cette spectaculaire victoire de la liberté, l’Europe de la géographie coïncidant désormais avec l’Europe de la liberté. Le document soumis à l’approbation des Européens se nomme : traité établissant une constitution pour l’Europe. Certains jugent cette appellation excessive, injustifiée, voire illégitime : il ne peut être, disentils, de constitution que de l’État ! L’emploi de ce terme marquerait aussi une volonté subreptice de transformer l’Union en État ! Au sens strict du terme, ajoutent d’autres, la constitution ne peut être que le produit d’un pouvoir constituant démocratique et démocratiquement exprimé : où est-il ? Existe-t-il « un » peuple européen ? Ou bien alors le mot de constitution ne signifie plus rien : après tout, l’Union postale universelle ou l’Organisation internationale du Travail sont aussi régies par des traités qui s’appellent « constitution ». Est-ce exactement cela qu’on a voulu faire pour l’Union européenne ? Ou bien l’on banalise le terme de « constitution », ou bien il est employé à tort ! La critique rejoint d’ailleurs une critique plus ancienne : depuis le traité sur l’Union européenne (1992), n’a-t-on pas l’impression que la construction européenne s’est engagée dans le verbalisme, les mots remplaçant de plus en plus les choses ? On parle depuis 1992 de l’Union européenne, coiffant la Communauté et les piliers de coopération, et celle-ci, avec le traité constitutionnel, absorbe et fait maintenant disparaître la Communauté européenne. Était-il indispensable de renoncer à la Communauté européenne ? De même, pourquoi avoir nommé Politique étrangère et de sécurité commune ce qui n’est encore qu’une simple coordination, incomplète et lacunaire, entre diplomaties Dossier : Changement qualitatif ou simple consolidation ? 7 nationales ? L’irréalité du vocabulaire n’est pas innocente : cela s’appelle tout simplement « faire prendre des vessies pour des lanternes » ou gesticuler de manière incantatoire ! Certains mots cependant sont encore tabous : on se souvient de l’opposition de certains pays au mot « fédéral » ou « fédéralisme », dont on ne parlait que par une périphrase honteuse : the « F » word ! Cette opposition s’est renouvelée avec la Constitution, qui n’a pas hésité en revanche à créer un ministre des affaires étrangères de l’Union européenne ! Le verbalisme mimétique est allé jusqu’à appeler Convention (à l’instar de l’assemblée de Philadelphie, ou de l’assemblée révolutionnaire), l’instance chargée de préparer les travaux de la conférence intergouvernementale (CIG)3. Quoi qu’il en soit de son appellation – après tout, les États sont libres d’intituler comme ils l’entendent les traités qu’ils concluent, et l’art. XVI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen dispose bien que : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a pas de constitution » – ce traité reste un traité international comme le montrent et sa procédure d’adoption (accord unanime au sein de la CIG) et les ratifications indispensables de chacun des vingt-cinq États membres pour son entrée en vigueur, ou comme en témoignent également les conditions de sa révision qui obéit, elle aussi, à l’unanimité… Le saut qualitatif droit international/droit interne ne s’est pas produit, pas plus que la frontière entre l’organisation internationale et l’État n’a été franchie. L’ambition constitutionnelle de ce texte se manifeste dans son Préambule, dans sa Ière partie (qui ne porte pas de titre), dans sa IIe partie consacrée à introduire la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dans le traité constitutionnel, et dans les Dispositions générales et finales de sa partie IV. La partie III, qui reprend les dispositions de droit communautaire matériel et qui précise le mode de fonctionnement des institutions, la plus importante en nombre d’articles (soit 333 articles) aurait plutôt relevé, en France du moins, de la catégorie 3. Certes, par sa composition (délégués des exécutifs et législatifs nationaux, parlementaires européens, représentants de la Commission) comme par les pays représentés (États membres, États candidats), cette Convention représentait une manière inédite d’engager le processus de révision des traités. Le traité constitutionnel en reprend l’idée pour ses futures révisions. Cependant, le travail accompli par les « conventionnels », quelque ait été sa qualité, ne s’est pas imposé aux ministres siégeant à la CIG, démentant ainsi les propos trop optimistes de certains qui estimaient que ces ministres, dont un nombre appréciable avait siégé à la Convention, n’en oublieraient pas les résultats une fois entrés dans les négociations de la CIG… 8 Vlad Constantinesco des lois organiques. Mais à cet ensemble – imposant ! – de 448 articles doivent être ajoutés les 36 protocoles, qui ont la même valeur que le traité, sans compter les 48 déclarations, dont toutes n’ont pas valeur contraignante, mais dont beaucoup précisent utilement certaines dispositions du traité lui-même. Au total, il s’agit d’une masse considérable de textes, dont le nombre et les statuts dépassent largement ce que l’on peut attendre, en règle générale, d’une constitution ! D’autant que l’une des ambitions assignées au processus post-Nice, et confirmées par la Déclaration de Laeken, était la simplification des traités ! Cette complexité textuelle, bien loin de la simplicité attendue d’une constitution, est tout simplement le reflet de l’étroitesse des compromis possibles aujourd’hui, dans une Europe à 254. Ce grand nombre d’États membres, avec lequel il va falloir s’habituer à vivre sans vaine nostalgie, complique mécaniquement la recherche du compromis et du consensus. Les positions de relatif leadership, ou tout simplement l’influence conjointe dont l’Allemagne et la France pouvaient se prévaloir dans une Europe plus réduite, appartiennent désormais à un passé révolu. La zone géopolitique qui s’est réouverte en Europe centrale et orientale n’est-elle pas davantage sensible à la capacité d’attraction de la seule Allemagne ? La position géographique respective des anciens États membres sur le nouvel échiquier politique de l’Europe élargie remet en cause bien des situations acquises, et bien des voisinages et des stratégies de proximité, dictés par une configuration géographique qui n’a plus lieu d’être, devront être repensés. C’est cette nouvelle situation que le traité constitutionnel exprime : aussi, s’il n’était pas ratifié par tous les États, et s’il fallait recommencer un processus de révision, il est peu probable que les gouvernements parviennent demain (quand ?) à un meilleur résultat… Dire non, aujourd’hui, au traité constitutionnel, dans l’espoir de lendemains meilleurs, est largement illusoire ! D’autant que ce serait le traité de Nice, en vigueur depuis 2003, et que chacun s’accorde à tenir pour un mauvais traité, qui sera applicable jusqu’à l’entrée en vigueur d’un nouveau traité…5 4. À la Convention, ont également siégé des représentants de pays comme la Bulgarie, la Roumanie et la Turquie, dont l’entrée dans l’Union n’est pas prévue immédiatement. 5. Même si le traité constitutionnel était ratifié par les vingt-cinq États membres conformément aux prévisions, soit en 2006, le traité de Nice continuerait de s’appliquer pour certains sujets (et non des moindres comme le montre par exemple la Déclaration ad article I-24, § 7 concernant la décision du Conseil européen relative à l’exercice de la présidence du Conseil) jusqu’en 2009 ! Dossier : Changement qualitatif ou simple consolidation ? 9 C’est pour toutes ces raisons qu’il ne faut considérer le traité constitutionnel que comme la mise en place d’une consolidation de l’Union européenne. Il ne s’agit que d’une étape supplémentaire, qui apporte des aménagements limités – mais utiles – au système antérieur, sans le transformer radicalement. De ce point de vue, le traité constitutionnel consacre la méthode des « petits pas », qui par le passé a déjà beaucoup servi à améliorer, peu à peu, les mécanismes de l’Union : – l’Union reçoit davantage de moyens institutionnels et procéduraux qui devraient améliorer sa capacité décisionnelle (augmentation du champ de la codécision, augmentation des cas de majorité qualifiée ; ainsi, la plupart des matières relevant de l'« espace de liberté, de sécurité et de justice » passent du régime de l’unanimité à celui de la majorité, le Parlement, jadis simplement consulté, participant par la co-décision). Le vote à la majorité qualifiée au sein du Conseil (55 % des pays [ce pourcentage étant porté à 72 % si le Conseil ne statue pas sur proposition de la Commission européenne ou du ministre des affaires étrangères de l'Union] et 65 % du total de la population6) met fin au système antérieur de la pondération, que le traité de Nice avait considérablement compliqué. La minorité de blocage ne peut comprendre moins de quatre États membres. La majorité qualifiée est donc atteinte si les pays opposés sont moins de quatre, soit moins d’un cinquième du chiffre total des États ; – certaines innovations laissent certes encore perplexe : a) quelle indépendance et quelle marge de manœuvre pour le ministre des affaires étrangères de l’Union européenne, serviteur de deux maîtres : Conseil européen et Commission ? b) comment coexisteront les trois titulaires de fonctions exécutives établies par le traité constitutionnel : le président du Conseil européen, désormais désigné en dehors de ses membres pour deux ans et demi, le président de la Commission, fort du soutien du Parlement européen, et le ministre des affaires étrangères de l’Union européenne, en même temps vice-président de la Commission européenne ? – d’autres méritent approbation : a) la mise en place d’un service diplomatique de l’Union, dont la réalisation, étudiée ces jours-ci, révèle la complexité et la 6. La Commission avait proposé un système plus simple et plus efficace : 51 % des États correspondant à 51 % de la population totale de l’Union. 10 Vlad Constantinesco b) c) d) e) f) difficulté, contribuera à donner à l’Union une identité internationale plus visible ; l’insertion de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dans la partie II du traité constitutionnel, ainsi que l’engagement de l’Union d’adhérer à la Convention européenne des droits de l’homme, attestent que l’Union a atteint le moment où l’exercice des pouvoirs qui sont les siens doit être mieux contrôlé, et par rapport à une Charte qui lui est propre7, et par rapport à la CEDH, à laquelle l’Union deviendra partie ; le traité comporte un certain nombre de clauses passerelles permettant au Conseil européen ou au Conseil, statuant à l'unanimité, de faire passer sous le régime de la procédure législative ordinaire, des matières en principe soumises à une procédure décisionnelle spéciale, et à l’unanimité. Ainsi l'article IV-444, relatif à la « révision simplifiée », contient-il une clause passerelle générale qui ne peut être mise en oeuvre qu'à défaut d'opposition des parlements nationaux, mais qui n'exige, par contre, pas de ratification nationale ; l’implication plus grande des parlements nationaux, grâce à leur participation au mécanisme d’alerte précoce en matière de contrôle politique de la subsidiarité, par les protocoles 1 et 2, devrait aider à diminuer sensiblement le déficit démocratique ; l’initiative populaire, permettant à un million de citoyens européens de provoquer une proposition de la Commission, n’est certainement pas une innovation négligeable : elle complète la démocratie représentative par la démocratie participative ; le droit de retrait d’un État membre est désormais clairement affirmé. Il confirme la nature confédérale de l’Union, et le maintien corrélatif de la souveraineté aux États membres. Sans doute destiné à rassurer les nouveaux États membres, un tel droit vaut plus par son affirmation que par l’usage éventuel qui en sera fait8. 7. On remarquera que le traité constitutionnel ne modifie pas les conditions de l’accès des particuliers au recours en annulation devant la Cour de justice : ses conditions restrictives, qui s’expliquaient par la volonté d’éviter une action populaire, se justifientelles encore au moment où la Charte des droits fondamentaux deviendra applicable par la Cour de justice ? Que valent les droits qu’on ne peut défendre en justice ? 8. Lire A. Vahlas, « Souveraineté et droit de retrait au sein de l’Union européenne », à paraître dans la Revue du Droit Public et de la Science Politique. Dossier : Changement qualitatif ou simple consolidation ? – – 11 d’autres questions n’ont pas été abordées par le traité constitutionnel, alors qu’elles sont cruciales : la présidence de la zone Euro, simplement mentionnée dans un protocole, ne s’accompagne pas d’un pas supplémentaire vers autre chose que la simple coordination des politiques économiques des États membres de la zone ! d’autres questions, enfin, sont présentées comme des avancées alors que leur examen oblige à plus de nuances. Ainsi la personnalité juridique enfin reconnue à l’Union, et la disparition corrélative des piliers, n’est-elle qu’apparente : la PESC, comme la coordination de politiques économiques, voire la JAI, gardent un régime spécifique, hors de la nouvelle typologie des compétences, et qui s’observe en particulier quant au contrôle de la Cour en ces matières. Un jugement d’ensemble sur le traité constitutionnel ne peut donc être que mesuré : ce texte n’encourt ni la réprobation fulminante ni l’enthousiasme béat, mais plutôt une approbation lucide et raisonnée, qui l’accepte comme un pas de plus, probablement pas le dernier, vers des institutions et des mécanismes décisionnels plus appropriés au rôle que l’Union européenne entend jouer sur la scène mondiale, plus adaptés aussi à la construction de cet espace politique non étatique, qui doit – faute de modèles pertinents – inventer ses règles de fonctionnement au fur et à mesure de son propre développement. Tel qu’il se présente, il est un jalon et un témoin : étape supplémentaire qui en appelle d’autres, mais aussi repère assez exact de la faible marge des convergences possibles entres vingt-cinq gouvernements nationaux au sein de l’Europe élargie. Mais pour pouvoir vérifier si ce traité constitutionnel répond aux attentes de l’Europe et de ses citoyens, encore faut-il qu’il entre en vigueur et qu’il soit ratifié ! Sinon, que se passera-t-il ? Là encore, il faut se garder des scénarios extrêmes : – si un seul État disait « non » – disent les uns, maniant un chantage à la peur – c’en serait fini de la construction européenne, l’Europe plongerait dans une zone de fortes turbulences et connaîtrait un coup d’arrêt ; – pour d’autres, l’échec du traité constitutionnel donnerait un coup de fouet salutaire à l’Europe : on pourrait enfin rédiger un texte meilleur, plus proche des préoccupations des citoyens, plus social, plus démocratique, plus respectueux des services publics, de l’environnement, mieux attaché à lutter contre le chômage et 12 Vlad Constantinesco contre les inégalités, plus conscient de la nécessité d’organiser le gouvernement économique de l’Europe, etc. Les précédents refus (Danemark, Irlande) ont été surmontés, dans chaque pays, par l’organisation d’un nouveau référendum qui a, cette fois-ci, donné un résultat positif. Croit-on sérieusement que l’on puisse demain faire de même, si la France ou le Royaume-Uni, répondaient non ? Poser la question, c’est y répondre… La première conséquence d’un « non » (quelque soit l’importance de l’État en cause : Malte, le Luxembourg, Chypre) serait la non–ratification du traité par toutes les parties, et donc l’impossibilité pour ce texte d’entrer en vigueur. La seconde conséquence serait que la machine européenne continuera de tourner, voire même d’avancer, à son modeste pas : le traité de Nice, déjà en vigueur depuis le 1er février 2003, continuera à s’appliquer, mais ses imperfections deviendront plus perceptibles, notamment quant à la capacité décisionnelle du Conseil9. La troisième conséquence serait une perte d’influence de ceux des États (Belgique, Allemagne, France) qui ont promu la Convention, et se sont fortement investis dans la bonne fin du traité constitutionnel. Corrélativement, cet échec renforcerait la position de ceux des États qui se sont montrés réservés, voire hostiles, à l’entreprise du traité constitutionnel (Royaume-Uni, Pologne, etc.). Et la quatrième conséquence sera – probablement – qu’il faudra bien reprendre, un jour, la marche vers un nouveau traité, qu’il soit constitutionnel ou non. De ces nouvelles négociations – précédées ou non d’une nouvelle Convention – il ne faudra pas attendre grand chose de plus que ce que nous donne, mais dès aujourd’hui, le traité constitutionnel soumis à notre approbation… Pendant tout ce temps-là – qui correspondra à la période de désarroi, au temps des nouvelles négociations, à la recherche des vingt-cinq (peutêtre vingt-sept ?) ratifications –, l’Union ne disposera pas d’un cadre à la hauteur de ses moyens et de ses ambitions, ou en tout cas ne disposera que d’un cadre insuffisant. Finalement, le résultat d’un « non » sera de décaler dans le temps l’entrée en vigueur d’un traité dont il n’est pas sûr, aujourd’hui, qu’il soit notablement meilleur que celui qui nous est proposé maintenant… Le jeu en vaut-il vraiment la chandelle ? Vlad Constantinesco. 9. Cf. O. Costa, « L’Union européenne peut-elle s’accommoder durablement du traité de Nice ? », Regards sur l’actualité, n° 307, janvier 2005, p. 43.