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1. A PROPOS DU JU-JITSU
LEJUJITSU.NET : Comment se porte le ju-jitsu français ? A-t-il évolué ces dernières
années ?
E.P. : Le ju-jitsu français ne se porte pas très bien, aucune structure officielle ne s'en occupe
réellement.
Maintenant, chacun gère son ju-jitsu sur le plan personnel avec ses propres moyens et plus ou
moins de bonheur. Certains se regroupent, comme nous l'avons fait avec l'EAJJ tout en
espérant obtenir une reconnaissance officielle.
Quant à son évolution, si nous nous situons sur le plan purement technique, il n’y a pas de
changement notable. Nous ne pouvons créer de nouvelles techniques indéfiniment. Ce sera
davantage sur des aspects tels que l'approche pédagogique, le programme des examens, pour
ne citer que ces deux exemples, que nous améliorerons notre discipline.
Par contre, je constate une évolution sur les pratiquants et notamment cette saison. L’éventail
des générations qui s'intéresse au ju-jitsu est de plus en plus large. Ce constat est très
encourageant. Une pédagogie adaptée à un panel technique important permettra de continuer
dans ce sens.
LEJUJITSU.NET : Aujourd’hui, sous la tutelle de la FFJDKDA, le ju-jitsu sera-t-il un jour,
à votre avis, un art martial à part entière, sortant de l’ombre du judo ?
E.P. : Sous la tutelle de la FFJDKA, j’ai des doutes. Mais, avec l'EAJJ, nous œuvrons pour ! Il
est bon de rappeler que notre pays est un cas unique en matière de (non-) gestion du ju-jitsu.
LEJUJITSU.NET : Pensez-vous que la fédération délégataire fait ce qu’il faut, en termes
de gestion et de communication, pour promouvoir et animer cette discipline ?
E.P. : Absolument pas. Il ne s’agit même pas du strict minimum, puisque le peu qui est fait ne
va pas dans le bon sens, c’est du moins mon avis. Notre discipline devrait être présentée
comme une méthode d’éducation physique et mentale (en plus d’une méthode de défense)
accessible à toutes et à tous. Or, le peu qui est démontré l’est sous l’aspect compétition. Mieux
vaudrait ne rien faire du tout.
LEJUJITSU.NET : Les raisons de votre démission de la commission technique ju-jitsu de
la FFJDA dans les années 90 restent floues, pourrions-nous en savoir plus ?
E.P. : J’ai démissionné de la commission technique ju-jitsu de la FFJDA en 1995, pour une
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raison très simple : je n’étais plus en accord avec les options prises en matière de contenu
technique, de programme des passages de grades et sur l’instauration de compétitions
d’affrontement direct, ainsi que de la mise en place du « duo-système » à partir de positions qui
ne sont pas naturelles.
LEJUJITSU.NET : Le site 100 % ju-jitsu a recensé près de 40 écoles de ju-jitsu dans
l’hexagone. Pensez-vous qu’elles pourraient cohabiter au sein d’une même fédération ?
E.P. : La majorité, vraisemblablement, mais quelle tâche ! Exaltante et titanesque. Le risque est
aussi de créer une « usine à gaz »! C’est du long terme. Avec des personnes de bonne volonté
cela doit être réalisable !
LEJUJITSU.NET : Selon vous le ju-jitsu-fighting a-t-il un avenir en France ?
E.P. : Pour une minorité de pratiquants, peut-être, mais sur une durée de pratique très courte, il
y a pas mal d’accidents.
LEJUJITSU.NET : Vincent Parisi semble se démarquer admirablement dans cette
discipline, qu’en pensez-vous ?
E.P. : Ce que je pense de Vincent Parisi est différent de ce que je pense du « fighting système
». Je ne pense que du bien de Vincent qui, dans son domaine, est un bon technicien et un bon
combattant.
LEJUJITSU.NET : Pourquoi le ju-jitsu « traditionnel japonais » n’est-il plus représenté
lors du festival des arts martiaux à Bercy ? (en 2011, c’est Vincent Parisi qui
représentera le ju-jitsu)
E.P. : Il faudrait poser la question aux organisateurs de cet évènement. Ce que va présenter
Vincent sera sans aucun doute de qualité, mais quand même assez éloigné de notre ju-jitsu
traditionnel japonais. Quant au ju-jitsu traditionnel, il souffre – entre autre – d’un manque de
cohésion des différentes écoles et différents styles. Aux yeux des non-initiés, cette appellation
reste floue. C’est peut-être également le point de vue de certains magazines.
LEJUJITSU.NET : Ju-jitsu traditionnel ou moderne : quelles différences ? Cela a-t-il
encore un sens aujourd’hui ?
E.P. : Effectivement, nous pouvons nous poser la question. Mais, je crois quand même que oui.
Ce qui fait la différence, sur le plan technique, par exemple, ce sont les katas. Pour certains ils
n’ont aucune utilité, ils sont dépassés et représentent une perte de temps. Ce point de vue
appartient davantage aux partisans du « moderne ». Pour les « traditionnels », les katas sont
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les racines d’une discipline et le véhicule de techniques et de principes au travers des âges. A
la condition de ne pas limiter sa pratique à ces seuls exercices.
LEJUJITSU.NET : Ju-jitsu combat ou défense : quelle orientation est la plus adaptée
selon vous ?
E.P. : A l’origine, le ju-jitsu n’était qu’utilitaire. Au fur et à mesure, avec l’évolution des sociétés,
il devenu également une méthode d’éducation physique et mentale. C’est cela qui est adapté
pour moi. Nous offrons ainsi à une large majorité de personnes la possibilité de s’épanouir au
travers d’une pratique martiale. Quant au combat, je n’y suis pas opposé par principe, j’ai été
compétiteur en judo, mais franchement, ju-jitsu et compétition, c’est un non-sens. « Soit on fait
du ju-jitsu et on ne fait pas de compétition, soit on fait de la compétition et ce n’est pas du
ju-jitsu.»
LEJUJITSU.NET : Que pensez-vous des nombreuses disciplines apparues ces dernières
années dans le paysage des arts martiaux français : krav-maga, ju-jitsu brésilien,
grappling, kyusho-jitsu, MMA ?
E.P. : Chaque pays a toujours possédé sa discipline de combat, sa lutte, son art martial. Les
arts martiaux japonais ont été les premiers à s’exporter. Pourquoi ont-ils été aussi prisés ? Sans
doute parce qu’ils offraient davantage qu’une simple méthode de combat. Ils proposaient,
certes une véritable technique intéressante dans la mesure où – par exemple – le principe de
non-opposition et d’utilisation de la force de l’adversaire en était la base (ju-jitsu et aïkido), mais
ils étaient aussi considérés, à juste titre, comme des écoles de vie. A l’époque où la
communication est de plus en plus rapide, chaque pays peut mettre en avant sa discipline. De
plus, nous sommes toujours à la recherche de nouveautés.
De mon point de vue, il y a trois soucis majeurs. Le premier réside dans la compétence de
certains enseignants, puisque beaucoup de ces disciplines n’offrent pas de réelles structures,
même si elles sont tout à fait respectables. Le deuxième se trouve dans le fait que certains
n’hésitent pas à créer leur propre art, alors qu’ils ne sont ni structurés ni compétents. Enfin, et
c’est le troisième problème, le nombre important d’écoles et de styles entraînent une confusion
dans l’esprit du néophyte au moment du choix.
Même si Mao Tse Tong disait : « Il faut que mille fleurs s’épanouissent ! »
LEJUJITSU.NET : Pensez-vous, comme Bertrand Amoussou, qu’il faille légaliser le MMA
en France ?
E.P. : Non, je suis contre. Pour moi cela ne va pas dans le sens de l’évolution. C’est contraire à
l’esprit sportif, à l’éducation physique et mentale que doit apporter une pratique martiale. Et
puis, pour des raisons évidentes, cette pratique ne peut s’inscrire dans la durée. Je rejoins la
position de Madame la Ministre.
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LEJUJITSU.NET : Dans ce contexte, la ceinture noire a-t-elle encore une signification,
une valeur ?
E.P. : Oui, bien-sûr, elle a une signification dans les disciplines où elle existe. Mais elle a, avant
tout, la valeur que possède l’organisme qui la délivre. Par contre, le nombre croissant de
pratiquants augmente de fait le nombre de ceintures noires, avec le risque de la banalisation.
Malgré tout, ce grade reste mythique pour l’ensemble des pratiquants.
2. A PROPOS DE VOUS
LEJUJITSU.NET : On a parlé dernièrement de vous sur le web : qu’en est-il de l’affaire «
Kwoon contre Pariset » ?
E.P. : Cette question est plus personnelle, mais elle est en liaison directe avec mon activité
professionnelle et la passion que j’ai pour le ju-jitsu. Je vais en profiter pour rétablir la « vraie
vérité ». A l’origine un commentaire posté en 2004. Injurieux personnellement et diffamatoire
professionnellement. Le problème est que je ne vais jamais sur ces forums et que je n’en été
informé qu’il y environ un an (printemps 2010). J’ai tout d’abord essayé de régler le problème
seul. J’ai fait des démarches auprès de Google : coup de fil, visite sur place chez «
Google-France » avenue de l’opéra à Paris, fax à la maison mère aux Etats-Unis. Et toujours
pas de retrait de ce message qui de surcroit avait été « indexé », le rendant accessible très
rapidement. Sans réaction de mes interlocuteurs, j’ai décidé de prendre un avocat pour m’aider
et je lui ai confié la défense de mes intérêts. Après avoir étudié le dossier, il a d’abord envoyé
une mise en demeure à Kwoon, restée sans réponse. Mon conseil a alors décidé de passer à la
vitesse supérieure. Il a demandé le retrait de l’info calomnieuse en référé et a menacé
d’attaquer sur le fond. Et c’est là qu’il y a eu une énorme contre-vérité ; jamais, je n’ai attaqué
Kwoon sur le fond, juste menacé. Et cela parce que je me suis trouvé confronté à une absence
totale de réaction suite à mes différentes démarches et la mise en demeure de mon conseil. De
toute façon, n’étant pas juriste, je ne pouvais faire autrement que faire confiance à celui à qui
j’avais confié la défense de mes intérêts. Ce qui est vraiment regrettable et lamentable, c’est
qu’il aura fallu en venir à de telles menaces pour – enfin – obtenir une réaction ! Mais, après
cela, un véritable « buzz » s’est produit. Chacun a pu dire tout et n’importe quoi. Ce que l’on
pourrait me reprocher, c’est de ne pas avoir réagi, à ce moment-là, en dénonçant tout de suite
ces contre-vérités. Mais franchement, je ne voulais pas entrer dans ce jeu et me mettre au
niveau de ces personnes qui déblatèrent bien planquées derrière leur ordinateur, bafouant ainsi
l’une des principales qualités (propre, en autres aux « vrais » pratiquants d’arts martiaux), qui
s’appelle le COURAGE, appartenant au code d’honneur du Bushido. Je veux bien échanger,
discuter, débattre, mais en connaissant mon interlocuteur, cela me semble être le minimum.
Même au risque de passer pour un ringard, puisque c’est de notre époque de diffamer en toute lâcheté. Que ceux qui ont des choses à me dire me le disent en face ! J’accepte la critique, à
condition qu’elle soit constructive et non pas simplement destructive et surtout de la part d’un
interlocuteur identifié. De toutes les façons, dans l’existence, il y a ceux qui construisent et… il y
a les autres. Je suis aussi prêt à donner mon opinion sur les compétences martiales des
internautes qui se permettent de le faire à propos de pratiquants ou d’experts. Encore faudrait-il
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qu’ils pratiquent et que nous puissions les identifier. Mais sur leurs qualités professionnelles
(s’ils en ont), je ne me permettrais pas de donner un avis, sinon faussé, puisque émanant d’un
non-initié.
Maintenant, l’info qui a tout déclenché est retirée et j’insiste sur le fait que je n’ai pas attaqué
Kwoon sur le fond.
LEJUJITSU.NET : De nombreux internautes critiquent votre démarche, comment
l’expliquez-vous ?
E.P. : Sans doute tout simplement parce qu’ils ne sont pas en possession de tous les éléments
!
LEJUJITSU.NET : Que répondez-vous à ceux qui vous considèrent plus comme un
"businessman" que comme un enseignant expert en ju-jitsu ? E.P. : Si la traduction de businessman est travail et homme, elle me va très bien. En effet, je
travaille beaucoup, même un peu trop. Sérieusement à qui l’on pourrait reprocher de gagner sa
vie avec son travail. Dans la mesure où celui-là est fait honnêtement. J’ai toujours été attaché à
ma liberté, même si celle-ci a un prix. Je n’ai jamais tergiversé, ni fait preuve de tiédeur. Si
j’avais choisi le « confort », je n’aurais pas quitté la FFJDA en 1995, par exemple. Je n’aurais
pas choisi de développer mon activité dans le secteur privé dans un local commercial à Paris
(sans avoir jamais demandé aucune subvention), au prix de nombreux sacrifices. Certaines
personnes devraient avoir un minimum de connaissances en économie, pour ne pas confondre,
notamment, chiffre d’affaire et bénéfice ! De plus, personne n’est obligé de venir pratiquer chez
moi, il existe des clubs municipaux qui, bien heureusement, permettent à tous de pratiquer en
fonction de ses préférences et de ses moyens financiers. On ne peut pas plaire à tout le
monde… mais cela doit-il forcément déclencher des tombereaux d’insultes ? A moins que cela
viennent tout simplement de personnes en mal de reconnaissance ? Méprisables à tout point
de vue et surtout plus aptes à détruire qu’à construire. Maintenant, il faudrait considérer
l’incident comme clos et que tout ce petit monde se calme ! Et garde son énergie pour une
pratique saine de corps et d’esprit !
LEJUJITSU.NET : Quel est votre avis sur les forums en général ? Les parcourez-vous ? E.P. : Comme je vous le dis plus haut, non, je n’ai pas le temps. De plus, il s’agit assez souvent
d’un défouloir, plus que d’un vrai lieu de débat !
LEJUJITSU.NET : De votre côté, qu’attendez-vous d’Internet ? Qu’elle utilisation en
faites-vous ?
E.P. : Certains l’ont dit avant moi : Internet : c’est le pire et le meilleur. Le pire, je l’ai évoqué
plus haut. Le meilleur, c’est bien évidemment une source infinie d’information et de
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communication. Je l’utilise peu à titre personnel, principalement pour des infos pratiques. A titre
professionnel, le club possède un site. Nous avons été d’ailleurs un des tout premiers clubs à
en posséder un. Je crois qu’à l’heure actuelle, c’est tout simplement indispensable. J’ai aussi un
blog, mais par manque de temps je ne publie pas autant d’articles que j’aimerais le faire.
LEJUJITSU.NET : Vous êtes directeur technique de l’EAJJ : quel est votre rôle ? Cette
école a-t-elle un avenir ?
E.P. : Comme son nom l’indique, le rôle du directeur technique se situe sur le plan… technique.
Les principaux aspects dans cette mission sont les suivants : garantir notre patrimoine
technique, assurer une bonne formation continue des enseignants et une bonne organisation
des différentes activités (stages, coupes techniques, équipes de démonstrations, etc.). Cela
prend énormément de temps et il n’est vraiment pas aisé de concilier cette activité avec le reste
!
Quant à l’avenir de l’EAJJ, j’y crois, sinon ce n’est pas la peine qu’elle existe !
LEJUJITSU.NET : Quels sont vos projets ? E.P. : Le ju-jitsu, toujours le ju-jitsu !
LEJUJITSU.NET : Et pour finir, quel est le meilleur et le pire souvenir de votre carrière
martiale ?
E.P. : J’ai bien sûr beaucoup de souvenirs, des bons et des moins bons. On se souvient davantage des meilleurs et c’est tant mieux. Les bons sont liés principalement aux
démonstrations. Peut-être Bercy 1993, où pour la première fois nous avions conçu la
démonstration à partir d’une histoire avec plus de mise en scène. Ce jour-là, notre prestation
avait reçu un accueil au-delà de nos espérances. Le pire, je le vis au quotidien, en quelque
sorte ; il s’agit du constat de ne pas avoir assez de temps pour faire tout ce qui devrait être fait.
Pour conclure, j’aimerais insister sur un aspect qui me tient particulièrement à cœur. Il
s’agit de celui de la « non-violence » dans l’enseignement et la pratique des arts
martiaux. La tâche du professeur ne doit pas se limiter à enseigner des techniques,
surtout dans la mesure où celles-ci sont dangereuses. Il doit également transmettre des
mises en garde et l’art de la maitrise et du contrôle. Certes, il s’agit d’être pragmatique
dans la réalité en cas d’agression et de ne pas sombrer dans l’angélisme. Mais le rôle du
professeur n’est pas de rajouter une dose de violence pour combattre celle-ci. La grande
majorité des disciplines et des enseignants sont dans cet état d’esprit, mais pas tous...
En aucun cas un dojo ne doit devenir l’école de la violence. A ce titre, je voudrais
signaler que le FIPAM (fonds international pour la préservation des arts martiaux,
présidé par Thierry Plée) organise les 1er, 2 et 3 avril son premier colloque international,
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ayant pour thème : violences et sociétés. Je pense sincèrement que les arts martiaux ont
un rôle à jouer dans ce débat.
LEJUJITSU.NET : Merci Eric Pariset.
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