PAUL ÉLUARD, POÈTE COMMUN DANS LA COMMUNE Paul

Transcription

PAUL ÉLUARD, POÈTE COMMUN DANS LA COMMUNE Paul
PAUL ÉLUARD,
POÈTE COMMUN
DANS LA COMMUNE
Paul Éluard est le poète que l’on connaît, comme un ami, et dont on a un
vague souvenir, comme Jean Jaurès ou le Général de Gaulle, car leur
nom fleurit sur les plaques de boulevard ou de rue. Pour ma part, Paul
Éluard, c’est une poésie, douce et claire, pour l’Humanité. Un poète à
gauche de la gauche dont le visage affichera toujours, à mes yeux, la
tendresse et la gentillesse.
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Ce sont aussi des noms de lieux dans une municipalité communiste :
stade, gymnase ou encore école Paul Éluard. Un cahier de collège dans
un carton à la cave, où j’ai pu découvrir le poème « Liberté », face
auquel l’on ne peut être que bouleversé jusqu’aux larmes, quand on sait
qu’il l’a écrit pour une femme. Et que, depuis les avions de la Royal Air
Force, ce poème est tombé du ciel sur les terres de France, entre les
mains des Françaises, des Français et des enfants.
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Bachelier, je rencontre à la bibliothèque Elsa Triolet à Pantin, au 102,
avenue Jean Lolive, un compagnon de route de Paul Éluard, un résistant
paraît-il. Comme je n’ai pas de stylo dans ma poche, il ose affirmer que
je ne suis pas poète. Je lui envoie des poèmes de jeunesse, avec
l’audace d’un génie. Dans une lettre manuscrite, il se montre méchant à
l’égard de ma poésie, alors que ses poèmes sont de très mauvais aloi, et
que son nom, lui, tombera dans l’oubli.
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À Berlin-Est, lors de mes études à l’université Humboldt, j’ai dans ma
valise trois Pléiades achetés avec mon argent : une anthologie bilingue
de la poésie allemande, les tomes I des œuvres complètes de Federico
Garcia Lorca… et de Paul Éluard. Étudiant, je passe souvent devant le
21, la rue Catulienne à Saint-Denis. J’apprends qu’il a grandi à Aulnaysous-Bois, dans le quartier vert de Nonneville, entre la mairie et le canal
de l’Ourcq. Il a également habité dans une villa blanche à Eaubonne, en
Seine-et-Oise.
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Quand je vivais dans un F2 en location à Paris, à côté du port de
l’Arsenal, Clément Eugène Grindel, son père, agent immobilier, m’a
profondément fasciné. Il avait tenté sa chance dans la Capitale, et réussi
à devenir riche. Après cela, j’ai découvert que Paul Éluard a rencontré
en 1946 Édouard Benes, nouveau Président de la Tchécoslovaquie, et
j’ai alors compris que le poète peut être reçu comme un chef d’État. À
présent, Paul Éluard et moi sommes voisins, dans le quartier du PèreLachaise, et je ne le vois plus guère.
M. Nicolas GRENIER
Poète français.