glaxosmithkline : l`interview

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glaxosmithkline : l`interview
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JEAN-PIERRE GARNIER
GSK PARIE GAGNANT
SUR LA RECHERCHE
Le président de GlaxoSmithKline,
Jean-Pierre Garnier, a annoncé,
en octobre dernier, un investissement
de 500 millions d’euros pour
la construction d’une nouvelle
unité de production dans le Nord
de la France. A la clé, la fabrication
de Cervarix®, vaccin préventif
contre le cancer du col de l’utérus,
« blockbuster » attendu du laboratoire,
avec Tykerb®, médicament
contre le cancer du sein.
Le choix du groupe d’investir
de manière « colossale »
dans la recherche et le développement
a permis une progression rapide
aux États-Unis.
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DOSSIER RÉALISÉ
PAR CHRISTINE COLMONT
ET XAVIER DIAZ
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Pourquoi avoir choisi la France pour la construction
d’une nouvelle unité de production à Saint-Amandles-Eaux et la fabrication de votre nouveau vaccin
Cervarix®, contre les papillomavirus ?
> Nous comptons en effet investir 500 millions d’euros sur
cinq ans. Cette nouvelle usine devrait être opérationnelle
fin 2010. Les risques que ce projet tombe en disgrâce
sont faibles car cette unité pourra accueillir d’autres
vaccins, contre la grippe notamment, et produira des
produits lyophilisés, pour lesquels la demande mondiale
est pour l’instant insatisfaite. Outre l’attrait de l’environnement industriel, nous pourrons trouver sur place du
personnel bien formé. Enfin, cet investissement nous
permettra de diversifier nos implantations internationales. Dans la pharmacie, il est essentiel de ne pas mettre
tous ses œufs dans le même panier. La motivation de la
localisation d’un investissement n’est pas seulement
pécuniaire. Mais la France a encore des progrès à faire
pour attirer les investissements étrangers. Et ce, même si
le gouvernement français nous a donné des preuves
tangibles de sa volonté de donner les moyens d’agir aux
industriels. Une attitude qui nous rend optimistes.
La fusion Glaxo Wellcome avec SmithKline Beecham en
2001 vous a permis de restructurer votre recherche.
Pouvez-vous en dresser le bilan ?
> La restructuration de la recherche avait commencé bien
avant la fusion. Dans la pharmacie, à l’aube des années
2000, les portefeuilles de molécules se sont réduits comme
peau de chagrin. La productivité de la recherche s’est nettement érodée. Trouver de nouveaux produits dans les maladies chroniques est devenu plus difficile. Alors que toute
la pharmacie consacrait en 1980 seulement 2 milliards de
dollars à sa R&D pour lancer 30 produits sur le marché,
elle devait dépenser 26 milliards, vingt ans plus tard, pour
le même nombre de produits mis sur le marché. Aujourd’hui, consacrer un budget de 2 milliards de dollars pour un
seul produit n’a plus aucun sens économique. Dans ce
contexte, GlaxoSmithKline a voulu transformer en profondeur sa recherche en créant des instituts de recherche
séparés. Nous avons monté des centres d’excellence, avec
à leur tête des patrons qui ont tous les droits mais aussi tous
les devoirs, des espaces de liberté et de transparence en
rupture avec les structures bureaucratiques. Nous avons
cassé la pyramide de recherche et nous sommes dotés de
nouveaux outils, comme la génomique ou la robotique ;
nous avons industrialisé le processus de recherche pour
mettre toutes les chances de notre côté. Nous sommes ainsi
devenus plus sélectifs. Les résultats sont là : en nous
appuyant sur ces unités stratégiques, notre recherche est
devenue deux fois plus productive. Le nombre de produits
entrés en essais cliniques a été multiplié par deux en quatre
ans. Aucun autre laboratoire pharmaceutique n’est allé
aussi loin que nous. La R&D coûte plus cher mais elle trouve
davantage de produits.
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Allez-vous augmenter encore son budget ?
> Nous consacrons déjà près de 17 % de notre chiffre
d’affaires à la recherche et développement et nous souhaiterions porter cette part à 25 % des ventes avant 10 ans.
Ce sont des sommes colossales puisque nous investissons
déjà 4 milliards d’euros chaque année. Au final, GSK de44
vrait être le laboratoire qui consacre le plus à la R&D. 4
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« Une recherche deux fois plus productive »
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Quels sont les médicaments majeurs que vous
fantastique pour améliorer la santé des femmes. Nous
prévoyez de lancer ?
avons constaté une demande considérable de la part des
> Huit produits en développement viennent d’entrer en médecins. Pour le moment, nous n’avons pas déposé de
phase III et nous comptons en enregistrer six cette andemande de mise sur le marché. Nous le ferons dans
née (cancer du sein, système nerveux central, système
un futur proche en Europe et aux Etats-Unis. Nous
infectieux, diabète et vaccin). Le produit le plus avancé
sommes donc clairement derrière Merck & Co du point
est Tykerb®. Nous venons de déposer les demandes de
de vue du timing. En revanche, notre produit offre un
mise sur le marché en Europe et aux Etats-Unis. C’est un
avantage primordial. Nous n’avons en effet pas effectué
produit très prometteur dans le traitement du cancer du
les mêmes choix que notre concurrent américain.
sein. Il a en outre un gros avantage. ContraiCervarix® a été conçu pour le cancer du col
rement aux traitements actuels, qui sont inde l’utérus et seulement pour le traitement
jectables et nécessitent donc de se rendre à
de cette thérapeutique. Cela nous a permis
Un passage
l’hôpital, la prise de Tykerb® se fait par voie
d’ajouter des adjuvants pour jouer le rôle
orale. De plus, la tolérance des patientes est
de catalyseur afin d’améliorer son efficaefficace
très bonne, ce qui leur permet de prendre
cité. A l’inverse, quand vous essayez de
en OTC
leur traitement quasiment comme s’il
fabriquer un produit qui est aussi efficace
s’agissait d’une maladie chronique. Il dedans d’autres indications vous diluez un
vrait devenir l’un des pivots du traitement
peu son efficacité. Du moins c’est un
du cancer du sein. La réaction positive des autorités
risque. Cervarix® a montré son efficacité dans la pronous conforte dans notre optimisme. Le dossier protection croisée au-delà des papillomavirus les plus
gresse très vite. Nous espérons obtenir les autorisations
fréquents HPV 16 et HPV 18. Mais nous ne sommes pas
de mise sur le marché et le commercialiser au cours de
inquiets de la concurrence de Gardasil® car deux fabril’année prochaine. Le cancer du sein est une maladie
cants ne seront pas de trop pour répondre à la future
malheureusement très répandue. Nous pensons donc
demande.
que ce produit sera incontournable dans quelques anPour un groupe comme le vôtre, quel est l’intérêt de
nées.
conserver une division produits grand public, bien
Quels sont les avantages du vaccin Cervarix® par
moins rentable que la pharmacie ?
rapport à son concurrent Gardasil®, de Merck & Co,
> Elle a sa place dans le groupe car les produits sans
déjà lancé aux Etats-Unis ?
prescription sont un très bon relais pour les produits
> Nous pensons que Cervarix® deviendra une solution sous prescription. Je m’explique : une fois que les mé-
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Enfin !
dicaments ont terminé leur cycle de vie dans le domaine
des produits de prescription, on peut en faire des
produits OTC. Cette deuxième vie, si je puis dire, est
certes plus modeste, compte tenu d’un marché moins
important et de prix plus bas, mais elle permet de poursuivre la commercialisation des produits et donc d’allonger leur pérennité. Mais il y a tout de même des
conditions pour que cette stratégie fonctionne. Sans
division commerciale OTC, il serait difficile de faire
soi-même la transition entre le produit de prescription
et les médicaments vendus sans ordonnance. Certes, le
passage au domaine OTC n’est pas possible pour tous les
produits. Mais pour ceux qui le peuvent, c’est assez
efficace. Et puis nous n’avons aucune raison de nous
séparer de cette division. Elle nous permet d’afficher
l’une des plus importantes rentabilités parmi les
laboratoires OTC, avec une marge de profit supérieure
à 20 %.
le 1er livre
de référence
sur le
Medical
Education
Votre croissance est notamment tirée
par les bonnes performances des Etats-Unis.
Medicare peut-il changer la donne et donner un coup
de frein à votre expansion outre-Atlantique ?
> Pour l’instant, nous avons un système mixte avec 30 %
du marché entre les mains de l’Etat fédéral avec les avantages et les inconvénients que cela implique. Une grande
partie du marché reste donc privée. Medicare est en train
de créer un marché public plus important. On peut bien
sûr jouer les cassandres en affirmant que, vu les
contraintes budgétaires qui sont les siennes, le payeur
public étranglera l’industrie pharmaceutique. Je pense
que ce ne sera pas le cas et que ce filet de sécurité est
nécessaire pour les personnes en difficulté. Medicare
leur permet d’accéder aux meilleurs traitements au
moindre coût. Avant ce programme, beaucoup de
personnes âgées ne pouvaient accéder aux produits
innovants. Au mieux elles pouvaient acheter les produits
génériques très développés aux Etats-Unis. Il va donc
falloir s’adapter et jouer le rôle de fournisseur d’un client
exigeant qui aura la maîtrise d’une grande partie du
marché. Mais je vois l’avenir de façon positive en ce qui
concerne le marché américain.
Plusieurs laboratoires européens viennent
d’annoncer des acquisitions. Souhaitez-vous
participer à la consolidation en cours ?
> Nous réalisons plutôt de petites acquisitions nous
permettant de nous renforcer dans certains domaines
stratégiques. La priorité chez GSK est à la consolidation
de notre pipeline actuel qui est de très bonne qualité et
dont nous allons délivrer les fruits au cours des années à
venir. ■
PROPOS RECUEILLIS
PAR CHRISTINE COLMONT,
XAVIER DIAZ ET DANIEL VIAL
POUR LE RECEVOIR
www.hoponthetrain.com
Dr Philippe Girault
Président RE-IMAGINE Health Agency