Skypper 582 NuviX le passe partout

Transcription

Skypper 582 NuviX le passe partout
NOS ESSAIS EN VOL ET AU SOL
ce que nous avons vu Air Création Skypper 582 NuviX
Skypper 582 NuviX
le passe partout !
Pour mener cet essai, nous avons pris la machine durant quatre jours et parcouru
environ 1000 kilomètres en 11 heures en posant sur tous types de terrains,
en biplace bien sûr. Nous avons également pu faire essayer ce pendulaire et
même donner une leçon à un élève débutant. Les conditions idéales d’un essai,
que nous ne pouvons hélas pas toujours réunir pour tout un tas de raisons,
la disponibilité des machines étant la première. Depuis Pizay chez Samir Elari,
nous sommes allés rendre visite à Olivier Marty près de Montauban, en posant
à Brioude, Douzalbats, Aurillac, Cahors, puis au retour Villefranche-de-Rouergue
et à nouveau Brioude. Le passage du Massif Central, le contournement de divers
orages et autres ZIT et de bonnes
Pierre-Jean le Camus
turbulences nous permettent de livrer
Benjamin Aygalenc
un avis assez complet sur ce nouvel
ensemble de chez Air Création.
Photos ULMiste et
Serge Porte
Le chariot
Destiné à remplacer la gamme GTE-Trek, ce tricycle biplace
léger n’a aucun point commun avec son ancêtre, à part le
582 et la largeur du train principal, qui est identique au GTE
(le train arrière du Trek étant celui du Tanarg, plus large).
La longueur est augmentée, afin d’améliorer le confort des
occupants. Même les roues, désormais, diffèrent. Alroc,
historique fournisseur de l’ULM, ne souhaite plus prendre de
responsabilités “aéronautiques”. Par conséquent Air Création
fait mouler ses propres jantes, prévues d’origine pour recevoir
des freins à disques périphériques. La structure du chariot est
en inox mécano-soudé, dont nous avions aperçu le prototype en
février 2010 à l’usine, puis des machines de présérie à Blois et St
Hilaire. Comme nous en avons pris le parti, nous avons attendu
l’ensemble définitif et quelques exemplaires en circulation avant
d’aller voir, afin de vous épargner le commentaire : “les défauts
seront corrigés sur la série”. Comme sur le Tanarg, le centre de
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gravité est abaissé, les deux sièges bien séparés et le réservoir
roto moulé intégré au treillis, sous l’assise passager, avec
ouverture à tribord dimensionnée pour les pistolets de 100LL.
D’origine, il contient 53 litres, mais devrait, avec le temps,
arriver aux 55 annoncés en tenant compte du volume qui
augmente par dilatation. Il nous semble dommage de mettre
à jour un segment de gamme en reniant l’un quelconque de
ses acquis. Or, les utilisateurs de GTE, habitués à plus de 60
litres, devront ici tenir compte de la moindre autonomie de ce
nouveau chariot, qui est réduite de 30 minutes au minimum,
avec le 582 qui nous concerne aujourd’hui. Avec les moteurs du
futur, auxquels ce chariot se destine, la question ne se posera
plus. La sellerie, habillée d’alcantara, repose sur des sangles,
ce qui donne une certaine souplesse qui améliore le confort par
rapport à des assises rigides sur tubes. La structure inférieure
avant, qui reprend les efforts de la fourche, est en tôle pliée
et ajourée, ce qui lui donne un petit air de “Ducat” assez
sympathique, au prix, certainement, d’un plus grand entretien
ce que nous avons vu...
NOS ESSAIS EN VOL ET AU SOL
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NOS ESSAIS EN VOL ET AU SOL
ce que nous avons vu...
au nettoyage. La fourche, réglable en deux positions (ainsi que
les repose-pieds passager), propose les freins hydrauliques à
bâbord et l’accélérateur à tribord, très classiquement. Frein sur
la roue avant de série, sur les trois roues en option. Nous avons
à l’essai la monte de série. Les harnais sont de type trois points,
avec enrouleur d’automobile.
La console à instruments n’est pas optionnelle. Par rapport à la
présérie, sa largeur a été diminuée pour faciliter le montage de
l’aile. Elle permet d’équiper le Skypper de tous les instruments
que l’on désire et contient la batterie. Elle reprend également
la commande de gaz manuelle, qui n’est plus sur le flanc droit
de la machine, ce qui, malgré un manuel d’utilisation très clair,
générait trop d’accidents à l’installation à bord sur les GTE-Trek.
La commande de starter, elle, se trouve sur le flanc droit du
chariot. Le haut saute-vent, teinté, est échancré sur les côtés de
manière à permettre d’accrocher l’aile et se démonte par quarts
de tours. On peut soulever la machine au sol en empoignant
l’avant (la “langue”) du carénage, sans effort notable.
Les flancs de la machine sont habillés de tissu néoprène, ce qui
affine la ligne. Le parachute est repris sous le siège arrière et
la poignée de déclenchement est doublée, de telle sorte que
pilote et passager peuvent l’opérer. La poutre verticale arrière
est cassée et sa jonction est abaissée, comme sur les DTA,
Chapelet et autres Aquilair, il est donc possible de monter et
baisser l’aile seul, nous allons le voir.
Le bâti-moteur reprend les solutions du Tanarg, avec
amortissement par ressorts et silentblocs et le radiateur se
trouve quasiment à la verticale, sous le moteur, l’écoulement
étant optimisé par des écopes à dépression.
Côté rangements, déception : tandis que le site internet
du constructeur indique une machine destinée “aussi bien
aux pilotes voyageurs qu’aux centres de formation”, nous
découvrons que le voyageur devra soit voler seul et monter
l’énorme coffre sur le siège arrière, soit, s’ils sont deux, être
sales ou se contenter de voyages organisés avec une intendance
qui transporte tout son petit merdier. Sous le siège avant, il y a
bien un petit coffre de trois petits litres, mais une fois qu’on y a
entreposé les chargeurs de téléphones, la housse du matériel
photo, deux brosses à dents, deux calbuts et trois chaussettes,
il est plein. Le manuel d’utilisation prévient qu’il ne faut pas y
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ranger plus de 10 kg de matériel, mais il faudrait que l’on nous
explique comment cela pourrait être possible. Si l’on juge que
le parachute n’est pas indispensable, ce qui est un droit, un
coffre de 20 litres prend sa place, qui rend alors la machine
exploitable en voyage à deux. Une pochette à document est
également disponible derrière le siège arrière. En attendant,
il est possible de glisser deux bidons d’un litre d’huile entre le
siège passager et le parachute, avantage dont nous ne nous
priverons pas !
En tous cas ce qui est certain, ce qu’il faudra mettre beaucoup
de bonne volonté pour emboutir la masse maximale avec cet
ensemble Skypper NuviX 582 : dans la configuration essayée,
avec le parachute et le plein de carburant, nous arrivons à
251,5 kg. L’aile supportant une charge maximale de 462 kg
(avec parachute, 450 kg sans), nous avons donc une capacité
d’emport de plus de 100 kg par occupant, viande, vêtements
et bagages compris. En l’occurrence, nous serons à 165
embarqués, soit une masse au décollage de 416,5 kg et une
marge de 45,5 kg qu’il serait impossible d’emporter, sauf à
poser des sacs de sable sur nos genoux. Au moins, il n’y a pas
à réfléchir, à moins de souffrir d’un embonpoint par essence
difficilement compatible avec l’ULM.
Le tout est dessiné sur des outils modernes et fabriqué selon
des procédés industriels. Les tubes sont livrés à l’usine gueules
de loups découpées à la machine numérique, prêts à être
soudés. Cette technique permet, malgré l’apparente plus grande
complexité, d’économiser sur la main d’œuvre et la matière
première nécessaires au montage d’un Skypper par rapport
au GTE, constitué de tubes d’alu droits découpés, percés et
boulonnés à la main. Ce qui qu’au final et à options égales,
le Skypper est facturé moins cher que le TREK ! Mais sans
possibilité (pour l’instant ?), de faire baisser la facture, puisque
ce qui était optionnel sur le GTE est en série sur le Skypper :
console à instruments (impossible à retirer puisqu’elle contient
notamment les gaz à main et la batterie, qui participe donc
au bon équilibre du chariot), carénages de roues à dérives et
démarreur électrique. Finie l’époque du pendulaire qui n’a pas
besoin de pendules et se pilote nez au vent après avoir démarré
en pilote responsable qui sait lire un manuel. Désormais, on
emporte avec soi les kilos inutiles du démarreur électrique et
on est tout content d’avoir devant soi tout un tas d’instruments.
Les temps changent… qu’un constructeur s’adapte l’honore,
mais qu’il impose le changement nous questionne, nous qui
ce que nous avons vu...
sommes minimalistes tout en respectant
les goûts de chacun. Lesquels goûts
plébisciteraient la version toutes options
si d’aventure il était proposé une version
nue... donc tout le monde est content !
Un carénage démontable sera proposé
en option, dont le dessin n’est pas
encore figé et qui viendra par-dessus la
console. Il permettra alors d’augmenter
la capacité de chargement, ainsi que
des sacoches latérales actuellement à
l’étude. Nous notons au passage que la
qualité des composites s’est améliorée.
L’aile
Le nom de NuviX est emprunté à la ville de
Nuvik au nord du Canada, le X rappelant
la parenté avec la BioniX, qui réside dans
la structure tubulaire, identique, ainsi,
bien entendu, que le corset, que nous
avons largement détaillé dans notre
numéro 1. Il y a toujours un mât, “à
l’ancienne”, point sur lequel Air Création
se justifie sur son site et question sur
laquelle nous avons fait le point dans le
numéro 3. Si la surface alaire, 15,2m2
est légèrement plus importante que sur
la grande sœur (15,1 m2), le profil et les
découpes de voile en font une aile très
différente.
L’objectif était de proposer une aile qui
conserve une bonne plage de vitesses,
décalée vers le bas par rapport à la
BioniX, tout en offrant une plus grande
maniabilité. Mais surtout, qu’elle soit
exploitable avec un HKS ou un 582,
tandis que la BioniX exige le 912 pour
s’exprimer pleinement. C’est pourquoi
nous avons pris le parti d’essayer la
version à moteur 582, puisque c’est la
raison d’être de cette aile !
NOS ESSAIS EN VOL ET AU SOL
Double surface à 90%, angle de nez
de 130°, envergure de 9,55 m et un
allongement de 6 sont quelques-unes
des caractéristiques de base de cette
aile, qui supporte 462 kg au maximum.
Autres éléments qui diffèrent de la
BioniX : les winglets disparaissent et l’aile
reste ouverte à ses extrémités, le bord
d’attaque, fermé, revient en dacron, il
n’y a donc plus les turbulateurs. Enfin, le
mât et les montants de trapèze ne sont
pas carénés.
Elle est destinée au Skypper ou Tanarg,
dans toutes les motorisations existantes,
582, 912 et HKS, ce dernier limitant la
masse à 450 kg, parachute ou non. Mais
elle peut également être montée sur
gamme GTE-Trek. Concernant les GtBi,
les dossiers n’ont pas été déposés et il
faudra donc passer en amateur, sachant
que l’idéal sera d’en profiter pour
renouveler le tricycle.
Enfin, la VNE est à 165 km/h, ce qui
est considérable pour une aile de cette
gamme. Et comme nous l’avons vu, la
masse maximale est limitée à 462 kg,
chiffre qui pourrait paraître curieux, mais
qui s’explique par le fait que la charge
utile de cette machine est la même avec
ou sans parachute, ce dernier pesant
12 kg. Enfin, bien entendu cette aile est
équipée du corset qui fait ses preuves
depuis près de deux ans sur la BioniX.
Allons voir
Comme nous le disions, nous avons pu
mener cet essai en conditions idéales, en
longue durée. Et même mieux : le vent
étant fort en arrivant à Aubenas, il nous
fut proposé de tout mettre sur remorque
pour aller chercher le beau temps !
Nous avons donc démarré par le montage
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NOS ESSAIS EN VOL ET AU SOL
ce que nous avons vu...
de la machine. Aucune surprise, rien que de très classique, le
corset prend sa place tout seul. Les embouts de lattes, comme
sur la BioniX, sont formés de pièces de plastique qui se clipsent
et dont les efforts sont repris par de petites sangles afin de
maintenir la tension du bord de fuite. Descendre le chariot de
la remorque est une formalité et le montage de tout l’ensemble
est tout à fait conventionnel. Bonne surprise par rapport au
GTE-Trek, on monte bien l’aile tout seul, sans que le chariot
ne tende à vouloir basculer sur l’arrière. En revanche il faut
bien serrer le frein et se positionner sur le sec, sans quoi la
machine recule. A deux, en mode pédagogique entrecoupé des
prises de vues et de discussions diverses avec des qui passent
par là “ah, c’est vous ULMiste, bien votre mag !”, nous aurons
mis 55 minutes entre la dépose de la première sangle de la
remorque et le moteur en route, prévol soigneuse effectuée.
Avec l’habitude de cet ensemble et sans distraction, une petite
demi-heure nous semble possible. Ce pendulaire peut donc se
passer de hangar et être ramené à la maison entre chaque vol,
pour peu que l’on dispose d’un garage. En revanche, comme
sur de nombreuses autres machines, attention aux rondelles,
écrous papillons et autres anneaux brisés, qui ne demandent
qu’à tomber dans l’herbe et y disparaître !
Tour du “proprio”
Sur notre ensemble, le moteur tourne une hélice tripale Arplast
Ecoprop via une réduction 1/3,47. En option, on peut avoir
la quadripale et une réduction ¼. Le réducteur E reprend le
démarreur (comme son nom l’indique), de telle sorte que le
lanceur à main reste en place à l’avant du moteur, en secours.
Le circuit de refroidissement et les commandes de gaz et
starters sont optimisés, ainsi l’installation moteur paraît très
dépouillée, sobre. La commande de gaz et de conduite au pied
sont doublées à l’arrière (optionnel), ce qui nous permettra un
peu d’instruction, les doubles commandes d’ailes n’étant pas
indispensables, vue la relative compacité du chariot. Le tableau
de bord offre l’intercom Alphatec, la radio Filser ATR500, le
badin en 80, un compas encastrable, un altimètre en pieds en
80, le compte-tours, les températures moteur, la clé de contact
et, heureuse surprise, une jauge à carburant, comme sur l’auto
de maman ! Jauge doublée par le classique tuyau translucide
au bord du réservoir roto moulé noir.
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Un petit vol en solo histoire de s’assurer que tout est en
ordre. Dans cette configuration, le décollage intervient en
environ 75 mètres, le taux de montée se stabilise vers 4,5
m/s. Le basculement du chariot vers l’avant et sur le côté est
extrêmement modéré. Un léger flou dans la barre se ressent
en tangage, entre la rotation et la prise de vitesse. L’aile est
très douce aux commandes, pour une ardéchoise. Quelques
allers-retours histoire de vérifier l’étalonnage du badin,
dont je constate qu’il est légèrement déficient, quelques
enchaînements de virages et décrochages. Sans surprise,
ce dernier intervient avec la barre à 5 cm du tube avant
en position lente. En roulis, la stabilité est standard pour
une aile de ce type. Corset tout tendu, la machine a
encore de la réserve à monter à plein régime, donc
une possibilité de tirer. Nous prendrons des mesures
complètes en biplace. Le lacet inverse est à peine
perceptible, mais présent. A l’atterrissage, sans
tirer vu les conditions, je retrouve ce même
léger flottement en tangage sur quelques
centimètres, au moment de l’arrondi.
Le temps d’un second vol local à deux
(décollage en une centaine de mètres)
pour prendre la machine en mains
avant le voyage, et nous voilà au
chargement pour demain matin,
après avoir observé que le taux
de montée se situe alors à
peine au-dessus des 3 m/s
tandis que le taux de chute,
lui, s’observe à près de 3,5
m/s dans la configuration corset
tendu au premier tiers. Les
données constructeur indiquent
le meilleur taux de chute à 2,6 m/s
pour 70 km/h, corset tout détendu. L’atterrissage s’effectue
sans tirer la barre en conditions calmes, en une petite centaine
de mètres à deux, le frein ne montrant pas encore sa pleine
efficacité (rodage nécessaire).
Dans le petit coffre avant, on charge comme on a dit. Nos
poches de combinaisons peuvent encore contenir quelques
effets, puis appareil photo en bandoulière du vaillant copilote,
cotesteur et néanmoins élève à l’expérience pendulaire déjà fort
riche et variée, porte carte sur la cuisse gauche, l’alti-vario-GPS
ce que nous avons vu...
NOS ESSAIS EN VOL ET AU SOL
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NOS ESSAIS EN VOL ET AU SOL
ce que nous avons vu...
Flymaster, qui ne sert qu’aux mesures et non à la navigation,
sur la droite. Quelques exemplaires de ULMiste sont glissés
sous l’assise avant, afin d’être distribués au long du parcours.
Le temps de faire le plein (très classique), nous voilà prêts au
décollage, après une courte et fraîche nuit sur le terrain.
La première étape devait nous conduire à Douzalbats, au
pied du Plomb-du-Cantal. Décollant aux aurores dans un air
parfaitement calme, nous prévoyons deux bonnes heures et
demi pour y parvenir, ce qui nous laissera une bonne vingtaine
de litres de carburant à l’arrivée, à la moyenne réputée à 14
litres par heure, selon quelques utilisateurs de cet ensemble.
A la première prise de repère, nous constatons que le compas
n’est pas compensé et que, sur le cap que nous devrons suivre
en ligne plus ou moins droite toute la journée, il montre plus
de 10° d’erreur. Pas grave, nous naviguerons à la carte et, ce
qui compte avec un compas, ce n’est pas tant qu’il indique
le bon cap, mais qu’on suive ce qu’il indique une fois qu’on
est d’accord avec lui, comme tout instrument du reste. Nous
trouvons le vent arrière prévu sur tout le parcours et attaquons
les Monts-du-Beaujolais avec une fraîche sérénité. Verticale
Ambert, nous hésitons à nous poser, mais en arrivant à Brioude
à 8 heures à peine passées, plus d’hésitation : nous sommes
frigorifiés, la jauge à carburant semble déconner sévère, qui
descend à vue d’œil, nous sommes largement dans les temps.
Bref, on se pose pour faire un premier point.
Le vent de cul nous a gratifié d’un bon 95 km/h au GPS, tandis
que le badin affichait 85, corset tendu au premier quart. Vu
les conditions, il semble que la vitesse propre devait se situer
aux alentours de 90 km/h, ce que des mesures ultérieures
confirmeront. A cette allure, nous avons consommé environ
18 litres à l’heure, de telle sorte que nous sommes à moins
de la moitié du réservoir puisque, vérifications faites, la jauge
à aiguille est redoutablement juste ! En à peine une heure
trente de vol, nous avons bouffé plus de la moitié de notre
autonomie, réserves de sécurité comprises ! Toutefois, cette
consommation, que nous observerons sur une grande partie
de la promenade, est à pondérer sérieusement par le fait que
nous avons du afficher plus de 5000 tours/minute durant une
grande partie du trajet, pour passer les reliefs et survoler des
zones qui n’ont rien de commun avec la Beauce en matière
de possibilités de vaches. De plus, un moteur moins jeune,
avec des réglages optimisés, rendra la consommation plus
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proche des chiffres indiqués par nos “indics”. En attendant,
pour rejoindre Douzalbats, ça monte encore, va pas trop falloir
folâtrer !
Au rayon des premiers constats, l’installation à bord ne pose
pas de probème, le confort est irréprochable en place avant et
arrière et le saute-vent est efficace, bien que sa texture teintée
masque la visibilité sous certains angles et oblige à pencher la
tête pour voir devant. La commande de gaz au tableau de bord
se révèle agréable, bien que la douceur de la pédale droite
permette assez facilement de se passer de ce “cruise control”.
Pendant que je prends quelques notes, Ben découvre que le
bar-restaurant de ce bel aérodrome est ouvert et que le café
y coule à flots (voir nos pages “actus”). Catherine, la patronne
de ce recommandable établissement nous en sert deux grands,
spontanément accompagnés de tartines et confitures, pour le
prix auquel les parisiens que nous sommes avons l’habitude de
payer un espresso au comptoir ! Légèrement réchauffés, nous
voilà prêts à repartir, les premiers rayons du soleil et le départ
de la convection devraient nous permettre de moins geler sur
les prochaines étapes.
Après un vol splendide aux turbulences modérées au-dessus
de la Planèze, nous voici à Douzalbats, dans un décor superbe
et un vent soutenu. Une fois posés, nous constatons qu’il nous
reste environ 8 litres dans le réservoir. Par ailleurs, pour attacher
l’aile dans ce vent, nous observons qu’en butée, les câbles
latéraux viennent au contact du pare-brise. Contrairement à
ce que nous prêchons dans ce même numéro, nous n’avions
pas prévenu de notre arrivée, Douzalbats faisant partie de ces
terrains qui sont ouverts à tous sur décision du gestionnaire.
Mais un mardi matin à 11 heures, il n’y a personne. Aurillac,
ouvert à la CAP et servi par un AFIS, est à une vingtaine de
kilomètres à l’est, il y aura bien, là, au moins de la 100 LL.
Avec 8 litres pour 15 minutes de vol, sans connaissance de
la quantité inutilisable du réservoir, va falloir que toutes les
bulles soient au vert (voir ULMiste n°1), on gère donc au plus
serré, les yeux rivés au sol pour savoir sur quelle altisurface
improvisée on se pose quand le jeu s’arrête. Mise en route de la
radio, affichage de la fréquence, écoute : aucun trafic. J’appuie
sur le bouton pour dire qu’on arrive dans la langue qu’il faut et
là, un strident couinement retentit, qui nous perce les oreilles.
Deuxième essai, même résultat. La radio ne fonctionne pas en
émission… ne sachant pas si on reçoit, nous ouvrons grand les
yeux et nous posons en visuel, en circuit
court pour dégager la piste au plus vite.
Cet atterrissage sur piste en dur, avec
un ensoleillement marqué et un vent
toujours prononcé, ne pose pas de
problème particulier, après une prise de
vitesse marquée : l’aile a de la défense
et conserve une bonne précision, jusque
dans les basses vitesses.
Nous montons à la tour nous dénoncer,
où les choses se passent bien. Après avoir
mis 40 litres et l’huile correspondante
dans le réservoir et payé la lourde note,
nous voilà repartis. Aurillac Cahors à
midi en plein mois de mai, avec des
conditions de vélivole, voilà qui va nous
permettre de savoir comment cette aile
se comporte en turbulences ! Heureuse
surprise, pendant que nous survolons les
paysages magnifiquement inquiétants
du Quercy et la vallée du Célé, nous
constatons que l’aile se comporte
remarquablement bien en conditions
mouvementées, l’amortissement se
combinant avec bonheur à une stabilité
de route plus qu’acceptable. Tout juste
quelques oscillations en lacet en sortie de
grosses tabasses. Très bon point, car s’il
est un domaine sur lequel le pendulaire
doit progresser pour conserver ses
adeptes, c’est bien celui-là plutôt que la
vitesse pure, par exemple.
A Cahors, l’AFIS est fermé entre midi et
deux, nous posons donc encore à vue.
Les copains de l’école “Parapente Max”
de Douelle nous attendent au restaurant,
comme prévu. De Cahors à Montauban,
après avoir convenu d’une procédure de
départ avec le coopérant AFIS, rien à
signaler, nous voici posés chez ULM MidiPyrénées, chez l’excellentissime Olivier
Marty.
Le débriefing place arrière avec Ben
confirme que le confort de l’assise est
propice aux grosses journées de vol (plus
de cinq heures), que la protection au vent
relatif est suffisante (sauf aux pieds bien
entendu), mais que le maintien latéral
pêche un peu en conditions turbulentes.
Un mardi soir hors périodes de congés
payés, la plupart des bases ULM ne
montrent guère d’activité. Sauf ici.
Quatre élèves en école paramoteur, deux
en pendulaire, des cours théoriques et
même des visiteurs aériens des bases
alentour. L’occasion de faire essayer
“notre” machine à un pilote qui vient de
se poser en visiteur impromptu avec son
GTE 503 Mild sans aucun équipement
superflu. Après un vol complet, il me
demande : “mais en quoi le pendulaire
a-t-il évolué au cours de ces quinze
années ?” N’y percevant aucune ironie, je
trouve la question intéressante et fais un
parallèle avec l’auto, qui depuis ses débuts
est équipé d’un volant, de quatre roues,
de sièges, d’un moteur à combustion…
et qui n’évolue pas que dans les “détails”.
Ainsi prend-il conscience de la différence
de confort, de la stable rigidité du tricycle,
de la souple précision des commandes,
des capacités à voler vite sans effort. Il
y a longtemps qu’un pendulaire équipé
d’un 582 est capable de voler à 120
kilomètres à l’heure. Mais sans que le
chariot ne bascule outrageusement sur
le côté, sans effort et sans modification
notable de la maniabilité en roulis, il n’y
a, à notre connaissance, que le corset
qui montre ce résultat.
Vient ensuite une session de tours
de piste avec Ben. Le pilotage de la
place arrière ne pose aucun problème
particulier, seule la commande de gaz
aux pieds est indispensable, puisqu’il
est impossible d’atteindre la commande
manuelle au tableau de bord du siège
arrière. Le tableau de bord reste bien
visible, l’étagement vertical entre les deux
sièges étant correctement étalonné.
Sur le chemin du retour, nous faisons
étape à Villefranche-de-Rouergue pour
serrer la paluche à Jean-Daniel Roman
(constructeur de la série des Guépard),
terrain absolument recommandable !
Puis nous refaisons à nouveau étape à
Brioude pour tester le restaurant, remettre
“un peu” de coco et nous gratifier d’une
petite sieste, avant de reprendre la route
pour Pizay. En fait, avec cet ensemble, il
faut prévoir de remettre du carburant à
chaque étape, ce sera le meilleur moyen
de ne pas avoir de mauvaise surprise,
mais un bon moyen de faire d’heureuses
rencontres !
Au décollage de Brioude, la piste étant
immense et dégagée, j’opte pour la
position tout tendu. La seule chose qui
varie sont les efforts en tangage, le même
petit flou se rencontre en tangage, aux
alentours de la position “neutre”.
Sur le dernier tronçon, nous n’avons plus
le vent arrière (incroyable, sur deux jours
en aller-retour, du vent de cul quasiment
tout le long !), mais au travers droit. Par
ailleurs, quelques orages dont nous avions
longuement observé l’évolution avant
de décoller nous obligent à quelques
contournements et petites émotions…
en conditions de luminosité réduite, avec
quelques gouttes de pluie, le pare-brise
teinté oblige à pencher la tête pour la
prise de repères. A l’arrivée, il nous reste
moins de 10 litres de réserve…
Repliage de tout le bazar pour repartir,
dès demain matin, à Aubenas, puis
retour à Paris dans la foulée.
Classiquement, le repliage est plus rapide
que le dépliage et toutes les protections
adaptées sont à leur place dans la housse
d’aile. En tous cas, 1000 bornes en deux
jours sur une machine agréable et bien
née qui passe bien en turbulences, quel
pied !
Conclusion
Lorsque nous avions proposé à Air
Création cet essai longue durée, ils nous
avaient plutôt conseillé de prendre la
version 912. Mais, dans la mesure où
leur site nous informe que cet ensemble
est prévu pour les “pilotes voyageurs”,
d’une part, que tout le monde n’a pas
les moyens ni l’intérêt d’être équipé d’un
912 d’autre part, nous avons pris le parti
de tester la version deux temps de 65 cv.
Par ailleurs, il nous semble plus cohérent
et logique de voler sur le plus petit en
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NOS ESSAIS EN VOL ET AU SOL
ce que nous avons vu...
imaginant ce que peut donner le plus gros que l’inverse. Nous
causerons donc du 912 quand nous l’aurons essayé, sachant
qu’a priori il résout le principal inconvénient que nous avons
noté : l’autonomie, moyennant un amortissement financier qui
ne sera que difficilement obtenu par un particulier. Car s’il y a
un gros bémol à poser sur cet ensemble, c’est bien celui-là,
ainsi que sur la capacité d’emport de bagages en biplace. Des
réglages de richesse adaptés, une fois que le moteur dépasse
les 20 heures, les sacoches latérales et le carénage, résoudront
au moins en partie ces inconvénients, qui ne s’observent qu’en
biplace (et en montagne !)
Là où d’autres machines, y compris pendulaires, sont limitées
en emport à cause de leur masse à vide, ici la charge utile ne
peut que difficilement être emboutie.
Sur les deux jours, nous avons moyenné la consommation à
18 litres à l’heure, corset tendu au premier quart. Les tronçons
sur lesquels nous avons pu nous mettre en croisière et non
pas en lente montée pour passer les reliefs nous montrent
que la consommation descend alors à environ 15,5 litres par
heure en biplace en croisière à plat, ce qui donne trois heures
d’autonomie dans la configuration d’origine. En 912 et en
solo (configuration qui sera probablement la plus achetée et
utilisée), on devrait pouvoir doubler cette allonge sans souci.
Certes, en pendulaire on ne reste que très rarement plus de
trois heures sans s’arrêter, comme à moto. La différence étant
que le deux roues terrestre bénéficie de pompes en nombre le
long des routes, ce qui n’est pas le cas pour nos engins volants,
qui apprécient donc de pouvoir se poser, certes, mais pour un
simple café-pipi-clope, sans avoir à obligatoirement dépendre
de quelqu’un pour un plein.
Les performances que nous avons notées sont les suivantes :
vitesse de décrochage indiquée 55 km/h (badin pessimiste), les
61 km/h annoncés par le constructeur nous semblent réalistes,
avec une manœuvrabilité intègre aux basses vitesses. Vitesses
de croisière de 76 km/h à 118 km/h selon la position du corset.
Taux de montée 3,1 m/s et taux de chute à 3,2 m/s corset au
premier quart. Tout détendu, l’usine mesure le meilleur taux de
chute à 2,6 m/s à 70 km/h.
Le confort s’avère excellent aux deux sièges, point sur lequel Air
Création avait vraiment besoin de se mettre à jour sur ce segment
de la “machine de tous les jours”, bien que le maintient latéral
en place arrière montre quelques insuffisances en conditions
(très) turbulentes. La grosse console, avec sa “langue” façon
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scooter, permet l’équipement de tous les instruments dont
on peut rêver et offre une bonne protection au vent relatif,
à toutes les vitesses. Les utilisateurs avertis feront comme ils
en avaient parfois l’habitude, ils remplaceront le Lexan teinté
par du translucide, afin de conserver une parfaite visibilité en
toutes circonstances. Mais il semble que ce sera bientôt en
série, le plastique teinté n’étant plus disponible.
Cet appareil, qui ravira tous les pilotes quel que soit leur niveau,
remplace avantageusement les chariots biplaces légers des
années 90 en apportant le résultat d’années de savoir faire
et de recherche. Si ses capacités en voyage en biplace sont
limitées dans sa version et ses réglages actuels, on se console
en se disant que, finalement, il s’adapte à la réelle pratique de
la majorité des pilotes de loisir : du vol local, voire régional,
une grosse balade tous les trois ans, la plupart du temps en
solo, le plus important étant de prendre du plaisir, mission que
remplit aisément cet ensemble absolument “idiot-proof” et
suffisamment performant. Quant à l’aile, il se confirme que le
corset résout une bonne part des difficultés rencontrées par les
concepteurs : une plage de vitesse sans effort étendue, sans
altération de la maniabilité d’un bout à l’autre, avancées que la
plupart des concurrents admettent.
On pourra regretter qu’un squelette plus léger engendre au
final un ensemble plus lourd que le GTE-Trek qu’il remplace,
mais il faut également tenir compte de la masse maximale
embarquée des ailes actuelles, qui évolue dans le même sens
et préserve, voire augmente, la charge utile. Enfin, le prix…
20 272 €TTC quand le Trek, à “options” égales, se facture 20
980 €TTC, soit 708 € de moins pour le Skypper ! Trek qui est
encore produit pour certains pays en attendant les certifications
du Skypper. L’aile, en revanche, coûte plus cher qu’une sans
corset, mais ce dernier la rend difficile à comparer avec les ailes
précédentes de Air Création. Au final, l’ensemble ici présenté
coûte 28 524,60 €TTC.
Enfin, correctement mené et sans talent de champion du
monde, il est possible, avec les trois roues freinées, de le poser
en mois de 50 m, ce qui, pour un pendulaire capable de voler à
120 km/h sans effort, en fait un véritable passe-partout !
P-J
Ben
ce que nous avons vu...
NOS ESSAIS EN VOL ET AU SOL
Air Création, qui c’est ceux-là ?
Ce fabricant de jouets pour “adultes” est installé en Ardèche depuis 1982. Employant 25 personnes à temps plein, Air
Création a produit à ce jour près de 7000 ULM. Les fondateurs, Jean-Yves Le Bihan (gérant) et Gilles Bru, viennent du vol
libre. Antoine Cardon dirigeait le bureau d’études jusqu’au mois de juin 2011. Jean-Luc Tilloy, le directeur commercial,
forme le réseau de revendeurs, qui bénéficie régulièrement tout au long de l’année de sessions de mises à jour sur les
nouveaux produits, les révisions, etc.
Avec ses nombreux revendeurs sur le territoire français et ses distributeurs dans la plupart des pays où l’ULM existe, le
client a la garantie d’un service après-vente de qualité et rapide.
Par ailleurs, Air Création est importateur France du sympathique moteur HKS et comporte depuis trois ans un département
marine qui conçoit et fabrique des bateaux aéropropulsés pour les pompiers.
En 2009, le chiffre d’affaires de Air Création d’élève à 2 287 000 €. 2010 fut pas une belle année grâce aux excellentes
ventes de la BioniX et 2011 se présente plutôt bien.
Un constructeur fiable !
Sans bla bla
Modèle essayé :
Air Création Skypper 582
NuviX
• Qualité de construction :
irréprochable
• Finition : RAS
Données techniques
Observations en vol
• Puissance à l’hélice : 64 cv
• Réservoir : 53 litres
• Sièges : semi rigides
• Carénage : en option
(bientôt)
• Palonnier réglable : oui
• Freins : à disque sur les trois
roues en option, roue avant
de série
• Frein de parc : oui
• Parachute : en option
• Surface alaire : 15,20 m2
• Masse à vide : 214,4 kg
• Visibilité vers l’avant :
correcte, sauf face au soleil
bas
• Visibilité vers l’arrière : selon
souplesse du pilote
• Visibilité inférieure : pas
de carénage, donc parfaite
• Visibilité supérieure :
quasi nulle, comme tous les
pendulaires
• Vitesse de décrochage : 55
km/h indiqués
• Vitesse max en croisière :
118 km/h
• Vitesse de compensation
mini au corset : 76 km/h
• Stabilité virage : standard
• Dureté des commandes :
douces et harmonieuses sur
toute la plage de vitesse
• Précision commandes :
acceptable
Observations au sol
• Déplacement au sol : sans
souci
• Accessibilité (prévol) :
excellente
• Niveau de pression des
roues : RAS
• Installation à bord : RAS
• Démontage et pliage : RAS
• Remplissage du réservoir : RAS
• Confort : excellent à l’arrière
comme à l’avant
Où acheter ce jouet ?
• Constructeur :
Air Création SARL
Aérodrome de Lanas
07200 Aubenas
Tél : +33 (0)4 75 93 66 66
Email: [email protected]
Site internet : aircreation.fr
• Belgique : Christophe &
Didier Coddens.
Tél. : +(32) 2-653 08 32
Site internet : ulm.be
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Ah oui, et le prix ?
28 524,60 €TTC
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