BAC TSR-2 Un joyau anglais qui n`a jamais vu le jour
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BAC TSR-2 Un joyau anglais qui n`a jamais vu le jour
ÉDITO En retard, d’accord, mais là ! Bon, ben voilà, le numéro de mars sort en retard. Mais il sort, et ça n’a déjà pas été facile tant je suis débordé. Et d’ailleurs, pour ne pas le retarder davantage, je vais raccourcir cet édito. Alors voilà : pas de grand dossier ce mois-ci, mais plusieurs articles sur des avions originaux. Bonne lecture à tous ! Jacques Desmarets Courrier des Lecteurs J-P Griffeuille nous fait remarquer que la phrase ci-dessous, extraite de l’article sur Mermoz du mois dernier, est erronée : « En février 1936, à la suite d’émeutes anti-gouvernementales auxquelles elles ont participé, et malgré que leur attitude ait empêché les autres manifestants d’envahir l’Assemblée Nationale, les Croix de feu sont dissoutes par le Front Populaire. » Il fallait en effet écrire : « En juin 1936, à la suite des émeutes anti-gouvernementales de février 1934 auxquelles elles ont participé, et malgré que leur attitude ait empêché les autres manifestants d’envahir l’Assemblée Nationale, les Croix de feu sont dissoutes par le Front Populaire. » Dont acte. De son côté, Jean-Claude Miniggio nous écrit : Quelle vie, quelle destinée et quelle passion … De la simplicité et de la grandeur à la fois. Cela nous manque actuellement car quelle décadence, enfin cette dernière vision n’engage que moi. Il y a eu bien des thèses sur la fin tragique de Mermoz et son équipage. Tu es certainement au courant de celle qui laissait sous-entendre qu’en ces périodes de troubles politiques graves que connaissait notre pays à cette époque, l’avion Croix du Sud aurait été saboté car Mermoz était un danger politiquement parlant vu son » aura «. Il est vrai que plus jeune, mon attention n’aurait pas été retenue, aujourd’hui mon observation sur les hommes, m’autorisent à penser que tout est possible. En effet, le bruit court… Je préfère laisser courir les bruits quand ils ne sont pas étayés. Un sabotage ? Possible, mais pas en abimant le système de calage d’une hélice sur quatre. Ce serait trop léger. Or celle-ci était effectivement défectueuse avant le départ, et le dernier message envoyé semblait la concerner. Le sabotage se serait déclenché juste en même temps ? Coïncidence ?? Par ailleurs, Alain Quincy rejoint Jean-Luc Borderelle pour nous recommander d’aller visiter le Brussels Air Museum en nous rendant sur la page http://www.sbap.be/museum/brussels/brussels.htm qui, mieux qu’une simple page de pub, est une visite très complète de l’endroit, un véritable catalogue de tout ce qui y est exposé. Sûr que ça donne envie de le visiter ! Merci à eux de leur intérêt pour le journal. En couverture ce mois-ci : Le Blimp Goodyear Ce n’est pourtant pas de lui dont il est sujet dans l’article « Gonflés ! » qui ouvre ce journal. Mais il y a quand même un rapport … On va parler de Goodyear et d’un projet aussi gonflé que ce dirigeable. Photo Chris-Stahl en ligne sur http://www.deviantart.com/morelikethis/artists/316173726?view_mode=2 2 04 Gonflés ! Un avion gonflable, vous y croyez ? Et pourtant, il a bel et bien existé … P. 04 10 07 BAC TSR-2 12 Le Republic Thunderceptor Un joyau anglais qui, lui par contre, n’a jamais vu le jour. Vu de profil, il n’avait rien d’extraordinaire. Par contre, vu d’en haut… P. 10 P. 12 13 07 Le Dernier Combat 14 Compétitions ULM 15 Agenda des manifestations 22 Aéroludique Il fallût bien qu’il y ait un dernier combat aérien sur le front européen en 1945. Mais ce fut une histoire improbable. P. 14 3 Gonflés ! Les GA-466 (ci-dessus) et GA-468 (monoplace), plus connus sous le nom d’Inflatoplane, ont réellement volé dans les années 50/60. Ils dérivaient d’un concept imaginé 30 ans plus tôt. C’est apparament Taylor McDaniel qui, le premier, eut l’idée de construire un planeur gonflable, à la suite d’un accident ayant entrainé la mort d’un de ses amis. Il pensait que la structure gonflable, de par son élasticité, protègerait le pilote en cas de choc frontal avec le sol. Un planeur airbag en quelque sorte… Après quelques années d’études, il put faire voler son prototype en janvier 1931. L’appareil, construit autour d’une structure faite de longerons en tubes gonflés, fit plusieurs vols tractés par un camion à une centaine de pieds de hauteur. Le contrôle de l’appareil s’avéra délicat et le pilote d’essai, Joe Bergling , eut rapidement l’occasion de vérifier la théorie de McDaniel en se sortant presque indemne d’un crash. Et faute de crédits, le constructeur dut abandonner son projet. 4 En 1955, les anglais réfléchirent également à la mise au point d’un avion de reconnaissance gonflable. Deux exemplaires du M. L. Aviation Company Utility Mark I furent construits (en 1956 et 1957). Son allure était très particulière puisqu’il ressemblait en fait à un ULM pendulaire, ce qu’il n’était pourtant pas du tout. En fait, seule l’aile était gonflable, une aile delta à profil très épais, qui, une fois dégonflée, se rangeait à l’intérieur de la nacelle du fuselage. Celle-ci, en bois et toile montée sur trois roues, pouvait être arrimée derrière une voiture ou un camion et servait de remorque pour le transport de l’ensemble. Légèrement sonné, Joe Bergling est effectivement sorti seul de son appareil après ce crash. Selon certaines sources, le crash aurait été délibéré pour démontrer les capacités de protection de la formule. En 1935, les soviétiques développèrent à leur tour un avion gonflable. L’idée de P. Gorokhovsky était d’envoyer des soldats à l’arrière des lignes ennemies à bord de planeurs qui seraient dégonflés après l’atterrissage en attendant d’être récupérés ultérieurement après l’avancée du front. A cette époque, les L’Utility Mark One faisait 23 ft de long, 10 de haut et 35 russes sont les spécialistes du planeur, discipline où ils détiennent de nombreux records. Aussi se tournent-ils tout d’envergure. Pesant 235 kg à vide, il pouvait décoller à naturellement vers ce type d’appareil pour ce projet qui doit 454 kg. apporter plus de mobilité à leur infanterie. Il lui adjoignent quand même une motorisation auxilliaire. Plusieurs vols tests seront réalisés qui valideront l’idée. Gorokhovsky étudiera alors une version plus élaborée… qui ne laissera, semble-t-il, aucune trace dans l’histoire. Le motoplaneur soviétique déplié par deux soldats dans la neige en 1936 Les essais furent réalisés avec une seule personne à bord, la place arrière étant occupée par les enregistreurs de test 5 L’Utility Mark One pouvait emporter deux passagers à 80 km/h en croisière grâce à un moteur Walter Mikron III de 38,5 cv placé en position arrière. Sa vitesse de décrochage était de 48 km/h, sa vitesse max de 93 km/h, et son autonomie de 2h30, soit un rayon d’action de 200 km. Son plafond théorique était de 5 000 ft, mais il n’a pas dépassé 700 ft lors des essais (plus de 40 heures de vol). De l’autre côté de l’Atlantique, l’armée américaine cherchait une solution au problème de la récupération de ses pilotes abattus au-dessus du territoire ennemi. Elle en avait perdu beaucoup pendant la seconde guerre mondiale, et plus encore pendant la guerre de Corée, qui n’avaient pu être récupérés assez vite pour leur éviter l’arrestation. Elle réfléchit à la possibilité d’imaginer un avion qui puisse être largué à proximité du crash pour que le pilote puisse luimême en repartir. La société Goodyear, spécialisée dans les pneumatiques mais qui avait aussi créé une filiale aéronautique à l’origine de mini dirigeables, proposa en réponse son projet GA-33, plus connu sous le nom d’Inflatoplane. Trois mois suffirent à ses ingénieurs pour le mettre au point, car ils reprirent les bases de l’appareil de McDaniel dont les brevets étaient échus. Le fuselage était composé d’un tube de caoutchouc, quand les ailes, la queue et le cockpit étaient faits de panneaux de caoutchouc réunis par des milliers de fils de nylon. Il fit son premier vol le 28 mai 1957, au main du pilote d’essai de Goodyear, Richard Ulm (un nom prédestiné !). Lors d’un des premiers vols, Ulm fut pris dans un terrible orage comme il en naît rapidement au Texas, mais il réussit à s’en sortir et à ramener l’appareil intact au sol, démontrant involontairement les bonnes capacités de l’avion. (Malheureusement, un autre pilote d’essai aura moins de chance en 1959 lorsqu’un câble d’aileron se cassera dans l’aile pendant un virage sans doute trop serré, bloquant le manche et entrainant l’appareil dans un virage engagé. L’aile finira par se rabattre par-dessus le moteur, provoquant la rupture de l’hélice. L’avion partira en vrille et le pilote sera éjecté mais il ne pourra ouvrir son parachute, sans doute frappé avant son éjection par le saumon métallique de l’aile.) L’appareil était jugé stable et facile à piloter Il fallait 15 minutes à deux personnes pour installet et gonfler l’aile à l’aide d’une pompe électrique qui, en l’air, maintenait également la pression de l’aile. Cette dernière était maintenue en forme par des nervures en coton qui laissait passer l’air d’un caisson à l’autre sans autoriser pour autant un dégonflage instantanné, permettant ainsi au pilote en cas d’incident (collision aviaire par exemple) de réaliser un atterrissage d’urgence. Le fabricant envisageait également une version civile de l’avion, pour des utilisations professionnelles dans des régions inhospitalières ou pour de simples vols d’agrément. L’appareil devait alors coûter le prix « d’une voiture familliale ». Mais le projet fut à son tour abandonné… Le GA-33 avait un cockpit des plus sommaire Les premiers vols étant satisfaisants, l’appareil va être décliné en deux versions. 6 Le GA-468 était un monoplace équipé d’un moteur deuxtemps Nelson de 40 cv qui lui permettait de voler à une centaine de km/h sur 600 km avec 100 kg de charge. Le GA-466 était, lui , un biplace équipé d’un moteur McCulloch de 60 cv capable de l’emmener à 90 km/h. Pour l’alléger, son train qui, lorsque l’appareil était dégonflé servait à manipuler l’ensemble à la façon d’une brouette, était ramené à une unique roue au lieu d’un tricycle. Un GA-468 à l’atterrissage Le GA-466 en cours de montage. Notez le container et son parachute de « livraison » Le GA-468 de profil Le GA-447 est une version du monoplace qui servit à tester différent types d’atterrisseurs, monotrace… Le GA-468 emballé ; le réservoir de carburant est monté en direct sur le moteur … ou hydro-ski. Bien entendu, l’appareil avait l’avantage d’être quasi insubmersible Il fallait une dizaine de minutes pour gonfler l’appareil au moyen d’une pompe électrique ou d’une bonbonne d’air comprimé. En vol, le moteur entrainait une pompe qui maintenanit la pression dans les ailes, comme pour le Utility Mark One. 7 Un appareil était même réputé avoir volé une heure malgré une douzaine d’impacts de balles ! Caractéristiques Techniques Longueur : Envergure : Hauteur : Masse totale : Moteur : Vitesse max. : Autonomie : Plafond : GA-466 GA-468 5 m 84 8 m 53 1 m 22 336 kg 60 cv 113 km/h 440 km 2.000 m 5 m 97 6 m 70 1 m 10 250 kg 42 cv 116 km/h 630 km 3.000 m Une fois gonflées, les ailes pouvaient supporter le poids d’un homme Une douzaine d’appareils furent construits jusqu’en 1959 et testés par les différents services de l’US Army. Mais la production ne fut jamais lancée. On remarqua en particulier que le sauvetage des pilotes abattus au Viet-nam aurait difficilement pu leur être confié. En effet, la jungle permettait difficilement de trouver un terrain de décollage adapté. D’autre part, les pilotes éjectés était rarement en état de récupérer, monter et piloter un tel appareil. Enfin la mise en œuvre de ce moyen de sauvetage aurait été plus logue que l’envoi d’un hélicoptère de sauvetage. Les études durèrent néanmoins jusqu’en 1973 avant l’abandon définitif du programme. Cockpit du 468 Plusieurs Inflatoplane sont encore existants. Un GA-466 est conservé au Crystal Lakes Resort (Montana) 8 Le GA-33 est aujourd’hui à Columbus (Ohio) En 1958 le Chicago Tribune voyait chacun avec un Inflatoplane dans son coffre Sur un plateau de télé de l’époque, l’Inflatoplane est gonflé en moins de 7 minutes ! http://www.youtube.com/watch?v=bdm9at83FFU 9 BAC TSR-2 Un joyau anglais qui n’a jamais vu le jour “Tous les avions modernes ont quatre dimensions : envergure, longueur, hauteur et politique. Le TSR-2 n’avait que les trois premières de bonnes.” - Sir Sydney Camm, ingénieur aéronautique anglais ayant dessiné le Hawker Hurricane. aéronautiques britanniques à fusionner, les deux équipes sont invitées à travailler ensemble pour une réponse définitive. Le développement du nouvel appareil est autorisé par la RAF début 1959 et, début 1960, les deux constructeurs sont réunis dans une nouvelle société British Aircraft Corporation (BAC). En mars 1957, pour succéder au Canberra, l'armée de l'air britannique émet un cahier des charges pour un bombardier tout-temps, capable de missions à vitesse élevée aussi bien à haute altitude qu'à basse altitude, avec une grande autonomie et la capacité d'utiliser des pistes courtes ou des terrains sommaires, voire de décoller verticalement. L'avion doit être capable d'emporter aussi bien des bombes classiques que des charges nucléaires, ou encore des équipements de reconnaissance. À peine lancé, cet appel d'offre est menacé pour deux raisons. Tout d'abord, la Royal Navy avait déjà lancé un programme du même genre qui allait aboutir au Blackburn Buccaneer dont le prototype fit son premier vol le 30 avril 1958. Cependant, la RAF fit valoir entre autres qu'elle réclamait un avion capable de voler à plus de Mach 2, alors que le projet de la Royal Navy était subsonique. Une autre menace sur le projet était que le pouvoir politique était convaincu que l'avenir était aux missiles et qu'il était inutile de développer de nouveaux avions de combat. Le TSR-2 est un appareil biplace en tandem. Ses ailes hautes possèdent une flèche importante et leur extrémité est incurvée vers le bas. Le bord de fuite est doté de volets soufflés afin de lui fournir une capacité de décollage et d'atterrissage court. Néanmoins, les réponses des constructeurs sont réclamées avant le 31 janvier 1958 et deux projets retenus : l’English Electric P.17A et le Vickers Armstrong Supermarine 571. Alors que le gouvernement encourage les constructeurs 10 Le contrôle du roulis n'est pas assuré par des ailerons mais par un braquage asymétrique de l'empennage delta monobloc. Mais les problèmes s’accumulent, en particulier au niveau des vibrations parasites et, surtout, du fonctionnement du train. Il faudra dix vols et quatre mois avant que celui-ci ne fonctionne correctement. L'avionique du TSR.2 comporte une centrale inertielle et un radar à balayage tant vers l'avant que latéral, le tout intégré dans un système informatique de suivi de terrain. Le pilote dispose d'un viseur tête haute, tandis que le navigateur suit les données et les signaux sur un écran tête basse, permettant d'armer et de larguer les différents éléments de la charge offensive. Le gouvernement travailliste de l’époque commence à envisager de remplacer le développement du TSR-2 par l’achat du F-111 américain en développement ; pourtant, il assure publiquement aux ouvriers de l’aéronautique anglaise que leur emploi est assuré par le futur TSR-2. Malgré sa complexité, le développement du TSR-2 (Tactical Strike and Reconnaissance /Mach 2) ne rencontra pas de problèmes majeurs, à part au niveau des réacteurs : les Olympus 22R (qui deviendront plus tard les 593 du Concorde) présentaient encore plusieurs défauts, au point que l'un d'eux explosa au sol en décembre 1963, détruisant l'Avro Vulcan utilisé comme banc d'essai. Mais le gouvernement britannique, qui n’arrête pas de se mêler du développement de l’appareil, imposant des choix à tous les niveaux, dans le cockpit comme pour l’aérodrome d’essais, traverse une mauvaise passe politique et risque de sauter. BAC espère qu’un premier vol réussi lui serait bénéfique aux yeux du nouveau gouvernement à venir. Malgré les craintes concernant le fonctionnement des moteurs, les dysfonctionnements constatés du parachute de freinage et l’impossibilité de faire fonctionner le train d’atterrissage, le pilote d’essais accepte sous la pression de faire le premier vol le 27 septembre 1964. Le vol se passe bien, mais il faudra attendre l’installation de réacteurs plus fiables avant son second vol, le 31 décembre 1964. Un second prototype du TSR est livré début avril1965. Mais à la surprise générale, le gouvernement annonce le 06 avril 1965 l’abandon définitif du programme. Ce second appareil ne volera jamais, ni les neuf autres appareils encore en construction. La raison officielle de l'abandon est le coût trop élevé du TSR-2. L'achat de General Dynamics F-111 américains sera annulé pour la même raison, et la Royal Air Force devra finalement se contenter du Blackburn Buccaneer. Les neuf derniers exemplaires furent mis à la casse BAC ne s’illustrera plus ensuite que dans des programmes multinationaux comme le Concorde ou le Tornado, un sous-successeur du TSR-2, dont on dira que l’acronyme du programme, MRCA, signifiait en fait « Must Replace Canberra AGAIN ! ». Deux exemplaires du TSR-2 ont été conservés : l'un au musée de la Royal Air Force, l'autre au Imperial War Museum. Le train bloqué dans cette position, l’équipage d’essai a envisagé l’éjection, mais y renonça sur les instances des ingénieurs au sol, et l’atterrissage se termina bien ! 11 Le très original Thunderceptor Avouez que si je vous dis que le prototype de chasseur de l’immédiat après-guerre figurant sur cette photo est plus qu’original, vous allez vous demander si la retraite ne commence pas à m’user les neurones. Ce Republic XF-91 Thunderceptor ressemble, vu comme ça, à de nombreux autres jets de cette période et, en particulier au F-84 dont il est issu. Pourtant, il a une caractéristique qui, à ma connaissance, n’a été reprise sur aucun autre avion. A cette époque, la course à la vitesse pose de nombreux problèmes. Le F-84 Thunderjet, avec son aile droite, ne permet pas d’atteindre les vitesses espérées par le moteur à réaction. On le sait, la solution passe par l’adoption d’une aile en flèche qui, plus tard, évoluera même vers l’aile delta. Mais cette aile en flèche, qui sera installée sur le F-84 F Thunderstreak pose un nouveau type de problème. Efficace aux grandes vitesses, elle oblige par contre, aux basses vitesses, à augmenter l’incidence pour contrer la baisse de portance, et donc à flirter avec la vitesse de décrochage. Or, ce type d’aile, évacuant les filets d’air vers les extrémités de l’aile, fait que ces extrémités décrochent avant le reste de l’aile à incidence identique. Lors de ce décrochage partiel, le centre de portée de l’aile se rapproche alors du fuselage et, du fait de la flèche, se déplace vers l’avant, provoquant un moment à cabrer tendant à accentuer l’angle d’incidence et donc le décrochage. Instabilité fâcheuse !! Pour y pallier, on créa un nouveau proto qui accumulait plusieurs améliorations : outre une propulsion mixte (il emportait un groupe de quatre moteurs fusées qui donnait 25% de complément de puissance pour le décollage et la montée), il était doté d’une aile à incidence variable (notez les marques à l’emplanture sur le fuselage) et surtout à longueur de corde croissant vers l’extérieur ! Après son premier vol en mai 1949, le XF-91passe le mur du son en décembre 1951 et atteindra au final M 1,71. Il reçoit ensuite un radome en pointe avant et une entrée d’air en « menton ». Un second proto est construit qui, après un accident, est modifié avec un empennage papillon. Mais comme les autres prototypes de cette époque, le XF-91 qui n’est qu’une amélioration de plus d’un avion trop ancien, ne répond plus aux besoins de l’USAF (en particulier, il ne dispose que de 25’ d’autonomie) et n’aura pas de suite. La silhouette du Thunderceptor, vue de dessus, agresse l’œil De ce fait, les extrémités portent plus et décrochent plus tard que le reste de l’aile. Autre particularité de cette disposition, l’aile a plus de volume disponible aux extrémités qu’à l’emplanture ; du coup c’est là que se relève le train d’atterrissage (voyez les trappes ouvertes sur la photo), et comme l’aile y est plus fine, on a opté pour deux roues fines l’une derrière l’autre plutôt que pour une roue large plus épaisse. 12 Le dernier combat “Duel in the sun” vue d’artiste par Burt B. Mader Jr Le Piper Cub que vous voyez sur cette peinture porte un joli nom : « Miss me !? » Le point d’exclamation, c’est pour les allemands : « Vous m’avez manqué ! ». Le point d’interrogation, c’est pour l’amie du pilote restée aux USA : « Je te manque ? » (L’expression « manquer à quelqu’un » s’utilise à l’envers en anglais). Il a été baptisé ainsi par son pilote, le lieutenant Meritt Duane Francies. C’est un as de la seconde guerre mondiale, même s’il n’est pas répertorié comme tel. En effet, par définition, un pilote d’avion d’observation n’abat pas d’avions ennemis. Et pourtant… Breveté pilote dans le civil début 1941 (à 20 ans), il s’engage trois jours après Pearl Harbour. Il est enfin affecté à la 5ème Division Blindée en 1943 et envoyé en Europe début 1944. A bord de son Piper L-4 Cub, il repère les cibles des artilleurs, dirige leurs tirs et guide l’avance des blindés, volant souvent à basse altitude et sous le feu de l’adversaire. Il effectue également des missions d’observation ou de liaison. Il est souvent amené à se poser dans la nature, lorsque sa division avance trop vite, ou pour refaire le plein et rester en mission plus longtemps ; une fois même pour aller à pied combattre deux observateurs allemands isolés, repérés depuis les airs. Il se porte également volontaire pour d’autres types de missions. Ayant quelques notions médicales, il est souvent appelé pour donner les premiers soins à des blessés ; deux fois (en France et en Allemagne), il sera même amené à aider des femmes civiles à accoucher. reviennent vers les deux allemands qui tentent de se cacher derrière un tas de betteraves pour se défendre. Mais l’observateur, blessé, s’écroule au sol et le pilote finit par se rendre. Francies donne les premiers soins à l’observateur allemand qui n’en revient pas. Puis ils remettent leurs prisonniers à leurs compatriotes et redécollent. Ce Storch est le dernier avion allemand abattu pendant cette guerre. Pour cette action, Francies est recommandé une seconde fois pour la DFC, mais cette recommandation se perdra pendant les derniers jours de la guerre, et ce n’est que 22 ans plus tard, à la suite de la parution d’un livre racontant son histoire, que Francies, devenu entre temps pilote professionnel dans le civil, la recevra enfin. Il est mort en 2004 à 83 ans. (DFC, Legion of Merit, Air Medal, Bronze Star) Avec sa division, il entre en Allemagne et va jusqu’à Berlin. Le 11 avril 1945, il décolle avec le Lieutenant William Martin (observateur) pour sa 142ème mission. Il repère d’abord un sidecar allemand se rapprochant des blindés américains, puis un Fieseler Storch en mission d’observation à 700 pieds au-dessus des arbres. Le Storch, un peu plus gros et plus rapide que le Cub, le repère également, mais Francies a l’avantage de l’altitude. Il fond sur sa proie. Lui et son observateur sortent leurs Colt 45 et tirent sur les allemands, espérant les forcer à se diriger sous le feu des canons des tanks. Mais le Storch s’échappe en virage. Les deux américains vident et renouvèlent leurs chargeurs (en tenant le manche entre les genoux pour Francies), touchant l’appareil à l’aile et au moteur. Au ras du sol, l’allemand finit par le heurter de l’aile et s’écrase. Francies pose son Cub non loin et ils Meritt D. Francies et William Martin devant leur Cub 13 SPORT ULM En termes de compétitions aériennes, je n’avais pas évoqué en janvier les compètes ULM, mais il ne faut pas les oublier même si elles n’ont pas le côté spectaculaire des Reno Air Races. Et puis surtout, notre ami Serge Bouchet, son copilote Laurent Oth et leur autogire Magni 16 ont pris l’habitude d’y faire briller les couleurs du club Véliplane de Meaux (Médailles d’Or 2012 et 2013 en Championnats de France, Médailles d’Or 2013 en Championnats d’Europe et Médaille de Bronze 2012 en Championnats du Monde). Je ne peux donc que vous inciter à aller les soutenir aux Championnats de France ULM qui se tiendront du 25 au 27 mai (pour les "classics" et du 29 au 31 mai pour les paramoteurs), à Levroux (36). Ils représenteront aussi la France aux Championnats du Monde d’ULM toutes classes (multiaxes, pendulaire, autogire, paramoteur) du 6 au 16 août 2014, à MATKOPUSZTA (Hongrie) ; mais là, bien sûr, ça fait un peu plus loin … En tout cas, nous leur souhaitons bonne chance pour ces deux compétitions ; mais en réalité, la chance n’est pas le plus utile pour gagner, et nous savons bien que ce sont leurs qualités de pilote et copilote qui leur permettront, cette année encore, de nous ramener les plus belles médailles ! Par ailleurs, signalons que la France organise le premier championnat d'Europe de slalom en paramoteur qui se déroulera sur l'aérodrome de Couhé du 21 au 27 juillet 2014 (attention dates à confirmer). 14 Précisions sur le saut en chute libre de Baumgartner Si vous vous intéressez encore au saut supersonique de Félix Baumgartner, je vous recommande d’aller voir la dernière vidéo publiée sur Youtube par son sponsor le fabricant de caméras Gopro. Outre qu’elle est excellente de qualité et riche d’informations, j’en ai déduit la courbe ci-dessous qui indique les vitesses enregistrées (en km/h) au cours de sa descente (abcisses en milliers de pieds) jusqu’à l’ouverture de son parachute (il manque les environ 3 000 premiers pieds, où l’accélération a du être fabuleuse !). Sachant que, selon mes sources (imprécises, il est vrai), la vitesse du son à ces altitudes était d’environ 1 110 km/h, on voit que son vol supersonique a duré le temps de perdre environ 30 000 pieds (entre 110 et 77 000 pieds), soit environ 10 km (1/4 de sa chute totale), et qu’il aurait dépassé M 1,2. http://www.francetvinfo.fr/sciences/video-en-devoilant-de-nouvelles-images-du-saut-de-felix-baumgartner-gopro-s-offreune-pub-de-luxe_520061.html#xtor=EPR-502-%5bnewslettervideo%5d-20140202-%5bvideo1%5d-%5bsite-web%5d Brocante aéronautique de Champagne Organisée par l’association Saint-Dizier Aéro Rétro à l’aéro-club de Saint-Dizier, la 6ème Brocante aéronautique de Champagne aura lieu les 5 et 6 avril. Sont attendus des exposants de maquettes, d’avions, de livres anciens et contemporains, de matériels aéronautiques divers… Entrée libre pour les visiteurs. Pour ceux souhaitant venir par la voie des airs (avions ou ULM), les installations du club se trouvant sur la base aérienne BA113, une demande préalable doit être impérativement demandée aux organisateurs avant le 15 mars via le contact… [email protected] Le parking visiteur sera à 300 m de la brocante. A cette occasion, les visiteurs pourront visiter le musée aéronautique local et les avions basés, en état de vol (Morane-Saulnier MS-317, Super Stearman, Waco UPF-7, Piper L-4 Grasshopper, Piper PA-19) et en statique (Mirage IIIR, Mirage IVP et Broussard). http://stdizieraeroretro.com Je l’ai lu sur www.pilotermag.com 15 Fête Aérienne du Centenaire de la Grande Guerre : C’est certain, 2014 sera l’année de la commémoration du début de la Grande Guerre, la Guerre de 14-18. De nombreuses manifestations vont se tenir partout en France, et celle-ci me tient particulièrement à cœur puisqu’elle est organisée sur l’aérodrome de Meaux, base originale d’Aérocic. Un site et un blog ont étés créés pour vous tenir au courant des nombreuses activités qui vont être organisées sur place pendant trois jours, du 13 au 15 juin : http://www.lesailesdupaysdemeaux.fr/ et http://ailesdupaysdemeaux.over-blog.com/ . Ce sera un spectacle tellement intéressant que je ne manquerais pas de remonter de ma Dordogne pour l’occasion. Mais pas seulement pour y assister … En effet, l’organisation d’une telle manifestation est quelque chose de très lourd, et nécessite de nombreuses bonnes volontés et beaucoup de muscles. C’est pourquoi, plutôt que d’assister au meeting depuis les pelouses réservées aux spectateurs, je vous suggère de rejoindre l’équipe d’organisation. Il n’est pas nécessaire, pour aider, de s’engager à trois jours de présence. Tous les coups de mains seront bons à donner. Et cela vous donnera le plaisir d’avoir contribué au succès de l’opération, tout en vous permettant d’en voir les coulisses et qui sait, d’approcher les avions de très, très près ! Je vous invite donc à vous rendre sur le site du Véliplane http://www.veliplane.com/article.php3?id_article=260 où vous pourrez trouver le dossier complet sur la manifestation, le programme (il évolue encore régulièrement) et le dossier d’inscription au bénévolat. Si vous avez des questions, vous pouvez aussi contacter directement Serge au 01.60.04.76.00 ou au 06.07.49.18.86. Ainsi, comme vos aïeux, et en leur honneur, vous pourrez dire : « J’y étais ! ». A bientôt sur place ! 16 17 D’autres meetings auront lieu pour commémorer l’évènement. N’hésitez pas à nous signaler les manifestations dont vous aurez connaissance. En voici déjà trois : Ci-dessus :http://legendairenlimousin.blogspot.fr/ Ci-contre : www.cercledesmachinesvolantes.com Page suivante : http://www.centenaire-aerien-somme14-18.fr/ 18 19 Saluons l’association J-B Salis qui, pour une fois, ne nous aura pas fait attendre jusqu’à la dernière minute pour dévoiler l’affiche de son meeting 2014. Commémoration du Débarquement en Normandie oblige, Romain Hugault, connu pour ses séries « Le pilote à l’edelweiss» ou «Le Grand Duc», a retenu le Douglas C-47 comme visuel principal et comme il s’agit de rappeler le Jour J, c’est une escadrille de C-47 qui traverse l’affiche, dans un camouflage typique de l’époque avec les bandes d’identification apposées sur les plans, escortés par un P-51 au nez bleu pour rehausser les couleurs de l’affiche… 20 HUMOUR Dans les années 60 ou dans une période proche, un 747 US se pose à Frankfurt où l’usage veut que les pilotes connaissent leur parking et les taxiways pour s’y rendre, sans marquer d’arrêt une fois la piste dégagée ; ce qui n’est pas le cas de cet équipage qui stoppe son roulage une fois la piste évacuée. Le contrôleur leur demande les raisons de cet arrêt : - Contrôleur : « Speedbird, savez-vous où vous allez ? » - Speedbird 206: « Juste un moment, nous vérifions où est notre parking. » - Contrôleur (arrogant et impatient): « Speedbird 206, vous n’êtes jamais venu à Frankfurt auparavant ? » - Speedbird 206 (très calmement) : « Si, en 1944, avec un autre genre de Boeing ; mais on ne s’est pas arrêtés, on a juste largué quelques trucs ». Voici l’histoire d’un échange radio raconté par un pilote de SR71, un des avions militaires les plus performants qui ait existé. L’équipage de cet avion volait dans le sud de la Californie en étant juste à l’écoute d’une fréquence de Los Angeles qui pouvait le voir sur son radar. L’équipage entend alors un Cessna demander au contrôleur sa vitesse sol. Le contrôleur répond : « 90 kt » Un moment plus tard un bimoteur fait la même demande : « 120 kt » Tous les pilotes sont fiers du tonnage de leur avion ou de ses performances ; c’est sans doute pourquoi un F18, qui était, comme le SR71, à l’écoute de la fréquence, demande également sa vitesse sol : - « Dusty 52 : 525 kt » Le pilote du SR71, amusé par la tournure de ces échanges, fait alors la même demande : - « Aspen 20, votre vitesse sol est de 1742 kt » Plus personne n’a demandé sa vitesse après cet appel. (Rappelons que le SR71 était capable de M 3,5, soit plus de 2.300 kt) Toujours dans la région de Los Angeles, et toujours un SR71, qui demande une clearance pour le niveau 600 (soit 18 000 mètres). Le contrôleur reste incrédule devant une telle altitude : - « Comment ? Vous voulez monter au niveau 600 ? » - « Négatif. Nous voulons descendre au niveau 600. » (Rappelons que le SR71 a établi un record d’altitude à 25.929 m en 1976) 21 Cockpit simulateur de SR 71 Le jeu des 7 erreurs Sept différences ont été incorporées dans la seconde version de cette photo du BAC TSR-2 en exposition au RAF Museum de Cosford. À vous de les découvrir ! 22 La photo du mois Pour une fois, la photo n’est pas excellente (je n’en ai pas trouvé de cette ville sur « Survol de France ! »), et finalement, j’avoue qu’on ne distingue pas très bien si elle représente une ville, une vache, ou un fromage … Les trois peuvent être considérés comme les plus beaux de France ! De quoi s’agit-il ? Du fait de la nouvelle irrégularité de parution du journal, la bonne réponse est donnée dans le même numéro. Vous n’êtes donc pas tenus de me l’envoyer par mail. Que ça ne vous empêche pas de m’écrire pour me faire part de vos commentaires … Kézakaéro Devinette 1/ A gauche : Photo déformée, ou avion excentrique ? Ce prototype Bell X-14 (premier vol en 1957, retrait du service en 1981, construit à un seul exemplaire) présente, outre son allure de poisson bizarre, trois caractéristiques originales. Lesquelles ? (Solutions en dernière page) 2/ Ci-dessus : Que porte sur la tête cette hôtesse de la Braniff ? 23 Les Solutions La photo mystère : Elle montre la ville de Salers (15), un des plus beaux villages de France, patrie des vaches et du fromage du même nom. (Photo en ligne sur http://skyshoot.com/blog/2012/05/24/la-corse/ ). Jeu des sept erreurs : 1/ La tige maintenant la trappe ouverte a changé de couleur. 2/ Le phare d’atterrissage droit a disparu, 3/ ainsi que le mât supportant la maquette 4/ et l’extincteur sous le nez de l’avion de gauche. 5/ Le panneau d’information de gauche a perdu la partie basse de ses explications, 6/ un second visiteur s’est ajouté au premier, 7/ et le panneau de sortie de secours en haut à gauche s’est inversé. Kézakaéro : 1/ Il s’agit tout simplement d’une photo prise sous un angle original de l’un des plus beaux avions jamais (dans les deux sens du terme) construits : le North American XB-70 Valkyrie. 2/ Le couturier italien Emilio Pucci avait eu, en 1964, l’idée de ce Bubble Bonnet (ou Space Bubble Helmet) en plexiglass pour compléter les nouveaux uniformes des hôtesses de la compagnie, afin de protéger leurs coiffures du vent et de la pluie lorsqu’elles traversaient les tarmacs. Devinette :1/ Cet avion est le premier bi-réacteur VTOL, autrement dit à décollage et atterrissage vertical, à tuyères orientables, à avoir réussi des vols avec transition du vol vertical au vol horizontal (et inversement). 2/ Il servira longtemps à la NASA à l’entrainement des astronautes, car son pilotage se rapprochait beaucoup de celui du LEM lunaire. 3/ Mais également, c’est le seul avion à réaction à ma connaissance (ou l’un des rares si je me trompe !) à avoir un cockpit ouvert. 24