l`obligation alimentaire

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l`obligation alimentaire
L'OBLIGATION ALIMENTAIRE
I - Définition
L'obligation alimentaire est une aide matérielle qui est due à un membre de sa
famille proche (ascendant, descendant) dans le besoin et qui n'est pas en mesure d'assurer sa
subsistance.
Son montant varie en fonction des ressources de celui qui la verse et des besoins du demandeur.
II - Bénéficiaires
Les personnes qui peuvent en bénéficier sont :
• les conjoints entre eux,
• les enfants, petits-enfants, grands-parents et parents entre eux,
• les beaux-parents, leurs gendres et leurs belles-filles entre eux. La jurisprudence reconnaît
en revanche que l'obligation des gendres et belles filles prend fin en cas de divorce. C'est
aussi le cas lors du décès du conjoint qui créait l'alliance lorsque les conjoint n'ont pas eu
d'enfants.
Cas particulier des enfants adoptés
En cas d'adoption plénière, l'adopté doit des aliments à l'adoptant s'il est dans le besoin et,
réciproquement, l'adoptant doit des aliments à l'adopté (Art 367 CC)
En cas d'adoption simple, les père et mère (biologiques) de l'adopté ne sont tenus de lui fournir
des aliments que s'il ne peut les obtenir de l'adoptant.
L'obligation de fournir des aliments à ses père et mère cesse pour l'adopté dès lors qu'il a été
admis en qualité de pupille de l'État ou pris en charge.
Rappel des principes de la loi et de quelques arrêts de Cour de Cassation
Selon l'article 205 du code civil, les enfants doivent des aliments à leurs père et mère et autres
ascendants qui sont dans le besoin.
Il faut entendre par "aliments", tout ce qui est nécessaire à la vie : hébergement, nourriture, soins
médicaux (Cour de cassation, civ. 28 février 1938). Aussi, si un ascendant est dans le besoin, ses
descendants peuvent être amenés à contribuer au titre de cette obligation. Cette contribution
peut être exercée sous la forme pécuniaire ou, à défaut, en nature.
Selon l'article 210 du code civil, si la personne qui doit fournir des aliments justifie qu'elle ne peut
payer la pension alimentaire, le juge aux affaires familiales peut, en connaissance de cause,
ordonner qu'elle recevra dans sa demeure, qu'elle nourrira et entretiendra celui auquel elle doit
des aliments.
Un enfant peut néanmoins refuser d'héberger un ascendant à son domicile. Il devra, toutefois, en
fonction de sa situation, contribuer au titre de l'obligation alimentaire, si l'ascendant se trouve
dans le besoin.
En fait, le juge ne peut imposer à un enfant d'héberger un parent à son domicile. Il peut également
refuser de prendre cette décision s'il estime que la cohabitation des deux parties risquerait de se
dérouler dans de mauvaises conditions. L'enfant devra dans ce cas contribuer financièrement à
cette obligation
L'obligation alimentaire est fixée en fonction du besoin de celui qui la réclame et de la fortune de
celui qui la doit (article 208 du Code civil). L’état de besoin du créancier est avéré lorsqu’il n’est pas
en mesure d’assurer sa subsistance. Seules les charges nécessitées par la vie courante sont prises
en compte. L’état de besoin est relatif et apprécié en fonction des circonstances propres à chaque
espèce.
L'obligation alimentaire peut revêtir plusieurs formes :
•
une pension alimentaire versée directement au parent
•
la prise en charge du loyer ou les charges locatives
•
le paiement des frais d'hébergement
•
la mise à disposition d'un logement qui appartient à l'obligé, à titre gratuit.
III - Modalités d'attribution
Elle peut être attribuée :
• soit d'un commun accord,
• soit, à défaut, sur décision du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance
dont relève le créancier.
IV - Personnes dispensées
Lorsque le créancier (celui qui réclame l'aide alimentaire) a lui-même manqué gravement à ses
obligations envers le débiteur (celui à qui on réclame l'aide), le juge peut décharger celui-ci de tout
ou partie de la dette alimentaire, en application de l'article 207 du code civil,
Les enfants qui ont été retirés de leur milieu familial par décision judiciaire durant une période
d'au moins 36 mois cumulés avant l'âge de 12 ans sont, sous réserve d'une décision contraire du
juge aux affaires familiales, dispensés de fournir cette aide alimentaire.
Les exemples repris ci dessous, vous permettront de défendre les intérêts du M.P. Qui vous est
confié et qui est cité à comparaitre pour obligation alimentaire
- Dans cette hypothèse, nul n’est besoin d’alléguer des fautes, certes commises par le créanciers,
mais à l’encontre d’autres personnes. Ainsi, l’infidélité de la mère vis-à-vis du père ne peut conduire
à décharger les enfants de l’obligation alimentaire dont ils sont tenus envers elle (arrêt de la cour
d’appel d’Orléans du 18 janvier 1984).
- De même, ne peuvent pas être invoqués des faits que l’on ne peut imputer avec certitude au
créancier : ainsi ne suffit pas à déchoir la mère de son droit à aliments le seul fait qu’une mesure
d’assistance éducative ait été prise, lorsqu’on ne peut déterminer si elle l’a été en raison des
manquements de la mère à ses devoirs envers ses enfants, ou d’éléments, tels que la conduite du
père, indépendants de sa volonté (arrêt de la cour de cassation du 27 mars 1979).
- Cependant, le créancier d’aliments qui s’est auparavant désintéressé de ses descendants se voit
fréquemment refuser un droit aux aliments, lorsque ceux-ci arrivent à l’établir (arrêt de la cour
d’appel de Paris du 29 janvier 1998).
- Ont ainsi été totalement déchus de leurs droits à aliments :
• la femme qui ne s’est que très épisodiquement préoccupée de son fils dans son jeune âge
pour ne plus lui donner de nouvelles jusqu’à ce qu’il ait atteint l’âge de 43 ans (arrêt de la
cour d’appel de Bordeaux du 8 septembre 1987) ;
• le père qui s’est totalement désintéressé de son fils et ne justifie d’aucune tentative de
rapprochement avec lui (arrêt de la cour d’appel de Versailles du 8 décembre 1988) ;
• la mère qui a abandonné, tant matériellement que moralement, son fils depuis l’enfance
sans jamais en demander de nouvelles alors qu’il était élevé par ses grands-parents (arrêt
de la cour d’appel de Toulouse du 8 décembre 1997).
- Mais dans certaines hypothèses, les créanciers fautifs n’ont pas été déchus de tous leurs droits,
leur faute ayant seulement pour incidence de réduire les aliments qui leurs sont dus :
• ce fut le cas concernant un enfant élevé en grande partie par ses grands-parents mais sans
qu’il soit établi un désintérêt des parents (arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 16 juillet
1985) ;
• également été réduite de deux tiers la pension alimentaire due à un père qui a autrefois
abandonné femme et enfant mais dont la gravité des manquements a été atténuée par
certaines manifestations épisodiques d’intérêt envers son enfant (arrêt de la cour d’appel
d’Angers du 27 janvier 1986).
Cependant ont été jugés insuffisants pour exonérer, ne fût-ce que partiellement, les descendants :
• le fait que l’enfant ait été élevé pas ses grands-parents conformément à sa volonté (arrêt de
la cour d’appel de Limoges du 28 janvier 1988) ;
• ou le fait que le père ait confié l’enfant à ses grands-parents, à la suite du décès de sa
femme (arrêt de la cour d’appel de Versailles du 14 mai 1998).
Les juges, dans chaque affaire, font une appréciation souveraine des faits allégués, dont la preuve
leur est rapportée par tous moyens.
Cas particuliers
En application des articles 204 et suivants du code civil, le tiers ayant subvenu aux besoins du
créancier peut se retourner contre le débiteur alimentaire. Les applications les plus courantes sont
le recours du président du conseil général pour le recouvrement des sommes dues à l'aide sociale
et du recours des établissements publics de santé.
Si ces ascendants renoncent, dans la plupart de cas, à demander les aliments, cependant, la
collectivité publique, en lieu et place de ceux-ci, ou les hôpitaux, en cas d’hospitalisation, peuvent
également exercer l’action devant le juge aux affaires familiales. Ils peuvent, à ce titre, se voir
pareillement opposer l’article 207 du code civil (arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 28 janvier
1999).
Références
• Code civil : articles 203, 205 à 207 et 367
• Code de l'action sociale et des familles : article L132-6
LA PROCEDURE POUR OBLIGATION ALIMENTAIRE
I – QUI EST LE JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES
Principe
Le juge aux affaires familiales est un juge du tribunal de grande instance, délégué par le président
aux affaires de la famille.
Il peut y avoir plusieurs juges aux affaires familiales par tribunal de grande instance.
Compétence
Le juge aux affaires familiales est compétent pour :
• l'homologation judiciaire du changement de régime matrimonial,
• les demandes relatives au fonctionnement des régimes matrimoniaux et des indivisions
entre personnes liées par un pacte civil de solidarité (PACS) ou entre concubins, et de la
séparation de biens judiciaire,
• les procédures de divorce et de séparation de corps, ainsi que leurs conséquences, de la
liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux, des personnes liées par un
pacte civil de solidarité (PACS) et des concubins (sauf en cas de décès ou de déclaration
d'absence),
• l'attribution et l'exercice de l'autorité parentale (notamment attribution de l'autorité
parentale après un divorce, enfants confiés à un tiers, droit de visite des grands-parents),
• l'attribution des prénoms si les prénoms choisis par les parents peuvent nuire aux intérêts
de l'enfant,
• la procédure de changement de prénom,
• la fixation et la révision des obligations alimentaires, de l'obligation d'entretien et à
l'éducation des enfants et de l'obligation de contribution aux charges du mariage ou du
PACS,
• les actions en révision de la prestation compensatoire ou de ses modalités de paiement,
• les demandes de protection à l'encontre du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de
solidarité ou du concubin violent ou d'un ancien conjoint, partenaire, ou concubin violent,
• les demandes de protection des personnes majeures menacées de mariage forcé.
II - LA PROCEDURE DEVANT LE JAF
La procédure de saisine du juge aux affaires familiales JAF est différente selon les affaires.
De façon générale, la saisine peut se faire :
- Par requête déposée au greffe du tribunal de grande instance (TGI)
- Par une assignation en justice ;
- Par lettre recommandée avec accusé de réception, adressée au secrétariat du greffe du TGI.
Pour l'obligation alimentaire, la demande est faite par l'ascendant dans le besoin, par requête ou
par assignation par huissier contre l'un ou les débiteurs de l'obligation, devant le juge aux affaires
familiales du tribunal de grande instance où il demeure ou de celui où demeure le créancier.
L'avocat n'est pas obligatoire mais fortement conseillé.
Le demandeur doit prouver qu'il est dans le besoin et établir que le défendeur a des ressources
suffisantes pour lui verser une pension alimentaire. C'est au débiteur d'apporter la preuve des
charges qu'il invoque pour s'exonérer.
Votre pratique :
– Informer le majeur de la nécessité de cette procédure : en curatelle la procédure est
engagée par le M.P.+ Curateur, en tutelle par le tuteur (acte d'administration en tutelle, de
disposition en curatelle)
–
Selon le contexte socio familial, informer les enfants de votre responsabilité et de la
nécessité d'engager cette procédure, leur rappeler que s'ils ne se présentent pas aux
convocations, le montant sera fixé par le JAF (dans ce cas les procédures sont souvent
longues)
– Choisir un avocat spécialisé en droit de la famille
– Établir la demande d'aide juridictionnelle : ne pas oublier de demander également la prise
en charge pour les auxiliaires de justice (huissier en particulier). En effet si la demande a été
faite par requête et que des enfants ne retirent pas leur convocation, il sera nécessaire de
faire signifier par huissier l'obligation de comparaitre devant le JAF
– Faire la demande d'obligation alimentaire sans tarder car elle ne s'arrérage pas;
– Si le mandataire dépose une demande d'aide sociale, sauf exception, il est fortement
conseillé de faire conjointement la demande d'obligation alimentaire auprès du JAF. En
effet, le conseil général rend en général une décision : »rejet compte tenu de l'aide possible
des obligés »
– Solliciter que le point de départ soit la réception de la requête par le JAF (difficile à obtenir,
la plupart des décisions prennent comme date de départ : la date de la décision judiciaire
– Si l'on ne connait pas tous les enfants, on peut introduire l'action contre un seul, charge à
lui de se retourner contre les autres enfants
– Lorsque la personne est hébergée dans un établissement public, leur rappeler qu'ils ont le
pouvoir de demander l'intervention de la justice pour obtenir la participation des enfants
Le juge se place à la date où il statue pour apprécier besoins et ressources et tient compte des
circonstances caractérisant la situation des parties (âge, charges familiales, état de santé...).Le juge
déterminera alors souverainement le montant de la contribution de chacun.
Attention : l'obligation alimentaire ne s'arrérage pas.
La décision du JAF est opposable aux décisions du Conseil Général. Il vous appartient donc de
faire recours devant le conseil général pour faire valoir la décision du JAF.
Votre Pratique :
–
Dès que le jugement du JAF est devenu exécutoire : le faire signer par huissier aux
obligés.
–
En cas de non paiement, après un courrier en recommandé, solliciter auprès de l'huissier
de justice une exécution forcée
–
L'obligation alimentaire est déductible fiscalement. Le mandataire doit donc fournir à
chacun des obligés, le justificatif de ses versements.
INTERVENTIONS DES CONSEILS GENERAUX
Selon le département, les conseils généraux peuvent :
–
rendre une décision, indiquant simplement « aide possible des obligés », il appartient donc
au mandataire de saisir le JAF aux fins de fixer cette obligation
–
la commission d'attribution de laide sociale peut fixer le montant et propose la répartition
de l'obligation alimentaire entre les enfants
–
En cas de contestation, le conseil général peut saisir lui même le JAF
Josiane Tirmarche – Décembre 2010/thémice formations