Marbella, vitrine des nouveaux riches espagnols

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Marbella, vitrine des nouveaux riches espagnols
International
Marbella, vitrine des nouveaux riches
espagnols
Diane Cambon
Publié le 27 juin 2006
Le pays a rejoint le club des dix États comptant le plus de
millionnaires au monde.
15 h : TROIS BLONDES en shorts moulants et tops à paillette se prélassent
sur un divan en cuir blanc, loué 100 euros la journée. A leurs côtés, un
sceau à champagne gît sur le sable à l'ombre des palmiers face à la mer. La
musique techno ronronne au loin, les serveurs en kimono zen se faufilent de
tables en banquettes et les clients s'extasient devant les assortiments de
sushis en guettant l'arrivée des yachts. Journée ordinaire au Nikki Beach, le
bar référence de la jet-set de Marbella. Avec le Meridiana, autre restaurant
huppé de la ville, ce bar de plage au design soigné est réputé pour accueillir
les millionnaires de la Costa del Sol.
Jusqu'ici, ces deux endroits étaient surtout connus des riches étrangers, à
l'exception des incontournables stars espagnoles, comme Julio Iglesias ou
l'acteur Antonio Banderas. Mais, depuis quelques années, ils sont aussi
fréquentés par des Espagnols au pouvoir d'achat élevé. Avec une croissance
économique de 3% et un marché immobilier en pleine effervescence,
l'Espagne produit désormais son lot de grandes fortunes. L'an dernier, le
nombre de riches a augmenté de 5,7%, soit le second plus fort taux au sein
de l'Union européenne. A tel point que l'Espagne a rejoint cette année le
club des dix pays au plus fort taux de millionnaires, juste derrière la Suisse.
Selon une étude réalisée par la banque d'investissement Merril Lynch et le
bureau de conseils Capgemini, 149 000 personnes espagnoles auraient un
patrimoine supérieur à un million de dollars (800 000 mille euros) et près
de 1500 autres seraient multimillionnaires. Des données qui contrastent
avec celles du fisc espagnol...
30 000 logements illégaux
Paradis de l'argent blanchi, Marbella et ses 30 000 logements illégaux, est
la vitrine favorite de ces nouveaux riches espagnols. A bord de sa Jaguar,
Theresa Bernabé, une Espagnole de 25 ans pomponnée comme une poupée
Barbie, responsable d'une agence immobilière haut de gamme, a lancé une
télévision sur Internet destinée aux millionnaires et à tous les «pauvres»
qui rêvent d'une vie princière. «Notre télévision s'adresse au club des
quatre millions d'euros», assure Teresa. Sur sa page Web télévisée
(www.theresabernabe.tv), la jeune fille, vêtue d'un jean de marque
soigneusement déchiré, guide le spectateur dans une visite virtuelle d'une
demeure en vente à 4 millions d'euros, la moins chère des offres. «Nous
avons beaucoup de demandes pour les 6 millions», assure-t-elle. Elle
propose aussi un ample éventail d'activités destinées aux riches : polo,
achat de Ferrari 612 Scaglietti, rajeunissement de 15 ans en suivant un
traitement à 12 millions d'euros...
Son équipe fournira bientôt les mêmes offres à Dubaï, Miami et SaintTropez. «Les riches se retrouvent aux quatre coins de la planète dans les
mêmes endroits de luxe, ils ont les mêmes loisirs», assure Theresa. Mais
personne ne se souvient d'avoir fréquenté l'homme le plus riche de
Marbella, considéré comme la quatrième fortune d'Espagne par la revue
Forbes : Juan Antonio Roca, ancien chargé de l'urbanisme de la ville,
aujourd'hui sous les verrous. Avec le maire de Marbella, Marisol Yague et
une dizaine de conseillers municipaux, il risque une peine de dix ans de
prison pour avoir spéculé sur des terrains publics. Au Nikki Beach, cette
vaste opération policière, qui a mis fin à vingt ans d'impunité, semble être
passé inaperçue.