Le Bananier 27 - Connaissance du Japon

Transcription

Le Bananier 27 - Connaissance du Japon
Samedi 04 Novembre
2006
Numéro 27
Remarques :
• Les haïkus cités, hormis
celui de la première page,
ont été écrits par les participants à la séance du samedi 04 Novembre 2006.
• Le nom de l’auteur japo-
nais est écrit en premier,
suivi de son prénom.
Le Bananier
L’association Connaissance du Japon vous présente
Le bulletin de l’atelier d’écriture de Haïkus
Accrochée au clou
La serviette mouillée
Est gelée aujourd’hui
Hosaï
• Seuls les haïkus ne res-
pectant pas les 17 syllabes
sont « mesurés ».
• Les haïkus précédés d’une
parenthèse ont été
« améliorés » pour la mise
en presse du Bananier
(nous nous en excusons
auprès de leurs auteurs).
• Une nouvelle rubrique Le
coin des experts s’adresse
aux anciens participants.
Ils y trouveront des
conseils plus techniques
ou des analyses plus poussées.
Sommaire :
1
Haïku de circonstance 1
Première image
2
Deuxième image
2
Troisième image
3
Quatrième image
3
Activité n°3 (suite) 4
Haïkus en plus
Écrire un haïku, c’est essayer de partager avec d’autres les émotions qui nous ont
étreints en voyant un paysage ou un événement. Une définition simple du haïku
pourrait être : c’est ce qui arrive en un tel
lieu, à un tel moment. Toutefois, il nous
faut d’abord réaliser qu’une série de
« filtres » va venir modifier notre perception d’une part, et la perception de nos
mots par les lecteurs d’autre part.
4
Le coin des experts 4
Les auteurs
4
Remerciements
4
Nos sens, notre mémoire, nos expériences, notre vécu vont influencer notre
ressenti. Les mots que nous allons
« choisir » vont influencer la perception de
ce ressenti par nos lecteurs (exemple : déguster, manger ou bouffer n’auront pas le
même impact et modifieront chacun à leur
manière la perception des lecteurs). Cela
s’applique particulièrement au haïku de
circonstance.
Haïku de circonstance
Plus que tout autre, le haïku de circonstance sera d ‘abord une image.
Je vois, je ressens…
j’écris
Je vois, je ressens… j’écris
Image réelle dans un premier temps,
transformée par le prisme de nos sens et de
notre vécu en image mentale riche de sentiments. Le travail du haïkiste sera de
permettre aux autres de ressentir les mêmes émotions que celles qui sont attachées
à cette image mentale en employant les
mots les plus adaptés.
C’est pourquoi le haïku de circonstance sera souvent celui que l’on retravaillera le plus. Sans vouloir pousser à
l’extrémisme de NATSUME Sôseki qui
définit le haïku comme un concentré littéraire, il faut toutefois prêter une grande
attention aux mots que nous allons choisir.
Composé lors de leurs voyages, notamment, le haïku de circonstance « n’a
d’autre fonction que d’éveiller l’intérêt en
faisant sentir l’émotion du cœur »* .
« Puisse ce manteau de pluie tendu
haut et ferme assurer bonnes prises aux
pêcheurs de l’océan des paroles. »*
(*Paroles de NAITÔ Jôsô en postface
au recueil Le Manteau de pluie du Singe,
de Bashô qui me paraissent correspondre
parfaitement au haïku de circonstance…)
Au long de la rivière
Je n’ai vu aucun pont
Ce jour est sans fin
MASAOKA Shiki
Page 2 / 4
Le Bananier
Lorsque Yume se lâche :
1ère image : Une cascade, l’ouïe, « Irrigue les champs »
Irrigue les champs
De son étrange eau dorée
Moine incontinent
Lors de cette séance d’écriture, les participants devaient écrire un haïku de circonstance à partir d’une photo et d’une phrase
amorce. Ce haïku devait également
s’appuyer sur le sens imposé. Les « anciens »
devaient également respecter une contrainte
technique (indiquée avant le ou les haïkus).
Rougi de plaisir
Sous les compliments soyeux
Se tâtait la mèche
Yume
Lorsque les autres se lâchent
De plaisir rougissent
Invitant à la fessée
Les miches perverses
Muriel
Rougi de plaisir
Ton innocence perdue
Quand les corps se frôlent
David
Rougis de plaisir
Après un toucher rectal
Les babouins jubilent
Akochan
Des babouins bardaches
Comme un doigt dans un cul
sabi (non respectée)
Irrigue les champs
De sa belle eau salvatrice
La cascade bleue
sabi
Irrigue les champs
Depuis tous ces millénaires
En usant les pierres
Irrigue les champs
Et fait renaître la vie
De tes blancs flots calmes
Irrigue les champs
Le torrent impétueux
Crépite et se calme
Rappel des techniques :
Rougi de plaisir
Quatre culs de quadrumanes
En rut dans les bois
>Kokkei = humour
>Karumi = légèreté
>Fueki-ryûkô = immuable /
éphémère
>Kigo = mot de saison
David
Irrigue les champs
Partant des hauteurs rocheuses
Puissante cascade
Isabelle
kokkei
Irrigue les champs
Son clapotis lancinant
Me tord la vessie
Muriel
karumi
Irriguent les champs
Les bruissements si feutrés
Des flots du glacier
Benoît
Irrigue les champs
L’écume hurle en chutant
Sous des bruissements
Matthieu
Irrigue les champs
Et donne envie de pisser
Bruyante cascade
Yume
Maryvonne
Sur la photo, des singes cynocéphales,
vus de dos, se suivaient à la queue leu leu sur
un tronc d’arbre déraciné.
Au fond du bois vont
Benoît
>Sabi = rouille – patine –
usure – mort – nostalgie
Akochan
Isabelle
2ème image : singes se suivant, toucher, « Rougi de plaisir »
Rougi de plaisir
Frotté sur les rugueux troncs
Brûlant postérieur
>Wabi = tranquillité – simplicité
Akochan
Irrigue les champs
Soleil chauffant sur l’azur
Tombe en pluie très fine
Rougit de plaisir
Dans l’attente des caresses
D’amour et de fièvre
Rougit de plaisir
Sous la main concupiscente
Le fessier simien
Rougit de plaisir
Sous le velours du pelage
Joli petit cul
Matthieu
Benoît
Muriel
Muriel
Muriel
karumi
Rougis de plaisir
Soyeux babouins se suivant
À la queue leu leu
Isabelle
Rougis de plaisir
Joyeux babouins en cavale
Popotin à l’air
Isabelle
Rougis de plaisir
Sur la mousse du sentier
Passent quatre singes
Maryvonne
Rougi de plaisir
Sous les caresses subtiles
Délicat prélude
David
Rougi de plaisir
À cette douce pensée
Du contact soyeux
David
Rougis de plaisir
Par le gros atout du mâle
Les babouins jubilent
Akochan
Page 3 / 4
Le Bananier
3ème image : Auschwitz, odorat, « Poursuit son chemin »
Cette image montre des rails se dirigeant
vers le camp au loin.
wabi
Le vieux tatoué
Se remémorant l’odeur
Poursuit son chemin
Le voile du temps
Efface ton odeur âcre
Poursuit ton chemin
Des nuages âcres
Jettent leur voile pudique
Poursuit ton chemin
Le train vert-de-gris
À travers les fumées âcres
Poursuit son chemin
fueki-ryûkô (non respecté)
Visages émaciés
Poursuit ton chemin sinistre
Train pestilentiel
Akochan
David
Ji tarazu
David
Maryvonne
karumi
Passant dans la brume
Le train poursuit son chemin
Odeurs matinales
kokkei
4- Le train à l’heure
7= Le chef de gare content
5= Poursuit son chemin
Mêlant au ballast
Les ossements l’ouvrier
Poursuit son chemin
Face aux barbelés
Poursuit son chemin, d’un geste
Muriel
Entre barbelés
Benoît
Benoît
(Nuage de cendres
Couvrant cette odeur de rouille
Poursuit son chemin
Matthieu
Le passé chargé
Ce train rempli de charognes
Poursuit son chemin
Vide le cendrier
Matthieu
Matthieu
Fumée blanche à la suie grasse
Poursuit son chemin
Yume
>JI TARAZU = manque de
lettres
Ce « joker » permet d’écrire
exceptionnellement un haïku
de 16 syllabes au lieu de 17.
Rappel des techniques :
>Voir notes page 2
Isabelle
4ème image : singe contre un arbre, odorat, « Je t’ai oublié »
Cette photo montre un singe assis sur un
tronc et appuyant sa tête contre le tronc d’un
arbre. Sa posture nous fait penser à une personne triste, abandonnée…
Je t’ai oubliée
Vapeur fruitée délétère
Pour l’us du printemps
kigo (non respecté)
Je t’ai oublié
Se lamente la guenon
Sur un tronc pourri
Je t’ai oublié
Ah ! Guenon, lui répondit
Le tronc pourrissant
Matthieu
Benoît
Benoît
sabi
Je t’ai oublié
En retrouvant le parfum
Des feuilles tombées
Muriel
Je t’ai oublié
L’odeur âcre de l’humus
A chassé la tienne
Muriel
kokkei
Je t’ai oublié
Ne pleure pas ma si belle
Laitue parfumée
Lorsque Yume se lâche encore:
Isabelle
Je t’ai oublié
Ton odeur m’a échappé
La forêt est vide
Maryvonne
Je t’ai oublié
Posée sur l’arbre moisi
Appelle un taxi
David
Je t’ai oublié
Mais le bambou odorant
Me rend nostalgique
Je t’ai oublié
Mais la souplesse de l’arbre
Me rend nostalgique
Je t’ai oublié
Dans les odeurs de vomi
Ô mon bien-aimé
Yume‘
Lorsque les autres se lâchent
encore :
Akochan
Akochan
Je t’ai oubliée
Goutte de virilité
Au coin de mes lèvres
Matthieu
Je t’ai oubliée
Ma banane tant aimée
Pour cet arbre tendre
Isabelle
Le Bananier
ASSOCIATION
CONNAISSANCE DU
JAPON
CENTRE CULTUREL
VERRERIE
14, RUE DE COURAUX
51100 REIMS
TELEPHONE :
03 26 85 36 55 (CCV)
03 26 91 12 47 (Président)
Haïkus en plus
Le petit coin des experts
Il s’agit cette fois d’un tanka (poème écrit
individuellement et composé de 31 syllabes
réparties en deux versets : le premier est un
hokku –ancêtre du haïku– et le second est de
métrique 7-7 syllabes) écrit par Matthieu.
Quelles sont les différences entre kokkei
(humour) et karumi (légèreté) ?
Mélodie goûteuse
Poussant le long des racines
D’érable à biwa
Nature égorgée, paisible
La douce infusion de notes
Matthieu
Lorsqu’il est écrit collectivement, il se
nomme renku. Il est alors composé de plusieurs tankas entrecroisés (cf. Le Bananier
n°8).
kokkei avec rejet
D’un sourire
Le Bouddha montre
Un moucheron qui pète
Issa
karumi avec un simple groupe nominal
Un être humain
Une mouche
Dans la chambre vaste
Issa
La deuxième sera d’ordre sémantique. Le
haïku emprunt d’humour doit faire sourire ou
rire. Pour cela, il jouera sur les contre-sens,
utilisera des images saugrenues (cf. exemple), comparera l’incomparable. Le haïku
emprunt de légèreté abordera les choses simplement, sans apparente réflexion, mais avec
sentiment.
Bien qu’apparemment contradictoire, il
faut se souvenir qu’un haïku pourra parfaitement être à la fois kokkei et karumi. Car
l’humour utilisé simplement avec légèreté
aura un effet plus fort qu’une blague vaseuse
et lourde.
Atelier d’écriture
de Haïkus
Le Bulletin
Animateur :
Denis ‘Yume’ Morenvillé
Tél. : 06.03.51.01.17
Ou : 08.71.37.68.97
E-mail :
[email protected]
La première différence sera d’ordre technique. Pour susciter l’humour, nous allons
utiliser différentes figures de style (rejet,
allusion, comparaison, etc.), alors que, pour
la légèreté, nous réaliserons un haïku le plus
simple possible, tout du moins en apparence.
Le deuxième haïku d’Issa est bien plus
riche en émotion que le premier. Et pourtant,
il s’avère d’une simplicité technique déconcertante. Pour écrire un haïku emprunt de
légèreté, faisons appel à nos sentiments et
exprimons-les simplement, comme Issa a su
le faire.
Les Auteurs
Nous tenons à féliciter pour leurs créations les auteurs :
Matthieu BLOCH
Isabelle CORLAY
Maryvonne MAINSANT
Jean-Emmanuel Akochan RONSIN
Benoît BEORCHIA
Muriel CARDINAL
David CHEVALIER
Nous les remercions également de leur
participation à cet atelier d’écriture.
Remerciements
Nous remercions le salon de thé « La
Maison de Melle THI » pour avoir reçu
l’atelier d’écriture dans ses locaux.
Nous remercions également Mademoiselle THI pour son accueil chaleureux.

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