La fête de la Saint Jean

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La fête de la Saint Jean
La fête de la Saint Jean
Le 21 juin, le soleil atteint sont point le plus bas au Nord par rapport à l'équateur céleste.
Cette date coïncide avec le jour le plus long de l'année : c'est le Solstice d'été.
Ce terme, qui vient du latin "sol stare" signifie "soleil qui ne bouge pas". En effet, durant le
solstice, la déclinaison du soleil par rapport à l'équateur céleste ne change presque pas d'un
jour à l'autre, donnant l'impression que l'astre reste figé dans le ciel.
En Syrie et en Phénicie, le solstice donnait lieu à une grande fête en l'honneur de Tammuz
(en babylonnien et Dumuzi en sumérien) qui est un dieu mésopotamien, dieu pasteur et
dieu de la fertilité. On le retrouve d'ailleurs dans la mythologie grecque sous la forme
d'Adonis. Cette fête commençait la veille au soir.
Ce n'est que bien plus tard, vers le Vème siècle de l'Ère Chrétienne que l'Église récupèrera
la tradition païenne des feux du solstice d'été, plaçant ceux-ci sous le signe de Saint Jean
Baptiste, personnage de l'Ancien Testament associé à la Vraie Lumière et qui annonce le
Messie à venir. Pour procéder à la réhabilitation des mythes païens, la liturgie de l'église
médiévale s'est appuyée sur l'Évangile selon Saint Jean, texte biblique (III, verset 30) où
Saint Jean-le-Baptiste prononce la phrase suivante : "Il faut qu'il croisse et que je diminue".
Il faisait sans doute allusion au Christ alors que la mentalité populaire y aurait vu une
allusion au parcours du soleil !
De cette "méprise" date la confusion de la tradition païenne originelle par la religion
Chrétienne, qui substitue un symbole biblique (le personnage de Saint Jean Baptiste) au
mythe de la Divinité solaire. Même débarrassés de leurs attributs païens, les feux du
solstice d'été n'en demeurant pas moins vivaces.
Couvant sous les cendres des siècles, ils vont d'ailleurs se perpétuer jusqu'à notre époque.
Depuis quelques années, la tradition des feux de la Saint Jean connaît en effet un
spectaculaire regain d'intérêt et bon nombre de villages proposent aujourd'hui des
animations (banquets, jeux traditionnels, retraites aux flambeaux,... sans oublier le
traditionnel bûcher) aux alentours de la Saint Jean, le 24 juin.
Les bûchers, brasiers et autres feux de joie sont sans doute l'aspect le plus spectaculaire de
cette fête qui associe, par un paradoxe qui lui est propre, résidus de croyances païennes,
traditions rurales et célébration religieuses. L'esprit de la fête a été profondément modifié
au fil du temps. On célébrait autrefois le retour de l'été triomphateur à l'approche des
grands travaux de fenaison et de la saison des récoltes, associant en cela les feux de la Saint
Jean aux pratiques agraires, ceux-ci possédant aujourd'hui un aspect beaucoup plus ludique
: joie de vivre un moment fort entre amis, voisins, habitant d'un même village, dans une
ambiance festive et conviviale avec pour conclusion le spectacle de l'embrasement du
bûcher au cours duquel les flammes montent vers le ciel nocturne, réveillant l'instinct
primitif qui sommeille en nous et une fascination pour cet élément qui demeure
aujourd'hui encore objet de mystère : le feu.
Dans certaines régions, chaque ferme faisait son petit feu mais la règle générale était la
réalisation d'un grand feu de joie commun qui devait se voir le plus loin possible. Dans les
villages les plus petits, la veille ou le jour de la Saint Jean, tous les gens du village
apportaient le soir venu, à l'endroit désigné, des fagots, des brindilles, des branches
mortes, des combustibles divers que l'on empilait en tas, dans la gaîté générale. Parfois, on
entassait tous ces matériaux autour d'un grand arbre coupé et planté là depuis quelques
temps. Le sommet était alors souvent décoré de fleurs en bouquet, en couronne ou en
croix.
Dans le temps, l'Église a toujours eu un regard critique sur ces feux qui datent de la nuit
des temps. Tantôt elle s'en sert pour organiser des processions et christianiser cette fête
populaire à travers le culte de Jean-le-Baptiste, tantôt elle tente d'interdire les feux de la
Saint Jean comme "entachés de superstitions". Da ns certains lieux, c'était le curé qui
allumait le bûcher. Dans d'autres par contre c'était celui qui l'avait construit, ou bien le
maire, ou la personne la plus âgée du village, ou une jeune fille (les familles se battaient
parfois pour que leur fille ait cet honneur) ou bien encore les derniers mariés de la
Commune ... Vers 1600 à Paris, le Roi lui-même allumait le feu.
Autour du feu, que faisait-on ? En général, on dansait car cette fête était l'occasion, pour la
jeunesse du pays, garçons et filles, de se retrouver et de se plaire. Mais tourner autour du
bûcher avait un sens magique, variables suivant les endroits. Ici, les mamans tournaient
trois fois autour avec leur nouveau-né dans les bras pour lui porter chance. Là, on faisait
quatorze fois le tour "pour être assuré de trouver mari ou femme", ou encore les filles, si
elles tournaient neuf fois autour, "étaient sûres de se marier dans l'année". Souvent,
aussitôt que les flammes pétillaient, tous les gens présents, jeunes ou vieux, se prenaient
par la main et se mettaient à danser des rondes autour de la "jônée".
Des superstitions et des croyances magiques étaient souvent liées à ces feux de joie. Dans
notre Poitou, on jetait des pierres dans le brasier pour les récupérer ensuite et les placer
dans les champs de raves : plus grosses étaient les pierres, plus grosses seraient les raves !
Ailleurs, on y jetait des pierres marquées d'une croix pour que "la bonne Vierge vienne
s'asseoir sur la plus jolie de ces pierres de telle sorte que le lendemain on y voit de ses
cheveux d'or". Ailleurs encore, on faisait brûler des bouquets d'armoise pour éviter le mal
aux reins des moissons. Pour avoir de l'argent toute l'année, certains devaient tourner
autour du feu et y jeter une pièce qu'ils devaient bien entendu récupérer dans les cendres
une fois le feu éteint pour la garder précieusement. Ailleurs encore, des sièges étaient
posés autour du feu pour que les défunts viennent s'y placer, écouter les chants et
contempler les danses. Le plus effrayant était en Charente où balancer son petit enfant
neuf fois au-dessus du feu "lui assurait une croissance rapide" !
Sauter par-dessus le feu était également un rite très fréquent. Sauter par-dessus le feu
permettait ici de se marier dans l'année, là de se préserver des furoncles et des sortilèges,
tantôt il portait bonheur, tantôt "il donnait force aux os et préservait des rhumatismes" ...
Les vieillards qui ne pouvaient plus sauter par-dessus le feu se contentaient d'enjamber
une braise !
On faisait aussi traverser le brasier presque éteint ou on menait les bêtes à travers la fumée
ou les cendre du feu de la Saint Jean pour les protéger des épidémies le reste de l'année.
Une fois le feu éteint, chacun rentrait chez soi avec un tison. La tradition populaire
affirme qu'on pouvait le saisir sans risque car "le feu de la Saint Jean ne brûle pas".
Enfermé dans une armoire ou placé près du lit des parents, conservé jusqu'à la Saint Jean
suivante, il devait préserver la maison de l'incendie, de la foudre et de certaines maladies.
On pouvait aussi en placer un morceau dans les champs pour protéger les récoltes de la
grêle, parfois aussi des chenilles ou des limaçons. On utilisait encore les cendres de ce feu
de joie auxquelles on attribuait des vertus bienfaisantes.
Sources : Marie-Odile Mergnac
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